La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/07/2024 | FRANCE | N°22/03876

France | France, Tribunal judiciaire de Versailles, Deuxième chambre, 25 juillet 2024, 22/03876


Minute n°

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Deuxième Chambre
JUGEMENT du 25 JUILLET 2024

N° RG 22/03876 - N° Portalis DB22-W-B7G-QXK7

DEMANDEURS :

Madame [N] [V], née le 06 avril 1948 à [Localité 4], de nationalité française, demeurant [Adresse 1], retraitée,
représentée par Maître Sandra BROUT- DELBART de la SELARL BROUT-DELBART AVOCAT, avocats au barreau de VERSAILLES, avocats plaidant/postulant

Monsieur [P] [V], né le 12 décembre 1940 à [Localité 3], de nationalité française, demeurant [Adresse 1],
représenté par Maît

re Sandra BROUT- DELBART de la SELARL BROUT-DELBART AVOCAT, avocats au barreau de VERSAILLES, avocats plaidant/...

Minute n°

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Deuxième Chambre
JUGEMENT du 25 JUILLET 2024

N° RG 22/03876 - N° Portalis DB22-W-B7G-QXK7

DEMANDEURS :

Madame [N] [V], née le 06 avril 1948 à [Localité 4], de nationalité française, demeurant [Adresse 1], retraitée,
représentée par Maître Sandra BROUT- DELBART de la SELARL BROUT-DELBART AVOCAT, avocats au barreau de VERSAILLES, avocats plaidant/postulant

Monsieur [P] [V], né le 12 décembre 1940 à [Localité 3], de nationalité française, demeurant [Adresse 1],
représenté par Maître Sandra BROUT- DELBART de la SELARL BROUT-DELBART AVOCAT, avocats au barreau de VERSAILLES, avocats plaidant/postulant

DEFENDERESSE :

La société ECOBATI IDF, société par actions simplifiée à associé unique, au capital de 40.000€, dont le siège social est situé [Adresse 2], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de PONTOISE sous le numéro 749 984 662,
représentée par Maître Mickaël CHOURAQUI de la SELARL MCH AVOCATS, avocats au barreau de VAL D’OISE, avocats plaidant/postulant

ACTE INITIAL du 08 Juillet 2022 reçu au greffe le 11 Juillet 2022.

DÉBATS : A l'audience publique tenue le 29 Mai 2024, les avocats en la cause ont été entendus en leurs plaidoiries par Madame ZYLBERMAN, Magistrat Honoraire, siégeant en qualité de juge rapporteur avec l’accord des parties en application de l‘article 805 du Code de procédure civile, assistée de Madame SOUMAHORO Greffier, puis l’affaire a été mise en délibéré au 25 Juillet 2024.

MAGISTRATS AYANT DÉLIBÉRÉ :
Madame LUNVEN, Vice-Présidente
Madame RODRIGUES, Vice-Présidente
Madame ZYLBERMAN, Magistrat Honoraire

EXPOSE DU LITIGE

M et Mme [V], respectivement âgés de 81 ans et 74 ans, faisaient appel à la société ECOBATI IDF pour le remplacement de leur mode de chauffage actuel au fioul par une pompe à chaleur.

Le 03 septembre 2019 la société ECOBATI IDF établissait un devis pour un montant total TTC de 16.774,50 € qui, déduction faite de la “Subvention ANAH” (-5.565 €), de la “Prime CEE “ (-5.500 €) et du “Crédit d’impôt” (-1.712,85 €) ramenait l’investissement final à hauteur de 3.996,65 €.

Un dossier était joint, lequel précisait les engagements de l’entreprise dans toutes les étapes du projet, notamment : une étude d’éligibilité aux différentes aides gouvernementales ainsi qu’une aide au montage du dossier, au suivi de la commercialisation et à la finalisation.

Le 11 septembre 2019, ils signaient le devis en présence du commercial, M. [C], lequel inscrivait le jour même les époux [V] sur le site EDF afin d’effectuer la demande de prime EDF (plus avant dénommée Prime CEE).

L’ensemble des éléments était transmis à EDF une fois le matériel posé et la facture éditée.

S’étonnant de la non réception de cette prime, Mme [V] adressait, le 6 avril 2020, un couriel au président de la société ECOBATI ainsi qu à EDF le 2 août suivant.

En décembre 2020, elle apprenait téléphoniquement d’EDF que sa demande allait être annulée car une date était manquante sur le devis, la renvoyant à contacter la société ECOBATI.

Cette dernière lui transmettait le devis qu’ils avaient signé, daté de manière manuscrite du 11 septembre 2019, l’invitant à retourner ce document à EDF.

Le 12 janvier 2021, EDF confirmait téléphoniquement à Mme [V] que son dossier était rejeté.

Après échange avec la société ECOBATI, qui lui confirmait qu’il n’y avait aucune raison pour que le dossier soit rejeté, Mme [V] effectuait un nouvel envoi, accompagné de tous les éléments en sa possession, à EDF.

Après un nouvel examen , EDF lui répondait, le 8 février 2021, dans les termes suivants: “(...) La prime énergie de 5.500 € est refusée suite à la réception le 12/11/2019 du devis signé mais non daté.
Le service prime énergie indique que lorsqu’un devis est signé mais non daté il est dans l’obligation de prendre en compte la date d’émission du devis. Malheureusement dans votre cas, votre devis a été édité avant votre inscription sur le site le 11/09/2019.
Or l’inscription sur le site doit intervenir en premier lieu. Dans le cas contraire, il n’est pas possible de justifier, auprès du Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire, du rôle incitateur d’EDF (...)Le service prime énergie est dans l’obligation de clore votre demande de prime énergie d’EDF pour délai expiré (...)”.

Après avoir transmis cette réponse à la société ECOBATI et bien que cette dernière lui ait assuré qu’elle ferait le nécessaire, les époux [V] n’ont jamais reçu la prime.

Suite à la demande des époux [V], par courrier recommandé du 12 février 2022, de trouver une solution amiable, la société ECOBATI rejetait toute responsabilité dans cette situation, reprochant aux époux [V] d’avoir omis de dater manuscritement le devis à côté de leur signature.

La société ECOBATI n’apportait aucune réponse à la mise en demeure adressée le 5 avril 2022 par le conseil des demandeurs visant à leur fournir divers documents et à réparer le préjudice causé.

C’est dans ce contexte que M. [P] [V] et Mme [N] [V] ont, par acte de commissaire de justice du 8 juillet 2022, fait assigner la société ECOBATI IDF, devant le tribunal judiciaire de Versailles, et demandent, au visa des articles 1112-1, 1602, 1130 et suivants du code civil, de l’article L.111-1 du code de la consommation:

A titre principal,
-constater que la société ECOBATI IDF a manqué à son obligation d’information
-condamner la société ECOBATI à réparer les préjudices causés de ce fait, soit la somme de 10.100 € (préjudice matériel et moral confondus)

A titre subsidiaire,
-constater que le consentement des époux [V] est vicié,
-prononcer la nullité du contrat,
-condamner les époux [V] à restituer la pompe à chaleur à la société ECOBATI IDF et cette dernière à leur restituer la somme de 16.774,50 €,
-condamner la société ECOBATI à réparer les préjudices causés de ce fait, soit la somme de 5.000 €

En tout état de cause,
-condamner la société ECOBATI IDF au paiement d’une indemnité de 2.500 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
-condamner la société ECOBATI IDF aux entiers dépens et dire qu’ils seront recouvrés par la SELARLU BROUT DELBART Avocat prise en la personne de Maître Sandra BROUT-DELBART,
-débouter la société ECOBATI IDF de l’ensemble de ses demandes,
-dire n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire du jugement à intervenir.

A l’appui de leurs demandes et à titre principal, M. et Mme [V] invoquent le non respect par la société ECOBATI IDF de son obligation d’information telle qu’elle résulte des dispositions combinées des articles 1112-1, 1602 du code civil et L.111-1 du code de la consommation.

Ils reprochent à la défenderesse de ne pas leur avoir précisé que l’obtention de la prime EDF était subordonnée à la production d’un devis signé ou, à défaut, à l’ouverture d’une demande postérieure à la date indiquée sur le devis, et ce, alors même que le document contractuel fait expressément référence à l’aide accordée pour le montage du dossier. Elle n’a, en tout état de cause, pas clairement expliqué ce à quoi l’obligeait une telle mention.

Ils ajoutent que le commercial de la société, présent lors de la signature, n’a formulé aucune observation relativement à l’absence de date manuscrite.

Ils font état du préjudice matériel en résultant, soit la non perception de la prime EDF de 5.500 €. Ils excipent en outre d’un préjudice moral né de la croyance entretenue par la société ECOBAT IDF, pendant plus d’une année, d’une possible régularisation du dossier, pour finalement, une fois le rejet définitif constaté, rejeter toute responsabilité dans cette situation.

A titre subsidiaire,M. et Mme [V] sollicitent la nullité du contrat, avec toutes les conséquences s’y attachant moti f pris du vice du consentement l’affectant.

Faisant application des dispositions des articles 1133 et 1132 du code civil, ils font valoir qu’ils n’auraient jamais souscrit ce contrat s’ils n’étaient pas assurés de l’obtention des primes énoncées au devis et dès lors entrées dans le champ contractuel.

L’erreur ainsi provoquée par la défenderesse a nécessairement vicié leur consentement.

Aux termes de leurs conclusions récapitulatives et responsives, signifiées électroniquement le 14 décembre 2023 M. [P] [V] et Mme [N] [V] maintiennent l’intégralité de leurs demandes et les moyens tels que plus avant développés.

En réponse à l’argumentation de la société ECOBATI IDF, ils font valoir qu’il n’y a jamais eu de création de leur espace sur le site EDF en leur présence, M. [C], commercial de la société, s’étant chargé de les inscrire sur le site EDF de sorte qu’il est le seul à y avoir accès et qu’ils ne peuvent, en conséquence, produire les documents réclamés par la société ECOBAT IDF.

Ils précisent que les premiers contacts directs avec EDF datent de la fin de l’année 2020, en l’absence d’information de la part de la société ECOBATI IDF.

Les demandeurs soulignent à cet égard que l’inscription sur le site a été faite par le commercial le 11/09/2019, soit après la date d’émission du devis, ce qui caractérise la faute de l’entreprise générative, à elle seule, du refus de l’octroi de la prime.

Ils rejettent pareillement le manquement allégué des services d’EDF, qui ne saurait dédouaner la société de son obligation d’information. Dans ces circonstances, elle aurait dû redoubler d’attention quant à l’élaboration du dossier et notamment s’assurer que les documents transmis étaient complets.

Ils ajoutent que la société ECOBATI IDF ne démontre pas les avoir clairement informés des conditions d’obtention de la prime, le commercial n’ayant eu de cesse de leur affirmer qu’il “s’occupait de tout”.

S’agissant des arguments opposés par la société ECOBATI IDF au vice du consentement invoqué, les époux [V] affirment que la perception effective de la prime constitue une condition de validité de leur engagement, ce que la seule présentation formelle du devis suffit à établir.

Par conclusions récapitulatives signifiées électroniquement le 12 janvier 2024 la société ECOBATI IDF demande au tribunal, au visa des articles 1112-1 et 1136 du code civil, de:

-débouter les époux [V] de leurs demandes,
-juger que la société ECOBATI IDF a parfaitement respecté ses obligations contractuelles et son obligation d’information
-condamner les époux [V] au paiement d’une indemnité de 1.500 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
-condamner les époux [V] aux entiers dépens de l’instance.

En opposition avec les alléguations des époux [V] la société ECOBATI IDF affirme avoir satisfait à son obligation d’information en justifiant :
-avoir procédé à une étude technique, commerciale et juridique préalablement à l’établissement du devis,
-avoir émis un devis mentionnant expressément les aides susceptibles d’être obtenues,
-fait intervenir le commercial sur place dès l’accord des clients pour donner suite au devis,
-avoir apportée son aide par l'intermédiaire du commercial pour la création de l’espace sur le site internet dédié à la prime EDF,
-avoir assuré la vérification par ce commercial de la régularisation de l’accord le 11 septembre 2019,
-avoir assuré le pré-remplissage de l’attestation sur l’honneur reçue par les époux [V] sur leur adresse mail, suite à la réalisation des travaux,
Elle ajoute que ladite attestation a été correctement remplie, ne restant aux clients qu’à la dater, la signer puis la revoyer aux services d’EDF accompagnée des pièces requises.

Au vu de l’ensemble de ces éléments la concluante considère avoir pleinement satisfait à son obligation d’information et rejette en conséquence toute responsabilité dans le refus d’EDF d’accorder la prime suite à l’absence de date. Elle précise en outre qu’elle entreprenait diverses démarches auprès d’EDF pour obtenir la régularisation du dossier, en vain.

La société ECOBATI IDF conteste l’affirmation des demandeurs selon laquelle seul M. [C] aurait eu seul accès à l’espace personnel de Mme [V], dès lors que créé au seul nom de cette dernière, avec son adresse mail et son numéro de dossier EDF, elle seule pouvait y accéder.

Considérant en conséquence que seule l’erreur commise par les époux [V] les a privés de la perception de la prime, la concluante conteste être tenue à une quelconque garantie à ce titre.

Elle rejette pareillement l’alléguation d’un vice du consentement d’autant que les époux [V] n’ont jamais conditionné leur accord à la perception de la prime EDF.

Ils soulignent enfin que les demandeurs n’hésitent pas à solliciter la restitution d’une somme de 16.774,50 € et ce alors même qu’ils ont bénéficié d’une subvention ANAH (5.565 €), d’un crédit d’impôts (1.712,85 €) et de la jouissance d’une pompe à chaleur neuve, depuis le 7 novembre 2019, dont ils ont indiqué être “totalement satisfaits”.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour l’exposé complet et détaillé de leurs moyens et prétentions.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 22 avril 2024. L’affaire a été fixée à l’audience du 29 mai 2024 et mise en délibéré au 25 juillet 2024, par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire il sera noté que les demandes présentées par les parties sous la forme de “JUGER” ou “CONSTATER” constituent en réalité une de reprise des moyens exprimés par les parties qui figurent inutilement dans le dispositif de leurs écritures, lequel doit être consacré exclusivement aux prétentions appelant une décision du tribunal saisi, de sorte qu’il ne saurait y être répondu.

Il résulte des pièces respectivement produites par les parties et concordantes sur ce point qu’à la demande de M. et Mme [V], la société ECOBATI IDF a établi, le 03 septembre 2019 un devis n°GI 191005 relatif à l’installation d’une pompe à chaleur.

Figure en page 4, le tableau suivant : Montant HT : 15.900,00
Montant TVA : 5.5874,50
Montant TTC à payer : 16.774,50
Subvention ANAH: -5565,00
Prime CEE: -5500,00
Crédit d’impôt : -1712,85
Investissement final: 3.996,65

Ce devis a été accepté par M. et Mme [V], le 11 septembre 2019, par le paraphe de chaque page, l’apposition de leur signature respective, précédée de la mention “Bon pour accord sous réserve de l’obtention de la subvention ANAH”.

Les travaux ont été réalisés ainsi qu’en atteste le procès-verbal de réception des travaux signé conjointement par l’installateur et Mme [V].

Une facture n°1327 a été établie le 6 novembre 2019 portant mention d’un total TTC de 16.774,50 €.

Il est pareillement établi qu’en exécution des exigences posées par EDF pour l’obtention de la prime, le commercial de la société ECOBATI IDF a créé ou aidé (selon les versions respectives des parties) les époux [V] à la mise en place de leur espace sur le site internet ENERGIE EDF.

Après divers échanges, tant avec la société ECOBATI IDF qu’avec EDF, Mme [V] apprenait, en janvier 2021 que “sa demande allait être annulée”. La demande, renouvelée et complétée, à laquelle a procédé Mme [V], était pareillement rejetée.

Au vu de ces circonstances et compte tenu des motifs exposés par EDF dans son courriel du 8 février 2021, M. et Mme [V] invoquent la responsabilité de la société ECOBATI IDF, pour n’avoir pas satisfait à son obligation de renseignement (I), subsidiairement pour avoir provoqué une erreur propre à vicier leur consentement (II).
La société ECOBATI IDF rejette toute responsabilité considérant avoir pleinement rempli ses obligations contractuelles.

I- Sur le respect de l’obligation d’information

Selon l’article 1112-1 du code civil: “Celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant. (...)
Il incombe à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que l’autre la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu’elle l’a fournie (...)”

L’ obligation générale d’information précontractuelle du livre I du Code de la consommation recouvre en premier lieu la longue liste d’informations précontractuelles qui sont exigées pour tous les contrats de vente et de services .

Ainsi l’article L.111-1 du code de la consommation, dans sa version applicable à l’espèce (soit celle issue de l’Ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 ), exige du professionnel qu’il fournisse au consommateur, de manière lisible et compréhensible, notamment, les informations suivantes :
“1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

L’article L.111-5 du même code prévoit “En cas de litige relatif à l'application des dispositions des articles L. 111-1, L. 111-2 et L. 111-4, il appartient au professionnel de prouver qu'il a exécuté ses obligations.”

En l’espèce, il n’est pas discuté que les exigences formelles relatives aux caractéristiques du bien acquis aient été satisfaites, la qualité et les performances du matériel posé n’étant en outre pas remises en cause.

Il est également justifié de ce que, conformément à ses engagements précontractuels, la société ECOBATI IDF a bien procédé à l’évaluation de l’eligibilité des époux [V] aux aides gouvernementales. Il n’est en effet pas discuté que ces derniers ont bénéficié de la subvention ANAH et du crédit d’impôt.

S’agissant de la prime EDF, il est constant que tant la demande initiale que celle renouvelée et modifiée, transmises par les époux [V], ont été rejetées.

Il ressort des termes du courriel d’EDF du 8 février 2021 que: “(...) La prime EDF05263902 de 5.500 € est refusée suite à la réception le 12/11/2019 du devis signé mais non daté.
Le service prime énergie indique que lorsqu’un devis est signé, mais non daté, il est dans l’obligation de prendre en compte la date d’émission du devis. Malheureusement, dans votre cas, votre devis a été édité avant votre inscription sur le site le 11/09/2019.
Or l’inscription sur le site doit intervenir en premier lieu (...)”.

La société ECOBATI IDF affirme avoir assisté les époux [V] dans leurs démarches administratives et leur avoir adressé les documents nécessaires pour la demande de prime, accompagnés de la liste des documents à joindre ainsi que la notice où il est clairement indiqué, parmi les pièces demandées, la copie du devis “DATE” et signé avec la mention “BON POUR ACCORD”.

La seule production d’une copie de ces documents (pièces 3 et 4 DEF) par celui qui s’en prévaut, sans aucun élément de nature à justifier de leur envoi effectif aux epoux [V], ne permet pas d’établir avec certitude la réalité de cette transmission.

Compte tenu des versions contradictoires des parties s’agissant du déroulement exact des faits et plus précisémment du rôle actif du commercial de l’entreprise, et en l’absence de tout élément confortatif pour étayer l’une ou l’autre de ces versions, ces éléments ne peuvent être pris en compte dans l’appréciation du litige.

En tout état de cause, le seul élément objectif dont il ne peut être discuté réside dans le fait qu’EDF a refusé aux époux [V] le bénéfice de la prime au seul motif que le devis transmis était signé mais non daté.

Cela laisse implicitement mais nécessairement induire que, pour le surplus, le dossier transmis était jugé satisfaisant.

Il sera rappelé que l'information exigible du vendeur doit être en relation avec l'objet des obligations nées du contrat. Une information n'est pertinente que dans la mesure où elle se rapporte à l'objet des obligations nées du contrat.

En effet, on ne saurait ,sauf à étendre démesurément le champ de l'obligation d’information, intégrer comme en faisant partie la vérification de ce que des documents, annexes à la prestation commandée et à destination d’organismes tiers, sont correctement datés et signés des clients, ce d’autant qu’il a été satisfait à l’ensemble des démarches préalables.

Les mentions concernées, seul motif du refus d’EDF, relèvent incontestablement de l’unique responsabilité des demandeurs au bénéfice de la prime, et seule l’absence de datation du document les a privés du bénéfice de cet avantage.

Les demandes formées de ce chef seront en conséquence rejetées.

II- Sur le vice du consentement

Il résulte de la combinaison de l'article L. 111-1 du code de la consommation et de l'article 1112-1 du code civil, qu'un manquement à l’obligation d’information du professionnel à l'égard du consommateur est susceptible d’entrainer l'annulation du contrat, dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants du code civil, si le défaut d'information porte sur des éléments essentiels du contrat.

Selon l’article 1132 du code civil : “L’erreur de droit ou de fait, à moins qu’elle ne soit inexcusable, est une cause de nullité du contrat lorsqu’elle porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou sur celles du cocontractant”.

L’article 1133 précise: “ Les qualités essentielles de la prestation sont celles qui ont été expressément ou tacitement convenues et en considération desquelles les parties ont contracté(...) ".

Il est classiquement admis que l' erreur ne peut alors être sanctionnée que si celui qui s’en prévaut démontre, non seulement qu'il recherchait cette qualité particulière, mais encore que son cocontractant savait qu'il en était ainsi.

Il doit s’agir d'une " qualité convenue ", c'est-à-dire incluse, fût-ce tacitement, dans l'objet de l'accord des parties.

Elle doit indiscutablement être entrée dans le champ contractuel.

A défaut d’accord exprès sur le caractère essentiel de la qualité en cause, il conviendra de recourir à différents indices tirés des circonstances de l'espèce .

Enfin, l' article 1135 alinéa 1er du code civil , après avoir posé le principe selon lequel l' erreur sur un simple motif n'est pas une cause de nullité, ajoute que ce principe est écarté lorsque les parties ont expressément fait de ce motif un élément déterminant de leur consentement.

Les deux conditions sont cumulatives, le caractère déterminant du motif ne pouvant suffire, en l'absence d'une stipulation expresse le faisant entrer dans le champ contractuel et l'érigeant en condition du contrat , à entraîner l'annulation du contrat.

Au cas d’espèce M. et Mme [V] ne sauraient valablement affirmer que l’obtention des primes ANAH et CEE(EDF) étaient un élément déterminant du contrat, alors même que leur accord au devis est précédée de la seule mention “sous réserve de l’obtention de la subvention de l’ANAH” de sorte que seule cette dernière est entrée dans le champ contractuel.

Il n’est justifié, par aucun autre élément de fait ou de droit, que l’octroi de la prime EDF ait été un élement constitutif du consentement des époux [V] au contrat.

Les demandes formées de ce chef seront en conséquence rejetées.

III- Sur les autres demandes

Conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile M. [P] [V] et Mme [N] [V] qui succombent supporteront la charge des dépens.

M. [P] [V] et Mme [N] [V] seront condamnés à payer à la société ECOBATI IDF la somme de 1.500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile.

Conformément aux dispositions de l’article 514 du code de procédure civile, le présent jugement est assorti de l’exécution provisoire de droit.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant par jugement contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au greffe après débats en audience publique;

REJETTE toutes les demandes de M. [P] [V] et Mme [N] [V];

CONDAMNE M. [P] [V] et Mme [N] [V] à verser à la société ECOBATI IDF la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

CONDAMNE M. [P] [V] et Mme [N] [V] aux entiers dépens;

RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit.

Prononcé par Madame LUNVEN, Vice-Présidente, assistée de Madame SOUMAHORO greffier, lesquelles ont signé la minute du présent jugement.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Versailles
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 22/03876
Date de la décision : 25/07/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 03/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-25;22.03876 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award