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17/06/2024 | FRANCE | N°19/08956

France | France, Tribunal judiciaire d'Évry, 3ème chambre, 17 juin 2024, 19/08956


TRIBUNAL JUDICIAIRE
D’EVRY

3ème Chambre

MINUTE N°

DU : 17 Juin 2024

AFFAIRE N° RG 19/08956 - N° Portalis DB3Q-W-B7D-NBVH

NAC : 50A

CCCRFE et CCC délivrées le :________
à :
Me Malik FARAJALLAH,
Me Thierry TORDJMAN


Jugement Rendu le 17 Juin 2024


ENTRE :

Monsieur [P] [E] [W], né le 02 Août 1976 à [Localité 4] (PORTUGAL),
demeurant [Adresse 2]

représenté par Maître Malik FARAJALLAH, avocat au barreau de PARIS plaidant


DEMANDEUR


ET :


La S.A.R.L. SELM AUTO r>Représentée par son Gérant, Mr [C] [J]
dont le siège social est sis [Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Maître Thierry TORDJMAN, avocat au barreau de PARIS plaidant

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TRIBUNAL JUDICIAIRE
D’EVRY

3ème Chambre

MINUTE N°

DU : 17 Juin 2024

AFFAIRE N° RG 19/08956 - N° Portalis DB3Q-W-B7D-NBVH

NAC : 50A

CCCRFE et CCC délivrées le :________
à :
Me Malik FARAJALLAH,
Me Thierry TORDJMAN

Jugement Rendu le 17 Juin 2024

ENTRE :

Monsieur [P] [E] [W], né le 02 Août 1976 à [Localité 4] (PORTUGAL),
demeurant [Adresse 2]

représenté par Maître Malik FARAJALLAH, avocat au barreau de PARIS plaidant

DEMANDEUR

ET :

La S.A.R.L. SELM AUTO
Représentée par son Gérant, Mr [C] [J]
dont le siège social est sis [Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Maître Thierry TORDJMAN, avocat au barreau de PARIS plaidant

DEFENDERESSE

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Sandrine LABROT, Vice-Présidente,siégeant à Juge Rapporteur avec l’accord des avocats ;

Magistrats ayant délibéré :
Président : Sandrine LABROT, Vice-Présidente,
Assesseur : Laure BOUCHARD, Juge,
Assesseur : Béatrice MARTIN DE MEREUIL, Juge,

Assistées de Tiphaine MONTAUBAN, Greffière lors des débats à l’audience du 18 Mars 2024 et lors de la mise à disposition au greffe.

DÉBATS :

Vu l’ordonnance de clôture en date du 07 Novembre 2023 ayant fixé l’audience de plaidoiries au 18 Mars 2024 date à laquelle l’affaire a été plaidée et mise en délibéré au 17 Juin 2024.

JUGEMENT : Rendu par mise à disposition au greffe,
Contradictoire et en premier ressort.

EXPOSE DU LITIGE

Le 20 avril 2019, monsieur [P] [K] [E] [W] a acquis auprès de la SARL SELIM AUTO un véhicule d’occasion de marque VOLKSWAGEN type Sharan d’un kilométrage de 124.000 kilomètres au prix de 15.990 euros.

Par correspondance en date du 24 mai 2019, invoquant le fait que le véhicule a été accidenté antérieurement à la vente, monsieur [P] [K] [E] [W] a sollicité de la SARL SELM AUTO la nullité de la vente et la restitution subséquente du véhicule et du prix de vente.

Monsieur [P] [K] [E] [W] a mandaté un expert amiable en la personne de monsieur [O] [U] qui a procédé aux opérations d’expertise et déposé son rapport le 10 juillet 2019.

C’est dans ces circonstances que par acte d’huissier en date du 17 décembre 2019 monsieur [P] [K] [E] [W] a fait assigner la SARL SELM AUTO devant le tribunal judiciaire d’Evry aux fins de résolution de la vente et d’indemnisation de ses préjudices sur le fondement de la garantie des vices cachés à titre principal, aux fins de nullité de la vente sur le fondement du non-respect de l’obligation d’information et du dol à titre subsidiaire et au fins de désignation d’un expert judiciaire à titre infiniment subsidiaire.

Dans ses dernières écritures notifiées le 4 mars 2023, monsieur [P] [K] [E] [W] demande au tribunal de :

Prononcer la résolution de la vente intervenue le 20/04/19 du véhicule VOLKSWAGEN modèle Touran immatriculé [Immatriculation 5] entre M. [E] [W] et la société SELM AUTOS pour vices cachés ;

Subsidiairement, prononcer la nullité de la vente pour non-respect de l'obligation d'information et ordonner la nullité du contrat de vente ;

En conséquence, dire que la société SELM AUTOS devra reprendre possession du véhicule au domicile désigné par M. [E] [W] et à ses frais contre remboursement de la somme de 15 990 € et condamner le vendeur, en tant que de besoin au paiement de cette somme avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure, soit le 24/05/19 ;

Dire que la reprise du véhicule au domicile désigné par l’acheteur, contre remboursement du prix, devra intervenir dans le mois du jugement à intervenir sous astreinte de 100 € par jour de retard passé ce délai ;

Condamner la société SELM AUTOS à verser à M. [E] [W] la somme de 1.733,21 € à titre de dommages et intérêts ;

Condamner la société SELM AUTOS à verser à M. [E] [W] la somme de 5000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamner le défendeur en tous les dépens dont les frais d'expertise judiciaire s'élevant à 2 684,56 €.

Au soutien de ses prétentions, monsieur [P] [K] [E] [W] se prévaut de l’article 1641 du code civil et expose que les éléments qui ressortent des deux rapports d’expertise démontrent selon lui la preuve d’un vice. Il indique que les défauts constitutifs de ce vice n’ayant été révélés qu’avec un regard de professionnel ne pouvaient être décelés par monsieur [P] [K] [E] [W], acheteur profane, lors de la vente. Il prétend que SELM AUTO avait nécessairement connaissance des accidents subis par le véhicule puisque qu’elle reconnait dans ses écritures que le véhicule a subi deux accidents les 8 juin 2015 et 15 mai 2017. Monsieur [P] [K] [E] [W] ajoute que les défauts révélés sont, selon lui, suffisamment graves pour rendre le véhicule impropre à sa destination, puisque celui-ci a subi au moins deux chocs importants qui n’ont pas été réparés dans les règles de l’art, ces défauts baissant la qualité du véhicule selon l’expert judiciaire. Sur l’antériorité du vice il soulève que la vente a eu lieu le 20 avril et que les défauts ont été signalisés au vendeur dès le 23 avril, et s’appuie sur l’expertise judiciaire qui indique que les désordres étaient présents au moment de la vente par la SARL SELM AUTO à monsieur [P] [K] [E] [W] en date du 20 avril 2019.

À l’appui de sa demande subsidiaire en nullité de la vente pour non-respect de l’obligation d’information monsieur [P] [K] [E] [W] se base sur l’article 1109 du code civil et argue de ce que le vendeur a dissimulé sciemment à l’acheteur l’existence d’accidents antérieurs à la vente en ne l’informant pas préalablement de ce que le véhicule avait été accidenté à deux reprises. Il estime de ce fait que son consentement à la vente du véhicule a été vicié. Monsieur [P] [K] [E] [W] explique qu’il s’était justement adressé à un professionnel pour l’achat de son véhicule car cela représentait pour lui un gage de fiabilité, cette fiabilité ayant été déterminante dans l’acte d’achat. Il affirme que s’il avait eu connaissance de ce que le véhicule avait été accidenté à deux reprises avant l’achat, il n’aurait pas acheté le véhicule, d’autant qu’il a été mal réparé.

À l’appui de sa demande en réparation des préjudices subis, monsieur [P] [K] [E] [W] se fonde sur l’article 1645 du code civil, la SAEL SELM AUTOS connaissant selon lui les vices de la chose. Il présente des factures relatives à des frais de carte grise, d’expertise, d’assurance et d’intervention du garage VELIZY pour un total de 1.733,21 euros.

Dans ses dernières écritures notifiées le 4 mars 2023, la SARL SELM AUTO demande au tribunal de :

Débouter Monsieur [P] [K] [E] [W] de l’intégralité de ses prétentions, fins et conclusions, en particulier ses demandes de résolution de la vente du 20 avril 2019 pour vices cachés, de remboursement du prix de vente, de condamnation du Vendeur aux intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 24 mai 2019, de reprise du véhicule au domicile de l’Acquéreur dans le mois du Jugement à intervenir sous astreinte de 100 € par jour de retard et de condamnation du Vendeur à une somme de 733,21 € à titre de dommages et intérêts ;
Débouter Monsieur [P] [K] [E] [W] de sa demande aux fins de nullité de vente pour dol, formulée à titre subsidiaire, faute d’éléments extrinsèques démontrant la prétendue connaissance ou la dissimulation par la Société SELM AUTO d’informations essentielles constituées par les deux sinistres ayant affecté le véhicule les 8 juin 2015 et 15 mai 2017 ;
Condamner Monsieur [P] [K] [E] [W] au paiement d’une somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;
Le condamner aux entiers dépens de l’instance.

À l’appui de sa demande en rejet de la garantie des vices cachés, la société SELM AUTO s’appuie sur les clichés photographiques intégrés au rapport d’expertise pour soutenir que les désordres invoqués par monsieur [E] [W] étaient visibles à l’œil nu, sans nécessité qu’intervienne un professionnel ou que le démontage de la carrosserie soit requis. Elle relève que l’acheteur a nécessairement fait un examen de la carrosserie avant l’acquisition puisque le bon de commande du 20 avril 2019 mentionne un problème de fermeture de la porte avant. La société SELM AUTO relève également que monsieur [E] [W] ne fournit pas à l’appui de sa mise en demeure du 27 septembre 2019 ni dans son assignation introductive d’instance du 17 décembre 2019 de pièces justifiant de l’intervention d’un professionnel qui l’aurait alerté et mis en garde quelques jours après l’achat des désordres affectant le véhicule.
La société SELM AUTO soulève par ailleurs l’absence de gravité des vices invoqués puisque monsieur [E] [W] a continué à utiliser son véhicule à hauteur de 3.169 kilomètres parcourus depuis la vente et n’établit pas de cette façon un préjudice de jouissance, mais seulement un désordre esthétique. Il déduit également cette absence de gravité par le fait que le véhicule en cause a passé « haut la main » le contrôle technique avant son acquisition en avril 2019.

La société SELM AUTO déduit des conclusions de l’expertise, présentant une géométrie des trains roulants du véhicule indemne, que les sinistres des 8 juin 2015 et 15 mai 2017 n’ont causé aucun dommage sur la structure et la solidité du véhicule, qui ainsi était conforme à sa destination et ne présentait aucun risque ni aucun danger pour son conducteur. Cela est corroboré selon elle par le faible coût des travaux de reprise, chiffrés par l’expert à 1.712,94 euros TTC, relativement au prix d’acquisition de 15.990 euros TTC. Elle soulève par ailleurs qu’elle avait proposé à monsieur [E] [W] un examen de la carrosserie chez son carrossier habituel ainsi qu’un prêt gratuit de véhicule de remplacement dans l’attente du réalignement des éléments de carrosserie le cas échéant, ce que monsieur [E] [W] a refusé.

Sur l’absence de responsabilité directe, la société SELM AUTO précise que les deux accidents évoqués dont les vices invoqués par monsieur [E] [W] tiennent vraisemblablement leur origine sont survenus avant qu’elle ne devienne propriétaire du véhicule et que la responsabilité doit être intégralement supportée par la société AVAIL SERVIC LEASE qui lui a vendu le véhicule en cause et qu’elle se réserve en conséquence la faculté de l’appeler en garantie.

Sur le rejet de la demande subsidiaire en nullité de la vente pour non-respect de l’obligation d’information la société SELM AUTO rappelle qu’elle a, dès connaissance des réclamations de l’acquéreur, proposé à monsieur [E] [W] de déposer le véhicule chez son carrossier pour un examen détaillé. Elle ajoute en se rapportant à l’historique du fichier informatique du constructeur VOLKSWAGEN révélé dans le rapport d’expertise judiciaire que le véhicule était régulièrement entretenu au garage VOLKSWAGEN [Localité 6]-[Localité 7] et que les deux sinistres de juin 2015 et mai 2017 auraient dû être identifiés et réparés par le concessionnaire. Elle rappelle là encore que le contrôle technique réalisé avant la vente n’a relevé aucun défaut majeur. Elle ajoute que contrairement à l’expert judiciaire elle ne pouvait avoir accès aux fichiers des assureurs, révélés dans le rapport d’expertise judiciaire, et qu’en conséquence elle ne pouvait avoir connaissance des deux sinistres en cause.

Pour un exposé exhaustif des prétentions, le tribunal se réfère expressément aux écritures par application de l’article 455 du code de procédure civile.

La clôture a été prononcée le 7 novembre 2023, par ordonnance du même jour.

MOTIFS

Sur la responsabilité de la SARL SELM AUTO au titre de la garantie des vices cachés et la demande en résolution de la vente

L'article 1641 du code civil exige la démonstration par l'acheteur de l'existence, au moment de la transaction, de l'existence d'un défaut caché de la chose vendue qui la rend impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminue tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, on n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il l'avait connu.

L'article 1642 du même code précise que le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.

Selon l'article 1643 du code civil, le vendeur est tenu des vices cachés quand bien même il ne les aurait pas connus.

Il résulte de l'article 1645 du code civil, si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.

Le vendeur professionnel ne peut ignorer les vices de la chose vendue, même à un professionnel. Et le vendeur non professionnel n'est pas présumé avoir connaissance de ces vices, il incombe donc à l'acheteur d'en rapporter la preuve.

En droit positif, sont notamment considérés comme des vendeurs professionnels, ceux qui ont, de par leur profession, des compétences ou connaissances techniques précises même si ceux-ci interviennent dans le cadre de la gestion de son patrimoine privé.

En l'espèce, la qualité de professionnel du vendeur n'est pas contestable de sorte qu'il est présumé connaître le vice de la chose.

S'agissant de l'existence et de l'origine du vice, le rapport d’expertise de monsieur [U], expert missionné par monsieur [E] [W] et le rapport d’expertise judiciaire de monsieur [V], expert mandaté par le tribunal judiciaire d’Evry, sont tous les deux formels et font tous deux découler les désordres affectant le véhicule des réparations effectuées après deux accidents, l’un intervenu le 8 juin 2015 à 3.607 kilomètres (choc avant droit pour un montant de remise en état de 4.385,62 euros), et l’autre le 15 mai 2017 à 64.853 kilomètres (choc latéral droit pour un montant de 1.613,70 euros).
Le rapport de monsieur [V] précise que ces sinistres étaient de faible intensité, et que les travaux effectués ont été limités aux secteurs qui concernaient les sinistres. Il ajoute que les réparations effectuées concernant les sinistres intervenus le 8 juin 2015 et le 15 mai 2017 étaient de mauvaise qualité puisqu’il constate que les éléments de carrosserie de la façade avant ne sont pas bien réglés, le réglage de l’aile avant droit n’est pas bien fait, l’aile n’étant pas centrée et le capot étant trop haut, que le bas de caisse latéral droit est déformé et que les garnitures du montant pare-brise droit sont cassées et que les portes latérales droit ne sont pas alignées avec le bas de caisse, les baguettes déformées et décollées, la porte avant droit se fermant difficilement. Cela est étayé par des photos annexées au rapport.

Les mêmes constats ont été faits par l’expert monsieur [U] qui constate, photos à l’appui, à savoir des jeux inégaux entre le capot et l’aile avant gauche du véhicule, et sur son avant droit, un décalage entre le capot et la grille de calandre, le capot fermé est légèrement relevé sur sa partie avant, un défaut de position de la partie supérieure arrière de l’aile avant droite, à l’ouverture de la porte arrière droite, celle-ci vient chevaucher la porte avant, ce qui a provoqué la dégradation des deux baguettes et la déformation des portes sur la zone de contact. Il constate également un mauvais ajustement de la garniture avant droite et une déformation du bas de caisse droit et des traces de pinces sur les bas de caisse.

Il est constant que monsieur [E] [W] a, dès le 23 avril 2019, soit trois jours seulement après l’achat du véhicule le 20 avril 2019, alerté par courriel la société SELM AUTO, photos à l’appui, de ce que le véhicule était mal assemblé.

Concernant le caractère apparent ou non des désordres de carrosserie, le rapport d’expertise judiciaire conclut au fait que les désordres constatés n’étaient pas décelables par un acheteur non professionnel. Cela est contesté par la société SELM AUTO. Or il convient de relever que l’expertise judiciaire vient corroborer la première expertise réalisée par monsieur [U], qui indique que l’aspect général extérieur sans examen précis peut être considéré comme normal au regard de la date de mise en circulation et du kilométrage. Par ailleurs, le désordre consistant en un problème de fermeture de la porte avant droit avait été identifié par monsieur [E] [W] puisqu’il est mentionné au titre de la garantie véhicule dans le bon de commande de véhicule d’occasion signé le 20 avril 2019, les autres désordres ne l’étant pas.

Le caractère non apparent des désordres de carrosserie, outre celui affectant la porte avant droit du véhicule, est donc établi.

En revanche, les désordres constatés ne semblent pas rendre le véhicule impropre à son utilisation.

En effet, s’il ressort des conclusions des deux expertises que si les réparations effectuées après les deux sinistres intervenus sur le véhicule ne sont pas conformes, aucun des experts ne conclut à une immobilisation totale du véhicule, celui-ci étant par ailleurs en bon état de marche, puisque le rapport établi par monsieur [U] indique que le véhicule est arrivé par ses propres moyens sur le lieu d’examen. De plus, il ressort des rapports d’experts que le véhicule présentait le 9 juillet 2019 au compteur 127.936 kilomètres parcourus et 170.381 le 18 mai 2022, alors qu’il en présentait 124.000 au moment de la vente, ce dont il ressort de la déclaration de cession du véhicule signée le 20 avril 2019 par les deux parties. Soit 46.381 kilomètres parcourus sur cette période, alors même que monsieur [E] [W] avait demandé la nullité de la vente par lettre recommandée datée du 24 mai 2019. Aucun des deux rapports d’expertise n’alerte sur l’existence d’un danger découlant des désordres qu’ils ont constatés sur le véhicule.

En conséquence, les désordres constatés sur le véhicule VOLKSWAGEN ne seront pas considérés comme le rendant impropre à l'usage auquel on le destine, ni même d’en diminuer l’usage d’une quelconque façon.

Il résulte de ces éléments que la responsabilité de la SARL SELM AUTO au titre de la garantie des vices cachés n’est pas établie. La demande de monsieur [E] [W] à ce titre sera rejetée.

Sur la responsabilité de la SARL SELM AUTO au titre du non-respect de l'obligation d'information

Aux termes de l’article 1112-1 du code civil, celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant. Néanmoins, ce devoir d'information ne porte pas sur l'estimation de la valeur de la prestation.

Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties. Il incombe à celui qui prétend qu'une information lui était due de prouver que l'autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu'elle l'a fournie. Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir.

Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d'information peut entraîner l'annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants.

En vertu de l’article 1130 du code civil, l’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu’ils sont de telle nature que, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s’apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.

L’article 1131 du même code prévoit que les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat.

L’article 1132 du code civil indique que l’erreur de droit ou de fait, à moins qu’elle ne soit inexcusable, est une cause de nullité du contrat lorsqu’elle porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou sur celles du cocontractant.

L’article 1137 du code civil, dispose que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties sont telles qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté. Le dol peut être constitué par le silence d’une partie dissimulant à son cocontractant un fait qui, s’il avait été connu de lui, l’aurait dissuadé de contracter.

Le dol est caractérisé par la réunion de quatre conditions cumulatives : une manœuvre ou équivalent, émanant du cocontractant, de nature intentionnelle et ayant provoqué une erreur déterminante chez le cocontractant.
Sur la dissimulation de l’information, la société SELM AUTO indique avoir elle-même acquis le véhicule litigieux à la société ARVAL SERVICE LEASE et n’avoir eu connaissance des sinistres survenus le 8 juin 2015 et le 15 mai 2017, soit avant qu’elle n’en devienne propriétaire. Elle prétend qu’elle en ignorait l’origine puisqu’elle ne pouvait avoir accès au fichier des assureurs, lequel a répertorié les deux sinistres précités.

Néanmoins, elle ne rapporte pas la preuve de son ignorance, d’autant plus qu’elle soutient que monsieur [E] [W] ne pouvait ignorer la présence de ces désordres, ceux-ci étant selon elle visibles à l’œil nu, les clichés photographiques intégrés au rapport d’expertise démontrant le caractère apparent des désordres de carrosserie affectant le véhicule. Partant, la société SELM AUTO, en tant que vendeur professionnel, avait nécessairement connaissance des désordres qui affectent le véhicule.

En conséquence, il sera considéré que la société SELM AUTO, a bien dissimulé, en qualité de contractant, à monsieur [E] [W] les informations relatives aux accidents antérieurs subis par le véhicule.

Sur l’erreur déterminante, il résulte du bon de commande précité que la société SELM AUTO a entendu prendre en charge le problème de fermeture de la porte avant droite. Ainsi monsieur [E] [W] était-il informé de ce désordre de carrosserie au moment de l’acquisition du véhicule.

Par ailleurs, le rapport d’expertise judiciaire conclut à des sinistres de faible intensité et estime à un montant 1.712,94 euros le coût de réparation des désordres constatés.

Quant à monsieur [E] [W], il a acquis ce véhicule d’occasion, de plus de 5 ans (mis en circulation le 11 mars 2015) et affichant 124.000 kilomètres au compteur, pour une somme de 15.990 euros.

Il apparait de plus que monsieur [E] [W] l’a utilisé sur 46.381 kilomètres au 18 mai 2022 et il n’est pas démontré qu’il ne l’utilise plus à l’heure actuelle.

Par ailleurs, il résulte du courriel adressé à monsieur [E] [W] le 18 mai 2019 que la société SELM AUTO a proposé à l’acheteur de lui remettre le véhicule afin qu’il soit examiné chez son carrossier partenaire, et lui a proposé un prêt de véhicule gratuitement, ce que monsieur [E] [W] n’a pas accepté.

En conséquence de ce qui précède, la dissimulation d’accidents antérieurs, qui plus est de faible gravité, ne semble pas avoir provoqué chez monsieur [E] [W] une erreur déterminante de son consentement.

En conséquence, la responsabilité de la société ne sera pas engagée au titre d’un manquement au devoir d’information.

Il convient donc de débouter monsieur [E] [W] de sa demande de nullité du contrat de vente pour dol.

Sur la demande de dommages et intérêts de monsieur [E] [W]

La responsabilité de la société SELM AUTO n’étant pas retenue, la demande de dommages et intérêts formulée par monsieur [E] [W] sera rejetée.

Sur les demandes accessoires

- Sur les dépens

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

Monsieur [P] [E] [W], partie perdante au procès, sera condamné aux dépens de l’instance.

- Sur les frais irrépétibles

Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer 1° à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.

Monsieur [P] [E] [W], condamné aux dépens, devra verser à la société SELM AUTO une somme qu’il paraît équitable de fixer à 1.200 euros.

- Sur l’exécution provisoire

Aux termes de l’article 515 du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure au décret 2019-1333 du 11 décembre 2019, hors les cas où elle est de droit, l’exécution provisoire peut être ordonnée, à la demande des parties ou d’office, chaque fois que le juge l’estime nécessaire et compatible avec la nature de l’affaire, à condition qu’elle ne soit pas interdite par la loi.

Il convient de rappeler qu'aux termes de l'article 514 du code de procédure civile, le jugement est exécutoire à titre provisoire.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

DEBOUTE monsieur [P] [K] [E] [W] de l’ensemble de ses demandes ;

CONDAMNE Monsieur [P] [K] [E] [W] aux dépens ;

CONDAMNE Monsieur [P] [K] [E] [W] à payer à la société SELM AUTO la somme de 1.200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que la présente décision est exécutoire à titre provisoire en application des dispositions de l'article 514 du code de procédure civile ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Ainsi fait et rendu le DIX SEPT JUIN DEUX MIL VINGT QUATRE, par Sandrine LABROT, Vice-Présidente, assistée de Tiphaine MONTAUBAN, Greffière, lesquelles ont signé la minute du présent Jugement.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire d'Évry
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19/08956
Date de la décision : 17/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-17;19.08956 ?
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