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12/07/2024 | FRANCE | N°23/03271

France | France, Tribunal judiciaire de Versailles, Jex, 12 juillet 2024, 23/03271


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
LE JUGE DE L'EXÉCUTION

JUGEMENT DU 12 JUILLET 2024


DOSSIER : N° RG 23/03271 - N° Portalis DB22-W-B7H-RKYR
Code NAC : 78I
MINUTE N° : 24/

DEMANDERESSE

TRIMAILLE AERO FORMATION, société à responsabilité limitée, inscrite au RCS de VERSAILLES sous le n° 333 020 428 dont le siège social est [Adresse 4] - [Localité 2], représentée par son dirigeant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Michèle DE KERCKHOVE, avo

cat postulant de la SELARL BVK AVOCATS ASSOCIES, avocats au Barreau de VERSAILLES, Vestiaire : 26, et Me Emmanuel ESCARD D...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
LE JUGE DE L'EXÉCUTION

JUGEMENT DU 12 JUILLET 2024

DOSSIER : N° RG 23/03271 - N° Portalis DB22-W-B7H-RKYR
Code NAC : 78I
MINUTE N° : 24/

DEMANDERESSE

TRIMAILLE AERO FORMATION, société à responsabilité limitée, inscrite au RCS de VERSAILLES sous le n° 333 020 428 dont le siège social est [Adresse 4] - [Localité 2], représentée par son dirigeant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Michèle DE KERCKHOVE, avocat postulant de la SELARL BVK AVOCATS ASSOCIES, avocats au Barreau de VERSAILLES, Vestiaire : 26, et Me Emmanuel ESCARD DE ROMANOVSKY, avocat au Barreau de PARIS

DÉFENDERESSE

S.A.R.L. LEROI & ASSOCIÉS, Etude de Commissaire de Justice, société à responsabilité limitée, immatriculée au RCS de NANTERRE sous le n° 900 021 254, dont le siège social est sis [Adresse 1] - [Localité 3], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Franck LAFON, avocat au Barreau de VERSAILLES, Vestiaire : 618

ACTE INITIAL DU 30 Mai 2023
reçu au greffe le 09 Juin 2023

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame Noélie CIROTTEAU, Juge, Juge de l’Exécution par délégation du Président du Tribunal Judiciaire de VERSAILLES
assistée de Madame Emine URER, Greffier

jugement contradictoire
premier ressort

Copie exécutoire à : Me Lafon
Copie certifiée conforme à : Me de Kerckhove + Parties+ Dossier + Commissaire de Justice
Délivrées le : 12 juillet 2024

DÉBATS

À l’audience publique tenue le 12 juin 2024 en conformité avec le Décret n°2012-783 du 30 mai 2012 et des articles L213-5 et L213-6 du code de l’organisation judiciaire, les parties présentes ou régulièrement représentées ont été entendues et l’affaire a été mise en délibéré au 12 juillet 2024.


◊ ◊ ◊

EXPOSÉ DU LITIGE

Par ordonnance en date du 23 mars 2023, le président du Tribunal de commerce de Versailles a autorisé SNC AIR INVEST à faire pratiquer une saisie conservatoire sur les huit aéronefs listés par l’ordonnance, appartenant à la société SARL TRIMAILLE AERO FORMATION (TAF) pour sureté et conservation de sa créance que nous évaluons provisoirement en principal, intérêts et frais à la somme de 535.758 euros.

Par acte d’huissier établi par la SARL LEROI & ASSOCIES, en date du 14 avril 2023, un procès-verbal de saisie conservatoire d’aéronefs a été dressé à la demande de la SNC AIR INVEST en vertu de l’ordonnance du 23 mars 2023, portant sur la somme totale de 535.738 euros en principal, intérêts et frais. Les aéronefs appartenant à la société SARL TRIMAILLE AERO FORMATION (TAF) ont été saisis, sans besoin de les déplacer.

Un procès-verbal de mainlevée de saisie conservatoire d’aéronefs a été pris le 20 avril 2023. Le même jour, un procès-verbal de saisie conservatoire a été délivré à la demande de la SNC AIR INVEST à l’encontre de la société SARL TRIMAILLE AERO FORMATION (TAF) en vertu de l’ordonnance précitée.

C’est dans ces conditions que par acte de commissaire de justice en date du 30 mai 2023, la société SARL TRIMAILLE AERO FORMATION (TAF) a assigné la SARL étude LEROI & ASSOCIES devant le Juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Versailles.

L’affaire a été appelée à l’audience du 4 octobre 2023 et renvoyée, à la demande des parties, aux audiences du 29 novembre 2023, du 28 février 2024 et du 12 juin 2024.

Aux termes de ses conclusions visées à l’audience, la société SARL TRIMAILLE AERO FORMATION (TAF) sollicite le juge de l'exécution aux fins de :
La juger recevable et bien fondée,Condamner la SARL étude LEROI & ASSOCIES à lui payer la somme de 80.000 euros au titre des dommages et intérêts pour son préjudice d’image et atteinte à la réputation,Condamner la SARL étude LEROI & ASSOCIES à lui payer la somme de 14.229,50 euros au titre des dommages et intérêts pour sa perte de chiffre d’affaires,Condamner la SARL étude LEROI & ASSOCIES à lui payer la somme de 8.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

En réponse, selon ses conclusions n°3 visées à l’audience, la SARL étude LEROI & ASSOCIES demande au juge de l'exécution de :
Se déclarer incompétent au profit du Tribunal judiciaire de Versailles,Déclarer la société TAF irrecevable, subsidiairement mal fondée en ses demandes,Débouter la société TAF de toutes ses demandes,Condamner la société TAF à lui payer ka somme de 3.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Franck LAFON.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, pour l’exposé complet des moyens et prétentions des parties, il est fait référence aux conclusions des parties.

L’affaire a été mise en délibéré au 12 juillet 2024, par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la compétence du juge de l'exécution

Selon l’article L.213-6 du Code de l'organisation judiciaire « Le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire.
Dans les mêmes conditions, il autorise les mesures conservatoires et connaît des contestations relatives à leur mise en œuvre.
Le juge de l'exécution connaît, sous la même réserve, de la procédure de saisie immobilière, des contestations qui s'élèvent à l'occasion de celle-ci et des demandes nées de cette procédure ou s'y rapportant directement, même si elles portent sur le fond du droit ainsi que de la procédure de distribution qui en découle.
Il connaît, sous la même réserve, des demandes en réparation fondées sur l'exécution ou l'inexécution dommageables des mesures d'exécution forcée ou des mesures conservatoires.
Il connaît de la saisie des rémunérations, à l'exception des demandes ou moyens de défense échappant à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire.
Le juge de l'exécution exerce également les compétences particulières qui lui sont dévolues par le code des procédures civiles d'exécution ».

L’article L.122-2 du Code des procédures civiles d'exécution dispose « L'huissier de justice chargé de l'exécution a la responsabilité de la conduite des opérations d'exécution. Il est habilité, lorsque la loi l'exige, à demander au juge de l'exécution ou au ministère public de donner les autorisations ou de prescrire les mesures nécessaires ».

La société LEROI & ASSOCIES conteste d’une part la recevabilité de la société TAF et d’autre part la compétence du juge de l'exécution. L’étude de commissaires de justice souligne que la saisie conservatoire n’a pas été contestée par la société TAF et qu’il a été ordonné la mainlevée de la mesure d’exécution litigieuse.

La société TAF rappelle que le juge de l'exécution est bien compétent pour connaître de l’action en responsabilité exercée par le débiteur saisi à l’encontre du commissaire de justice sur le fondement du droit commun. Le juge de l'exécution est compétent pour examiner les demandes de réparation fondées sur l’exécution ou l’inexécution dommageables des mesures d’exécution forcée sans qu’il y ait lieu de distinguer si elles

sont toujours en cours. Le Tribunal judiciaire est compétent pour les actions en responsabilité diligentées par le mandant contre le commissaire de justice mandaté.

Il est constant que les difficultés relatives au titre exécutoire ne relèvent du juge de l'exécution que si l’exécution forcée a été engagée. Ainsi, la jurisprudence rappelle que les difficultés relatives aux titres exécutoires et l’existence d’une mesure d’exécution forcée constituent des conditions cumulatives (Cass. Avis du 16 juin 1995, n°09-50.008). Il importe peu que la mesure d’exécution forcée soit encore en cours au moment où le juge de l'exécution statue. La loi ne donne compétence au juge de l'exécution que pour la responsabilité extracontractuelle de l’huissier de justice, l’exécution fautive du mandat relève du Tribunal de grande instance.

Par conséquent, le juge de l'exécution est compétent pour examiner la demande de condamnation de la société LEROI & ASSOCIES et la société TAF sera déclarée recevable en son action.

Sur les demandes de dommages et intérêts

Selon l’article 1240 du Code civil « tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

La société TAF reproche à l’étude de commissaires de justice d’avoir commis une faute en immobilisant ses avions alors que ces derniers sont indispensables pour assurer son activité. Concrètement les avions ont été immobilisés par la saisi des carnets de vol, l’intervention de la gendarmerie des transports aériens et dénonciation de la procédure à l’opérateur de la tour de contrôle de l’aéroport pour interdire le vol des avions. Elle précise que l’immobilisation n’était pas prévue par l’ordonnance du Président du Tribunal de commerce, laquelle se fonde sur les dispositions de droit commun du Code des procédures civiles d'exécution et non sur les articles du Code des transports.

Elle poursuit en expliquant que cette immobilisation a entraîné une perte de chiffre d’affaires et une atteinte à sa réputation et à son image. Elle précise que si seulement huit avions sur les quinze qu’elle possède ont été saisis, les avions restant correspondaient à un avion de voltige et pour le reste à des avions monomoteurs qui ne permettent pas la formation de pilotes.

L’étude LEROI & ASSOCIES rappelle que la saisie conservatoire des aéronefs a été autorisée par le président du Tribunal de commerce, sur requête de la société SNC AIR INVEST. Elle estime que la mainlevée de la saisie n’a eu lieu que pour éviter la dépréciation des aéronefs immobilisés alors même que la société TAF ne contestait pas sa dette.

De plus, l’étude de commissaire de justice met en doute le préjudice allégué en relevant que l’immobilisation réelle n’est que de trois jours en enlevant les jours de fin de semaine, et que la société disposait d’autres aéronefs. Elle note que la saisie n’a pas été contestée, ni même la seconde, pratiquée sans immobilisation, et qu’ainsi la société TAF ne peut prétendre à l’existence d’un préjudice pour son image.

En l’espèce, l’examen de l’ordonnance en date du 23 mars 2023 permet de constater que seuls les textes du Code des procédures civiles d'exécution sont visés. Toutefois, il est bien autorisée la saisie des aéronefs. Or, ces biens mobiliers étant susceptibles d’être changés de place facilement, la possibilité de garantir leur saisie par une immobilisation n’apparaît pas incohérente. La saisie des aéronefs est une saisie particulière, dérogeant aux règles de droit commun. Le spécial dérogeant au général, l’étude d’huissiers a pu

légitimement penser que l’ordonnance du Tribunal de commerce fondait la saisie des aéronefs sur le Code du transport plutôt que sur le Code des procédures civiles d'exécution.

Par conséquent, aucune faute de l’étude ne peut être caractérisée et la demande de dommages et intérêts sera rejetée.

Sur la demande d’article 700 du Code de procédure civile et sur les dépens

La société SARL TRIMAILLE AERO FORMATION (TAF), partie perdante, a succombé à l’instance, elle sera condamnée aux dépens conformément à l'article 696 du Code de Procédure Civile.

La SARL étude LEROI & ASSOCIES ayant exposé des frais non compris dans les dépens, il y a lieu de faire droit à sa demande et de condamner la partie demanderesse à lui verser la somme de 2.500 euros, en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS

Le Juge de l’exécution statuant par mise à disposition au greffe, par décision contradictoire, en premier ressort,

SE DECLARE compétent pour examiner l’action en responsabilité diligentée par la société SARL TRIMAILLE AERO FORMATION (TAF) contre la SARL étude LEROI & ASSOCIES ;

DECLARE recevable l’action de la société SARL TRIMAILLE AERO FORMATION (TAF) ;

REJETTE la demande de dommages et intérêts de la société SARL TRIMAILLE AERO FORMATION (TAF) ;

DEBOUTE la société SARL TRIMAILLE AERO FORMATION (TAF) de sa demande formée au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONDAMNE la société SARL TRIMAILLE AERO FORMATION (TAF) à payer à La SARL étude LEROI & ASSOCIES la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

REJETTE toute autre demande plus ample ou contraire des parties,

CONDAMNE la société SARL TRIMAILLE AERO FORMATION TAF aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Franck LAFON.

RAPPELLE que la décision est exécutoire de droit.

Ainsi jugé et mis à disposition au greffe, le 12 Juillet 2024. Le présent jugement a été signé par le Juge et le Greffier.

LE GREFFIER JUGE DE L’EXECUTION

Emine URER Noélie CIROTTEAU


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Versailles
Formation : Jex
Numéro d'arrêt : 23/03271
Date de la décision : 12/07/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-12;23.03271 ?
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