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16/07/2024 | FRANCE | N°24/00449

France | France, Tribunal judiciaire d'Évry, Chambre des référés, 16 juillet 2024, 24/00449


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au Nom du Peuple Français



Tribunal judiciaire d’EVRY
Pôle des urgences civiles
Juge des référés

Ordonnance du 16 juillet 2024
MINUTE N° 24/______
N° RG 24/00449 - N° Portalis DB3Q-W-B7I-QCD3

PRONONCÉE PAR

Francis BOBILLE, Président,
Assisté de Fabien DUPLOUY, greffier, lors des débats à l’audience du 11 juin 2024 et lors du prononcé

ENTRE :

Monsieur [S] [P]
demeurant [Adresse 3]

représenté par Maître Anne BACHELLERIE, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : C766

DEMANDEUR

D'UNE PART

ET :

Monsieur [N] [L]
demeurant [Adresse 2]

représenté par Maître Michael BELHASSEN, avocat au barreau de PARIS, vestiair...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au Nom du Peuple Français

Tribunal judiciaire d’EVRY
Pôle des urgences civiles
Juge des référés

Ordonnance du 16 juillet 2024
MINUTE N° 24/______
N° RG 24/00449 - N° Portalis DB3Q-W-B7I-QCD3

PRONONCÉE PAR

Francis BOBILLE, Président,
Assisté de Fabien DUPLOUY, greffier, lors des débats à l’audience du 11 juin 2024 et lors du prononcé

ENTRE :

Monsieur [S] [P]
demeurant [Adresse 3]

représenté par Maître Anne BACHELLERIE, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : C766

DEMANDEUR

D'UNE PART

ET :

Monsieur [N] [L]
demeurant [Adresse 2]

représenté par Maître Michael BELHASSEN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0305

S.E.L.A.R.L. PHARMACIE [L]
dont le siège social est sis [Adresse 6]

non comparante ni constituée

DÉFENDEURS
D'AUTRE PART

ORDONNANCE : Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe, réputée contradictoire et en premier ressort.

**************
EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte délivré le 29 avril 2024, Monsieur [S] [P] a assigné en référé devant le président du tribunal judiciaire d'Evry, Monsieur [N] [L] et la SELARL Pharmacie [L], au visa des articles 834 et 835 du code de procédure civile, aux fins de :
- condamner Monsieur [N] [L], par provision, à payer à la SELARL PHARMAClE [L] la somme de 128.159,01 euros au titre du trop-perçu de sa rémunération nette hors charges sociales pour la période courant du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2022,
- désigner un administrateur judiciaire en qualité de mandataire ad hoc de la SELARL
PHARMACIE [L] avec mission de :
- faire exécuter l'ordonnance à intervenir au bénéfice de la SELARL PHARMACIE [L],
- se faire communiquer tout document comptable utile afin de déterminer le montant total du trop-perçu de rémunération du gérant, incluant les charges sociales,
- dire que les frais et honoraires du mandataire ad hoc seront mis à la charge de Monsieur [N] [L] ès qualité de gérant défaillant,
- condamner Monsieur [N] [L] à payer à Monsieur [S] [P] la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance incluant l'intégralité des frais de recouvrement.

Au soutien de ses demandes, Monsieur [S] [P] expose que :
- en février 2015, Monsieur [S] [P], pharmacien et propriétaire d'une officine de pharmacie à [Localité 9], a proposé à son collaborateur Monsieur [N] [L], également pharmacien, de la lui céder,
- par acte du 12 février 2015, la SELARL PHARMACIE DE [Adresse 7] a été constituée entre Monsieur [S] [P], détenant 499 parts sociales, représentant 49,9% du capital et des droits de vote de la société, et Monsieur [N] [L], détenant 501 parts sociales, représentant 50,1% du capital et des droits de vote de la société, dont la dénomination sociale a été changée en SELARL PHARMACIE [L] le 30 avril 2015,
- par acte sous seing privé du 30 avril 2015, la société SPFPL AL BARAKA, anciennement dénommée SELARL PHARMACIE [P], a cédé à la SELARL PHARMACIE [L], le fonds de commerce de pharmacie exploité à [Localité 9], sous diverses clauses, charges et conditions usuelles pour les cessions de fonds de commerce d'officine de pharmacie, moyennant un prix 2.200.000 euros,
- par actes sous seings privés du 1er mai 2015, Monsieur [S] [P] et Monsieur [N] [L] ont pris des engagements, aux termes d'un pacte d'associés, portant notamment sur la gouvernance de la société, les distributions de dividendes, le droit d'information de l'associé extérieur, Monsieur [S] [P], et ont organisé, aux termes d'un règlement intérieur, le temps de travail, les absences et la rémunération du gérant,
- à compter de 2016 les relations entre Monsieur [S] [P] et Monsieur [N] [L] se sont dégradées, notamment à travers des échanges de courriers,
- dès le 27 mai 2017, Monsieur [S] [P], n'ayant pas obtenu du gérant de la SELARL PHARMACIE [L], Monsieur [N] [L], les informations sur la situation financière de la société, a adressé plusieurs courriers aux experts comptables afin d'obtenir la transmission de ces informations, sans succès,
- après avoir reçu une première convocation à l'assemblée générale ordinaire de la SELARL PHARMACIE [L] appelée à se réunir le 20 juillet 2017 contenant certaines irrégularités qu'il a donc contestées, Monsieur [S] [P] a reçu le 25 juillet 2017, une convocation rectificative, l'informant de l'ordre du jour repris en annexe, du report de la date de l'assemblée générale ordinaire de la SELARL PHARMACIE [L] au 3 août 2017, dans les locaux du cabinet JURIS PHARMA situés à [Localité 8],
- au cours de l'assemblée à laquelle Monsieur [S] [P] ne s'est pas présenté, toutes les résolutions ont été adoptées notamment la fixation de la rémunération nette annuelle du gérant, Monsieur [N] [L], pour l'exercice à clore au 31 décembre 2017 à la somme de 120.000 euros, soit 10.000 euros net par mois,
- sur saisine de Monsieur [S] [P], le tribunal judiciaire d'Evry a notamment, par jugement du 22 mai 2023 :
- prononcé la nullité des convocations des 15 juin et 18 juillet 2017 à l'assemblée générale de la SELARL PHARMACIE [L] du 3 août 2017 ;
- prononcé la nullité de l'assemblée générale de la SELARL PHARMACIE [L] du 3 août 2017 et du procès-verbal subséquent ;
- à ce jour, aucune autre assemblée générale n'a été organisée,
- Monsieur [S] [P] est donc recevable et bien-fondé, en sa qualité d'associé, de solliciter la condamnation de Monsieur [N] [L] à rembourser à Ia SELARL PHARMACIE [L] des rémunérations indument perçues et les charges y afférant.

A l'audience du 11 juin 2024, Monsieur [S] [P], représenté par son conseil, a soutenu son acte introductif d'instance et déposé ses pièces telles que visées dans l'assignation.

Monsieur [N] [L], représenté par avocat, s'est référé à ses conclusions en défense aux termes desquelles, au visa de l'article 835 du code de procédure civile, il sollicite de dire n'y avoir lieu à référé sur l'ensemble des demandes de provisions formées par Monsieur [S] [P], de rejeter toute demande plus ample ou contraire et de condamner ce dernier à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, il expose que :
- il existe des contestations sérieuses sur la demande de remboursement au regard de l'approbation des comptes en cours et que le montant demandé à titre provisionnel n'est pas certain,
- la désignation d'un mandataire ad hoc n'apparaît pas nécessaire du fait de l'absence de résistance à l'approbation des comptes, de la communication des bilans et de l'absence du fondement juridique de la demande.

Bien que régulièrement assignée, la SELARL Pharmacie [L], n'a pas comparu et n'a pas constitué avocat.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à l'assignation introductive d'instance et aux écritures déposées et développées oralement à l'audience.

L'affaire a été mise en délibéré au 16 juillet 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

En application des dispositions de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne faisant droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Les demandes des parties tendant à voir « dire et juger » ou « constater » ne constituent pas des prétentions au sens des dispositions de l'article 4 du code de procédure civile et ne donneront pas lieu à mention au dispositif.

Sur la demande de désignation d'un mandataire ad hoc

Aux termes de l'article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire, peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

Selon les dispositions de l'article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal peut, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Monsieur [S] [P] soutient qu'il existe un conflit d'intérêt entre la SELARL PHARMACIE [L] et son gérant Monsieur [N] [L], qui est redevable à cette dernière d'une somme provisionnelle de 128.159,01 euros, paralysant ainsi le fonctionnement de la société qui se trouve dans une situation économique particulièrement difficile, au regard notamment de sa dette locative de plus de 200.000 euros, hors loyers et charges courants.

Monsieur [N] [L], précisant qu'une convocation a été adressée pour une assemblée au 10 juillet qui fixera la rémunération du gérant, réplique qu'il n'y a pas lieu à référé.

En effet, il considère que les conditions tant de l'article 834 que de l'article 835 du code de procédure civile ne sont pas réunies au motif que le demandeur ne démontre aucune résistance concernant l'approbation des comptes et que les bilans ont été communiqués.

Monsieur [S] [P] réplique qu'au regard du différent existant et de la dette locative, la SELARL PHARMACIE [L] risque l'expulsion de son local commercial.

En l'espèce, Monsieur [S] [P] justifie par la production des statuts de la SELARL PHARMACIE [L] et du règlement intérieur signé entre Monsieur [S] [P] et Monsieur [N] [L] le 1er mai 2015, de nombreux courriers, du procès-verbal d'assemblée générale du 3 août 2017, du jugement du 22 mai 2023 du tribunal judiciaire d'Evry-Courcouronnes et de son certificat de non appel, des accords collectifs sur la rémunération, des liasses fiscales de 2017, 2018, 2019, 2020 et 2021, du récapitulatif des rémunérations de gérant de 2017 à 2022 et du jugement du 23 juin 2022 du tribunal judiciaire d'Evry-Courcouronnes, de la nécessité de déterminer la rémunération du gérant de manière rétroactive, en considérant les décisions du tribunal judiciaire d'Evry ainsi que tous les documents comptables utiles afin de calculer le montant total du trop-perçu de rémunération du gérant, incluant les charges sociales, éventuellement versé.

En conséquence, il convient, au visa de l'article 834 du code de procédure civile, de désigner un mandataire ad hoc à l'effet de déterminer le montant net de la rémunération du gérant de manière rétroactive, dans les termes du dispositif.

Sur la demande de provision

Monsieur [S] [P] sollicite la condamnation de Monsieur [N] [L] à payer à la SELARL Pharmacie [L] la somme provisionnelle de 128.159,01 euros au titre du trop-perçu de sa rémunération nette hors charges sociales pour la période courant du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2022,

Monsieur [N] [L] s'oppose à cette demande aux motifs :
- qu'une convocation en vue de l'approbation des comptes a été adressée à Monsieur [S] [P] et que, étant associé majoritaire, dès lors qu'il manifeste sa volonté d'approuver la rémunération du gérant, la demande devient sans objet,
- que le montant demandé n'est pas certain.

En effet, dans son acte introductif d'instance Monsieur [S] [P] précise que « à ce jour, la détermination du montant du trop-perçu des rémunérations n'est pas possible en l'absence de l'intégralité des documents comptables de la SELARL PHARMACIE [L] ».

Au regard des pièces versées au débat et de la rémunération du gérant contestée, il convient de s'en rapporter au mandataire judiciaire désigné qui analysera la demande en considérant les documents de la société et les décisions de justice, et déterminera s'il y a un trop-perçu à rembourser à la SELARL Pharmacie [L].

Il n'appartient pas au juge des référés, juge de l'évidence, d'interpréter les contrats.

En conséquence, la demande de provision se heurte à des contestations sérieuses et il n'y a donc pas lieu à référé sur ce point.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

En l'absence de partie succombante, il y a lieu de laisser à chacune des parties la charge de ses dépens.

L'équité commande de laisser à la charge de chacune des parties ses frais de procédure non compris dans les dépens. Il n'y a donc pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Le juge des référés, statuant publiquement, par ordonnance contradictoire et en premier ressort :

DESIGNE en qualité de mandataire ad hoc de la SELARL Pharmacie [L] :

la SELARL FHB prise en la personne Madame [J] [W]
[Adresse 5]
[Localité 4]
tél [XXXXXXXX01]

avec mission de :
- se faire communiquer tous documents comptables utiles afin de déterminer le montant total de l'éventuel trop-perçu de rémunération du gérant, incluant les charges sociales,
- faire exécuter les décisions de justice rendues à l'encontre de la SELARL Pharmacie [L] et/ou de ses associés,
- fixer la rémunération nette du gérant ;

DIT que la mission du mandataire prendra fin une fois la rémunération du gérant fixée de manière rétroactive, avec comptes entre les parties ;

FIXE la rémunération du mandataire selon les usages et dit qu'elle sera à la charge de la SELARL Pharmacie [L] ;

FIXE un délai de 6 mois à compter de l'avis de consignation entre les mains du mandataire ad hoc pour l'accomplissement de sa mission, délai qui, en cas de besoin justifié, pourra être prorogé pour une durée de 6 mois à la demande du mandataire ;

DIT que le mandataire ad hoc déposera son rapport sur l'exécution de sa mission en double exemplaire original au greffe du tribunal judiciaire d'Evry à l'issue de l'accomplissement de sa mission ou à l'issue du délai de 6 mois, sauf prorogation de ce délai dûment sollicité en temps utile auprès du juge chargé du contrôle des administrateurs ;

DESIGNE le magistrat chargé du contrôle des administrations judiciaires provisoires pour suivre la mission confiée à l'administrateur provisoire et statuer sur tous incidents;

FIXE à la somme de 2.000 euros provision à valoir sur la rémunération du mandataire ad hoc qui devra être consignée par la SELARL Pharmacie [L] directement entre les mains du mandataire ad hoc dans le délai de six semaines à compter de la délivrance par le greffe aux parties de la présente ordonnance ;

DIT que faute de consignation dans ce délai impératif, la désignation du mandataire ad hoc sera caduque et privée de tout effet ;

DIT n'y avoir lieu à référé sur la demande de provision ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE toute demande plus ample ou contraire ;

LAISSE à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

Ainsi fait et prononcé par mise à disposition au greffe, le 16 juillet 2024, et nous avons signé avec le greffier.

Le Greffier, Le Juge des Référés,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire d'Évry
Formation : Chambre des référés
Numéro d'arrêt : 24/00449
Date de la décision : 16/07/2024
Sens de l'arrêt : Désigne un mandataire ad hoc

Origine de la décision
Date de l'import : 22/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-16;24.00449 ?
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