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16/07/2024 | FRANCE | N°21/05766

France | France, Tribunal judiciaire de Versailles, Première chambre, 16 juillet 2024, 21/05766


Minute n°





TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Première Chambre
JUGEMENT
16 JUILLET 2024


N° RG 21/05766 - N° Portalis DB22-W-B7F-QDW5
Code NAC : 63B

DEMANDERESSE :

S.A.R.L. 3A Immo SRT, immatriculée au RCS de VERSAILLES sous le n° B 435 177 506, représentée par son gérant en exercice, domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Stéphanie ARENA, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postulant, et par Me Jérôme WALTER, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant



DEFENDEUR :

Maître [P] [I], notaire associée de la SELARL ARMELLE ROGER & [P] [I], NOTAIRES, société d’exercice libéral à respon...

Minute n°

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Première Chambre
JUGEMENT
16 JUILLET 2024

N° RG 21/05766 - N° Portalis DB22-W-B7F-QDW5
Code NAC : 63B

DEMANDERESSE :

S.A.R.L. 3A Immo SRT, immatriculée au RCS de VERSAILLES sous le n° B 435 177 506, représentée par son gérant en exercice, domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Stéphanie ARENA, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postulant, et par Me Jérôme WALTER, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

DEFENDEUR :

Maître [P] [I], notaire associée de la SELARL ARMELLE ROGER & [P] [I], NOTAIRES, société d’exercice libéral à responsabilité limitée, immatriculée au RCS de VERSAILLES sous le N°853 608 198, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège.
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Maître Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES

ACTE INITIAL du 09 Août 2021 reçu au greffe le 02 Novembre 2021.

DÉBATS : A l'audience publique tenue le 06 Mai 2024 Madame MARNAT, Juge, siégeant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l’article 812 du Code de Procédure Civile, assistée de Madame BEAUVALLET, Greffier, a indiqué que l’affaire sera mise en délibéré au 16 Juillet 2024.

EXPOSE DU LITIGE

Par mandat exclusif de vente en date du 26 juin 2019, la SCI LUVIN a chargé la SARL 3A IMMO SRT, représentée par son gérant Monsieur [W] [K], de vendre un terrain industriel situé à [Localité 4] (78), le bien devant être présenté au prix de 594.000 euros, TVA incluse, la rémunération du mandataire fixée à 8% du montant de la vente étant comprise.

Une première proposition d’achat a été émise par la SAS MY VOITURE le 25 juillet 2019 au prix de 530.000 euros outre la commission de 8% de l’agence à la charge de l’acquéreur.

Cette offre n’a pas été acceptée.

Par courriel du 8 octobre 2019, Monsieur [W] [K] a informé Maître [P] [I], notaire à [Localité 3] (78), de la vente par la société SCI LUVIN représentée par Maître [S] [G], notaire à [Localité 5] (35), du terrain industriel situé à [Localité 4].

Une seconde proposition d’achat a été émise par la SAS MY VOITURE le 30 octobre 2019 au prix de 530.000 euros, outre la TVA sur la marge ou le prix total ainsi que les frais d’agence en sus fixés à 40.000 euros TTC à la charge de l’acquéreur, étant précisé : « Cette vente s’effectuera de la façon suivante :
- signature de la promesse de vente sous 15 jours,
- sous condition suspensive de prêt partiel ou total (durée de la condition suspensive 60 jours),
- sans condition suspensive du permis de construire. Il a été délivré en 2010, un CU positif pour les activités de commerce en RdC et bureaux en étage,
- conditions suspensives de droit commun (purge du droit de préemption de la commune, etc…) ».

L’offre a été acceptée le 12 novembre 2019 par la SCI LUVIN.

Par courriel du 25 novembre 2019, Maître [P] [I] a transmis à Maître [S] [G] un projet de promesse de vente.

Par courriel du 28 novembre 2019, Maître [S] [G] a indiqué à Maître [P] [I] qu’il résultait des dernières négociations entre leurs clients respectifs qu’il n’y avait pas de condition suspensive du permis de construire, la SAS MY VOITURE ayant obtenu un certificat d’urbanisme pré-opérationnel récent pouvant être joint au dossier, et ajoutait que la SCI LUVIN sollicitait notamment le versement au jour de l’acte d’une indemnité d’immobilisation de 10% du prix de vente.

Par la suite, aucune promesse de vente n’a été signée.

Une troisième proposition d’achat immobilière a été émise par la SAS MY VOITURE le 9 janvier 2020 au prix de vente de 594.000 euros outre la TVA sur marge ou sur le prix total honoraires d’agence inclus, étant précisé : « Cette vente sera actée sur la promesse de vente avec les conditions suspensives suivantes :
- condition suspensive de prêt total ou partiel, demandé par l’acquéreur. Durée de condition 60 jours.
- conditions suspensives liées au droit commun (préemption de la commune, servitude d’urbanisme, situation hypothécaire, etc…).
- signature de l’acte authentique sous un délai (délais légaux) de 3 ou 4 mois ».

Par courriel du 13 janvier 2020, Maître [P] [I] a indiqué à Maître [S] [G] que la SAS MY VOITURE avait fait une nouvelle offre à la SCI LUVIN au prix et avec une condition suspensive de prêt uniquement, et précisait dans un second mail du même jour que le projet initial de ses clients avait changé, ce qui expliquait l’absence de condition suspensive de permis de construire.

Par courriel du même jour, Maître [S] [G] a répondu à Maître [P] [I] que sa cliente était prête à étudier la nouvelle offre, sous réserves de plusieurs conditions en particulier le versement d’un séquestre de 10% du prix de vente en la comptabilité de sa consœur avant le 20 janvier 2020. Il l’a, par ailleurs, invitée à lui faire un retour d’ici le 15 janvier 2020 à midi.

Par courriel du 21 janvier 2020, Maître [S] [G] a écrit à Maître [P] [I] que l’offre émise par la SAS MY VOITURE ne pouvait être retenue, faute de retour à son mail précédent.

Par courriel du même jour, Maître [P] [I] lui a répondu qu’elle avait cherché à le joindre à deux reprises et que la SAS MY VOITURE acceptait les conditions posées par la SCI LUVIN, à l’exception du versement d’un séquestre de 10% du prix, proposant un prix de séquestre de 5% avec un engagement de 10% du prix.

Par courriel du 21 janvier 2020, Maître [S] [G] a indiqué à Maître [P] [I] que la SCI LUVIN n’acceptait pas l’offre émise par la SAS MY VOITURE, mettant un terme aux négociations.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du même jour, la SCI LUVIN a résilié le mandat de vente exclusif signé avec la SARL 3A IMMO SRT le 26 juin 2019.

Reprochant à Maître [P] [I] d’être à l’origine de cette résiliation et de ne pas lui avoir permis de percevoir sa commission sur la vente du terrain industriel en ayant fait échec à la signature de promesse de vente entre la SCI LUVIN et la SAS MY VOITURE, la SARL 3A IMMO SRT a, par acte d’huissier en date du 9 août 2021, saisi le tribunal judiciaire de Versailles d’une action en responsabilité civile professionnelle à son encontre.

Par dernières conclusions signifiées par RPVA le 26 mai 2023, la SARL 3A IMMO SRT demande au tribunal de :

« - Recevoir la SARL 3A Immo SRT en toutes ses demandes, fins et prétentions :

L’y dire bien fondée.

En conséquence,

- Condamner Maître [P] [I] à payer à la SARL 3A Immo SRT une indemnité de 44. 000 euros (quarante-quatre mille).

- Ordonner que ladite somme portera intérêts au taux légal à compter de l’assignation en date du 9 août 2021.

- Condamner Maître [P] [I] à payer à la SARL 3A Immo SRT une indemnité de 8000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

- Condamner Maître [P] [I] en tous les dépens, en ce compris le coût de l’exploit introductif d’instance.

- Ordonner l’Exécution provisoire qui est de Droit ».

La SARL 3A IMMO SRT soutient que Maître [P] [I] a commis une faute consistant en un défaut de diligences et un manquement à son devoir d’information et de conseil d’une part, en adressant à son confrère une promesse de vente comportant une condition suspensive d’obtention de permis de construire alors que la SCI LUVIN et la SAS MY VOITURE avaient convenu de l’absence d’une telle clause, et d’autre part en ne précisant pas dans le délai fixé par son confrère que le projet était erroné et qu’il y avait bien un accord global entre les parties sur la base de l’offre du 9 janvier 2020.

Elle considère que la faute reprochée a eu comme conséquence l’absence de signature d’une promesse de vente entre la SCI LUVIN et la SAS MY VOITURE alors que l’offre était acceptée, ce qui lui a fait perdre son droit à commission et a entraîné la résiliation du mandat exclusif de vente du 26 juin 2019.

Par dernières conclusions signifiées par RPVA le 14 août 2023, Maître [P] [I] demande au tribunal de :

« Vu l’arrêt de la 1ère Chambre de la Cour de cassation, civile, du 28 juin 2012, pourvoi n°11-14.486
Vu les dispositions des articles 1241 et 1240 du Code civil,
Vu les dispositions de l’article 9 du Code de Procédure Civile,

Recevoir Maître [P] [I] en ses écritures, l’y déclarer bien fondée et y faisant droit,

Déclarer l’action de la SARL 3A IMMO SRT à l’encontre de Maître [P] [I] mal fondée, la responsabilité du notaire ne pouvant être retenue, l’en débouter,

Prononcer la mise hors de cause de Maître [P] [I],

Débouter en tout état de cause, la SARL 3A IMMO SRT de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

Y ajoutant,

Condamner la SARL 3A IMMO SRT à régler à Maître [P] [I] la somme de 8.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

Condamner la SARL 3A IMMO SRT aux entiers dépens dont le montant sera recouvré par la SCP COURTAIGNE AVOCATS, conformément aux dispositions de l’article 699 du C.P.C ».

Maître [P] [I] conteste avoir commis une faute susceptible d’engager sa responsabilité civile professionnelle et soutient avoir accompli les diligences en fonction des informations qui lui avaient été communiquées. Elle ajoute n’avoir aucune obligation de résultat quant à la signature de l’acte et que l’échec des négociations entre les parties est lié à l’absence d’accord sur le versement d’un séquestre de 10%. Elle soutient que ses échanges avec son confrère étaient soumis au secret professionnel et qu’elle n’était pas dépositaire d’un devoir de conseil à l’égard de la SARL 3A IMMO SRT, tiers à l’acte.

Elle fait valoir que la SARL 3A IMMO SRT ne démontre pas avoir subi un préjudice en lien direct avec la faute reprochée, exposant que ce dernier ne justifie pas du quantum de sa demande indemnitaire et que le demandeur ne saurait se fonder sur la notion de perte de chance. Elle ajoute que le notaire ne peut être condamné au paiement de la commission alors que l’opération n’a pas été réalisée, l’acte de vente n’ayant pas été signé en raison d’un désaccord des parties sur les conditions définitives de cette dernière.
Le tribunal renvoie expressément aux dernières écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions, en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 3 octobre 2023.

L’affaire, appelée à l’audience du 6 mai 2024, a été mise en délibéré au 16 juillet 2024.

MOTIFS

Sur la responsabilité civile professionnelle de Maître [P] [I]

Aux termes de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

L’article 1241 du code civil prévoit que chacun est responsable du dommage qu’il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.

En application de ces textes, le notaire est débiteur d’une obligation d’information et de conseil à l’égard des personnes qu’il assiste. Il doit aussi, dans le cadre de ses missions, veiller à l’efficacité des actes qu’il rédige. Il est également tenu de faire preuve de loyauté et de prudence au regard des parties, ainsi que des actes et opérations qu’il réalise.

Pour être retenue, la responsabilité du notaire suppose que soient démontrés par le demandeur, sur qui pèse la charge de la preuve, une faute, un préjudice et un lien de causalité entre la faute et le préjudice subi.

En l'espèce, il est établi que par courriel du 8 octobre 2019, Monsieur [W] [K] de l’agence immobilière SARL 3A IMMO SRT a informé Maître [P] [I], notaire, que sa mandante la société SCI LUVIN dont le notaire est Maître [G], vendait un terrain industriel situé à [Localité 4] pour un prix de vente net vendeur de 530.000 euros et 40.000 euros d’honoraires d’agence à la charge de l’acquéreur, étant précisé que les vendeurs souhaitaient signer dès que possible une promesse de vente et l’acte authentique, et : « Comme nous en avons parlé, il serait souhaitable que les acquéreurs fassent mention d’un prêt concernant l’acquisition du terrain, sans effectivement évoquer sur la promesse le prêt de 5.000.000 € bien entendu je vous laisse seul juge en la demeure ».

Il n’est évoqué aucune condition suspensive relative au permis de construire.

La SARL 3A IMMO SRT produit une proposition d’achat immobilier du terrain industriel sis à [Localité 4] qu’elle a, en qualité de mandataire, signé avec la SAS MY VOITURE, acquéreur, le 30 octobre 2019, la SCI LUVIN propriétaire du terrain l’ayant acceptée le 12 novembre 2019. Il est mentionné un prix de vente de 530.000 euros, outre la TVA sur la marge ou le prix total ainsi que les frais d’agence en sus fixés à 40.000 euros TTC à la charge de l’acquéreur, étant précisé : « Cette vente s’effectuera de la façon suivante :
- signature de la promesse de vente sous 15 jours,
- sous condition suspensive de prêt partiel ou total (durée de la condition suspensive 60 jours),
- sans condition suspensive du permis de construire. Il a été délivré en 2010, un CU positif pour les activités de commerce en RdC et bureaux en étage,
- conditions suspensives de droit commun (purge du droit de préemption de la commune, etc…) ».

Il ne résulte d’aucune des pièces versées aux débats que ce document aurait été adressé à Maître [P] [I].

Par courriel en date du 25 novembre 2019, Maître [P] [I] a transmis à Maître [S] [G], notaire du vendeur, un projet d’acte de promesse de vente lui demandant un certain nombre de documents pour le compléter ; ce dernier lui a répondu par courriel du 28 novembre 2019 : « Vous n’avez sans doute pas eu connaissance des dernières négociations entre nos clients. En fait, il n’y a pas de condition suspensive de permis de construire. Votre client a obtenu un certificat d’urbanisme pré-opérationnel récent qui pourra être joint au dossier. Le montant de l’indemnité d’immobilisation de 10% est à verser au jour de l’acte. La vente devra être signée, dès la purge du droit de préemption. »

Il s’en déduit que le projet d’acte transmis par Maître [I] comportait une condition suspensive de permis de construire. Toutefois, il résulte de l’attestation de Monsieur [U] [E], président de la SAS MY VOITURE, que ce sont les associés de la société qui ont demandé à leur notaire que le projet d’acte inclut des conditions suspensives qui n’apparaissaient pas dans l’offre d’achat initiale. Il ajoute avoir été informé « entre le 28 novembre 2019 et le 13 janvier 2020 que le notaire du vendeur souhaitait modifier le projet envoyé et notamment supprimer la condition d’obtention d’un permis et ajouter le versement d’un dépôt de garantie de 10% du prix ».

Aucun élément ne permet d’établir que Maître [I] aurait été informée du souhait des parties de ne plus faire figurer comme condition suspensive le permis de construire que ses clients lui avaient initialement demander d’inclure, et il ne saurait ainsi lui être reproché d’avoir commis un manquement en tant que garant de l’efficacité du projet d’acte qu’elle avait établi.

Il est, de plus, constant qu’il ne s’agissait que d’un projet transmis à son confrère dans l’attente de la production d’éléments complémentaires, soit dans la phase préparatoire de la rédaction du projet, et aucun élément ne permet de justifier en tout état de cause que le manquement allégué tenant à la mention comme condition suspensive du permis de construire dans le projet d’acte aurait été déterminant dans la rétractation du consentement à la vente de la SCI LUVIN.

Au contraire, une troisième proposition d’achat immobilière a été émise par la SAS MY VOITURE le 9 janvier 2020 au prix de vente de 594.000 euros outre la TVA sur marge ou sur le prix total honoraires d’agence inclus, étant précisé : « Cette vente sera actée sur la promesse de vente avec les conditions suspensives suivantes :
- condition suspensive de prêt total ou partiel, demandé par l’acquéreur. Durée de condition 60 jours.
- conditions suspensives liées au droit commun (préemption de la commune, servitude d’urbanisme, situation hypothécaire, etc…).
- signature de l’acte authentique sous un délai (délais légaux) de 3 ou 4 mois ».

Maître [I] a, par deux courriels du 13 janvier 2020, informé le notaire des vendeurs de : « Mon client m’indique avoir fait une nouvelle proposition aux vôtres, au prix et avec une condition suspensive de prêt uniquement » et « Ps : leur projet initial a changé, ce qui explique l’absence de condition suspensive de PC etc… ».
Suite à cette nouvelle offre, Maître [G] lui a répondu que celle-ci était à l’étude de ses clients mais sous la réserve suivante : « Les conditions suivantes devront être réunies au préalable :
- versement d’un séquestre de 10% du prix en votre comptabilité d’ici le 20 janvier,
- fourniture d’un accord de principe de la banque sur le financement demandé,
- accord de prêt sous 1 mois de la promesse de vente,
- absence d’autres conditions suspensives particulières,
- signature promesse à brève échéance,
- signature acte de vente dans les 15 jours de la renonciation au droit de préemption.
Afin que chacun soit fixé, je vous invite à me faire un retour d’ici mercredi midi. »

Si Maître [I] n’a répondu à son confrère que le 21 janvier 2020 pour lui faire part de la position des acquéreurs, rien ne permet pas de considérer que cette réponse tardive soit la cause du refus d’acceptation de l’offre par les vendeurs ; il résulte au contraire des pièces produites que les parties ne s’étaient pas accordées au préalable sur les conditions suspensives qu’il convenait de prévoir à l’acte, les différents propositions d’achat précitées faisant état de conditions fluctuantes, les échanges entre notaires démontrant la persistance de négociations et d’incertitudes entre les parties sur ces conditions, ce que confirme Monsieur [U] [E] sur l’existence d’un désaccord persistant sur le versement du séquestre de 10%. De même, bien que la date de réponse initialement fixée par Maître [G] ait été dépassée, ce dernier a tout de même fait part à ses clients de la nouvelle offre des acquéreurs transmise par courriel de Maître [I] le 21 janvier 2020 de ne verser qu’un séquestre de 5% du prix avec un engagement de 10%, et que la SCI LUVIN a refusé ces conditions financières, ainsi que cela résulte de la réponse de Maître [G] du même jour.

Enfin s’agissant du devoir d’information et de conseil du notaire dont le manquement est reproché par la SARL 3A IMMO SRT à Maître [I], il sera rappelé que le notaire n’est pas tenu d’un devoir de conseil envers ceux qui restent tiers par rapport aux actes auxquels il intervient. Or, il n’est pas contesté que Maître [I] est intervenue en qualité de notaire de la SAS MY VOITURE, créancière du devoir d’information et de conseil, et que la SARL 3A IMMO SRT, mandataire de la SCI LUVIN au titre du contrat de vente signé le 26 juin 2019, est un tiers à l’acte de promesse de vente, de sorte que la demanderesse ne dispose pas d’un droit opposable aux parties. En conséquence de quoi, Maître [I] n’était pas dépositaire d’un devoir de conseil à l’égard de l’agence immobilière.

Ainsi, il résulte des considérations qui précèdent que Maître [I] a fait preuve de diligences et la SARL 3A IMMO SRT ne rapporte pas la preuve que le notaire ait commis une quelconque faute en violation de ses obligations professionnelles de sorte que sa responsabilité professionnelle ne saurait être engagée.

En conséquence, la SARL 3A IMMO SRT sera déboutée de ses demandes à ce titre.

Sur les autres demandes

Compte tenu du sens du présent jugement, il y a lieu d’écarter l’exécution provisoire.

La SARL 3A IMMO SRT sera condamnée à payer les dépens, avec faculté de recouvrement au profit de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, avocat au barreau de Versailles.

Les circonstances d’équité tendent à justifier que la SARL 3A IMMO SRT soit condamnée à verser à Maître [P] [I] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,

DEBOUTE la SARL 3A IMMO SRT de l’ensemble de ses demandes ;

CONDAMNE la SARL 3A IMMO SRT aux dépens avec application des dispositions de l’article 699 du code procédure civile ;

CONDAMNE la SARL 3A IMMO SRT à verser à Maître [P] [I] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DIT qu’il convient d’écarter l’exécution provisoire du présent jugement.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 juillet 2024 par Madame MARNAT, Juge, assistée de Madame BEAUVALLET, greffier, lesquelles ont signé la minute du présent jugement.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Versailles
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 21/05766
Date de la décision : 16/07/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 22/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-16;21.05766 ?
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