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20/08/2024 | FRANCE | N°24/00684

France | France, Tribunal judiciaire de Versailles, Chambre des référés, 20 août 2024, 24/00684


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
20 AOUT 2024





N° RG 24/00684 - N° Portalis DB22-W-B7I-SAXZ
Code NAC : 54G


DEMANDEURS

Madame [H] [F] épouse [W]
née le 04 Mai 1981 à [Localité 5],
demeurant [Adresse 1]

Monsieur [M] [W]
né le 29 Juillet 1980 à [Localité 3],
demeurant [Adresse 1]

Représentés par Me Pierre-antoine CALS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 719, avocat postulant et par Me Amel BEN MANSOUR, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E 1612, avocat plaidant,



DEFENDERESSE

LLOYD’S INSURANCE COMPANY, société anonyme belge dont le siège social est situé à [Adresse 2] (Belgique), qui est enr...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
20 AOUT 2024

N° RG 24/00684 - N° Portalis DB22-W-B7I-SAXZ
Code NAC : 54G

DEMANDEURS

Madame [H] [F] épouse [W]
née le 04 Mai 1981 à [Localité 5],
demeurant [Adresse 1]

Monsieur [M] [W]
né le 29 Juillet 1980 à [Localité 3],
demeurant [Adresse 1]

Représentés par Me Pierre-antoine CALS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 719, avocat postulant et par Me Amel BEN MANSOUR, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E 1612, avocat plaidant,

DEFENDERESSE

LLOYD’S INSURANCE COMPANY, société anonyme belge dont le siège social est situé à [Adresse 2] (Belgique), qui est enregistrée auprès de la Banque-Carrefour des Entreprises sous le numéro 682.594.839 RLE (Bruxelles) compagnie d’assurance soumise à la supervision de la BANQUE NATIONALE DE BELGIQUE, représentée par le Coverholder United Brokers International Limited, [Adresse 4], UK,

Non représentée,

***

Débats tenus à l'audience du : 25 Juin 2024

Nous, Gaële FRANÇOIS-HARY, Première Vice-Présidente, assistée de Virginie DUMINY, greffière lors des débats et de Elodie NINEL, greffière placée lors du prononcé,

Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil, à l’audience du 25 Juin 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 20 Août 2024, date à laquelle l’ordonnance suivante a été rendue :

EXPOSE DU LITIGE

Par acte de Commissaire de Justice en date du 14 mai 2024, Mme [H] [F] épouse [W] et M. [M] [W] ont assigné la société LLOYD'S INSURANCE COMPANY en référé devant le Tribunal judiciaire de Versailles aux fins de voir :
- condamner par provision la société LLOYD’S INSURANCE COMPANY à leur payer la somme de 140 227,76 euros TTC au titre du préfinancement des travaux réparatoires de l’ouvrage sis [Adresse 1], avec intérêt légal au double du taux de l'intérêt légal à compter du 22 janvier 2024,
- condamner la société LLOYD’S INSURANCE COMPANY à leur verser la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Ils exposent qu'en qualité de maîtres de l’ouvrage, ils ont fait construire une maison individuelle sise [Adresse 1] et ont souscrit une police d’assurance dommages-ouvrage et risques annexes émise le 27 juin 2019, contrat régi par les dispositions du Code des assurances et notamment son article L.242.1 ; les garanties ont été souscrites notamment au vu des études de sol réalisées dès janvier 2016, attestant du caractère argileux du terrain ; malgré ces données, il est apparu que le maître d’œuvre, la société FL3C, de même que les sociétés intervenantes dont la société CUNHA BATIMENT, n’ont pas réalisé leurs prestations dans les règles de l’art, ni satisfait à leur devoir de conseil ; une réception est intervenue 1e 9 janvier 2021 et des désordres en lien avec la conception et la réalisation de la gestion de l’eau de l'ouvrage sont apparus postérieurement.

Ils rappellent que par ordonnance de référé du 2 décembre 2021, la juridiction de céans a nommé
Monsieur [L] [E] en qualité d'expert, lequel a, par notes aux parties n°2 du 26 octobre 2022 et n°3 du 30 novembre 2022, décrit les désordres et sollicité la transmission de solutions réparatoires par supervision d’un maître d’œuvre.

Ils indiquent avoir sollicité à plusieurs reprises la prise en charge du préfinancement par leur assureur dommages-ouvrage, en vain ; la défenderesse n’a eu de cesse d’éluder son obligation de paiement en appréhendant volontairement les désordres dans une approche superficielle soutenant qu'ils ne seraient pas de nature décennale, sans en approfondir la cause réelle qui tient à la conception même de l’ouvrage ; les désordres déclarés sont le symptôme d’un défaut de conception majeur de la gestion de l'eau par les constructeurs pour un ouvrage construit en zone argileuse ; les désordres entrent bien dans le champ de la garantie souscrite puisque le défaut de conception de la gestion de l’eau sur une parcelle argileuse entame la solidité et la pérennité de l’ouvrage.

La défenderesse n'est pas représentée.

La décision a été mise en délibéré au 20 août 2024.

MOTIFS

Sur la demande de provision

Aux termes de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le Président du Tribunal judiciaire peut, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

L'article 1103 du Code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. L'article 1104 ajoute que les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d'ordre public.

Aux termes de l'article L 242-1 du Code des assurances, "Toute personne physique ou morale qui, agissant en qualité de propriétaire de l'ouvrage, de vendeur ou de mandataire du propriétaire de l'ouvrage, fait réaliser des travaux de construction, doit souscrire avant l'ouverture du chantier, pour son compte ou pour celui des propriétaires successifs, une assurance garantissant, en dehors de toute recherche des responsabilités, le paiement de la totalité des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1, les fabricants et importateurs ou le contrôleur technique sur le fondement de l'article 1792 du code civil.
L'assureur a un délai maximal de soixante jours, courant à compter de la réception de la déclaration du sinistre, pour notifier à l'assuré sa décision quant au principe de la mise en jeu des garanties prévues au contrat.

Lorsqu'il accepte la mise en jeu des garanties prévues au contrat, l'assureur présente, dans un délai maximal de quatre-vingt-dix jours, courant à compter de la réception de la déclaration du sinistre, une offre d'indemnité, revêtant le cas échéant un caractère provisionnel et destinée au paiement des travaux de réparation des dommages. En cas d'acceptation, par l'assuré, de l'offre qui lui a été faite, le règlement de l'indemnité par l'assureur intervient dans un délai de quinze jours.
Lorsque l'assureur ne respecte pas l'un des délais prévus aux deux alinéas ci-dessus ou propose une offre d'indemnité manifestement insuffisante, l'assuré peut, après l'avoir notifié à l'assureur, engager les dépenses nécessaires à la réparation des dommages. L'indemnité versée par l'assureur est alors majorée de plein droit d'un intérêt égal au double du taux de l'intérêt légal."

L'article 1792 du Code civil dispose que "Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages mêmes résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination". L'article 1792-4-1 du même code prévoit que cette garantie est décennale à compter de la réception des travaux.

Il est constant que l’assureur dommages-ouvrage est tenu de préfinancer les travaux de réparation définitive des désordres de nature décennale subis par son assuré, notamment des travaux de réparation de désordres de nature décennale trouvant leur origine dans un défaut de conception initial.

En l'espèce, les époux [W], maîtres d'ouvrage, ont fait construire une maison individuelle sise [Adresse 1] et ont souscrit le 27 juin 2019 auprès de la société LLOYD'S INSURANCE COMPANY, une police d’assurance dommages-ouvrage DOO-108306-LIC/06.19 n°B1256R029612019.

Le contrat prévoit les garanties suivantes : dommage-ouvrage, complémentaires (de bon fonctionnement des biens d'équipement et de dommages immatériels consécutifs), décennale constructeurs non réalisateurs. Sont exclus de la garantie, tout sinistre ayant pour origine des faits ou circonstances connus du souscripteur et antérieurs à la date du contrat. Sont également exclus du présent contrat tout dommage qui n'affectent pas la solidité de l'ouvrage ou qui ne le rendent pas impropre à sa destination et provenant d'équipements de production d'électricité photovoltaïque. Par ailleurs, cette assurance ne couvre les dommages résultant d'éléments radioactif, toxiques, chimiques ...

Par ordonnance du 2 décembre 2022, le juge des référés du Tribunal judiciaire de Versailles, saisi par les époux [W] à l'encontre des sociétés CUNHA BATIMENT, SMABTP et FL3C, a désigné M. [L] [E] en qualité d'expert.

Les époux [W] ont effectué une déclaration de sinistre auprès de leur assureur DO le 23 avril 2022.

Il ressort de la note aux parties n°2 établie par l'expert judiciaire en date du 26 octobre 2022 qu'au sous-sol de la maison sont constatées à plusieurs endroits des traces d'humidité et d'infiltrations, et a été relevé un taux anormal d'humidité ; des infiltrations ont été constatées à proximité du tableau électrique.

L'expert indique qu’à plus ou moins long terme, la solidité, la durabilité, la salubrité, l'esthétique et la pérennité du bien vont être affectées de part les désordres observés". Il rappelle qu'"une étude et un chiffrage pour la remise en état du bien et notamment concernant le drain et son collecteur" a été sollicitée. Il précise que "Les travaux devront être réalisés par une entreprise qualifiée, dans les règles de l'art et il est conseillé sous la direction d'un maître d'œuvre". Il précise que "le bien est localisé dans un secteur exposé aux retrait-gonflements des sols argileux", présentant un "Type d'exposition de la localisation : Aléa fort", en précisant que "Un aléa fort signifie que des variations de volume ont une très forte probabilité d'avoir lieu. Ces variations peuvent avoir des conséquences importantes sur le bâti (comme l'apparition de fissures dans les murs)".

Il apparaît donc que les désordres trouvent leur origine dans un défaut de conception initial et affectent la solidité et la pérennité de l'ouvrage, présentant ainsi un caractère décennal.

Le devis de l'entreprise BASTIEN ODDO BATIMENT (n°DEV-2023-0045) établi le 13 novembre 2023 fait état d'un montant de 124 934,33 euros TTC au titre des travaux de reprise des malfaçons (et notamment de reprise du réseau de drainage).

Il convient en conséquence de condamner la société LLOYD'S INSURANCE COMPANY à payer aux époux [W] la somme provisionnelle de 124 934,33 euros TTC au titre du préfinancement des travaux réparatoires. Le surplus des dépenses n'est pas à ce stade établi avec l'évidence requise en référé.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il y a lieu de condamner la défenderesse, partie succombante, à payer aux demandeurs la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La défenderesse sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Nous, Gaële FRANCOIS-HARY, Première Vice-Présidente au Tribunal judiciaire de Versailles, statuant par ordonnance mise à disposition au greffe, réputée contradictoire et en premier ressort,

CONDAMNONS la société LLOYD'S INSURANCE COMPANY à payer à Mme [H] [F] épouse [W] et M. [M] [W] la somme provisionnelle de 124 934,33 euros TTC,

CONDAMNONS la société LLOYD'S INSURANCE COMPANY à payer à Mme [H] [F] épouse [W] et M. [M] [W] la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNONS la société LLOYD'S INSURANCE COMPANY aux dépens.

Prononcé par mise à disposition au greffe le VINGT AOUT DEUX MIL VINGT QUATRE par Gaële FRANÇOIS-HARY, Première Vice-Présidente, assistée de Elodie NINEL, Greffière placée, lesquelles ont signé la minute de la présente décision.

LA GREFFIÈRE LA PREMIERE VICE-PRÉSIDENTE
Elodie NINEL Gaële FRANCOIS-HARY


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Versailles
Formation : Chambre des référés
Numéro d'arrêt : 24/00684
Date de la décision : 20/08/2024
Sens de l'arrêt : Accorde une provision

Origine de la décision
Date de l'import : 29/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-08-20;24.00684 ?
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