Minute n°
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Deuxième Chambre
JUGEMENT du 18 JUILLET 2024
N° RG 23/05524 - N° Portalis DB22-W-B7H-RRA7
DEMANDERESSE :
BTP PREVOYANCE, Institution de prévoyance, exerçant sous la forme d’une personne morale de droit privé à but non lucratif, régie par le Titre III, Livre IX du Code de la Sécurité Sociale dont le siège social est [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
représentée par Me Guillaume NICOLAS, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat plaidant/postulant
DEFENDEURS :
Monsieur [I] [T], né le 12 mars 1985 au Togo, domicilié [Adresse 2]
défaillant
Madame [Z] [M], née le 26 mars 1984 à [Localité 3] domiciliée [Adresse 2]
défaillant
ACTE INITIAL du 21 Septembre 2023 reçu au greffe le 09 Octobre 2023.
DÉBATS : A l'audience publique tenue le 13 Mai 2024, Madame LUNVEN, Vice-Présidente, siégeant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l’article 812 du Code de Procédure Civile, assistée de Madame SOUMAHORO, Greffier, l’affaire a été mise en délibéré au 18 Juillet 2024.
EXPOSE DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 13 novembre 2015, l'institution de prévoyance BTP PREVOYANCE a consenti à Monsieur [I] [T] et Madame [Z] [M] un prêt immobilier d'un montant de 15.000 euros au taux d’intérêt annuel fixe de 0,60 %, remboursable en 240 mensualités de 66,34 euros.
Plusieurs échéances étant restées impayées à compter du mois de février 2022, l'institution de prévoyance BTP PREVOYANCE a vainement mis en demeure, par courrier recommandé avec accusé de réception du 13 avril 2022, Monsieur [I] [T] d'avoir à régulariser les échéances impayées sous quinzaine faute de quoi la déchéance du terme serait prononcée.
En l'absence de régularisation de la situation, l'institution de prévoyance BTP PREVOYANCE a, par courriers recommandés avec accusé de réception du 2 février 2023, prononcé la déchéance du terme et l'exigibilité anticipée du solde du prêt. Elle a également mis en demeure Monsieur [I] [T] et Madame [Z] [M] de lui verser sous huitaine la somme de 10.562,97 euros.
Suivant actes de commissaire de justice signifiés à étude le 21 septembre 2023, l'institution de prévoyance BTP PREVOYANCE a fait assigner Monsieur [I] [T] et Madame [Z] [M] devant le tribunal judiciaire de Versailles auquel elle demande de :
Vu les articles 1103 et suivants nouveaux du code civil et L. 313-1 et suivants du code de la consommation, subsidiairement 1184 ancien et 1224 et 1227 nouveaux du code civil,
Vu les pièces au soutien de la demande en annexe aux présentes,
- Dire et juger la BTP Prévoyance recevable et bien fondée en sa demande ;
- Constater la déchéance du terme prononcée par la requérante, et la dire régulière ;
A titre subsidiaire,
Prononcer la résolution judiciaire du contrat pour manquements graves de l’emprunteur à son obligation principale de remboursement ;
En conséquence,
Condamner solidairement Monsieur [I] [T] et Madame [Z] [M], à payer à la BTP Prévoyance :
la somme de 10.562,97 euros au titre du solde débiteur du prêt n° 0176474.5, avec intérêts au taux contractuel de 0,60 % l’an à compter du 13 avril 2022, date de la mise en demeure, et ce jusqu'à parfait paiement ;
Rappeler que l'exécution provisoire du jugement à intervenir est de droit ;
Condamner solidairement Monsieur [I] [T] et Madame [Z] [M] à payer à la BTP Prévoyance la somme de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamner Monsieur [I] [T] et Madame [Z] [M], aux entiers dépens de l’instance dont distraction au profit de la SCP PIRIOU METZ NICOLAS conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Monsieur [I] [T] et Madame [Z] [M], régulièrement assignés, n'ont pas constitué avocat. Le présent jugement sera en conséquence réputé contradictoire.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé à l'assignation du demandeur quant à l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 19 février 2024. L'affaire a été fixée le 27 mai 2024 et a été mise en délibéré au 18 juillet 2024 par mise à disposition au greffe.
En cours de délibéré, le juge a soulevé d’office, par message RPVA du 25 juin 2024, la nullité du prêt au visa de l’article 312-10, alinéa 2, du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et invité le demandeur à formuler ses observations au plus tard le 3 juillet 2024.
L'institution de prévoyance BTP PREVOYANCE n'a pas produit de note en délibéré.
MOTIFS DE LA DECISION
A titre liminaire, il est rappelé qu'en application de l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
Sur la nullité du contrat de prêt
Il est de principe au visa de l’article L 312-10, alinéa 2, du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 que l'offre étant soumise à l'acceptation de l'emprunteur qui ne peut l'accepter que dix jours après qu'il l'a reçue, l'inobservation de ce délai est sanctionnée par la nullité du contrat de prêt.
Ces dispositions sont d’ordre public.
L'article L 312-10 précité prévoit que l’acceptation doit être donnée par lettre, le cachet de la poste faisant foi.
En l'espèce, l'offre de prêt est soumise aux articles 312-1 et suivants du code de la consommation applicable aux crédits immobiliers ainsi que rappelé en première page de l'acte. Il est également rappelé que l'emprunteur ne peut accepter l'offre que dix jours après sa réception àl'article 3.1 «Acceptation de l'offre».
L'offre de prêt a été signée par les emprunteurs le 13 novembre 2015. L'institution de prévoyance BTP PREVOYANCE a produit en cours de délibéré un document intitulé« déclaration d'acceptation d'offre de prêt » aux termes de laquelle les emprunteurs indiquent avoir reçu l'offre le 30 octobre 2015 et l'avoir acceptée le 13 novembre 2015. Cette mention en vertu de laquelle les emprunteurs déclarent avoir accepté l’offre après expiration du délai requis ne fait pas foi de la date d’acceptation, en l'absence de production du cachet de la poste faisant foi de cette date.
L'institution de prévoyance BTP PREVOYANCE ne justifiant pas que le délai de rélexion de 10 jours a bien été respecté il convient de prononcer la nullitédu contrat de prêt en date du 13 novembre 2015.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
L'institution de prévoyance BTP PREVOYANCE succombant à l'instance, elle sera condamnée au paiement des dépens et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal statuant par jugement réputé contradictoire en premier ressort par mise à disposition au greffe,
PRONONCE la nullité du contrat de prêt en date du 13 novembre 2015,
CONDAMNE l'institution de prévoyance BTP PREVOYANCE au paiement des dépens,
DEBOUTE l'institution de prévoyance BTP PREVOYANCE de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Jugement prononcé par mise à disposition au greffe le 18 JUILLET 2024 par Madame LUNVEN, Vice-Présidente, siégeant en qualité de Juge Unique, assistée de Madame SOUMAHORO, Greffier, lesquelles ont signé la minute du présent jugement.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT