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09/07/2024 | FRANCE | N°23/02283

France | France, Tribunal judiciaire de Versailles, Troisième chambre, 09 juillet 2024, 23/02283


Minute n°



TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Troisième Chambre
JUGEMENT
09 JUILLET 2024



N° RG 23/02283 - N° Portalis DB22-W-B7H-RGZF
Code NAC : 58E




DEMANDERESSE :

Madame [Z] [D] épouse [J]
née le [Date naissance 1] 1948 à [Localité 6] (75),
demeurant [Adresse 4],

représentée par Maître Gwenahel THIREL de la SELARL THIREL SOLUTIONS, avocat plaidant au barreau de ROUEN et par Maître Pascale REGRETTIER-GERMAIN de la SCP HADENGUE & ASSOCIES, avocat postulant au barreau de VERSAILLES.



DÉFEN

DERESSES :

1/ La société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES (numéro de sinistre 8493096840X), société d’assurance mutuelle immatriculée au Regist...

Minute n°

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Troisième Chambre
JUGEMENT
09 JUILLET 2024

N° RG 23/02283 - N° Portalis DB22-W-B7H-RGZF
Code NAC : 58E

DEMANDERESSE :

Madame [Z] [D] épouse [J]
née le [Date naissance 1] 1948 à [Localité 6] (75),
demeurant [Adresse 4],

représentée par Maître Gwenahel THIREL de la SELARL THIREL SOLUTIONS, avocat plaidant au barreau de ROUEN et par Maître Pascale REGRETTIER-GERMAIN de la SCP HADENGUE & ASSOCIES, avocat postulant au barreau de VERSAILLES.

DÉFENDERESSES :

1/ La société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES (numéro de sinistre 8493096840X), société d’assurance mutuelle immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LE MANS sous le numéro 775 652 126 dont le siège social est situé [Adresse 3], agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,

représentée par Maître Alain CLAVIER de l’ASSOCIATION ALAIN CLAVIER - ISABELLE WALIGORA - AVOCATS ASSOCIÉS, avocat plaidant/postulant au barreau de VERSAILLES.

2/ La société ALLIANZ IARD (numéro sinistre B300.033.0477), société anonyme immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de NANTERRE sous le numéro 542 110 291 ayant son siège social situé [Adresse 2], représentée par son Président en exercice domicilié en cette qualité audit siège,

représentée par Maître Mathieu CENCIG, avocat plaidant/postulant au barreau de VERSAILLES.

PARTIE INTERVENANTE :

La société MMA IARD, société anonyme à conseil d’administration immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LE MANS sous le numéro
440 048 882 dont le siège social est situé [Adresse 3], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

représentée par Maître Alain CLAVIER de l’ASSOCIATION ALAIN CLAVIER - ISABELLE WALIGORA - AVOCATS ASSOCIÉS, avocat plaidant/postulant au barreau de VERSAILLES.

* * * * * *

ACTE INITIAL du 03 Avril 2023 reçu au greffe le 18 Avril 2023.

DÉBATS : A l'audience publique tenue le 06 Juin 2024 Madame GARDE, Juge, siégeant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l’article 812 du Code de Procédure Civile, assistée de Madame LOPES DOS SANTOS, Greffier, a indiqué que l’affaire sera mise en délibéré au 09 Juillet 2024.

* * * * * *

EXPOSE DU LITIGE

Madame [Z] [D] épouse [J] est l’unique propriétaire, depuis
le 18 juillet 2017, d’une propriété rurale située [Adresse 4], à [Localité 5] (78), composée de bâtiments d’élevage, d’une maison d’habitation, d’un corps de bâtiment couvert en tuiles et d’une maison à usage du personnel, assurée en multirisques auprès des sociétés MMA Iard et MMA Iard Mutuelles (ci-après les MMA) dans le cadre d’une police n° 114 241 625.

Cette propriété appartenait autrefois à la SCI la Haie Montaise, dont Madame [Z] [D] épouse [J] et Monsieur [O] [D] étaient les associés. En 2005, une première déclaration de sinistre dans le cadre d’un état de catastrophe naturelle de sécheresse a été effectuée auprès de la société AGF (devenue Allianz). Des travaux ont alors été entrepris, au niveau de la maison d’habitation et de la maison à usage du personnel.

Le 18 juillet 2019, Madame [J] a procédé à une nouvelle déclaration de sinistre auprès des MMA, signalant l’apparition de fissures sur la maison d’habitation et ses dépendances consécutivement à un épisode de sécheresse survenu du 1er octobre au 31 décembre 2018, reconnu comme état de catastrophe naturelle par arrêté publié au JO le 18 juin 2019.

Après avoir saisi le cabinet Cerutti d’une demande d’expertise et la société Esiris d’une étude de sol, les MMA ont, le 26 février 2021, dénié leur garantie au motif que le caractère déterminant de l’épisode de sécheresse n’était pas établi.

Madame [J] a alors mandaté le cabinet Altais Expertises, dont les conclusions n’ont pas permis aux parties d’engager des pourparlers.

Aux termes d’une ordonnance rendue le 24 février 2022 à l’initiative de Madame [J], le juge des référés du tribunal judiciaire de Versailles a ordonné une expertise confiée à Monsieur [U] [E]. Les opérations d’expertise
ont été rendues communes à la société Allianz par décision rendue le
28 juin suivant. L’expert a déposé son rapport au mois de février 2023.

Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées au greffe par voie électronique le 19 janvier 2024, Madame [Z] [D] épouse [J] demande au tribunal de :

- Condamner solidairement Allianz et les MMA à régler à Madame [J] la somme de 153.781,27 €, déduction faite de la franchise de 1.520 € et assortie de l’indice BT01 à compter de décembre 2022,
- Condamner solidairement Allianz et les MMA à payer à Madame [J] une somme de 6.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens en ce compris les frais d’expertise,
- Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir.

Madame [Z] [J] soutient, en vertu de l’article L. 125-1 du code des assurances, être propriétaire du bien sinistré, être régulièrement assurée auprès des MMA depuis le mois de juillet 2017 et bénéficier, depuis un arrêté du
18 juin 2019, de la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle pour sécheresse sur la période courant du 1er octobre au 31 octobre 2018 à [Localité 5].

Elle indique que, lors du premier arrêté de catastrophe naturelle en 2005, la société AGF s’est contentée de mesures cosmétiques sur la maison du gardien (ravalement de façade sur trois côtés), lesquelles n’ont pas suffi à prévenir la survenance de nouveaux désordres. Elle observe, à l’instar de l’expert judiciaire, que “si les justes remèdes avaient été apportés à cette maison à l’occasion du premier arrêté de CAT-NAT, il n’y aurait probablement pas eu de deuxième procédure”. Elle rappelle, pourtant, que la garantie due au titre de l’état de catastrophe naturelle suppose, de la part de l’assureur, le financement d’une réparation intégrale et pérenne.

Elle réplique que le caractère déterminant de la sécheresse de 2003 est établi par le rapport Fondasol rédigé à l’époque ainsi que par l’origine commune des fissures observées sur la maison principale et la maison du gardien. Elle souligne que la société Allianz Iard a financé l’intégralité des travaux diligentés, ce qui prouve le lien de causalité aujourd’hui critiqué.

Elle ajoute, pour l’état de catastrophe naturelle reconnu en 2018, que l’ancienneté de la maison et l’existence de fondations hétérogènes sont des facteurs aggravants et non déterminants dans la survenance des désordres.

Elle explique, enfin, que son préjudice inclut la reprise en sous-oeuvre des fondations, la réfection du ravalement ainsi que le remboursement des frais de maîtrise d’oeuvre.

Aux termes de leurs dernières conclusions, notifiées au greffe par voie électronique le 12 janvier 2024, les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles, demandent au tribunal de :

- Recevoir l’intervention volontaire de MMA Iard et lui en donner acte,
- Débouter Madame [J] de toutes ses demandes, fins et prétentions,

A titre subsidiaire,

- Condamner la société Allianz à relever et garantir indemnes les MMA de toute condamnation,
- Débouter toute partie d’une demande plus ample ou contraire,

En tout état de cause,

- Condamner tout succombant à verser aux MMA Iard Assurances Mutuelles et Iard la somme de 5.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens en ce compris les frais d’une éventuelle exécution forcée,
- Ecarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

Les MMA contestent le caractère déterminant de l’épisode de sécheresse de 2018 dans l’apparition des désordres. Elles considèrent, à l’instar de l’expert judiciaire, que “la maison du gardien construite à la fin du XIXème siècle l’a été avec les moyens alors affectés et le savoir-faire de l’époque. Cette maçonnerie est liaisonnée par des tirants métalliques multiples qui témoignent de la mauvaise qualité de la construction, les fondations paraissant hétérogènes. Il n’est pas besoin de phénomène climatique comme la sécheresse épisodique altérant les terrains argileux pour provoquer la dislocation d’une telle construction, outre l’effet du temps”.

Elles ajoutent que les désordres dénoncés ne sont que l’aggravation de ceux présents en 2003, pour lesquels un simple traitement esthétique a été apporté. Elles en tiennent pour preuve les propos de l’expert selon lesquels leurs causes ne peuvent être utilement distinguées.

Elles sollicitent, à titre subsidiaire, la garantie de la société Allianz Iard, celle-ci n’ayant pas procédé, lors de la mobilisation de sa garantie, à une réparation intégrale et pérenne des causes des désordres affectant la maison du gardien.

Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées au greffe par voie électronique le 20 décembre 2023, la société Allianz Iard demande au tribunal de :

- Débouter Madame [J], MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles de l’intégralité de leurs demandes,
- Condamner Madame [J] à lui payer la somme de 1.500 € au titre des frais irrépétibles exposés,
- Condamner Madame [J] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Mathieu Cencig,

A titre subsidiaire,

- Réduire les prétentions indemnitaires de Madame [J] à de plus justes proportions,
- Condamner Madame [J] et la société MMA Iard à relever et garantir la société Allianz chacune à hauteur d’un tiers du montant des condamnations qui seraient prononcées à son encontre,
- Débouter Madame [J], MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles de toutes demandes, fins et prétentions contraires,
- Statuer ce que de droit sur les frais irrépétibles et les dépens.

La société Allianz Iard expose, au visa des articles 1103, 1104, 1240 du code civil et L. 125-1 du code des assurances, que les conditions de mobilisation de la garantie catastrophe naturelle ne sont pas réunies, l’épisode de sécheresse n’étant pas la cause déterminante du sinistre.

Elle ajoute que, tierce au contrat d’assurance souscrit par le précédent propriétaire, Madame [J] ne rapporte pas la preuve de la mauvaise exécution du contrat d’assurance alors souscrit et du lien de causalité direct et certain entre le manquement allégué et le préjudice invoqué.

Elle souligne que le principe indemnitaire de l’article L. 121-1 du code des assurances, d’ordre public, doit être respecté et se réfère, au soutien d’un partage de responsabilité, aux conclusions de l’expertise judiciaire selon lesquelles les désordres consécutifs aux mouvements de sols caractérisés de 2005 et 2018, et ceux liés au caractère rustique de la construction, ne peuvent être utilement distingués.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 mars 2024.

MOTIFS

Les dispositions issues de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations étant applicables aux contrats conclus à compter du 1er octobre 2016, il sera fait référence, dans le présent jugement, à l’ancienne numérotation du code civil.

Sur la mobilisation de la garantie catastrophe naturelle

L’article L. 125-1 du code des assurances dispose notamment que “les contrats d'assurance, souscrits par toute personne physique ou morale autre que l'Etat et garantissant les dommages d'incendie ou tous autres dommages à des biens situés en France, ainsi que les dommages aux corps de véhicules terrestres à moteur, ouvrent droit à la garantie de l'assuré contre les effets des catastrophes naturelles, dont ceux des affaissements de terrain dus à des cavités souterraines et à des marnières sur les biens faisant l'objet de tels contrats.
Sont considérés comme les effets des catastrophes naturelles, au sens du présent chapitre, les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises.
L'état de catastrophe naturelle est constaté par arrêté interministériel qui détermine les zones et les périodes où s'est située la catastrophe ainsi que la nature des dommages résultant de celle-ci couverts par la garantie visée au premier alinéa du présent article (...)”

Sur la responsabilité d’Allianz Iard (venant aux droits d’AGF)

En application de l’article 12 du code de procédure civile, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables. Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.

En vertu de l’article 1382 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Il est de principe qu’un manquement contractuel peut être constitutif d’une faute délictuelle à l’égard d’un tiers. Dans ce cas, pour être indemnisé, le tiers au contrat doit établir un lien de causalité entre le manquement contractuel et le dommage subi.

En l’espèce, Madame [Z] [J], à laquelle incombe la charge de la preuve, ne communique pas le contrat d’assurance habitation ayant lié la SCI la Haie Montaise à l’AGF, devenue Allianz Iard. Néanmoins, les relations contractuelles ayant lié les parties sont reconnues de part et d’autre. Elles seront donc considérées comme acquises aux débats.

Pour mémoire, la propriété litigieuse est composée de plusieurs corps de bâtiment : un bâtiment d’origine du 18ème siècle, une longère du 19ème siècle accolée au bâtiment précédent et formant avec lui un ensemble en L, une maison de gardien ainsi que des dépendances. Seuls le bâtiment d’origine (composant la maison d’habitation) et la maison de gardien auraient, selon les déclarations de Madame [J], été concernés par la réalisation de travaux en 2010 avec, pour le premier, une reprise en sous-oeuvre avec des micropieux et longrines et, pour le second, un ravalement de façade. Ces allégations, qui ne sont ni confirmées ni infirmées par l’assureur, ne sont pas justifiées par les pièces versées aux débats, seules quelques photographies non datées étant produites.

Au soutien de ses prétentions, Madame [J] produit un arrêté du
11 janvier 2005 relatif à la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle
pour les mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et
à la réhydratation du sol de juillet à septembre 2003 sur la commune de [Localité 5] dans le département des Yvelines.

Elle se réfère, par ailleurs, à divers extraits du rapport d’études de la société Fondasol du 9 janvier 2006 aux termes duquel la maison de gardien, élevée sur deux niveaux, est constituée de murs en pierres, recouverts sur les façades Sud et le pignon Ouest d’un enduit. Des tirants métalliques sont visibles et semblent former un chaînage entre le premier et le second niveau avec une extension en briques au niveau du pignon Est. Les pages du rapport versées aux débats font part des investigations géologiques, hydrogéologiques et géomécaniques entreprises. Il est notamment indiqué que “les désordres [affectant la longère du XIXème siècle] semblent se rapprocher dans leur nature et leur origine, de ceux observés sur la maison de gardien” / “pour la maison de gardien, la valeur de bleu du sol d’assise limono-argileux, est plus basse, caractéristique d’un sol moins plastique et moins sensible”.

Ces pièces ne suffisent pas à déterminer la cause des fissures initialement apparues sur la maison de gardien ce d’autant que, contrairement à ce qu’affirme Madame [J], la société Fondasol ne les a pas comparées à celles relevées sur la maison d’habitation, mais à celles observées sur la longère (dont la structure n’a pas été examinée). Elles ne suffisent pas davantage à retenir la garantie catastrophe naturelle de l’assureur, la nature des travaux engagés et le cadre dans lequel ces derniers l’ont été n’étant pas démontrés. En tout état de cause, si l’expert judiciaire indique aux termes de son rapport que “si les justes remèdes avaient été apportés à cette maison à l’occasion du premier arrêté de CAT-NAT, il n’y aurait probablement pas eu de deuxième procédure”, il relève aussi et surtout que la maçonnerie de la maison témoigne “de la mauvaise qualité de la construction, les fondations paraissant hétérogènes” avant de souligner qu’il n’est “pas besoin de phénomènes climatiques comme la sécheresse épisodique altérant les terrains argileux pour provoquer la dislocation d’une telle construction, outre l’effet du temps” et de conclure qu’il est “impossible de distinguer les désordres consécutifs à ces deux mouvements de sols caractérisés [de 2003 et 2018], comme ceux intrinsèquement liés à cette construction rustique”. En d’autres termes, le caractère déterminant de la sécheresse de 2003 quant à l’apparition des désordres n’est pas établi, ce qui fait corrélativement échec à l’engagement de la responsabilité délictuelle de l’assureur pour inexécution fautive de ses obligations.

En conséquence, Madame [J], qui succombe dans la charge de la preuve qui lui incombe, sera déboutée de ses demandes à l’encontre d’Allianz Iard.

Sur la garantie due par les MMA

Madame [J] est devenue, à effet du 21 juin 2018, l’unique titulaire
du contrat d’assurance multirisques habitation n° 114 241 625 initialement
souscrit par la société April Entreprise Est auprès de la société Covéa Risks
le 21 mars 2011.

La publication, le 18 juin 2019, d’un arrêté portant reconnaissance de l’état
de catastrophe naturelle pour les mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols du 1er octobre 2018 au
31 décembre 2018 sur la commune de [Localité 5], dans le département des Yvelines, est établie.

Au soutien de ses prétentions, Madame [J] verse aux débats :

- un rapport du cabinet Cerutti Experts en date du 27 décembre 2019 relevant, en façade Sud, pignon Ouest et façade Nord du bâtiment des fissures et remontées capillaires, outre des fissures erratiques et un décrochage sur le mur et le dallage à l’intérieur des locaux.
La conclusion est la suivante : “Plusieurs désordres en façades se manifestent par des fissures inclinées et par des fissures verticales en allèges de fenêtres. Elles peuvent résulter des effets de la sécheresse sur le sol d’assise des fondations. Des indices particuliers ont néanmoins été relevés : remontées capillaires sur les enduits refaits récemment ; fissures du dallage du local Sud-ouest, les fissures sont erratiques, un soulèvement du dallage a été constaté ; réfection du dallage du local Nord-ouest. Ces travaux ont été réalisés du fait du dallage antérieur en mauvais état. Ces indices révèlent la présence d’eau épisodique ou plus durable. Il est donc nécessaire de vérifier les caractéristiques du terrain et le profil hydrique de celui-ci”,
- un rapport d’investigations géotechniques de la société Esiris Group en date du 29 septembre 2020,
- un courriel du 26 février 2021 par lequel l’assureur a décliné sa garantie, considérant que “les fondations sont peu profondes et le terrain est argileux. De plus, la présence d’une nappe phréatique et d’un puits situé sur le côté de la maison du gardien fragilise les sols, la présence d’eau occasionnelle conduit à l’augmentation du volume des terrains sensibles. L’expert conclut que les désordres ne sont pas la conséquence de mouvements de terrain imputables à la sécheresse d’octobre à décembre 2018 (...)”.

L’analyse de l’expert selon laquelle “il est impossible de distinguer les désordres consécutifs à la sécheresse de 2003 et à celle de 2018, comme ceux intrinsèquement liés à la construction rustique” signifie que les fissures relevées peuvent avoir plusieurs origines. Elle ne signifie cependant pas que, parmi ces facteurs, la sécheresse de 2018 ait été déterminante, c’est-à-dire qu’elle ait joué un rôle tel que, même si les mesures habituelles avaient été prises pour empêcher leur survenance (dont l’amélioration de la qualité de la construction), de nouvelles fissures seraient apparues sur la maison.

Ainsi, au regard des pièces versées aux débats, les conditions de mobilisation de la garantie catastrophes naturelles ne sont pas remplies.

En conséquence, Madame [J], qui succombe dans la charge de la preuve qui lui incombe, sera déboutée de ses demandes à l’encontre des MMA.

Sur les autres demandes

Sur les dépens

Conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

En vertu de l’article 699 du code de procédure civile, les avocats peuvent, dans les matières où leur ministère est obligatoire, demander que la condamnation aux dépens soit assortie à leur profit du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l’avance sans avoir reçu provision.

Madame [J], qui succombe en ses demandes, sera condamnée aux dépens de l’instance, en ce compris les frais de l’expertise judiciaire, avec droit de recouvrement au profit de Maître Mathieu Cencig.

Sur les frais irrépétibles

Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.

Madame [J], qui perd son procès, sera condamnée à payer aux MMA d’une part et à Allianz Iard d’autre part la somme qu’il est équitable de fixer à 1.200 € au titre des frais irrépétibles exposés.

Sur l’exécution provisoire

En application de l’article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la décision rendue n’en dispose autrement.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort,

REJETTE l’intégralité des demandes de Madame [Z] [D] épouse
[J],

CONDAMNE Madame [Z] [D] épouse [J] à payer aux sociétés MMA Iard et MMA Iard Mutuelles d’une part, et Allianz Iard d’autre part, la somme de 1.200 € chacune,

CONDAMNE Madame [Z] [D] épouse [J] aux entiers dépens de l’instance définis à l’article 695 du code de procédure civile, en ce compris les frais de l’expertise judiciaire, avec droit de recouvrement au profit de Maître Mathieu Cencig,

REJETTE les autres demandes,

RAPPELLE que l’exécution provisoire de la présente décision est de droit.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 JUILLET 2024 par Madame GARDE, Juge, assistée de Madame LOPES DOS SANTOS, Greffier, lesquelles ont signé la minute du présent jugement.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
Carla LOPES DOS SANTOS Angéline GARDE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Versailles
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 23/02283
Date de la décision : 09/07/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-09;23.02283 ?
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