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19/07/2024 | FRANCE | N°23/00276

France | France, Tribunal judiciaire de Versailles, Deuxième chambre, 19 juillet 2024, 23/00276


Minute n°

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Deuxième Chambre
JUGEMENT du 19 JUILLET 2024

N° RG 23/00276 - N° Portalis DB22-W-B7H-RBX6

DEMANDEURS :

Monsieur [U] [N] né le 15 janvier 1956 à [Localité 3] (Algérie), de nationalité française, retraité,
représenté par Me Aude GONTHIER, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, Me Sophie PORCHEROT, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postulant

Madame [V], [F] [N] née [I] le 21 février 1955 à [Localité 6] (78), de nationalité française, retraitée,
représentée par Me Aude GO

NTHIER, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, Me Sophie PORCHEROT, avocat au barreau de VERSAILLES, avoc...

Minute n°

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Deuxième Chambre
JUGEMENT du 19 JUILLET 2024

N° RG 23/00276 - N° Portalis DB22-W-B7H-RBX6

DEMANDEURS :

Monsieur [U] [N] né le 15 janvier 1956 à [Localité 3] (Algérie), de nationalité française, retraité,
représenté par Me Aude GONTHIER, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, Me Sophie PORCHEROT, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postulant

Madame [V], [F] [N] née [I] le 21 février 1955 à [Localité 6] (78), de nationalité française, retraitée,
représentée par Me Aude GONTHIER, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, Me Sophie PORCHEROT, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postulant

DEFENDERESSE :

La société VDR ARTIZOL, SARL, dont le siège social est situé [Adresse 1], immatriculée sous le n°494 496 409 auprès du RCS d’[Localité 4], prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualité audit siège,
représentée par Me Monia ABBES, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, avocat postulant

ACTE INITIAL du 04 Janvier 2023 reçu au greffe le 12 Janvier 2023.

DÉBATS : A l'audience publique tenue le 20 Février 2024, Madame RODRIGUES, Vice-Présidente, siégeant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l’article 812 du Code de Procédure Civile, assistée de Madame SOUMAHORO, Greffier, l’affaire a été mise en délibéré au 02 mai 2024 prorogé au 07 juin 2024 puis au 19 Juillet 2024.

EXPOSE DU LITIGE 

Selon devis signé le 6 avril 2021 accepté le 14 avril 2021, Monsieur [U] [N] et Madame [V] [N] ont confié à la société à responsabilité limitée VDR ARTIZOL (ci-après « la société ARTIZOL ») l’isolation thermique par l’extérieur de leur maison située [Adresse 2] et ont réglé un premier acompte de 1.995,80 € le 28 septembre 2021 par chèque bancaire.
Le 22 juillet 2021, Monsieur [N] a informé la société VRD ARTIZOL qu'il avait pu obtenir la décision de non-opposition à déclaration préalable.

Les travaux ont débuté le 17 septembre 2021, mais ont été stoppés après une première matinée de travail, les ouvriers étant salariés par une autre société, sous-traitante et non titulaire de la qualification RGE.

Le 6 octobre 2021, une nouvelle équipe s'est présentée sur le chantier mais a stoppé les travaux après trois jours.

Le 13 octobre 2021, un ouvrier s’est présenté sur le chantier mais est reparti le jour même.

Le même jour, par lettre recommandée avec avis de réception, la société ARTIZOL a informé les époux [N] qu'elle résiliait le contrat les liant.

A la demande des époux [N], l’agence QUALICONSULT de [Localité 5] s’est rendue sur place le 22 novembre 2021 et a conclu que « les travaux d’isolation thermique par l’extérieur sur ce chantier ne sont pas en respect avec les référentiels applicables ».

Par acte extra-judiciaire du 26 janvier 2022, les époux [N] ont assigné la société ARTIZOL en référé aux fins de désignation d’un expert et Monsieur [C] a été désigné en qualité d’expert judiciaire selon ordonnance du 3 mars 2022.

Celui-ci a déposé son rapport le 30 novembre 2022.

Aucune solution amiable n’ayant pu être trouvée entre les parties, les époux [N] ont par exploit du 4 janvier 2023, fait assigner la société ARTIZOL devant la présente juridiction aux fins d’indemnisation de leur entier préjudice.

Aux termes de leurs dernières écritures notifiées par le RPVA le 22 juin 2023, les époux [N] réclament de voir :

Vu les dispositions des articles 1231-1 et suivants du code civil,

Vu les pièces communiquées et notamment le rapport d’expertise judiciaire

- Déclarer Monsieur [U] [N] et Madame [V] [N] recevables et bien fondés en leurs demandes, fins et conclusions

- Dire et juger que les [N] subissent un préjudice en lien direct et certain avec les manquements contractuels de la société VDR ARTIZOL

- Condamner la société ARTIZOL VDR à payer à Monsieur [U] [N] et Madame [V] [N] les sommes de :

- 1.995,80 € TTC au titre de la restitution de l’acompte
- 14.553,53 € TTC au titre de la remise en état (dépose blocs + ravalement car murs endommagés)
- 3.000 € au titre du trouble de jouissance
- 3.000 € au titre de leur préjudice moral

- Débouter la société ARTIZOL VDR de l’intégralité de ses demandes

- Dire et juger que l’exécution provisoire n’étant pas incompatible avec la nature de l’affaire pendante par-devant le Tribunal de céans, elle sera ordonnée dans la décision à intervenir

- Condamner la société ARTIZOL VDR à payer à Monsieur [U] [N] et Madame [V] [N] la somme de 6.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile

- Condamner la société ARTIZOL VDR aux entiers dépens, en ce compris les frais d’expertise à hauteur de 4.000 €, ainsi qu’aux éventuels frais d’exécution forcée à venir.


Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 13 octobre 2023, la société ARTIZOL demande au tribunal de :

Vu les dispositions des articles 1101 et suivants du Code civil,
Vu les dispositions des articles 1217 et suivants du Code civil,
Vu les dispositions des articles 1231 et suivants du Code civil,
Vu la jurisprudence,
Vu les pièces versées aux débats

A TITRE PRINCIPAL
- DEBOUTER les époux [N] de leurs demandes, fins et conclusions,

A TITRE RECONVENTIONNEL
- ORDONNER la résolution du contrat de prestations de services conclu le 6 avril 2021 entre les parties

- CONDAMNER les époux [N] à régler à la société ARTIZOL la somme de 30.554,85 euros à titre de dommages intérêts.

EN TOUT ETAT DE CAUSE

- CONDAMNER les époux [N] aux entiers dépens.

- CONDAMNER les époux [N] à régler à la société ARTIZOL, la somme de 7.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

- DIRE ET JUGER que l’exécution provisoire n’étant pas incompatible avec la nature de l’affaire pendante par-devant le Tribunal de céans, elle sera ordonnée dans la décision à intervenir.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux écritures des parties susvisées quant à l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens respectifs.
 
L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 décembre 2023. L'affaire a été fixée à l'audience du 20 février 2024 et mise en délibéré au 2 mai 2024 prorogé au 19 juillet 2024 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION
 
A titre préliminaire, il est rappelé que :
– d’une part, en vertu de l’article 768 du Code de procédure civile, le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion,
– d’autre part, les demandes tendant à voir « constater » ou « dire et juger », lorsqu'elles développent en réalité des moyens, ne constituent pas des prétentions au sens de l’article 4 de ce même code.

Sur l'exécution du contrat :

Les demandeurs font valoir que le chantier a tout d’abord subi un retard conséquentqui leur a été préjudiciable ; que le devis ayant été signé le 13 avril 2021, en application des dispositions de l’article L216-1 du Code de la consommation, la date d’achèvement des travaux aurait dû être le 14 mai 2021 ; qu'il incombait à la société ARTIZOL de les avertir de la nécessité d’obtenir une déclaration préalable de travaux, alors qu'ils ont eu cette information par un voisin, le 3 août 2021, à la réception du matériel, de telle sorte que le retard pour commencer les travaux est exclusivement imputable à la société ARTIZOL qui a manqué à son obligation de conseil.

Ils affirment, par ailleurs, que le chantier a ensuite subi une désorganisation totale avec des équipes qui se sont présentées de façon ponctuelle sans assurer un quelconque suivi du chantier dans la durée, engendrant nouveau un retard conséquent ; que le travail effectué a été mal réalisé de nombreux désordres ayant été relevés tant par l’expert amiable que par l’expert judiciaire

Ils soulignent que la recherche de la cause de cette situation a mis en évidence l’absence de documents d’étude et planning d’exécution lesquels, selon l'expert, doivent normalement être établis par l’entreprise en charge de l’exécution à destination du maître d’ouvrage avant tout démarrage d’exécution ; que l'expert judiciaire impute les désordres allégués au manque de préparation et de conduite du chantier, par la société ARTIZOL et à une relation maître d’ouvrage- entreprise difficile ; que la société ARTIZOL a fait appel à des sous-traitants ne disposant pas eux-mêmes de la certification RGE, et ce, en contravention du décret n°20166235 du 1er mars 2016 modifiant l’article 46 AX de l’annexe III au code général des impôts relatif au crédit d’impôt pour la transition énergétique.
Ils soulignent, encore que l'expert a noté que l’abandon du chantier, avant réception au 13 octobre 2021, constituait en soi une situation de non-conformité et a constaté différents désordres qui auraient constitués autant de malfaçons une fois le chantier réceptionné.

En réplique aux arguments de la société ARTIZOL qui entend se prévaloir du rapport établi par leur propre assureur, les époux [N] affirment que cet expert a pris pour argent comptant le contenu de la lettre de résiliation ainsi que d’autres affirmations erronées, alors que ce rapport a, par la suite, été contredit par le rapport de QUALICONSULT et par le rapport d’expertise judiciaire.

Les demandeurs reprochent, encore, à la société ARTIZOL d'avoir abandonné le chantier et de l'avoir résilié de façon abusive et brutale, alors que les arguments développés dans sa lettre de résiliation du 13 octobre 2021 ainsi qu’au cours des opérations d’expertise ne résistent pas à l’analyse.

Ils indiquent, ainsi, que les attestations communiquées par la société ARTIZOL dans le cadre de l’expertise judiciaire, afin d’établir que les époux [N] auraient perturbé le bon déroulement du chantier sont dénuées de force probante ; que la société ARTIZOL ne leur a jamais demandé de laisser libre accès aux sanitaires ni avant ni pendant l’exécution des travaux, ce point n’ayant jamais été évoqué ; qu'au demeurant, ils n’ont jamais refusé à un ouvrier d’accéder à leurs sanitaires et avaient mis à la disposition des ouvriers, des tables, des chaises et un robinet avec du savon et des serviettes.

En défense, la société ARTIZOL conteste être responsable du retard dans le démarrage des travaux dans la mesure où ce sont les époux [N] qui ont omis de faire une déclaration préalable de travaux, alors que des matériels ont été livrés en juillet 2021.

Elle soutient, encore, qu'elle n'a pas pu réaliser la prestation promise compte tenu du comportement dénigrant et malveillant de Monsieur [N] et des exigences accrues et disproportionnées des époux [N] dès le début du chantier qui sont à l’origine directe des conflits nés pendant le chantier et qui l'ont conduite à abandonner le chantier, ce que l'expert reconnaît dans son rapport et ce que corroborent les attestations des ouvriers qu'elle verse aux débats.

Elle indique, encore, qu'elle a déployé son chantier comme elle a l’habitude de le faire dans le cadre des maisons individuelles ; que contrairement à la position de l’expert judiciaire sur le sujet, elle n’a pas omis de ne pas donner d’instructions à ses ouvriers qui recevaient un bon de travail.

Elle souligne, également, que l’étude d’un chantier n’est pas obligatoire pour un particulier alors que de surcroît, en l’espèce, il n’y avait de coordination à faire entre plusieurs corps d’état.

Elle affirme qu’elle n’a jamais eu l’intention de stopper le chantier mais qu'elle n’a pas eu le choix, dans la mesure où les époux [N] n’ont pas respecté eux-mêmes leurs obligations contractuelles consistant à lui laisser réaliser le chantier ; qu'ainsi l’exception d'inexécution n’est pas constituée en l’espèce.

Elle souligne, enfin, les conclusions du rapport de l’expert diligenté par l’assureur des demandeurs selon lesquelles :

« …Nous avons expliqué à Monsieur [N] que les travaux réalisés et non terminés, ne nous faisaient pas apprécier d’anomalies. Nous avons expliqué que le calepinage des plaques de polystyrène mises en place, semblait avoir été réalisé correctement. Nous avons précisé à Monsieur [N] que le chantier n’ayant pas été réceptionné, il n’y avait pas de responsabilité civile décennale et que de toutes façons les désordres énoncés n’étaient pas de nature décennale. »

Elle soutient que tant qu’un chantier n’est pas terminé, il n’est pas possible de juger du travail réalisé, chaque réalisation pouvant faire l’objet d’ajustement ou de modifications.

***

Les articles 1103 et 1104 du Code civil posent pour principe que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi.

Selon l'article 1231-1 du code civil :
« Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure. »
 
 L'article 1353 du même code impose à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Ainsi, conformément aux règles de preuve, il incombe à la victime, demanderesse à l'action en responsabilité, de rapporter la preuve, par tous moyens, de l'existence de son préjudice, en lien avec le manquement contractuel ou la faute retenue, et de fournir au tribunal les éléments propres à en permettre l'évaluation.

Par ailleurs, selon l'article 1219 du Code civil : « Une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave ».
 
Enfin, aux termes de l'article 1220 du Code civil : « Une partie peut suspendre l'exécution de son obligation dès lors qu'il est manifeste que son cocontractant ne s'exécutera pas à l'échéance et que  les conséquences de cette inexécution sont suffisamment graves pour elle. Cette suspension doit être notifiée dans les meilleurs délais ».
 
Il appartient, en toutes hypothèses, en application des dispositions de l'article 1353 du même code, à celui qui invoque l'exception d'inexécution d'établir la réalité de l'inexécution alléguée.

***

En l'espèce, la société ARTIZOL fait valoir qu'elle est fondée à invoquer l'exception d'inexécution en raison du comportement des époux [N].

Pour autant force est de constater qu'à l'exception des reproches contenus dans le courrier du 13 octobre 2021 destiné à acter la fin de la relation contractuelle, la société ARTIZOL n'a jamais exprimé à ses co-contractants, au cours de l'exécution du contrat, que leur comportement était fautif.

Par ailleurs, il convient de noter que les deux attestations produites n'ont pas de caractère suffisamment probant.

D'une part, quand bien même il est indiqué qu'il n'existe aucun lien de subordination entre les auteurs des attestations et la société ARTIZOL, il est tout de même permis d'en douter s'agissant d'ouvriers intervenus dans le cadre du contrat liant cette dernière aux époux [N].

D'autre part, la signature figurant sur l'attestation de Monsieur [B] ne correspond pas à celle figurant sur la copie de la pièce d'identité versée au débat, tandis que la copie du titre de séjour de Monsieur [H] est totalement illisible, de telle sorte qu'il est impossible, pour la présente juridiction, de vérifier l'identité des attestataires.

Au demeurant, ces pièces ne sont absolument pas circonstanciées et ne font qu'égrener des affirmations factuelles non datées.

De surcroît, à titre surabondant, il convient de rappeler que, sauf meilleur accord, c'est à l'employeur, et non au maître de l'ouvrage, de prévoir des lieux d'aisance et des vestiaires pour les ouvriers intervenant sur le chantier.

Enfin, il peut être justifier de fermer à clefs son portail, pour des raisons de sécurité.

Il résulte, ainsi, de l'ensemble de ses éléments, que la société ARTIZOL est mal fondée à opposer aux époux [N] une exception d'inexécution.

Au soutien de leurs propres demandes, les époux [N] invoquent les constatations et les conclusions du rapport d'expertise judiciaire.

L'expert a ainsi noté :
« En constat visuel :
 
Il s'agit d'une opération de travaux d'isolation thermique par l'extérieur (ITE) non terminée. Seules les façades nord-est, sud-est, et nord-ouest sont partiellement recouvertes d'isolants thermiques.
Suite à la rupture du contrat à l'initiative de la société ARTIZOL, les travaux n'ont pas été pas terminés. De fait, ils ne sont donc pas réceptionnés et sont donc non conformes aux règles de l'art.
 
Dans l'état actuel, hormis l'aspect inachevé, nous avons examiné les travaux réalisés et avons pu relever quelques points particuliers d'exécution non conformes au regard de la documentation de référence et directives techniques de pose des fabricants de matériaux.
Une fois la réception prononcée ces points particuliers auraient caractérisé des malfaçons et non- conformités.
 
✓ Les profilés installés en partie basse pour recevoir les panneaux d'isolant sont des profilés de départ avec goutte d'eau sur lequel reste à installer l'entoilage. Cet entoilage de finition permet la protection anti UV demandée par le fabricant des plaques de polystyrène afin d'éviter une détérioration des plaques de polystyréne. Aucun bachage de protection ni entoilage n'est pas installé. La garantie du produit est donc perdue

✓ Les hauteurs des profilés se trouvent bien à une hauteur minimum de 2 cm par rapport au sol bois ou béton. Pour les sols végétaux, la hauteur minimum doit être de 15cm.
Bien qu'une partie des profilés de départ soit correctement positionnés, nous avons relevé les anomalies suivantes :
 
Sur la façade sud-ouest, la hauteur du profilé de départ est à 2 cm du sol, conforme pour une surface béton ou carrelage. Cependant, les pavés reposent directement sur la terre végétale, hors disposition constructive cohérente avec un support dalle béton cela implique un positionnement à une hauteur de 15 cm et non de 2 cm. Par ailleurs le demandeur signale que cette zone présente un flash qui crée une retenue d'eau lors de forte pluie. Cette particularité aurait dû être identifiée en phase préparatoire du chantier d'isolation.

Sur la façade Nord-Ouest, à gauche du robinet RDC, le profité est posé à 10 cm d'un sol végétal avec des cailloux au lieu de 15 cm minimum.
 
✓ Au niveau de l'isolation thermique et du positionnement des plaques, en dehors des dispositions réglementaires, nous avons relevé les anomalies suivantes :
 
Façade Nord-Ouest :
 
Nous avons constaté le remplissage d'un vide entre la plaque et le mur comblé à la colle, côté droit de la fenêtre et sur l'appui de fenêtre de la salle de séjour.
Le remplissage par colle n'est pas autorisé.
La société ARTIZOL a indiqué qu'il s'agissait d'un débordement de colle et non un comblement.
Conformément au cahier du CSTB 3035 V2 de juillet 2013, selon le mode de collage choisi (...) un espace entre 2cm et 5 cm entre la colle et le bord de la plaque doit exister afin d'éviter la pénétration de la colle dans les joints entre plaques.
 Le débordement est donc un défaut de mise en œuvre de la colle sur la plaque d'isolation, non conforme aux règles de l'art.
Suite au décollement d'une plaque pour vérifier la répartition de la colle nous avons constaté un collage avec un point unique de colle en son centre et en bord de plaque.
La fixation de la plaque peut être faite selon différentes configuration, répartis uniformément sur la plaque répartie avec une bande laissée libre sur le pourtour, ce qui n'est pas le cas.
Bien que le chantier ne soit pas terminé, une plaque d'isolant, au milieu d'autres, n'est pas collée. Cette situation témoigne d'un manque de sérieux dans la mise en place des plaques La société ARTIZOL nous précise qu'il s'agit d'une prestation non finie et qu'un auto contrôle est prévu au moment du chevillage.
La distance réglementaire de 200mm sur le polystyrène découpé au niveau du linteau d'une porte ou d'une fenêtre n'est pas respectée. La distance mesurée est de 140mm au lieu des 200 mm normatifs  
La découpe des panneaux n'est pas linéaire. Le décalage entre deux panneaux n'est pas autorisé. Cette disposition n'est pas autorisée pour la pose des panneaux

Façade Nord-Est :
 
Rattrapage d'un manque de panneau par ajout d'un élément de faible épaisseur sur le côté gauche de la fenêtre. Cette disposition n'est pas autorisée pour la pose des panneaux

Quel que soit la façade :
 
Sur les façades recouvertes des panneaux de polystyrène d'isolation Façadbox 31 de marque ISOBOX, il n'est pas constaté la présence de protections ou de finitions afin d'éviter l'expo aux UV. Cette disposition est précisée dans la fiche technique du produit d'isolation polystyrène gris de marque ISOBOX.
Cette protection obligatoire, demandée par le fournisseur, est nécessaire sur ce type de polystyrène gris afin d'éviter toute dégradation du produit. Un non-respect de cette disposition rendra caduc la garantie du fournisseur.

Nous avons noté aussi une absence partielle de plots de fixation afin de sécuriser le maintien des plaques collés sur les façades.
 
✓ Exécution du chantier ;
 
La société ARTIZOL nous a déclaré ne pas avoir fait d'étude ou de plan préalable à l'exécution des travaux donnant les indications (calepinages panneaux, coupes, positionnement des profilés, ...) pour une réalisation conforme de l'isolation thermique par l'extérieur. Seul le devis signé liste les produits et travaux envisagés.
De ce fait, les ouvriers en charge de la réalisation des travaux n'ont pas de document directeur des taches à exécuter.
De leur côté M et Mme [N] n'ont pas souscrit d'assurance Dommage Ouvrage et ont établi tardivement une déclaration de travaux auprès de leur mairie ce qui a retardé le début des travaux.
D'après les documents et photos transmises, les relations entre M et Mme [N] et la société ARTIZOL ont été difficiles :
 La société ARTIZOL dénonce son contrat suite à une ingérence M Mme [N] dans l'exécution du chantier notamment vis-à-vis de son personnel.
 
Du fait de l'abandon du chantier par la société ARTIZOL :
 
• Le câble électrique principal d'alimentation a été détaché et laissé décrocher
• Les câbles d'internet, du téléphone sont encore suspendus au mur
• Les gouttières n'ont pas été remises en place.
• Les palissades de la terrasse ont été démontées et sont mal remises.
• Les barreaux en fer forgé des rambardes ont été sciés.
• La lampe d'extérieur n'a pas été remise après démontage. Le câble est coupé.
•Les grilles d'aération ont été enlevées et non remises en place.
 
Tels sont les constats visibles des malfaçons ou non façons effectués.»

 
En page 17 de son rapport au paragraphe « ANALYSE », l'expert a retenu les éléments suivants :

« les constats effectués lors de l'accedit du 11/05/2022, nous ont permis d'identifier quelques anomalies d'exécution qui se seraient traduit en malfaçons et/ou non-conformités une fois le chanter réceptionné, faute de reprise.
 
La recherche de la cause de cette situation a mis en évidence l'absence de documents d'étude et planning d'exécution normalement par l'entreprise en charge de l'exécution, dans notre cas la société ARTIZOL, à destination du maître d'ouvrage, M Mme [N], avant tout démarrage d'exécution
 
Cette étape est utile à plusieurs titres. Elle permet de présenter au maître d'ouvrage le futur chantier, d'asseoir une relation de confiance avec le maître d'ouvrage, d'identifier les singularités d'un chantier et d'avoir un document de référence à destination des ouvriers chargé de la pose.
 
La société ARTIZOL nous a indiqué qu'elle ne faisait jamais ce type de document car cela coûterait trop cher. Cette disposition constitue néanmoins une faute de la part de la société ARTIZOL laissant livrés à eux-mêmes les ouvriers, sans consignes d'exécution.
 
De même, aucun planning d'exécution n'a été établi.
 
Durant la mission d'expertise, la société ARTIZOL nous a fourni, à notre demande, les fiches techniques des produits mis en œuvre, documents faisant normalement partie de l'étude technique. 
Sans a minima un plan, il n'a pas été possible au maître d'ouvrage, M Mme [N]. D’examiner et de faire d'éventuelles observations pouvant éviter tout désaccord ultérieur.
M Mme [N] étant le maître d'ouvrage de l'opération d'ITE, plusieurs obligations sont de son ressort.
 

Principalement dans notre cas, nous avons :

L'établissement et l'obtention de la déclaration de travaux
La souscription d'une assurance dommages-ouvrage :
L'affichage réglementaire en limite de propriété des travaux envisagés pour le recours de tiers.
Mise à disposition des énergies (eau, électricité) et d'une évacuation des eaux usées à l'attention des entreprises intervenantes.
 
Du fait de l'absence de déclaration de travaux, imputable totalement au maître d'ouvrage, le délai d'instruction par le service urbanisme laissait largement le temps nécessaire à la société ARTIZOL pour mener à bien sa phase d'étude d'exécution, ce qui n'a pas été le cas.
De plus, l'absence de déclaration de travaux ne peut être reprochée à la société ARTIZOL, même dans le cadre d'un devoir de conseil, car la déclaration de travaux, comme le permis construire, sont des dispositions réglementaires à charge du maître d'ouvrage. »
L'expert judiciaire précise, encore, que :

« En phase exécution, M [N] est intervenu à plusieurs reprises auprès des ouvriers, se, se substituant ainsi à la société ARTIZOL, pour leur faire part de ses directives au regard de la réalisation des travaux, alertant à plusieurs reprise la société ARTIZOL de ce fait.
Sans constat de notre part, suite aux différents courriers échanges entre les parties (courriers, constat d'huissier, photos) nous comprenons que ce chantier ne s'est pas déroulé de façon sereine.
Il a été caractérisé par une exécution discontinue des travaux (17/9/2021-4h, 6/10/2021 au 8/10/2021, 13/10/2021-1 journée) et des alertes successives auprès de la société ARTIZOL
 
(...)
 
La société ARTIZOL dans un contexte de fortes divergences avec M Mme [N] a donc décidé unilatéralement d'abandonner le chantier non terminé, laissant en l'état le pavillon dans lequel nous avons pu le constater.
Le choix de la société ARTIZOL de quitter le chantier et laissant les travaux non terminés a plusieurs impacts sur la situation de M Mme [N] :
• La valeur immobilière de leur pavillon en l'état est fortement dévaluée
• Les aides à l'isolation par l'extérieur de 2021 sont susceptibles d'être perdus en fonction des dates des aides d'état. En effet, les critères d'attribution de MaPrimeRenov et des Certificats d'Economie d'Energie (CEE) peuvent être remis en cause en fonction des évolutions législatives entre 2021 et 2022 ou années ultérieures.
• Toute isolation thermique par l'extérieur ne peut s'envisager qu'après dépose des polystyrènes installés, ceux-ci n'ayant pas été protégés contre les rayonnements solaires. Cette absence de protection anti UV exclut de fait la garantie fabricant.
 
Même si le relationnel avec M Mme [N] s'est avéré difficile, nous identifions l'origine principale des désordres sur l'absence d'étude d'exécution et de préparation de chantier ainsi que d'une conduite et un suivi déficients.
Cela a conduit les équipes de travaux successive à mettre en œuvre une isolation thermique par l'extérieure selon leurs habitudes incompatibles avec la réglementation et les règles de l'art comme nous avons pu le constater.»

L'expert indique que « les désordres allégués existant sont le résultat d'un manque de préparation et de conduite du chantier, par la société ARTIZOL et d'une relation maître d'ouvrage entreprise difficile.
 Cela s'est traduit, sans mise en garde préalable du maître d'ouvrage, par l'abandon, suite à résiliation unilatéral du chantier, par la société ARTIZOL. »

S'agissant de l'imputabilité, s’il précise qu'elle repose, pour une très faible part sur les époux [N], en raison de l'absence de déclaration de travaux, disposition réglementaire à la charge exclusive du maître d'ouvrage décalant de fait le début des travaux, il ajouté qu’elle tient pour une très forte partau comportement de la société ARTIZOL en raison :

- du manquement à son engagement contractuel (devis signé) de réalisation des travaux d'isolation thermique par l'extérieur jusqu'à son terme et abandon en cours de chantier,
- d'une une gestion inadaptée et désordonnée de ce chantier ayant généré un mécontentement du maître d'ouvrage (stockage échafaudage, matériaux non protégé. Ouvriers ne sachant pas quoi faire...).
- de l'absence d'une étude de l'entreprise pour le maître d'ouvrage afin que celui-ci puisse formuler d'éventuelles remarques et observations étant précisé que même s'il s'agit d'un particulier, l'étude d'un chantier, qui plus est pour une entreprise intervenant depuis longtemps dans ce domaine, reste un minimum pour éviter tout désaccord.
- de l'emploi de sous-traitances non certifié RGE, donc non qualifiées pour la réalisation de ce type de travaux.

L'expert conclut au fait que les échanges entre les parties montrent une insuffisance de la société ARTIZOL dans la gestion du chantier (pas de suivi, équipe livrée à elle-même sans consigne précise) qui s'est traduit par une exigence de plus en plus accrue des époux [N] envers la société ARTIZOL et un comportement inadapté envers ses ouvriers.

Il souligne que l'abandon du chantier avant réception constitue en soi une situation de non- conformité et que cette situation lui a permis de constater les différents désordres qui auraient constitués autant de malfaçons une fois le chantier réceptionné ; qu'un plan d'exécution avec le calepinage des plaques et les différentes instructions particulières d'implantation est un minimum pour que les ouvriers puissent exécuter les travaux conformément aux règles de l'art et la réglementation en vigueur ; que cette disposition n'a pas été retenue par la société ARTIZOL si bien que les ouvriers se sont retrouvés sans directives et sans encadrement, situation préjudiciable à une bonne exécution des travaux.
 
L'expert termine en précisant que « la problématique de ce dossier résulte d'un manque de prise en considération du client particulier et d'une gestion insuffisante par l'entreprise ARTIZOL qui a conduit à un dialogue difficile entre les parties » et « faute de redresser la situation, la société ARTIZOL a quitté le chantier laissant une situation désastreuse pour M et Mme [N] ».

Il résulte, dès lors, de l'ensemble de ces éléments, indépendamment de la question de la responsabilité du retard dans le commencement des travaux qui ,’a, somme toute, au regard de la situation actuelle qu'une importance modérée, que la société ARTIZOL a très clairement engagé sa responsabilité en raison d'une insuffisance de la gestion du chantier, de l'abandon fautif de celui-ci et, surtout, de malfaçons ou non façons importantes.

Ainsi, s'agissant de ce dernier point, contrairement aux affirmations de la défenderesse selon lesquelles, il aurait été remédié aux désordres dans la continuation du chantier, il apparaît qu'en réalité les non façons et malfaçons étaient déjà installées et définitives et auraient fait fait perdre la garantie du fabricant aux époux [N].

Enfin, la société ARTIZOL ne peut valablement invoquer le comportement inadapté de ses co-contractants dans la mesure où il apparaît, en réalité, que celui-ci résulte directement de la défaillance de la défenderesse dans la gestion du chantier qui a insécurisé les époux [N].

Sur le préjudice des époux [N] :

Les demandeurs invoquent l'existence d’un préjudice financier correspond à la restitution de l’acompte versé, soit 1.995,80 € TTC et aux travaux de remise en état soit 14.553,53 € TTC comprenant le coût de la dépose des blocs de polystyrènes et du ravalement.

S'agissant de la restitution de l’acompte, ils rappellent que la société ARTIZOL a abandonné le chantier sans aller au bout de sa prestation.

S'agissant du coût du ravalement, ils soulignent que la dépose des blocs de polystyrène va endommager la façade de la maison puisque ces blocs ont été collés et vissés avec des matériaux censés résister dans le temps ; qu'ils souhaitent simplement la remise en état de leur pavillon.

Ils font encore valoir subir un trouble de jouissance dans la mesure où le matériel entreposé pendant plusieurs mois dans leur jardin, les a empêchés de jouir de celui-ci du 3 juillet au 16 novembre 2021 et où depuis plus de dix-huit mois, la façade de leur maison est en partie recouverte des blocs de polystyrène et fortement enlaidie.

Ils indiquent, qu'en outre, en cas de fortes chaleurs, les plaques de polystyrène et la colle dégagent des odeurs très désagréables qui viennent encore aggraver leur trouble de jouissance, les privant de l’utilisation de leur terrasse et qu'en raison de l’abandon de chantier, ils souffrent des désagréments suivants :

▪ Le câble électrique principal d'alimentation a été détaché et laissé décrocher.
▪ Les câbles d'Internet, du téléphone sont encore suspendus au mur
▪ Les gouttières n’ont pas été remises en place.
▪ Les palissades de la terrasse ont été démontées et sont mal remises.
▪ Les barreaux en fer forgé des rambardes ont été sciés.
▪ La lampe d'extérieur n'a pas été remise après démontage. Le câble est coupé.
▪ Les grilles d'aération ont été enlevées et non remis.

Ils précisent également qu'ils ont souhaité réaliser l’isolation thermique de leur maison dans la perspective de la revendre plus facilement et dans de meilleures conditions alors qu'actuellement leur maison est invendable.

Ils soutiennent subir, enfin, un préjudice moral résultant de la situation a été très désagréable à vivre tant au cours du chantier qu’au cours des opérations d’expertise et encore dans le cadre de cette instance et que cette situation a fini par affecter leur santé.

En défense, la société ARTIZOL fait valoir que les époux [N] ont décidé de se faire « offrir » le ravalement de la façade de leur maison par elle en prétendant qu'elle aurait commis une faute et qu’elle devrait réparer ; qu'ils ne donnent aucun fondement à leur demande ; qu'en aucun cas, l’expert judiciaire ne préconise qu’elle prenne en charge les frais de ravalement de la maison des époux [N], alors qu'elle a été engagée pour réaliser des travaux d’isolation thermique par l’extérieur et non de procéder au ravalement de la maison.

Elle rappelle qu'elle n'a pas pu achever le chantier en raison des exigences accrues et disproportionnées des époux [N] et du comportement dénigrant de Monsieur [N] envers les ouvriers ; que le ravalement n’était pas l’objet du contrat conclu entre les parties.

Sur le remboursement de l'acompte, la société ARTIZOL rappelle qu'un acompte est un premier versement sur le prix total de la prestation ; que la demande de remboursement d’un acompte doit être motivée par une absence de réalisation des prestations commandées alors qu'elle a commencé l’exécution des prestations qu'elle n’a pas pu terminer à cause du comportement des époux [N].

Elle précise, ainsi, avoir commandé, le 14 septembre 2021, auprès de la société PEINTEA, le matériel utile et, par la suite, du matériel complémentaire ; qu'elle est intervenue sur site le 17 septembre 2021, du 6 au 8 octobre 2021 et le 13 octobre 2021 soit au total 5 jours ; que l’échafaudage installé et la machine à couper le polystyrène ont été immobilisés pendant 42 jours ; que si l’expert judiciaire a rejeté le montant des frais qu'elle a supportés au motif que l’échafaudage n’était pas conforme en raison de l’absence de plinthes et de garde-corps par endroit, ce n'est pas une raison de la pas facturer cet équipement.

Elle souligne que Monsieur [N] a refusé catégoriquement de lui restituer son matériel pendant plusieurs semaines et qu'elle a dû faire une déclaration à son assureur pour l’avertir de la situation et s'adresser aux services d’un huissier pour faire constater la situation.

Concernant les troubles de jouissance et le préjudice moral allégué par les époux [N], elle rappelle, encore une fois, que c’est le comportement de Monsieur [N], qui n’a eu de cesser le perturber le chantier.

Elle précise que lorsqu'elle s’est retrouvée dans cette situation de blocage, elle a demandé à un huissier de venir faire constater l’impossibilité pour elle d’accéder au chantier et de récupérer au moins l’échafaudage.

***

Selon l'article 1231-1 du code civil :
« Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure. »
 
L’article 1231-2 du même code dispose : « Les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé, ».
 
Conformément aux règles de preuve, il incombe à la victime, demanderesse à l'action en responsabilité, de rapporter la preuve, par tous moyens, de l'existence de son préjudice, en lien avec le manquement contractuel ou la faute retenue, et de fournir au tribunal les éléments propres à en permettre l'évaluation.

La réparation du dommage doit obéir au principe de la réparation intégrale, qui implique de remettre la victime en l'état, sans qu'il n'en résulte pour elle ni perte, ni profit.

Dans son rapport, l'expert rappelle que le devis de la société ARTIZOL prévoyait la perception par délégation de la prime CEE de 5.465.92€,les époux [N] devant également percevoir environ 7 500€ de MaPrimeRenov, de telle sorte que le reste à payer était de 2.853,00€TTC dont 1.995.80 €TTC, soit 66%, a été versé à la société ARTIZOL conformément aux conditions de règlement du devis.

C'est à juste titre qu'il souligne que ce reste à payer, qui ne constitue ni acompte ni arrhes, est dû pour un chantier réceptionné ce qui n'est pas le cas en l'espèce, si bien que la société ARTIZOL est donc tenue de restituer cette somme aux époux [N].

L'expert retient encore, s'agissant spécifiquement des travaux de remise en état, qu'aucune entreprise d'isolation thermique par l'extérieur n'a accepté de poursuivre les travaux de la société ARTIZOL, une garantie décennale étantt en jeu ; que les travaux consisteront à déposer les isolants déjà installés avant d'envisager la mise en place de nouveaux isolants ou la réalisation d'un ravalement, moyennant un coût de 14.553.53 € TTC.

La société ARTIZOL conteste la nécessité de ces travaux, soutenant qu'ils reviendraient à permettre aux demandeurs de disposer, gratuitement, d'un ravalement.

Pour autant, tant les constatations de l'expert que les photographies des façades de l'immeuble appartenant aux époux [N] établissent que la remise en état des lieux impose l'arrachage des blocs de polystyrène et que cet arrachage endommagera nécessairement l'enduit des façades.

Ainsi, il apparaît que le ravalement ne constitue pas un enrichissement injustifié des époux [N] mais constitue la seule façon de replacer ceux-ci dans l'état antérieur au fait dommageable.

Il convient, en conséquence, de leur allouer la somme de 14.553.53 € TTC au titre des frais de remise en état.
 
Enfin, les préjudices de jouissance et moral des époux [N], directement imputables à la mauvaise exécution des travaux d'isolation réalisés par la société ARTIZOL, sont incontestables.

Il convient, à ce titre de leur allouer la somme de 2.000 € pour chacun de ces préjudices.

Sur les demandes reconventionnelles de la société ARTIZOL :

La société ARTIZOL soutient qu'elle n’a jamais eu l’intention de stopper le chantier car elle savait que de l’arrêter lui ferait perdre de l’argent mais elle n’a pas eu le choix ; que la tension exercée par Monsieur [N] était trop lourde pour les ouvriers de sorte qu'il était impossible de poursuivre le chantier en l’état ; qu'elle a donc suspendu le chantier car les époux [N] ne respectaient pas leur obligation contractuelle consistant à la laisser réaliser le chantier.
Elle sollicite, ainsi, que le tribunal ordonne la résolution judiciaire du contrat de prestations conclu entre les parties et matérialisé par le devis du 6 avril 2021 outre la condamnation des époux [N] à lui payer la somme de 30.554,85 euros à titre de réparation.

En défense, Monsieur et Madame [N] font valoir que si résolution judiciaire il devait y avoir, celle-ci serait nécessairement prononcée aux torts exclusifs de la société ARTIZOL ; que les griefs tenant à leur comportement, postérieurement à la résiliation du contrat par celle-ci, ne sont pas de nature à justifier cette résiliation ni la résolution judiciaire désormais sollicitée par la défenderesse.

Ils soulignent, qu'en tout état de cause, les allégations d’ARTIZOL sont fausses et ne reposent sur aucun élément probant ; que la société ARTIZOL ne justifie pas d’un quelconque préjudice ; qu'ainsi, elle invoque une période d’immobilisation de 42 jours pour l'échafaudage, alors que dès le 12 novembre 2021, elle pouvait récupérer l’échafaudage et en avait été avisée par SMS du 10 novembre 2021 ; de sorte qu'à supposer qu’un préjudice ait pu résulter de l’immobilisation de l’échafaudage, celle-ci ne dépasse pas 25 jours ; qu'au demeurant, la société ARTIZOL ne justifie pas de facture de location d’échafaudage.

Ils expliquent, encore, que c’est leur assureur protection juridique qui leur a conseillé de ne pas restituer l’échafaudage car compte tenu de l’expertise qui allait avoir lieu, les échafaudages seraient nécessaire pour examiner les désordres.

S'agissant de la machine à couper le polystyrène, ils relèvent que celle-ci peut être achetée au prix de 682,70 € et le fil de rechange coût 9.95 €, soit un total de 692,65 €, alors que, là encore, aucune facture n’est communiquée, et que la pièce adverse n° 36 n’est nullement probante.

Concernant le polystyrène et les fournitures, ils précisent que la totalité des fournitures et du matériel a été restituée à ARTIZOL dans l’état dans lequel ils avaient été laissés.

Enfin, ils rappellent que dans le cadre des opérations d’expertise, la société ARTIZOL avait invoqué un manque à gagner lié à la non perception de la PRIMERENOV, au CEE et au RAC et affirment que ce n’est pas ainsi que s’apprécie le préjudice financier d’une société pour laquelle il convient de raisonner en termes de perte bénéfice et non de chiffre d’affaires ; que la société ARTIZOL est seule responsable de son éventuel préjudice puisqu'elle a décidé d’abandonner le chantier ; que d'ailleurs l’expert judiciaire a écarté ces demandes.

***

L’article 1217 du Code civil dispose que :

« La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :

- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;
- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;
- obtenir une réduction du prix ;
- provoquer la résolution du contrat ;
- demander réparation des conséquences de l'inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter ».

L’article 1224 du Code civil précise que :

« La résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice ».

Aux termes de l’article 1227 du Code civil :

« La résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice ».

L’article 1228 prescrit quant à lui que :

« Le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l'exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts ».

Aux termes de l’article 1229 du Code civil :

« La résolution met fin au contrat.
La résolution prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l'assignation en justice.
Lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l'exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer l'intégralité de ce qu'elles se sont procuré l'une à l'autre. Lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l'exécution réciproque du contrat, il n'y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n’ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.

Les restitutions ont lieu dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9 ».
***

En l'espèce, il résulte des développements précédents que la société ARTIZOL est mal fondée à invoquer la résolution judiciaire du contrat conclu avec des époux [N] soit parce le comportement qu'elle reproche à ceux-ci résultent directement de ses insuffisances dans la préparation et la gestion du chantier, soit parce qu'elle ne rapporte pas la preuve de ses allégations.

Il sera, encore, souligné qu'au demeurant, les inexécutions contractuelles, invoquées au soutien d’une demande de résolution, doivent nécessairement présenter un caractère de gravité suffisant pour justifier ladite résolution judiciaire.

Enfin, force est de constater, à titre surabondant, que la société ARTIZOL réclame des dommages et intérêts d'un montant de 30.554,85 € sans détailler cette demande et sans apporter d'élément justificatif au soutien de celle-ci.

En conséquence, la société ARTIZOL sera déboutée de l'ensemble de ses demandes.

Sur les autres demandes :
 
Il y a lieu de condamner la société ARTIZOL, qui succombe, aux dépens de l'instance, en ce compris les frais d'expertise judiciaire.

Par ailleurs Monsieur et Madame [N] sollicitent qu'il soit statué d'ores et déjà sur les éventuels frais d'exécution forcée et de les mettre à la charge de la société ARTIZOL
 
Toutefois, aux termes de l'article L.111-8 du Code des procédures civiles d'exécution, les frais de l'exécution forcée sont à la charge du débiteur, à l'exception des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement qui peuvent être mis partiellement à la charge du créancier dans des conditions fixées par décret ; il n'y a donc pas lieu de faire supporter au débiteur les droits spécifiquement mis à la charge du créancier en application des articles R. 444-3 et R. 444-55 du Code de commerce précités, les dispositions dérogatoires de l'ancien article L. 141-6 du code de la consommation, devenu R. 631-4, ne trouvant pas application en l'espèce.
 
Cette demande sera par conséquent rejetée.

Aux termes de l’article 700 du Code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.
 
La société ARTIZOL, condamnée aux dépens, devra verser aux époux [N] la somme de 3.500 €.

Enfin, il convient de rappeler que selon les dispositions de l’article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.
 
Le présent jugement est donc assorti de l'exécution provisoire de plein droit.

PAR CES MOTIFS :
 
Le tribunal, statuant par jugement contradictoire, en premier ressort par mise à disposition au greffe,
 
CONDAMNE la société à responsabilité limitée VDR ARTIZOL à verser à Monsieur [U] [N] et Madame [V] [N] les sommes de :

- 1.995,80 € TTC au titre de la restitution de la somme versée pour réaliser les travaux
- 14.553,53 € TTC au titre de la remise en état
- 2.000 € au titre du trouble de jouissance
- 2.000 € au titre de leur préjudice moral

CONDAMNE la société à responsabilité limitée VDR ARTIZOL aux dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire,
 
CONDAMNE la société à responsabilité limitée VDR ARTIZOL à payer à Monsieur [U] [N] et Madame [V] [N] la somme de 3.500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
 
RAPPELLE que l’exécution provisoire de la présente décision est de droit.

REJETTE les demandes plus amples ou contraires.
 

Jugement prononcé par mise à disposition au greffe le 12 JUILLET 2024 par Madame RODRIGUES, Vice-Présidente, siégeant en qualité de Juge Unique, assistée de Madame SOUMAHORO, Greffier, lesquelles ont signé la minute du présent jugement.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Versailles
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 23/00276
Date de la décision : 19/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-19;23.00276 ?
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