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19/07/2024 | FRANCE | N°20/06629

France | France, Tribunal judiciaire de Versailles, Deuxième chambre, 19 juillet 2024, 20/06629


Minute n°


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Deuxième Chambre
JUGEMENT du 19 JUILLET 2024

N° RG 20/06629 - N° Portalis DB22-W-B7E-PXSQ

DEMANDERESSE :

Société ENTREPRISE D”ASSAINISSEMENT ET DE VOIRIE (E.A.V.) Société par actions simpli?ées enregistrée au RCS de Versailles sous le numéro 619 803 679, dont le siège est sis [Adresse 6], prise en la persorme de son représentant légal,
représentée par Me Jérôme DAGORNE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, Me Virginie JANSSEN, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postulant
r>DEFENDERESSE :

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L’IMMEUBLE DU [Adresse 2] ET [Adresse 3], représenté par so...

Minute n°

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Deuxième Chambre
JUGEMENT du 19 JUILLET 2024

N° RG 20/06629 - N° Portalis DB22-W-B7E-PXSQ

DEMANDERESSE :

Société ENTREPRISE D”ASSAINISSEMENT ET DE VOIRIE (E.A.V.) Société par actions simpli?ées enregistrée au RCS de Versailles sous le numéro 619 803 679, dont le siège est sis [Adresse 6], prise en la persorme de son représentant légal,
représentée par Me Jérôme DAGORNE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, Me Virginie JANSSEN, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postulant

DEFENDERESSE :

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L’IMMEUBLE DU [Adresse 2] ET [Adresse 3], représenté par son syndic la société ARCHIGESTIM, SARL, immatriculée au RCS de Paris sous le n° B 519 552 319, dont le siège social est situé [Adresse 1], agissant par son gérant domiciliés ès-qualité audit siège.
représentée par Me Michel BOHBOT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, Me Ghislaine DAVID-MONTIEL, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postulant

ACTE INITIAL du 28 Octobre 2020 reçu au greffe le 16 Décembre 2020.

DÉBATS : A l'audience publique tenue le 26 Mars 2024, Madame RODRIGUES, Vice-Présidente, siégeant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l’article 812 du Code de Procédure Civile, assistée de Madame SOUMAHORO, Greffier, l’affaire a été mise en délibéré au 31 mai 2024, prorogé au 19 Juillet 2024.

EXPOSE DU LITIGE :

La société par actions simplifiée Entreprise d'Assainissement et de Voirie (ci-après « la société E.A.V. ») est spécialisée dans le curage industriel et l’entretien des réseaux d’assainissement.

Aux termes d'un contrat, d’un an renouvelable par tacite reconduction, en date du 30 janvier 2015 et signé le 7 avril 2015 avec le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] à [Localité 5] (ci-après « le SDC »), l’entretien d’un poste de relevage d’eaux usées a été confié à la société E.A.V.
En janvier 2017, le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] à [Localité 5] a remplacé le cabinet GENIEZ par le cabinet ARCHIGESTIM en qualité de syndic

La société E.A.V. a effectué des prestations commandées ou des prestations contractuelles pour le compte du Syndicat des copropriétaires, dont il est résulté l'émission de plusieurs factures pour un montant total HT de 9.900, 67 € HT :

- La facture du 19 septembre 2018 pour un montant de 328,90 € correspondant à des demandes de travaux faites par le client pour des travaux de pompage et de nettoyage, et la réparation d’une canalisation.

- La facture du 24 septembre 2018 correspondant à du pompage et du nettoyage pour un montant de 4 353,80 € TTC.

- La facture du 4 octobre 2018 correspondant à des travaux d’étanchéité suite à une demande d’intervention par mail du 28 septembre 2018 pour un montant de 495 € TTC.

- La facture du 17 octobre 2018 correspondant à des travaux de remise en état du poste de relevage de la résidence suite à une demande d’intervention et à un devis pour un montant de 4 156, 16 € TTC.

- La facture du 24 octobre 2018 correspondant à la réalisation du contrat d’entretien et à l’intervention sur le poste de relevage de la résidence pour un montant de 566, 81 € TTC.

Le 2 octobre 2018, le cabinet ARCHIGESTIM, a écrit un courrier à la société E.A.V. dans lequel il lui rappelait qu'elle était, depuis 3 ans et demi, en charge de l’entretien des installations de l'ensemble immobilier du [Adresse 4] à [Localité 5]et qu'« aucun retour ou rapport ne lui a été communiqué concernant l’état des installations », précisant que « de plus, même après nos sollicitations répétées par téléphone, par courrier en AR et par mail, nous recevons toujours un refus de votre part concernant votre avis de professionnel certifié QUALITASS et agrémenté par la préfecture ».

La société E.A.V. a répondu par courrier recommandé avec avis de réception du 3 juin 2019 en rappelant notamment que les factures résultaient de prestations commandées ou de prestations contractuelles alors qu'un compte rendu et des photos avaient été réalisés avec le précédent syndic le 22 avril 2015.

A cette occasion, la société reprenait « pour mémoire, la chronologie des événements majeurs relatifs au poste de relevage eaux usées de la résidence avec transmission des pièces indiquées.

Le 22 juillet 2019, la société E.A.V. a adressé une mise en demeure au syndic pour obtenir le paiement des factures, restée sans effet.

De sorte que le conseil de la société E.A.V. a adressé un courrier recommandé avec avis de réception en date du 29 septembre 2020 reçu par ARCHIGESTIM le 30 septembre 2020 pour tenter de trouver une solution consensuelle. Toujours en vain.

C'est dans ces conditions que la société E.A.V. a, par acte extra-judiciaire des 23 et 28 octobre 2020 fait assigner en paiement le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] à [Localité 5] devant la présente juridiction.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par le RPVA le 7 septembre 2023, la société E.A.V. sollicite de voir :

Vu les dispositions des articles 1 101 et suivants et 1 343-2 du Code Civil applicables en l’espèce,
Vu les dispositions de l’article D 441-5 du Code de commerce,
Vu la jurisprudence,
Vu les pièces versées aux débats,
Dire et juger E.A.V. recevable et bien fondée en ses demandes,

En conséquence,
Débouter le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] à [Localité 5] de ses demandes reconventionnelles ;
Condamner le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] à [Localité 5] à payer la somme en principal de 9 900, 67 € TTC, ainsi que les intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 22 juillet 2019 avec un taux de trois fois le taux d’intérêt légal outre une indemnité forfaitaire de 40 € par facture ;
Ordonner l’anatocisme conformément aux dispositions de l’article 1 343-2 du Code Civil,
Condamner le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] à [Localité 5] à payer à la société E.A.V. la somme de 6 000 € au titre de l’article 700 du CPC,
Condamner le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] à [Localité 5] à payer à E.A.V. les entiers dépens,
Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 8 novembre 2023, le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] à [Localité 5] demande au tribunal de :

Vu les articles 1223, 1231 et suivants du code civil,
Vu l’article L. 132-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au jour du contrat,
Vu l’article 1235-1 du code civil,
Vu les articles 514 et suivants du code de procédure civile,

Sur les demandes principales

En considération de l’inexécution par la société ENTREPRISE D'ASSAINISSEMENT ET DE VOIRIE de ses obligations contractuelles et de l’inexigibilité de ses factures, la débouter de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

A titre subsidiaire, sur la demande de pénalités de retard et intérêts légaux réclamés par la société EAV, déclarer la clause abusive.


A titre subsidiaire, déclarer manifestement excessives les indemnités réclamées, en ordonner la suppression et rejeter toutes demandes de pénalités.

Sur les demandes reconventionnelles

Condamner la société ENTREPRISE D'ASSAINISSEMENT ET DE VOIRIE à payer au Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 2] et [Adresse 3] une indemnité de 8.881,52 € à titre de dommages-intérêts pour inexécution du contrat, avec intérêts légaux à compter des présentes et capitalisation annuelle conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil.

Dans tous les cas, condamner la société ENTREPRISE D'ASSAINISSEMENT ET DE VOIRIE à payer au Syndicat des Copropriétaires du [Adresse 2] et [Adresse 3] une somme de 6.000 € sur le fondement de l’article 700 du CPC.

La condamner aux entiers dépens qui pourront être recouvrés par Me DAVID-MONTIEL, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du CPC.

Rappeler que l’exécution provisoire est de droit.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux écritures des parties quant à l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 23 janvier 2024. L'affaire a été fixée à l’audience du 26 mars 2024 et mise en délibéré au 31 mai 2024 prorogé au 19 juillet 2024, date à laquelle la présente décision a été rendue.

 
MOTIFS DE LA DECISION

A titre préliminaire, il est rappelé que :

- d’une part, en vertu de l’article 768 du Code de procédure civile, le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion,
- d’autre part, les demandes tendant à voir « constater » ou « dire et juger » ne constituent pas des prétentions au sens de l’article 4 de ce même code.

Sur la demande en paiement :

Au soutien de ses demandes, la société E.A.V. fait valoir que le SDC ne conteste pas qu’il a reçu son rapport circonstancié en 2015 avant la signature du contrat d’entretien, rapport reprenant les préconisations à faire, alors qu'elle n'est qu'une société de maintenance et non un bureau d’études ou un maître d’œuvre et qu’il n’a jamais mis en cause justement le maître d’œuvre de l’ouvrage.

Elle souligne, encore, que le SDC admet lui-même dans ses conclusions « qu’après livraison et réception, il est apparu que l’immeuble présentait un désordre majeur d’assainissement » et que l’ensemble de la station a été remplacée en décembre 2018, remplacement qui était justement préconisée et proposée par EAV en septembre 2017.

Elle affirme, également, que le SDC a fait, pour certaines factures des demandes d’intervention spécifiques sans réserve d’aucune sorte, qu’il a signé les ordres de service sans réserve, qu'il a attendu de recevoir les factures pour contester les prestations réalisées pour la première fois le 2 octobre 2018, alors qu'il n'a pas saisi ses propositions. et n'a pas accepté les devis qu'elle a établis en 2016 et réactualisé en 2018 pour lever les anomalies et remettre en état du poste de relevage de la résidence.

Elle considère que c'est la société DOMNIS qui est la vraie responsable, avec le constructeur, du réseau d’assainissement de l’immeuble et rappelle qu'elle n’est jamais intervenue aux lieu et place de l’entreprise du lot plomberie lors de la construction de l’immeuble livré le 14 janvier 2015, en février et mars 2016 contrairement aux dires du SDC.

Elle conteste que le SDC, ainsi qu'il le prétend, aurait été contraint de souscrire un contrat d’entretien avec elle et souligne qu’il confirme qu’il savait parfaitement qu’il y avait un désordre d’assainissement et que, pourtant, il n’a engagé aucuns travaux pour y remédier malgré les préconisations qu'elle a faites dès le début de son engagement en 2015.

Elle note, encore, que le SDC indique qu’il a assigné la société DOMNIS et a obtenu une mesure d’expertise, sans qu'elle-même soit mise en cause.

Elle précise, s'agissant de la facture N°18100908, qu' il ne s’agit en aucun cas d’une remise en état complète de l’installation contrairement aux dires du SDC, mais d’une simple remise en état partielle ; qu'en tout état de cause le syndic a signé le devis et a même approuvé les conditions générales de vente ; que les clauses mentionnées dans ces conditions générales de vente dûment signées ne sont en rien abusives ; que si le SDC explique que le problème est résolu et qu’il n’y a plus de panne depuis le remplacement de l’installation en décembre 2018, c'est ce qu'elle proposait dès septembre 2017.

En défense, le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] à [Localité 5] fait valoir que la station de relevage des eaux usées, installée dans le cadre de la construction de l’immeuble qui a été livré le 14 janvier 2015, n’a cessé de présenter des dysfonctionnements depuis l’origine et en tout cas depuis l’intervention de la société EAV en avril 2015 ; qu'au titre de la garantie légale de parfait achèvement, plusieurs interventions ont été réalisées en février et mars 2016 par la société EAV aux lieu et place de l’entreprise chargée du lot plomberie lors de la construction de l’immeuble ; que pourtant, les interventions se sont multipliées.

Il indique que face à l’incapacité de la société E.AV. de remplir ses obligations, il a réclamé à plusieurs reprises à celle-ci, d’août à octobre 2018, des réponses précises sur les raisons de défaillances constatées et sur la conformité de l’installation au titre de laquelle a été demandé le certificat de conformité de l’installation ; qu'aucune réponse précise n'a été apportée par la société E.A.V.

Il précise que l’ensemble de la station qui a dû être remplacée en décembre 2018 et que depuis ce remplacement, l’installation a fonctionné correctement sans qu’une seule panne n’ait été à déplorer.

Il considère qu'il résulte de ces éléments que la société EAV n’a pas exécuté ses obligations contractuelles, non seulement au regard de la qualité des prestations exécutées, impropres à permettre un fonctionnement normal de l’installation, mais aussi du devoir d’information et de conseil auquel tout entrepreneur est tenu ; qu'il lui appartenait, en sa qualité de professionnel spécialisé, avant d’intervenir, de vérifier la conformité des installations et leur aptitude à remplir leur fonction et de s’abstenir d’interventions répétées et de prestations coûteuses et inutiles, sans se préoccuper de la cause des défaillances à répétition et des moyens d’y remédier.

Il souligne, s'agissant de l'expertise judiciaire, que le recours exercé contre le promoteur à l’origine de l’installation des pompes de relevage, à supposer celui-ci soit responsable de leur défaillance, ne serait pas susceptible de dédouaner l’entreprise EAV de sa propre responsabilité professionnelle, dans la mesure où il appartenait à celle-ci, spécialisée en la matière, d’apprécier l’opportunité de ses interventions sans pouvoir se retrancher derrière la signature d’ordres de service par le Syndicat, non professionnel et certainement pas à même d’apprécier l’utilité des prestations proposées.

Il fait valoir :

* S'agissant de la facture n° 18091337 du 19/09/2018, qui est peu compréhensible, les codes et initiales n’étant pas expliqués et qui indique se rapporter une demande téléphonique de travaux du 11 septembre 2018 et qui mentionne comme client « DOMNIS » et alors qu'il n’est pas produit d’ordre de service ou bon de commande, qu'il n'est pas établi qu’il s’agisse de gros travaux ou pièces non compris au contrat d'entretien.,

*S'agissant de la facture n° 18091865 du 23/11/2018, qui mentionne comme objet les prestations ainsi libellées : « Pompage Nettoyage du poste de relevage » pour un montant HT de 3.958 € HT, que n’est produit ni d’ordre de service ni de bon de commande émanant du Syndicat ou du syndic, ni de devis accepté, seul étant communiqué un échange de mail avec le syndic ne permettant pas de démontrer l’approbation d’une prestation hors contrat d’entretien, alors que le détail du montant facturé n’est pas mentionné.

* S'agissant de facture n° 18100232 du 04/10/2018 qui mentionne pour objet : « Etanchéité faite sur regard eaux usées en extérieur et dans le parking et sur 2 tuyaux … », que l’intervention a été validée par le syndic mais qu'il n’est pas établi que la prestation se situait hors contrat d’entretien en l’absence de toute précision sur la nature des gros travaux qui en seraient exclus.

* S'agissant de la facture n° 18100908 du 17/10/2018, qu'elle a été éditée sur la base d’un devis préalable du 13 septembre 2018 ayant pour objet « la remise en état du poste de relevage eaux usées », que pourtant la prestation ne saurait être exigible compte tenu de l’absence d’exécution par l’entreprise EAV de ses obligations contractuelles, étant rappelé que malgré cette remise en état complète, la station de relevage a continué à dysfonctionner jusqu’à son remplacement total devenu nécessaire en décembre 2018, soit à peine trois mois plus tard et qu'une prestation de pompage facturée alors qu’elle est censée être couverte par le contrat d’entretien.

* S'agissant de la facture n° 18101474 du 24/10/2018, qui mentionne comme prestation : « Pompage poste de relevage EU… », qu'il n’est produit ni ordre de service ou bon de commande émanant du Syndicat ou du syndic, ni de devis accepté, alors qu'il n'est pas davantage démontré que la prestation facturée n'était pas déjà incluse dans le contrat d’entretien et que cette facture intervient une semaine après la précédente qui portait sur la remise en état complète de l’installation avec une prestation identique de pompage du poste.

***

En application des dispositions des articles 1103 et 1104 du Code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits et ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.
 
Par ailleurs, selon l'article 1353 du même code, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Ainsi, selon l'article 1219 du Code civil : « Une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave ».
 
Enfin, aux termes de l'article 1220 du Code civil : « Une partie peut suspendre l'exécution de son obligation dès lors qu'il est manifeste que son cocontractant ne s'exécutera pas à l'échéance et que  les conséquences de cette inexécution sont suffisamment graves pour elle. Cette suspension doit être notifiée dans les meilleurs délais ».
 
Il appartient, en toutes hypothèses, à celui qui invoque l'exception d'inexécution d'établir la réalité de l'inexécution alléguée.

L'article 9 du Code de procédure civile dispose qu'il appartient à chaque partie de prouver les faits nécessaires au succès de ses prétentions.

***

En l'espèce, la société E.A.V. a conclu avec le SDC de la résidence des [Adresse 4] à [Localité 5] un contrat d'entretien – station de relevage aux termes duquel elle s'engageait à effectuer les interventions suivantes :
 
•Contrôle de fonctionnement de l'armoire électrique (différentiel, protections, voyants, commutation des démarrages automatiques et manuels, resserrage des connections) •Nettoyage de l'armoire.
•Contrôle, nettoyage, réglage et essais des détecteurs de niveau.
•Vérification du fonctionnement des clapets anti-retour.
•Vérification du bon fonctionnement des vannes d'isolement.
•Relevé des compteurs horaires. (Pompes, EDF, eau)
•Mesures d'intensité, d'isolement et d'enroulements des pompes et moteurs.
• Pompage et nettoyage haute pression du poste.
 
précision faite qu'en cas de changement de pièces ou de gros travaux envisagés, ceux-ci feraient l'objet d'un devis séparé soumis à votre acceptation et que les parties ont convenu d'une visite de l'installation et d'un pompage du poste selon une périodicité semestrielle.
 
Par ailleurs, aux termes des conditions générales de prestations, il était convenu qu'aucune demande de prestation ne pourra être prise en compte sans la signature préalable par le client soit d'un devis daté et signé, soit d'un contrat de prestations.

La société E.A.V. réclame le règlement de 6 factures :

- Facture n° 18091337 du 19/09/2018 de 328,90 € TTC
- Facture n° 18091865 du 23/11/2018 de 4.353,80 € TTC
- Facture n° 18100232 du 04/10/2018 de 495 € TTC
- Facture n° 18100908 du 17/10/2018 de 4.156,16 € TTC
- Facture n° 18101474 du 24/10/2018 de 566,81 € TTC
pour des interventions relatives au poste de relevage de la résidence des [Adresse 4] à [Localité 5], qu'il convient de reprendre une par une.

- la Facture n° 18091337 du 19/09/2018 de 328,90 € TTC : il apparaît qu'aucun devis ni ordre de service signé par le SDC n'est produit et qu'au surplus la demande téléphonique de travaux est établie au nom de «  DOMNIS » ; la demande en paiement du chef de cette facture ne peut prospérer en l'absence de pièce probante établissant l'accord du SDC pour l'intervention.

- la Facture n° 18091865 du 23/11/2018 de 4.353,80 € TTC : des ordres de travail sont produits pour les 11, 13, 15, 16 et 17 septembre 2018.

Seule l'intervention du 12 n'a pas fait l'objet d'un bon.

Toutefois, cette intervention a été réalisée parmi plusieurs autres qui apparaîssent constituer un ensemble alors que le poste de relevage était défectueux.

En outre, cette intervention ne correspond à l'évidence pas aux visites et pompages semestrielles prévus au contrat d'entretien.

De ce fait, il convient de faire droit à l'ensemble de la facture.

- la Facture n° 18100232 du 04/10/2018 de 495 € TTC : cette facture est confirmée par un courriel d'ARCHIGESTIM du 27 septembre 2018 qui donne son accord pour une intervention sur fuite en urgence et sans devis si le prix est inférieur à 500€.
Cette intervention ne correspond à l'évidence pas aux visites et pompages semestrielles prévus au contrat d'entretien.

Il sera fait droit à cette demande.

- La Facture n° 18100908 du 17/10/2018 de 4.156,16 € TTC : le devis validé par ARCHIGESTIM est produit.

Cette intervention ne correspond à l'évidence pas aux visites et pompages semestrielles prévus au contrat d'entretien.

Il sera fait droit à cette demande.

- Facture n° 18101474 du 24/10/2018 de 566,81 € TTC, aucun devis ni ordre de service signé par le SDC n'est produit.

La demande en paiement fondée sur cette facture sera rejetée.

Le SDC soutient que la société E.A.V. n’a pas exécuté ses obligations contractuelles, « non seulement au regard de la qualité des prestations exécutées, impropres à permettre un fonctionnement normal de l’installation, mais aussi du devoir d’information et de conseil auquel tout entrepreneur est tenu. »

Elle déduit l'existence de ce manquement au fait que depuis le remplacement de l’intégralité de la station de relevage des eaux usées, aucune défaillance du système d'assainissement n'est à déplorer.

Pourtant, elle ne procède que par voie d'affirmation, alors même qu'à plusieurs reprises, et notamment en 2016 et 2018, la société E.A.V. avait préconisé des interventions plus conséquentes. Sans suite du SDC.

Or, il n'est pas établi que ces interventions n'auraient pas permis d'éviter le changement de l’installation.

En conséquence, le SDC de la résidence des [Adresse 4] sera condamné à payer à la société E.A.V. la somme de 9.004,96 € assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 juillet 2019, date de la réception de la mise en demeure conformément aux dispositions de l'article 1231-6 du Code civil.

Il sera fait droit à la demande d’anatocisme conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du Code civil.

En revanche, il convient de rappeler que la pénalité de retard de paiement prévue par l'article L 441-6 du Code de commerce dont la société E.A.V. réclame le bénéfice n'est pas applicable aux consommateurs ou particuliers non-professionnels dont les transactions ne sont pas soumises au code de commerce.

Or, il est constant que la représentation d'un syndicat des copropriétaires par un syndic professionnel ne lui fait pas perdre sa qualité de non professionnel.

Ainsi ; ce chef de demande sera rejeté.

Sur les demandes reconventionnelles du SDC :

Le SDC de la résidence des [Adresse 4] soutient qu'il résulte des pièces versées aux débats qu’en dehors des factures litigieuses, non acquittées, il a supporté, au titre des interventions de la société E.A.V., diverses factures de novembre 2016 à novembre 2018, pour un montant total de 8.881,52 € TTC alors que ces interventions ont été infructueuses et inutiles

Il affirme que la société EAV a, manqué à son devoir d’information et de conseil et n’a jamais répondu sur la cause des défaillances de la station de relevage ni sur sa conformité ; que les installations, défectueuses depuis l’origine, ont ainsi été remplacées plusieurs fois de 2015 à 2018 sans pour autant qu’il ait été remédié aux dysfonctionnements récurrents et sans que la société EAV ne l’alerte sur la cause des désordres et sur la conformité des installations de telle sorte que ses interventions ont été réalisées en pure perte.

Il considère que de ce fait, la société E.A.V. a engagé sa responsabilité en lui faisant supporter des dépenses inutiles à hauteur de la somme précitée de 8.881,52 € au paiement de laquelle elle doit être condamnée à titre de dommages-intérêts sur le fondement des articles 1231 et suivants du code civil.

La société E.A.V., qui réclame le rejet de cette demande reconventionnelle, ne présente aucun moyen de défense spécifique.

En application de l'article 9 du Code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Or, en l'espèce, ainsi qu'il a déjà été dit plus haut, le SDC se contente d'affirmation qui ne sont étayées par aucun élément technique probant.

En effet, le simple fait que le changement de la station de relevage ait fait cesser les dysfonctionnements n'est pas de nature à caractériser un manquement contractuel imputable à la société E.A.V. laquelle avait préconisé à plusieurs reprises des interventions d'envergure, préconisations qui n'avaient pas été suivies d'effet.

Dès lors, la demande de dommages et intérêts présentée à titre reconventionnel sera rejetée.
Sur les autres demandes :
 
Il y a lieu de condamner le SDC de la résidence des [Adresse 4], qui succombe, aux dépens.

Aux termes de l’article 700 du Code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.

Le SDC de la résidence des [Adresse 4], condamné aux dépens, devra verser à la société E.A.V. la somme de 3.000 €.
 
Enfin, il convient de rappeler que selon les dispositions de l’article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.
 

PAR CES MOTIFS :

 
Le tribunal, statuant par jugement contradictoire, en premier ressort par mise à disposition au greffe,
 
CONDAMNE le Syndicat des Copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 2] et [Adresse 3] représenté par son syndic la société à responsabilité limitée ARCHIGESTIM, à verser à la société par actions simplifiée Entreprise d'Assainissement et de Voirie la somme de 9.004,96 € assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 juillet 2019,

ORDONNE la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du Code civil,
 
CONDAMNE le Syndicat des Copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 2] et [Adresse 3] représenté par son syndic la société à responsabilité limitée ARCHIGESTIM, aux dépens de l'instance,
 
CONDAMNE le Syndicat des Copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 2] et [Adresse 3] représenté par son syndic la société à responsabilité limitée ARCHIGESTIM, à verser à la société par actions simplifiée Entreprise d'Assainissement et de Voirie la somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
 
RAPPELLE que l’exécution provisoire de la présente décision est de droit.

REJETTE les demandes plus amples ou contraires. 

Jugement prononcé par mise à disposition au greffe le 19 JUILLET 2024 par Madame RODRIGUES, Vice-Présidente, siégeant en qualité de Juge Unique, assistée de Madame SOUMAHORO, Greffier, lesquelles ont signé la minute du présent jugement.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Versailles
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 20/06629
Date de la décision : 19/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-19;20.06629 ?
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