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12/11/2012 | FRANCE | N°12/00814

France | France, Cour d'appel d'agen, Chambre civile, 12 novembre 2012, 12/00814


ARRÊT DU 12 Novembre 2012

A. B/ S. B**
--------------------- RG N : 12/ 00814---------------------

Elisio X...

C/

Dominique C...

------------------

ARRÊT no 1117-12

COUR D'APPEL D'AGEN

Chambre Civile

Prononcé par mise à disposition au greffe conformément au second alinéa de l'article 450 et 453 du Code de procédure civile le douze Novembre deux mille douze, par Raymond MULLER, Président de Chambre, assisté de Nathalie CAILHETON, Greffier

LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire,

ENTRE

:

Monsieur Elisio X...né le 02 Mars 1959 à LAUROSA (PORTUGAL) Gérant de société Demeurant : ...31380 PAULHAC

assisté de Me...

ARRÊT DU 12 Novembre 2012

A. B/ S. B**
--------------------- RG N : 12/ 00814---------------------

Elisio X...

C/

Dominique C...

------------------

ARRÊT no 1117-12

COUR D'APPEL D'AGEN

Chambre Civile

Prononcé par mise à disposition au greffe conformément au second alinéa de l'article 450 et 453 du Code de procédure civile le douze Novembre deux mille douze, par Raymond MULLER, Président de Chambre, assisté de Nathalie CAILHETON, Greffier

LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire,

ENTRE :

Monsieur Elisio X...né le 02 Mars 1959 à LAUROSA (PORTUGAL) Gérant de société Demeurant : ...31380 PAULHAC

assisté de Me David LLAMAS, avocat postulant inscrit au barreau d'AGEN et de Me Jacques LEVY, avocat plaidant inscrit au barreau de TOULOUSE

DEMANDEUR sur recours en révision d'un arrêt rendu par la cour d'appel d'AGEN en date du 21 Novembre 2011

D'une part,

ET :

Monsieur Dominique C...né le 23 Juillet 1965 à VILLEFRANCHE DE ROUERGUE (12200) de nationalité française Demeurant : ...12260 VILLENEUVE

assisté de la SCP NARRAN Guy, avocat postulant inscrit au barreau d'AGEN, et de Me Jacques LAVERGNE, avocat plaidant inscrit au barreau de TOULOUSE

DÉFENDEUR

D'autre part,

a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été communiquée au Ministère Public, débattue et plaidée en audience publique, le 24 Septembre 2012, devant Raymond MULLER, Président de Chambre, Aurélie PRACHE, Conseiller, et Aurore BLUM, Conseiller (laquelle, désignée par le Président de Chambre, a fait un rapport oral préalable), assistés de Nathalie CAILHETON, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées par le Président, à l'issue des débats, que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe à la date qu'il indique.

* * *

La S. A. FAXCOPY DIFFUSION est une société avec pour activité la vente, location et entretien de photocopieurs et autres appareils numériques.
Le capital est détenu à 100 % par la société civile MD HOLDING dont Monsieur Elisio X...est le gérant, qui a une activité d'acquisition, souscription, détention, administration, gestion et cession de parts sociales d'actions ou autres titres de participation ainsi que d'animation et gestion administrative, juridique, comptable, commerciale, financière, informatique des sociétés du groupe.
Monsieur Dominique C..., embauché en qualité d'attaché commercial le 13 janvier 2003, est devenu directeur commercial de la S. A. FAXCOPY DIFFUSION le 1er janvier 2004.
Par ailleurs, par actes sous seing privés des 29 décembre 2005 et 7 avril 2006, Monsieur Dominique C...a acquis 250 parts sociales, soit 25 % du capital de la Société MD HOLDING, et a signé un pacte d'associés permettant de déterminer les modalités de détentions des parts.
Monsieur Dominique C...a été licencié pour faute grave le 2 novembre 2006.
Sur contestation de Monsieur C..., la Cour d'Appel de TOULOUSE, par arrêt du 26 mars 2010 confirmant le jugement du Conseil des Prud'hommes de TOULOUSE du 11 décembre 2008, a confirmé le licenciement.
Par acte du 27 janvier 2010, Monsieur C... a fait assigner Monsieur X...en paiement du prix des parts sociales.
Le juge des référés du Tribunal de Grande Instance d'AGEN, au visa de l'article 1843-4 du Code Civil, par ordonnance du 27 juillet 2007, a désigné Madame Madeleine D..., expert comptable, en qualité d'expert.
Par arrêt confirmatif du 21 novembre 2011, la Cour d'Appel d'AGEN a condamné Monsieur Elisio X...à verser à Monsieur Dominique C...la somme de 248. 312 € au titre du rachat des 250 parts sociales qu'il détenait au capital social de la Société MD HOLDING, ce avec intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2010.
Monsieur X...a régularisé un pourvoi en cassation le 23 janvier 2012.

Par acte du 5 avril 2012, Monsieur Elisio X...a fait citer Monsieur Dominique C...en révision de l'arrêt rendu par la Cour d'Appel d'AGEN le 21 novembre 2011 dans l'affaire les opposant.

Par conclusions signifiées le 9 août 2012 auxquelles il convient de se référer pour de plus amples développements, Monsieur X...au visa de l'article 593, 595, 601 du Code Civil et 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme demande de :

- Accueillir le recours en révision contre l'arrêt du 21 novembre 2011 et rétracter l'arrêt,- Déclarer nulle et non avenue l'expertise de Madame D...,- Ordonner une nouvelle expertise,- Surseoir à statuer dans l'attente du dépôt du rapport,- Faire droit à une indemnité de procédure de 5. 000 €.

A l'appui de ses prétentions, il fait valoir :
- qu'à l'occasion de l'expertise Monsieur C... était assisté de Monsieur A... commissaire aux comptes,
- qu'il vient d'apprendre que Monsieur A... faisait partie de la même société BETEA CONSULTANTS SA, Monsieur A... y était administrateur et Madame D...associée,
- que les liens professionnels et commerciaux entre l'expert et le conseil de Monsieur C... permettent de mettre en cause l'impartialité de l'expert,
- que ce fait ne lui a pas été révélé lors de l'expertise, qu'il n'en a eu connaissance que postérieurement à l'arrêt de la Cour,
- que l'expert avait ainsi des intérêts communs avec le conseil de Monsieur C..., du fait de la proximité d'intérêts les liant.
En réponse, par conclusions signifiées le 14 septembre 2012 auxquelles il convient de se référer pour de plus amples développements, Monsieur Dominique C...demande de :
- Dire irrecevable comme tardif le recours en révision formé par Monsieur Elisio X...,
- Déclarer irrecevable et subsidiairement mal fondé le recours en révision,
- Débouter en conséquence Monsieur X...de sa demande en rétractation de l'arrêt,
Subsidiairement :
- Confirmer l'arrêt rendu sur le rapport de Madame D...,
- Rejette en conséquence la demande d'expertise.

En tout état de cause :

- Condamner Monsieur X...à la somme de :
-15. 000 € à titre de dommages et intérêts,
-5. 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile. A l'appui de ses prétentions, il fait valoir :
- que Monsieur X...n'a ni d'explications, ni la preuve sur la date de découverte des faits,
- qu'il ne démontre pas que la fraude ait été commise par la partie au profit de laquelle le jugement a été rendu, que les manoeuvres frauduleuses d'un tiers ne donnent pas lieu à l'ouverture d'une action en révision.

Le Ministère Public a visé la procédure le 2 mai 2012.

SUR CE, LA COUR,

- Sur l'irrecevabilité de l'action :

L'article 596 du Code Civil stipule que le délai du recours en révision est de deux mois et court à compter du jour où la partie a eu connaissance de la cause de révision qu'elle invoque.
Monsieur C... au soutien de sa demande d ‘ irrecevabilité du recours prétend que Monsieur X...n'est pas en mesure de rapporter la preuve de la date à laquelle il a eu connaissance des faits fondant son recours.
En l'espèce, Monsieur X...indique que l'information selon laquelle il existait des liens d'associés entre Madame D...et Monsieur A..., conseil de Monsieur C..., intervenu à la procédure, n'a été portée à sa connaissance que par mail du 8 mars 2012 émanant du cabinet privé d'investigation " MUGA CONSULTING " (pièce 17), que les allégations de Monsieur C... tendant à mettre en cause les méthodes du cabinet privé ou consistant à dire que cette information était à disposition de tous sur le site internet de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes n'est pas de nature à démontrer que cette information était personnellement connue de Monsieur X...dont il ne s'agit pas du domaine de compétence ; ces affirmations ou insinuations n'étant de nature à apporter une preuve contraire quant à la date de cette révélation, le recours est jugé recevable en la forme pour avoir était engagé dans le délai de la loi.

- Sur la fraude :

Aux termes de l'article 595-1 du Code Civil, le recours en révision est ouvert notamment s'il se révèle, après le jugement, que la décision a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue.
Il n'est pas contesté que Madame D..., expert désigné, est porteuse en qualité d'expert comptable d'une part dans la Société BETEA CONSULTANTS, société dans laquelle Monsieur A..., commissaire aux comptes, est administrateur.
Monsieur X...reproche dès lors qu'il lui ait été caché le lien professionnel et commercial existant entre l'expert, Madame D...et Monsieur A..., intervenant en qualité de technicien spécialisé, auprès de Monsieur C....
La fraude suppose une dissimulation qu'une information capitale dans le sort du procès, elle doit avoir un caractère déterminant.
Aussi, en ne portant pas à la connaissance de Monsieur X...cette information, il lui a été dissimulé la réalité d'un fait, le privant ainsi d'une demande en récusation de l'expert en suspicion légitime en raison des relations notoires existantes entre eux dans le cadre des liens professionnels les liants. L'expert qui ne révèle pas qu'il est récusable peut voir sa responsabilité engagée, sachant que la question du nombre de parts détenues par Madame D...dans la structure est sans importance s'agissant d'une question de principe.
En effet, les parties doivent avoir la certitude que l'expert commis est en situation d'accomplir sa mission avec conscience, objectivité impartialité, et indépendance ce qui impose qu'il soit d'une parfaite neutralité, s'agissant d'une expertise fondée sur les dispositions de l'article 1843-4 du Code Civil où les conclusions de l'expert sauf erreur grossière font loi entre les parties.
Par ailleurs, Monsieur A... en intervenant auprès de Monsieur C... en qualité de technicien spécialisé, en procédant à des dires, est entré dans le champ des opérations d'expertise. En ne révélant pas la nature des liens entretenus avec Madame D..., il a commis une faute consécutive d'une fraude dont Monsieur C... a tiré partie, les liens professionnels unissant Monsieur A... et Madame D...étant de nature à porter atteinte à la sincérité du débat technique.
En conséquence, il convient de recevoir le recours en révision contre l'arrêt rendu le 21 novembre 2011 par la Cour d'Appel d'AGEN, de rétracter la décision querellée et de prononcer la nullité du rapport d'expertise de Madame D...en raison du discrédit jeté sur le déroulement des opérations d'expertise.
Par suite, il y a lieu de faire droit à la désignation d'un nouvel expert suivant la mission visée au dispositif, Monsieur C... est en conséquence débouté de l'ensemble de ses demandes.
Les frais non répétibles et les dépens sont réservés.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,
Dit recevable en la forme le recours en révision,
Rétracte l'arrêt rendu le 21 novembre 2012 par la Cour d'Appel d'AGEN,
Prononce la nullité de l'expertise déposée par Madame Madeleine D...,

Ordonne une nouvelle expertise confiée à :

Monsieur E...Alain Expert inscrit sur la liste près la Cour de Cassation ...75116 PARIS

Tél 01. 42. 88. 29. 32 Fax ...

avec pour mission :

- Se faire remettre tous documents utiles,
- Procéder à l'évaluation des 250 parts sociales détenues par Monsieur Dominique C...dans la Société MD HOLDING, conformément aux termes du pacte d'associés du 29 décembre 2005,
- Dit que l'expert devra déposer un pré-rapport, solliciter les dires des parties et y répondre,

Dit que l'expert commis, saisi par le greffe de la Cour, devra accomplir sa mission en présence des parties ou celles-ci dûment appelée, les entendre en leurs dires et explications ;

Subordonne l'exécution de l'expertise à la consignation par Monsieur Elisio X..., à moins qu'il ne justifie bénéficier de l'aide juridictionnelle, d'une avance de 4. 000 € payée à l'ordre du régisseur de la Cour d'Appel d'AGEN, dans le délai d'un mois à compter de la présente décision ;
Dit que toute partie au procès est autorisée en cas de carence de celle désignée pour la consignation à s'y substituer afin de ne pas faire échec aux opérations d'expertise ;
Dit que l'expert, si le coût probable de l'expertise s'avère beaucoup plus élevé que celui de la consignation devra communiquer à la Cour et aux parties l'évaluation prévisible de ses frais et honoraires en sollicitant au besoin une consignation d'une provision complémentaire ;
Dit que l'expert devra déposer le rapport de ses opérations en double exemplaires au greffe de la Cour d'Appel d'Agen dans un délai de 4 mois à compter du jour où il aura été avisé de la réalisation de la consignation, sauf prorogation de délai expressément accordée par le juge chargé du contrôle ;

Rappelle les dispositions suivantes du code de procédure civile applicables aux expertises :

Article 271 : A défaut de consignation dans le délai et selon les modalités impartis, la désignation de l'expert est caduque à moins que le juge, à la demande d'une des parties se prévalant d'un motif légitime ne décide une prolongation du délai ou un relevé de la caducité. L'instance est poursuivie sauf à ce qu'il soit tiré toute conséquence de l'abstention ou du refus de consigner.
Article 278 : l'expert peut prendre l'initiative de recueillir l'avis d'un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne.

Article 278-1 : l'expert peut se faire assister dans l'accomplissement de sa mission par la personne de son choix qui intervient sous son contrôle et sa responsabilité.

Article 279 : Si l'expert se heurte à des difficultés qui font obstacle l'accomplissement de sa mission ou si une extension de celle-ci s'avère nécessaire il en rendra compte au juge chargé de suivre l'expertise ;
Désigne Madame Aurore BLUM, à défaut le conseiller chargé du contrôle des expertises, pour surveiller les opérations d'expertise ;
Dit qu'en cas d'empêchement, retard ou refus de l'expert, il sera pourvu à son remplacement par ordonnance rendue sur requête ;
Sursoit à statuer dans l'attente du dépôt du rapport ;
Dit que l'affaire sera appelée à la première date utile de mise en état après dépôt du rapport ;
Déboute Monsieur Dominique C...de l'ensemble de ses demandes ;
Réserve les frais non répétibles et les dépens.
Le présent arrêt a été signé par Raymond MULLER, Président de Chambre, et par Nathalie CAILHETON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

Nathalie CAILHETON Raymond MULLER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 12/00814
Date de la décision : 12/11/2012
Sens de l'arrêt : Expertise
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2012-11-12;12.00814 ?
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