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07/06/2024 | FRANCE | N°23/01242

France | France, Tribunal judiciaire d'Évry, Chambre des référés, 07 juin 2024, 23/01242


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au Nom du Peuple Français


Tribunal judiciaire d’EVRY
Pôle des urgences civiles
Juge des référés

Ordonnance du 7 juin 2024
MINUTE N° 24/______
N° RG 23/01242 - N° Portalis DB3Q-W-B7H-PXD6

PRONONCÉE PAR

Carol BIZOUARN, première vice-présidente,
Assistée de Alexandre EVESQUE, greffier, lors des débats à l’audience du 3 mai 2024 et lors du prononcé

ENTRE :

Monsieur [A] [L]
demeurant [Adresse 7]

représenté par Maître Dominique NARDEUX de LEXIALIS, demeurant [Adresse 6], avocat au

barreau de MELUN, vestiaire : M10

Madame [I], [N], [F] [B]
demeurant [Adresse 7]

représentée par Maître Dominique NARDEUX de LEXIALIS, ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au Nom du Peuple Français

Tribunal judiciaire d’EVRY
Pôle des urgences civiles
Juge des référés

Ordonnance du 7 juin 2024
MINUTE N° 24/______
N° RG 23/01242 - N° Portalis DB3Q-W-B7H-PXD6

PRONONCÉE PAR

Carol BIZOUARN, première vice-présidente,
Assistée de Alexandre EVESQUE, greffier, lors des débats à l’audience du 3 mai 2024 et lors du prononcé

ENTRE :

Monsieur [A] [L]
demeurant [Adresse 7]

représenté par Maître Dominique NARDEUX de LEXIALIS, demeurant [Adresse 6], avocat au barreau de MELUN, vestiaire : M10

Madame [I], [N], [F] [B]
demeurant [Adresse 7]

représentée par Maître Dominique NARDEUX de LEXIALIS, demeurant [Adresse 6], avocat au barreau de MELUN, vestiaire : M10

DEMANDEURS

D'UNE PART

ET :

Monsieur [O] [P]
demeurant [Adresse 3]

représenté par Maître Charlotte LAURENT, avocate au barreau de l’ESSONNE
Monsieur [E] [P]
demeurant [Adresse 9]

représenté par Maître Charlotte LAURENT, avocate au barreau de l’ESSONNE

Syndicat des copropriétaires LES TERRASSES D’[Localité 14], représenté par son syndic la S.A.S. ABP
dont le siège social est sis [Adresse 10]

représenté par Maître Jean-Sébastien TESLER de la SELARL AD LITEM JURIS, avocat au barreau de l’ESSONNE

S.A. ALBINGIA
dont le siège social est sis [Adresse 5]

représentée par Maître Samia DIDI MOULAI de la SELAS CHETIVAUX-SIMON SOCIÉTÉ D’AVOCATS, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : C0675

DÉFENDEURS
D'AUTRE PART

ORDONNANCE : Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort.

**************

EXPOSE DU LITIGE

Par actes de commissaire de justice des 28 novembre, 1er et 6 décembre 2023, Monsieur [A] [L] et Madame [I] [B] ont assigné en référé Monsieur [O] [P], Monsieur [E] [P], la SA ALBINGIA et le syndicat des copropriétaires LES TERRASSES D'[Localité 14] représenté par son syndic en exercice la SAS ABP, devant le président du tribunal judiciaire d'Évry, au visa des articles 834 et 835 du code de procédure civile, pour voir :

-Enjoindre Monsieur [O] [P] et Monsieur [E] [P] à effectuer, à leurs frais, les travaux nécessaires pour remédier à la fuite située entre les deux appartements du dessus et du dessous, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à compter de la présente décision ;

-Condamner le syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic la SAS ABP, sous la garantie de la SA ALBINGIA, à effectuer les travaux nécessaires et à casser la dalle afin de permettre le changement du coude et son remplacement, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la présente décision ;

-Condamner solidairement Monsieur [O] [P], Monsieur [E] [P], la SA ALBINGIA et la SAS ABP à verser à Monsieur [A] [L] et Madame [I] [B] la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Condamner les mêmes aux entiers dépens.

Appelée successivement aux audiences des 26 décembre 2023, 2février 2024 puis 5 avril 2024, l'affaire a été utilement renvoyée à l'audience du 3 mai 2024.

A l'audience du 3 mai 2024, Monsieur [A] [L] et Madame [I] [B], représentés par leur conseil, se sont référés à leurs conclusions aux termes desquelles ils sollicitent désormais du juge des référés de :

A titre principal,

-Enjoindre Monsieur [O] [P] et Monsieur [E] [P] à effectuer, à leurs frais, les travaux nécessaires pour remédier à la fuite située entre les deux appartements du dessus et du dessous, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à compter de la présente décision ;

-Enjoindre le syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic la SAS ABP, sous la garantie de la SA ALBINGIA, à effectuer ou à laisser exécuter à ses frais les travaux consistant à casser la dalle afin de permettre le changement du coude et son remplacement, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la présente décision ;

-Condamner solidairement Monsieur [O] [P], Monsieur [E] [P], la SA ALBINGIA et la SAS ABP à leur verser la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

A titre subsidiaire,

-Désigner un expert judiciaire avec mission classique en la matière ;

-Fixer la provision de l'expert à consigner par le syndic de copropriété et les consorts [P] qui contestent les expertises amiables ;

En tout état de cause,

-Condamner solidairement Monsieur [O] [P], Monsieur [E] [P], la SA ALBINGIA et la SAS ABP à leur verser la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Condamner les mêmes aux entiers dépens.

A l'appui de leurs demandes, Monsieur [A] [L] et Madame [I] [B] exposent que, depuis 2019, leur locataire subit d'importantes infiltrations dans la salle de bain dès que son voisin, Monsieur [O] [P], prend une douche. Ils ont fait constater par commissaire de justice les désordres rapportés par ce locataire selon procès-verbal du 31 août 2022, lequel permet de s'apercevoir que ces infiltrations ont endommagé les murs de la salle de bain. Ils expliquent avoir fait réaliser une recherche de fuite par la société AIRT CONTROLE, laquelle a révélé que la fuite était située dans la dalle entre les deux appartements nécessitant de casser la dalle pour atteindre le coude et le remplacer. Ils ajoutent que le syndic leur a, par courrier officiel du 6 juillet 2023, indiqué que la destruction de la dalle n'est pas techniquement envisageable pour des raisons d'ordre structurel et a proposé en conséquence de neutraliser les réseaux privatifs défaillants en effectuant un passage desdits réseaux en apparent, solution qui aurait été refusée par Messieurs [P]. Malgré plusieurs expertises et plusieurs mises en demeure adressées tant au syndicat des copropriétaires qu'à Messieurs [O] et [E] [P], aucune solution n'a pu être trouvée et les travaux ne sont toujours pas réalisés. S'agissant des contestations sérieuses soulevées par les parties défenderesses, ils font valoir que l'origine des désordres est connue de tous depuis longtemps au regard de l'historique des faits. Ils ajoutent que le remplacement de cette dalle située dans les parties communes nécessite l'autorisation du syndic, qui refuse d'admettre que la fuite se situe à ce niveau.

Monsieur [O] [P] et Monsieur [E] [P], représentés par leur conseil, se sont référés à leurs conclusions aux termes desquelles ils sollicitent, au visa des articles 1240 et 1353 du code civil, de l'article L.242-1 du code des assurances, et des articles 515, 659, 696 et 700 du code de procédure civile, de voir :

A titre principal,

-Débouter Monsieur [A] [L] et Madame [I] [B] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

A titre subsidiaire,

-Condamner le syndicat des copropriétaires LES TERRASSES D'[Localité 14] représenté par son syndic en exercice, la SAS ABP, à garantir Messieurs [E] et [O] [P] de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre (dont notamment l'astreinte) ;

-Condamner le syndicat des copropriétaires LES TERRASSES D'[Localité 14] représenté par son syndic en exercice, la SAS ABP, à prendre en charge les travaux de remise en état du logement appartenant à Monsieur [E] [P], qui s'élèveront à la somme de 2.684,44 euros TTC ;

-Condamner le syndicat des copropriétaires LES TERRASSES D'[Localité 14] représenté par son syndic en exercice, la SAS ABP, à prendre en charge le préjudice de jouissance subi par Monsieur [O] [P] du fait de l'inhabitabilité de son bien, du premier jour d'intervention de la société mandatée pour les travaux réparatoires, jusqu'à la remise en état complète du logement loué ;

-Condamner le syndicat des copropriétaires LES TERRASSES D'[Localité 14] représenté par son syndic en exercice, la SAS ABP, en cas d'exonération de Monsieur [O] [P] du paiement du loyer, à prendre en charge la perte de loyer à intervenir et à subir par Monsieur [E] [P] ;

-Fixer, dans les deux cas, l'indemnisation mensuelle à hauteur de la valeur locative, à savoir la somme de 680 euros ;

A titre infiniment subsidiaire,

-Condamner la SA ALBINGIA à garantir Messieurs [E] et [O] [P] de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre (notamment l'astreinte), et à prendre en charge le coût des travaux nécessaires à mettre fin aux désordres issus de la fuite ;
-Condamner la SA ALBINGIA à prendre en charge les travaux de remise en état du logement appartenant à Monsieur [E] [P], qui s'élèveront à la somme de 2.684,44 euros TTC ;

-Condamner la SA ALBINGIA à prendre en charge le préjudice de jouissance subi par Monsieur [O] [P] du fait de l'inhabitabilité de son bien, du premier jour d'intervention de la société mandatée pour les travaux réparatoires, jusqu'à la remise en état complète du logement loué ;

-Condamner la SA ALBINGIA en cas d'exonération de Monsieur [O] [P] du paiement du loyer, à prendre en charge la perte de loyer à intervenir et à subir par Monsieur [E] [P] ;

-Fixer, dans les deux cas, l'indemnisation mensuelle à hauteur de la valeur locative, à savoir la somme de 680 euros ;

En tout état de cause,

-Condamner solidairement Monsieur [A] [L], Madame [I] [B], le syndicat des copropriétaires LES TERRASSES D'[Localité 14] représenté par son syndic en exercice la SAS ABP, et la SA ALBINGIA à régler à Messieurs [E] et [O] [P] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Monsieur [O] [P] et Monsieur [E] [P] s'opposent aux demandes visant à procéder aux travaux, au motif que la cause réelle du sinistre n'est pas déterminée et ce malgré les nombreuses expertises et recherches de fuites réalisées. Ils ajoutent qu'aucun rapport ne s'accorde pour déterminer s'il s'agit d'un problème d'étanchéité du receveur ou bien de la défectuosité du coude de la colonne de descente des eaux ménagères située au niveau de la dalle entre les deux appartements. En tout état de cause, ils précisent que le coude objet du litige ne constitue pas une partie privative, contrairement à ce qu'allègue le syndicat des copropriétaires, et qu'en conséquence seule la responsabilité du syndicat des copropriétaires peut être engagée, ce dernier étant propriétaire des parties communes conformément au règlement de copropriété. Ils indiquent que, dans l'hypothèse où l'origine des désordres relèverait d'une partie privative, il appartient à l'assureur dommage-ouvrage de mobiliser ses garanties et de les garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre outre la prise en charge du coût des travaux nécessaires.

Le syndicat des copropriétaires LES TERRASSES D'[Localité 14] représenté par son syndic en exercice la SAS ABP, elle-même représentée par son conseil, s'est référé à ses conclusions aux termes desquelles il sollicite, au visa de la loi du 10 juillet 1965 et des articles 834, 835, 700 et 263 et suivants du code de procédure civile, de voir :

A titre principal,

-Rejeter la demande de Monsieur [A] [L] et Madame [I] [B] visant à ce que la dalle située entre les appartements 401 et 501 soit détruite par le syndicat des copropriétaires, en raison notamment des risques de dégradation de la structure de l'immeuble ;

-Débouter Messieurs [E] et [O] [P] de l'ensemble de leurs demandes à l'encontre du syndicat des copropriétaires ;

A titre subsidiaire,

-Ordonner à Monsieur [E] [P] de procéder à la réparation de la canalisation privative à l'origine du sinistre en procédant à une neutralisation des réseaux privatifs défaillants par un passage des réseaux défectueux en apparent, de telle sorte que la structure de l'immeuble ne soit pas affectée par la destruction de la salle, sans recours, ni garantie contre le syndicat des copropriétaires ;

A titre infiniment subsidiaire,

-Condamner la compagnie ALBINGIA à garantir le syndicat des copropriétaires de toute condamnation prononcée à son encontre et notamment au paiement des travaux de réparation et de toute indemnisation due au titre des préjudices éventuellement subis par les copropriétaires ;

En tout état de cause,

-Condamner tout succombant à payer au syndicat des copropriétaires des TERRASSES D'[Localité 14] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, le syndicat des copropriétaires LES TERRASSES D'[Localité 14] fait valoir l'existence de contestations sérieuses, au motif que les parties s'accordent à dire que l'origine du sinistre n'est pas clairement déterminée. Il expose que les constats réalisés relèvent en majorité une origine privative des désordres, à savoir un défaut d'étanchéité du joint entre le receveur et la faïence collée sur la paroi de la douche de la salle d'eau appartenant aux consorts [P]. Concernant la demande de réalisation des travaux consistant à casser la dalle pour procéder au remplacement du coude pouvant être à l'origine de la fuite, il souligne que cette mesure est attentatoire à la structure de l'immeuble et propose en conséquence une réparation de la fuite en passage apparent sans avoir à détruire la dalle, et ce comme préconisé par les spécialistes. S'agissant des demandes formulées à son encontre par les consorts [P], il s'y oppose au motif que l'origine des désordres étant vraisemblablement privative, il n'a pas à garantir des désordres survenus dans les parties privatives et ce d'autant plus qu'il a proposé une solution réparatoire laquelle a été refusée par ces derniers. Enfin, il réclame, dans l'hypothèse où la dalle devait être détruite, la condamnation de la compagnie ALBINGIA à le garantir du paiement des travaux de réparation et de toute indemnisation due au titre des préjudices subis par les copropriétaires.

La SA ALBINGIA, représentée par son conseil, s'est référée à ses conclusions aux termes desquelles elle sollicite du juge des référés, au visa des articles L.241-1, L.242-1 et A.243-1 du code des assurances et des articles 699, 700 et 834 du code de procédure civile, de voir :

-Juger que la compagnie ALBINGIA ne peut, en sa qualité d'assureur
«Dommage-ouvrage», tiers au contrat être condamnée à une obligation de faire ;

-Juger que l'obligation de la compagnie ALBINGIA est strictement indemnitaire ;

-Débouter Monsieur [A] [L] et Madame [I] [B] ou tous autres concluants de toutes leurs demandes fins et conclusions formées à l'encontre de la compagnie ALBINGIA à ce titre ;
-Condamner Monsieur [A] [L] et Madame [I] [B] à verser à la compagnie ALBINGIA la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens dont le montant pourra être recouvré directement par Maître Samia DIDI MOULAI.

Au soutien de ses demandes, la compagnie ALBINGIA, en sa qualité d'assureur dommage-ouvrage, fait valoir qu'elle est un tiers au contrat, de sorte qu'aucune obligation de faire ne peut lui être ordonnée et qu'en conséquence sa garantie ne saurait être mobilisée.

Sur la demande subsidiaire d'expertise, l'ensemble des défendeurs forme les protestations et réserves d'usage.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à l'assignation introductive d'instance et aux écritures déposées et développées oralement à l'audience ainsi qu'à la note d'audience.

L'affaire a été mise en délibéré au 7 juin 2024.

MOTIFS

Sur la procédure

Les demandes des parties tendant à voir "dire et juger" ou "constater" ne constituent pas des prétentions au sens des dispositions de l'article 4 du code de procédure civile et ne donneront pas lieu à mention au dispositif.

Sur la demande principale de procéder aux travaux

Aux termes de l'article 835 du code de procédure civile, le juge des référés, peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
Il ressort de ce texte que le trouble manifestement illicite résulte de toute perturbation provenant d'un fait qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit.

La contestation sérieuse au sens cet article n'est pas le moyen qui permet de juger du mal fondé de la demande mais celui qui exige un examen au fond du litige, lequel ne relève dès lors plus du domaine du juge des référés, juge de l'évidence.

En l'espèce, il ressort des pièces produites aux débats et en particulier des différents rapports d'expertise et de recherches de fuite que l'existence des désordres n'est pas contestée. Cependant, quand bien même le trouble manifestement illicite réside dans la privation de jouissance normale de l'appartement, l'origine des infiltrations n'est pas déterminée.

Il convient de relever que le rapport réalisé le 26 décembre 2019 par Monsieur [M] conclut à un défaut d'étanchéité sous le receveur et en dalle, nécessitant la casse du receveur pour avoir accès à l'évacuation située au niveau de la dalle entre les deux appartements. Celui de la société EURISK daté du 12 octobre 2020 conclut à un défaut d'étanchéité au niveau du passage de l'alimentation du mitigeur au niveau du carrelage et celui du cabinet STELLIANT, le 17 décembre 2021, retient un défaut d'étanchéité du calfeutrement, partiellement fissuré, au niveau du receveur de la douche du logement appartenant à Messieurs [P]. Le rapport de la société AIRT CONTROLE daté du 31 décembre 2022 conclut, après avoir réalisé une inspection télévisuelle, que le coude de descente vers l'étage inférieur est complètement cassé en partie haute ce qui nécessite de casser la dalle pour l'atteindre et le remplacer. Enfin, un second rapport du cabinet STELLIANT du 13 avril 2023 retient un potentiel défaut d'étanchéité du joint délimitant le receveur et la faïence collée sur la paroi de la douche de la salle d'eau.

En conséquence, il ressort de l'ensemble de ces rapports des conclusions divergentes qui ne permettent pas d'établir, avec toute l'évidence requise devant le juge des référés, l'origine des désordres et l'étendue des travaux à réaliser.

Il résulte de ces éléments que les parties demanderesses sont défaillantes à démontrer, comme elles en supportent la charge, la preuve ou un commencement de preuve suffisant, d'une violation évidente du droit de propriété, tant sur l'origine que sur l'imputabilité des désordres, notamment en l'absence d'une expertise contradictoire, de sorte qu'il existe des contestations sérieuses.

La demande subsidiaire d'expertise montre bien que les prétentions ne reposent pas sur des éléments techniques indiscutables, alors que le juge des référés est le juge de l'évidence. L'existence et la provenance des désordres relèvent d'un examen précis, détaillé et contradictoire qui ressort de l'office du juge du fond.

Par conséquent, il n'y a pas lieu à référé sur la demande principale et il convient de rejeter les prétentions qui tendent à enjoindre sous astreinte les parties défenderesses à faire réaliser les travaux nécessaires pour remédier à la fuite située entre les deux appartements du dessus et du dessous et notamment les travaux consistant à casser la dalle afin de permettre le changement du coude et son remplacement.

De même, il n'y a pas lieu à référé sur les appels en garantie formulés par Monsieur [O] [P] et Monsieur [E] [P].

Sur la demande subsidiaire d'expertise judiciaire

Selon l'article 145 du code de procédure civile, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé.

Justifie d'un motif légitime au sens de ce texte la partie qui démontre la probabilité de faits susceptibles d'être invoqués dans un litige éventuel.
Monsieur [A] [L] et Madame [I] [B] sollicitent de manière subsidiaire une mesure d'instruction par la désignation d'un expert judiciaire afin que soient examinés les désordres revendiqués, en rechercher l'origine et les causes, donner un avis sur les responsabilités encourues et déterminer les travaux à effectuer pour y mettre fin, demande à laquelle l'ensemble des parties défenderesses forment protestations et réserves.

En l'espèce, Monsieur [A] [L] et Madame [I] [B] justifient par la production de l'ensemble des rapports réalisés, du procès-verbal de constat du 31 août 2021, des échanges entre les parties, du devis du 10 octobre 2023, et des différents rapports d'expertise et avis techniques précités, éléments qui rendent vraisemblable l'existence des désordres invoqués, d'un motif légitime pour obtenir la désignation d'un expert en vue d'établir, avant tout procès, la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution du litige.

Dès lors, il convient d'ordonner une expertise judiciaire dans les termes du dispositif et au contradictoire de l'ensemble des parties, étant rappelé qu'à ce stade de la procédure aucune responsabilité ne peut être établie, la compagnie ALBINGIA sera en conséquence partie aux opérations d'expertise ordonnée.

Les mesures réclamées avant tout procès sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile ne sont pas destinées à éclairer le juge qui les ordonne mais le sont au seul bénéfice de celui qui les sollicite en vue d'un éventuel procès au fond. En conséquence la provision à valoir sur le coût de cette expertise est mise à la charge de Monsieur [A] [L] et Madame [I] [B].

Sur les dépens et les frais irrépétibles

En l'absence de partie succombante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, les dépens sont laissés à la charge de Monsieur [A] [L] et Madame [I] [B], dans l'intérêt desquels la mesure d'expertise est ordonnée.

Pour les mêmes raisons, il n'y pas lieu non plus à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge des référés, statuant publiquement par ordonnance contradictoire et en premier ressort :

DIT n'y avoir lieu à référé sur l'ensemble des demandes de faire procéder aux travaux et d'appel en garantie ;

ORDONNE une expertise judiciaire, au contradictoire de l'ensemble des parties et désigne pour y procéder :

Monsieur [J] [H]
expert près la cour d'appel de Paris
[Adresse 8]
[Adresse 8]
[Localité 13]
Tél : [XXXXXXXX01]
Email : [Courriel 15]

lequel pourra prendre l'initiative de recueillir l'avis d'un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne ;
avec mission de :

*se rendre sur les lieux [Adresse 4] à [Localité 14] (91) après y avoir convoqué les parties,

*se faire communiquer tous documents et pièces nécessaires à l'accomplissement de sa mission,

*examiner les désordres allégués dans l'assignation et les pièces versées aux débats affectant l'immeuble ou les installations litigieux, ainsi que les non conformités et/ou inachèvement allégués au regard des documents contractuels liant les parties, s'il y a lieu ; les décrire, en indiquer la nature, l'importance, la date d'apparition ; en rechercher la ou les causes, et fournir tous éléments permettant à la juridiction de déterminer à quels intervenants de ces désordres, malfaçons et inachèvements sont imputables, et dans quelle proportions,

*indiquer les conséquences de ces désordres, malfaçons et inachèvements quant à la solidité, l'habitabilité, l'esthétique du bâtiment, et, plus généralement quant à l'usage qui peut en être attendu ou quant à la conformité à sa destination,

*donner son avis sur l'origine et les causes des désordres allégués dans l'assignation, en s'attachant notamment aux conditions d'utilisation et d'entretien des équipements ou installations retenus pour être à l'origine des désordres,

*dire en tout état de cause si ces équipements ou installations sont conformes aux règles de l'art ainsi qu'aux normes de réglementations le cas échéant applicables,

*fournir tout renseignement de fait permettant au tribunal de statuer sur les éventuelles responsabilités encourues,

*après avoir exposé ses observations sur la nature des travaux propres à remédier aux désordres, et leurs délais d'exécution, chiffrer, à partir des devis fournis par les parties, éventuellement assistées d'un maître d'œuvre, le coût de ces travaux,

*fournir tous éléments de nature à permettre ultérieurement à la juridiction saisie d'évaluer les préjudices de toute nature, directs ou indirects, matériels ou immatériels résultant des désordres, notamment le préjudice de jouissance subi ou pouvant résulter des travaux de remise en état,

*dire si des travaux urgents sont nécessaires soit pour empêcher l'aggravation des désordres et du préjudice qui en résulte, soit pour prévenir les dommages aux personnes ou aux biens ; dans l'affirmative, à la demande d'une partie ou en cas de litige sur les travaux de sauvegarde nécessaires, décrire ces travaux et en faire une estimation sommaire dans un rapport intermédiaire qui devra être déposé aussitôt que possible,

*faire toutes observations utiles au règlement du litige.

FAIT injonction aux parties de communiquer aux autres parties les documents de toute nature qu'elles adresseront à l'expert pour établir le bien fondé de leurs prétentions.

DIT que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 248, 263 à 284-1 code de procédure civile et qu'il déposera son rapport en un exemplaire original sous format papier et en copie sous la forme d'un fichier PDF enregistré sur un CD ROM au greffe du service du contrôle des expertises du tribunal judiciaire d'Evry sis [Adresse 12] à [Localité 16], dans le délai de six mois à compter de l'avis de consignation, sauf prorogation de ce délai dûment sollicité en temps utile auprès du juge du contrôle (en fonction d'un nouveau calendrier prévisionnel préalablement présenté aux parties).

DIT que l'expert devra, dès réception de l'avis de versement de la provision à valoir sur sa rémunération, convoquer les parties à une première réunion qui devra se tenir avant l'expiration d'un délai de deux mois, au cours de laquelle il procédera à une lecture contradictoire de sa mission, présentera la méthodologie envisagée, interrogera les parties sur d'éventuelles mises en cause, établira contradictoirement un calendrier de ses opérations et évaluera le coût prévisible de la mission, et qu'à l'issue de cette première réunion il adressera un compte rendu aux parties et au juge chargé du contrôle :

-en faisant définir une enveloppe financière pour les investigations à réaliser, de manière à permettre aux parties de préparer le budget nécessaire à la poursuite de ses opérations,
-en les informant de l'évolution de l'estimation du montant prévisible de ses frais et honoraires et en les avisant de la saisine du juge du contrôle des demandes de consignation complémentaire qui s'en déduisent,
-en fixant aux parties un délai pour procéder aux interventions forcées,
-en les informant, le moment venu, de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse.

INVITE les parties, dans le but de limiter les frais d'expertise, à utiliser la voie dématérialisée via l'outil OPALEXE, pour leurs échanges contradictoires avec l'expert et la communication des documents nécessaires à la réalisation de la mesure ;

DIT que, sauf accord contraire des parties, l'expert devra adresser à celles-ci une note de synthèse dans laquelle il rappellera l'ensemble de ses constatations matérielles, présentera ses analyses et proposera une réponse à chacune des questions posées par la juridiction ;

DIT que l'expert devra fixer aux parties un délai pour formuler leurs dernières observations ou réclamations en application de l'article 276 du code de procédure civile et rappelons qu'il ne sera pas tenu de prendre en compte les transmissions tardives ;

DESIGNE le magistrat chargé du contrôle des expertises pour suivre la mesure d'instruction et statuer sur tous incidents ;

DIT que l'expert devra rendre compte à ce magistrat de l'avancement de ses travaux d'expertise et des diligences accomplies et qu'il devra l'informer de la carence éventuelle des parties dans la communication des pièces nécessaires à l'exécution de sa mission conformément aux dispositions des articles 273 et 275 du code de procédure civile ;

FIXE à la somme de 3.000 (trois mille) euros la provision à valoir sur la rémunération de l'expert qui devra être consignée par Monsieur [A] [L] et Madame [I] [B] entre les mains du régisseur d'avances et de recettes de ce tribunal, [Adresse 12] à [Localité 16] ([Courriel 17] / Tél : [XXXXXXXX02] ou [XXXXXXXX011]) dans le délai de six semaines à compter de la délivrance de la présente ordonnance par le greffe aux parties, sans autre avis ;

DIT que, faute de consignation dans ce délai impératif, la désignation de l'expert sera caduque et privée de tout effet ;

DIT qu'en déposant son rapport, l'expert adressera aux parties et à leurs conseils une copie de sa demande de rémunération ;

DIT n'y avoir lieu à référé sur le surplus des demandes présentées par chacune des parties ;

CONDAMNE in solidum Monsieur [A] [L] et Madame [I] [B] aux dépens de la présente instance ;

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que l'exécution provisoire est de droit.

Ainsi fait et prononcé par mise à disposition au greffe, le 7 juin 2024, et nous avons signé avec le greffier.

Le Greffier,Le Juge des Référés,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire d'Évry
Formation : Chambre des référés
Numéro d'arrêt : 23/01242
Date de la décision : 07/06/2024
Sens de l'arrêt : Désigne un expert ou un autre technicien

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-07;23.01242 ?
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