ARRÊT DU 21 Janvier 2009
--------------------- RG N : 07 / 01479---------------------
S. A. BANQUE POPULAIRE OCCITANE
C /
Alain X...
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ARRÊT no
COUR D'APPEL D'AGEN
Chambre Civile
Prononcé par mise à disposition au greffe conformément au second alinéa de l'article 450 et 453 du Code de Procédure Civile le vingt et un janvier deux mille neuf, par René SALOMON, Premier Président, assisté de Isabelle LECLERCQ, Greffier,
LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire,
ENTRE :
S. A. BANQUE POPULAIRE OCCITANE venant aux droits de la BANQUE POPULAIRE TOULOUSE PYRENEES Dont le siège social 33-43 av. Georges Pompidou 31135 BALMA CEDEX
représentée par Me Jean-Michel BURG, avoué assistée de la SCP PRIM-GENY, avocats
APPELANTE d'un jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'AGEN en date du 06 septembre 2007
D'une part,
ET :
Monsieur Alain X... notaire Domicilié ... 47600 FRANCESCAS
représenté par la SCP TESTON-LLAMAS, avoués assisté de Me Georges LURY, avocat
INTIMÉ
D'autre part,
a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été communiquée au Ministère Public, débattue et plaidée en audience publique, le 03 décembre 2008, devant René SALOMON, Premier Président (lequel a fait un rapport oral préalable), Bernard BOUTIE, Président de Chambre et Dominique NOLET, Conseiller, assistés de Isabelle LECLERCQ, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées par le Premier Président, à l'issue des débats, que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe à la date qu'il indique.
La BANQUE POPULAIRE OCCITANE venant aux droits de la BANQUE POPULAIRE TOULOUSE PYRÉNÉES a relevé appel d'un jugement en date du 6 septembre 2007 du Tribunal de Grande Instance d'AGEN qui a dit qu'Alain X..., Notaire, n'avait pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité à l'égard de cette banque, l'a débouté de l'ensemble de ses demandes et a dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Au soutien de son appel, elle fait valoir que le notaire rédacteur d'un acte de vente a l'obligation de relever un état hypothécaire sur la formalité de publication de l'acte de vente du 6 mai 2003 ce qui aurait dû le conduire à conserver une somme suffisante pour garantir les droits de la banque, créancier hypothécaire, tels qu'ils seront définitivement arrêtés par les divers jugements à intervenir au fond ;
Elle estime que l'omission de tenir compte de son inscription en date du 30 mai 2005 a créé les circonstances qui l'ont privée de ses droits sur l'immeuble hypothéqué à son profit, ce notaire ayant commis une faute en ce sens qu'il ne pouvait ignorer le droit de préférence dont bénéficiait le créancier inscrit sur le prix de vente et qu'il devait s'assurer de la légalité de son acte quel que soit son mode de règlement. Il existe selon elle un lien de causalité indiscutable entre cette faute et le préjudice allégué ;
Elle sollicite en conséquence la condamnation de l'intimé au paiement de la somme de 50 000 € outre les intérêts au taux légal à compter de la date de l'acte litigieux du 6 mai 2003 au besoin à titre de supplément de dommages et, subsidiairement, elle demande le paiement d'une somme de 30 490 € outre les intérêts au taux légal à compter du 6 mai 2003 au besoin à titre de supplément de dommages outre la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
En réponse, Alain X... fait valoir que le paiement par compensation des créances respectives des parties était antérieur à l'acte authentique et il n'a fait que le constater ;
Surabondamment, il affirme qu'il n'avait pas l'obligation de conserver le prix jusqu'à la délivrance de l'état sur publication ;
Enfin, il estime que la banque ne prouve ni l'existence d'un préjudice direct et certain ni a fortiori son montant alors qu'elle conserve un droit de suite et qu'aucun lien de causalité ne peut être établi entre sa prétendue faute et le préjudice qu'elle allègue ;
À titre infiniment subsidiaire il demande, dans l'hypothèse où il serait amené à régler une somme à la BANQUE POPULAIRE OCCITANE au titre de l'inscription d'hypothèque prise contre Liberto A..., à être subrogé dans les droits et actions de la banque à ce titre ;
Il sollicite le paiement d'une somme de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
MOTIFS
Il résulte des pièces de la procédure que suivant Ordonnance en date du 23 mai 2003, le Président du Tribunal de Commerce d'AUCH a autorisé la BANQUE POPULAIRE TOULOUSE PYRENEES à prendre une inscription d'hypothèque judiciaire provisoire en garantie d'une créance provisoirement évaluée à la somme de 235 000 € sur le lot numéro 1 d'un ensemble immobilier dont Liberto A... est propriétaire dans un immeuble situé sur la Commune de LA REOLE (33) cadastré section AO No 727 et 728 ;
Cette inscription a été publiée le 30 mai 2003 à la Conservation des hypothèques de LA REOLE volume 2003 no 355 sur un immeuble appartenant à Liberto A... situé Commune de LA REOLE cadastré section AO No 727 et 728, lot 1, en garantie de la créance de la BPTP provisoirement évaluée par l'ordonnance susvisée à la somme de 230 000 € ;
La Banque a saisi le Tribunal de Grande Instance d'AUCH lequel, par jugement en date du 17 décembre 2003, a condamné Liberto A... au paiement de la somme de 30 282, 50 € outre les intérêts au taux légal à compter du 28 mars 2003 et une somme de 500 € au titre de l'article 700 du Code Procédure Civile ainsi que les dépens, ce jugement, signifié le 26 décembre 2003, étant devenu définitif ;
L'inscription d'hypothèque définitive a été publiée le 20 février 2004 venant se substituer à la provisoire du 30 mai 2003 ;
Le Tribunal d'Instance de CONDOM a également été saisi et, par jugement en date du 5 décembre 2003, il a condamné Liberto A... à payer à la BPTP la somme de 14 824, 07 € avec intérêts au taux contractuel de 6, 40 % à compter du 28 mars 2003 et 1 € au titre de la clause pénale, outre les dépens, ce jugement étant devenu définitif pour avoir été signifié le 26 octobre 2004, l'inscription d'hypothèque définitive venue se substituer à la provisoire du 30 mai 2003 ayant été publiée le 5 janvier 2005 ;
Cependant, par contrat du 27 novembre 2002, la SCI LE PÉRIGORD avait prêté la somme de 30 490 € à Liberto A... remboursable dans un délai d'un an sans intérêt ;
Par acte en dates des 18 avril et 6 mai 2003, dressé par Maître X..., Notaire à la Résidence de FRANCESCAS, Liberto A... a vendu à la SCI LE PÉRIGORD l'ensemble immobilier situé à LA REOLE18 et... cadastré AO nos 727 et 728 au prix de 30 490 € « payé.... conformément aux dispositions des articles 1289 et suivants du Code civil, par compensation avec le paiement en principal d'une même somme, actuellement liquide et exigible que le vendeur se trouve devoir sur l'acquéreur par suite d'un acte de prêt reçu par Maître Alain X..., Notaire soussigné, le 27 novembre 2002 » ;
La BANQUE POPULAIRE OCCITANE venant aux droits de la BANQUE POPULAIRE TOULOUSE PYRÉNÉES estime que son inscription judiciaire provisoire a pris effet le 30 mai 2003 de sorte que par l'effet de cette inscription elle avait un droit acquis sur le prix de vente de l'immeuble de LA REOLE. Selon elle, la compensation ne pouvait pas être réalisée en présence de cette inscription le notaire ayant commis une faute pour n'avoir pas levé la réquisition sur les formalités ou omis de prendre en considération cette inscription d'hypothèque qui engagerait sa responsabilité ;
Alain X... pour sa part, indique qu'il a reçu l'acte de vente les 18 avril et 6 mai 2003 et qu'il avait à cette époque en possession un état hypothécaire hors formalités négatif délivré le 1er avril 2003 ;
Les premiers juges en ont déduit que le notaire avait respecté les obligations qui lui incombaient avant la rédaction de l'acte en relevant qu'il avait déposé l'acte de vente à la Conservation des Hypothèques de LA REOLE le 19 juin 2003 alors que le bordereau d'inscription provisoire déposé par la BANQUE POPULAIRE TOULOUSE PYRÉNÉES à l'encontre de Liberto A... le 30 mai 2003 avait été porté au fichier au volume 2003 no 355 avec la mention « formalité en attente » sans autre précision, le bordereau rectificatif du 3 juillet 2005 ayant été publié et enregistré le 7 juillet 2003 au volume 2003 no 437 au titre d'une inscription provisoire et porté reprise pour ordre de la formalité initiale précédente ;
Ils en ont déduit à bon droit que le notaire ne pouvait en l'espèce conserver entre ses mains le prix de vente du bien alors que les parties avaient prévu la compensation laquelle n'était pas de nature à nuire aux droits de la BANQUE POPULAIRE TOULOUSE PYRÉNÉES qui dispose en effet d'un droit de suite sur l'immeuble prévu par l'article 2166 du Code civil ;
Alain X... fait observer sur ce point à juste titre qu'il n'a en réalité jamais été dépositaire du prix de vente et qu'aucune somme n'a été versée en sa comptabilité. En outre, il précise qu'il ne pouvait prévoir dans l'acte que le paiement par compensation, laquelle était déjà réalisée, serait conditionnée à la délivrance d'un état hypothécaire sur formalité négative ;
Au surplus, aucun texte n'impose au notaire de conserver le prix jusqu'à la délivrance de l'état hypothécaire à la date de l'application de la vente, de sorte que même si une somme d'argent à valoir sur le paiement du prix de vente avait été remis au notaire, aucune faute ne pouvait être reprochée à celui-ci dans la mesure où on ne pouvait lui faire grief de ne pas l'avoir conservé jusqu'à l'obtention de l'état hypothécaire sur formalité ;
La Cour approuve en conséquence les premiers juges d'avoir estimé qu'aucune faute ne pouvait être imputée à Alain X... ;
Il serait inéquitable de laisser à la charge d'Alain X... les frais irrépétibles non compris dans les dépens ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,
Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions ;
Condamne la BANQUE POPULAIRE OCCITANE venant aux droits de la BANQUE POPULAIRE TOULOUSE PYRENEES au paiement de la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code Procédure Civile outre les entiers dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SCP TESTON-LLAMAS en application de l'article 699 du Code de Procédure Pénale ;
Le présent arrêt a été signé par René SALOMON, Premier Président et Isabelle LECLERCQ, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Premier Président,