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27/06/2024 | FRANCE | N°21/06590

France | France, Tribunal judiciaire de Versailles, Quatrième chambre, 27 juin 2024, 21/06590


Minute n°




TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Quatrième Chambre
JUGEMENT
27 JUIN 2024



N° RG 21/06590 - N° Portalis DB22-W-B7F-QKQX
Code NAC : 54C


DEMANDERESSE :

La société HYDROSA,
S.A.S. immatriculée au RCS de Créteil sous le numéro 810 910 828, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié audit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentée par Maître Monique TARDY de l’ASSOCIATION AVOCALYS, avocats au barreau de VERSAILLES, avocats postulant, Me Caroline LEVY TERDJMAN, av

ocat au barreau de PARIS, avocat plaidant


DEFENDEUR :

Monsieur [K] [L]
né le 08 Mai 1964 à [Localité 5]
[Adresse 1]
[Localité 3]

re...

Minute n°

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Quatrième Chambre
JUGEMENT
27 JUIN 2024

N° RG 21/06590 - N° Portalis DB22-W-B7F-QKQX
Code NAC : 54C


DEMANDERESSE :

La société HYDROSA,
S.A.S. immatriculée au RCS de Créteil sous le numéro 810 910 828, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié audit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentée par Maître Monique TARDY de l’ASSOCIATION AVOCALYS, avocats au barreau de VERSAILLES, avocats postulant, Me Caroline LEVY TERDJMAN, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

DEFENDEUR :

Monsieur [K] [L]
né le 08 Mai 1964 à [Localité 5]
[Adresse 1]
[Localité 3]

représenté par Me Fanny LE BUZULIER, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat plaidant/postulant

Copie exécutoire à Maître Monique TARDY, Me Fanny LE BUZULIER
Copie certifiée conforme à l’origninal à
délivrée le

ACTE INITIAL du 10 Décembre 2021 reçu au greffe le 14 Décembre 2021.

DÉBATS : A l'audience publique tenue le 25 Avril 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 27 Juin 2024.

COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Mme DUMENY, Vice Présidente
Monsieur BRIDIER, Vice-Président
Madame BARONNET, Juge

GREFFIER :
Madame GAVACHE

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [K] [L] a entrepris des travaux d’extension et de réhabilitation d’une maison individuelle, située au [Adresse 1].

Le cabinet CD ARCHITECTES s’est vu confier la maîtrise d’œuvre du chantier et a établi le cahier des clauses administratives particulières et des clauses techniques particulières des lots signé le 21 décembre 2017.

Un marché de travaux de plomberie et de chauffage a été signé le 22 décembre 2017 avec la société HYDROSA pour un montant de 30.273, 83euros HT soit
33.122,11 euros TTC

Par un courrier recommandé avec accusé de réception du 14 juin 2018, Monsieur [L] mis la société HYDROSA en demeure de finir le chantier intégralement et dans les règles de l’art dans un délai de 7 jours. L’entreprise a répondu par courrier recommandé du 4 juillet 2018.
Le 10 juillet 2018, Monsieur [L] a fait délivrer par huissier de justice à la société HYDROSA un courrier de résiliation du marché de travaux et a fait constater par un huissier de justice l’état d’avancement du chantier.
Un décompte général définitif a été adressé au maître de l’ouvrage le 17 juillet 2018 par la société HYDROSA, auquel l’architecte a répondu par courrier du 18 septembre 2018.

Par exploit en date du 26 septembre 2018, la société HYDROSA a assigné Monsieur [L] en référé aux fins d’obtenir la désignation d’un expert judiciaire afin de constater l’état d’avancement du chantier et d’établir le compte entre les parties. Par ordonnance de référé en date du 4 décembre 2018, Monsieur [B] a été désigné en qualité d’expert judiciaire.

Monsieur [B] a déposé son rapport le 7 décembre 2020 après un seul rendez-vous et une note aux parties, la consignation complémentaire qu’il sollicitait pour poursuivre sa mission n’ayant pas été versée.

Par exploit en date du 10 décembre 2021, la société HYDROSA a donné assignation à Monsieur [L] aux fins d’obtenir le paiement du solde du marché de travaux et le versement de dommages intérêts pour résistance abusive.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 12 juin 2023, elle demande au tribunal, au visa des articles 1794, 1103, 1104 et 1193, 1240, 1231-6 et 1353 du code civil, de :

- La recevoir en ses demandes et les juger bien fondées

A titre principal,
- Condamner Monsieur [L] à lui verser la somme en principal de 18.982,54 € au titre du solde du marché, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 10 juillet 2018, date de la résiliation unilatérale du marché par le Maître d’ouvrage,

A titre subsidiaire,
- Condamner Monsieur [L] à lui verser la somme en principal de 13.604,89 € au titre de l’avancement des travaux, telle que mentionnée dans le décompte général définitif du 17 juillet 2018, augmentée des intérêts au taux légal à compter de cette date,

En tout état de cause,
- Débouter Monsieur [L] de ses demandes formées à son encontre
- Ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1231-6 du Code civil,
- Condamner Monsieur [L] à lui payer la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive dans le paiement de la créance contractuelle,
- Condamner Monsieur [L] au paiement de la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- Condamner Monsieur [L] aux entiers dépens, en ce compris les frais d’expertise.
- Rappeler le caractère exécutoire de droit de la décision à intervenir.

Dans ses dernières écritures échangées le 28 août 2023, Monsieur [L] demande au tribunal, sur le fondement des article 1103, 1104, 1231-6 et 1240 du code civil, de:
- Le dire recevable et bien fondé en ses demandes, fins et prétentions
- Débouter la société HYDROSA de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions
- Condamner la société HYDROSA à lui verser la somme de 8.300,77€ à titre reconventionnel
- Condamner la société HYDROSA à lui verser la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile

- Condamner la société HYDROSA aux entiers dépens incluant les frais d’expertise judiciaire
- Rappeler que l’exécution provisoire est de droit

* * * *

Ainsi que le permet l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières conclusions des parties pour l’exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

L’instruction a été clôturée par ordonnance du 19 septembre 2023 et le dossier a été appelé à l’audience tenue le 25 avril 2024 par la formation collégiale qui a mis la décision en délibéré ce jour.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de paiement de la société HYDROSA

La société HYDROSA fait valoir que le maître d’ouvrage a accepté un devis en date du 22 novembre 2017 d’un montant de 33.122,11 euros TTC et un devis complémentaire proposé, d’un commun accord entre les parties, le 18 juin 2018 pour un montant de 2.140,60 euros TTC.

Elle soutient que Monsieur [L] a résilié unilatéralement le marché ainsi conclu en lui reprochant à tort des manquements dans la réalisation des travaux et qu’il est donc redevable, aux termes de l’article 1794 du code civil, de l’intégralité du marché incluant les dépenses engagées par la société, les travaux réalisés, et tout ce qu’elle aurait pu gagner dans cette entreprise.

Elle reconnaît que le défendeur a versé les sommes de 1.362,43 euros au titre de l’avance forfaitaire, 7.148,56 euros au titre du règlement n°1 et 8.469,18 euros en règlement de la facture 18-06-21, soit un montant total de 16.280,17 euros qui doit être déduit du montant du marché, et réclame dès lors au maître d’ouvrage le solde de 18.982,54 euros.

Elle conteste tout retard dans l’exécution des travaux et soutient que le planning a été recalé à cinq reprises.

Elle considère qu’aucun manquement ne peut lui être reproché, l’objectivité des comptes-rendus de chantier pouvant être mise en doute dès lors qu’ils ont été rédigés par le frère du maître d’ouvrage (en qualité de maître d’oeuvre), que les courriers produits par le maître d’ouvrage démontrent une immixtion de sa part dans le chantier et ne peuvent être pris en compte, n’ayant pas été rédigés par un homme de l’art, de même que le procès-verbal de constat qui a en outre été réalisé alors que les travaux n’étaient pas achevés.

Elle fait encore valoir que l’expert judiciaire n’a pas relevé de manquements dans la réalisation de ses travaux pouvant justifier la résiliation unilatérale du marché.

Elle répond au défendeur qu’elle a fourni les plans d’exécution par mail du 1er mai 2018, qu’elle a également produit les fiches d’exécution et a toujours répondu aux demandes de la maîtrise d’ouvrage concernant l’état d’avancement de ses travaux.

Elle souligne que la chaudière a été commandée mais n’a pas été installée du fait de la résiliation unilatérale injustifiée du marché par le défendeur de sorte qu’elle ne peut se voir imputer le coût de cette commande.

Elle conteste le décompte du maître d’oeuvre, la moins-value de 3.000 euros n’étant pas justifiée et les travaux de la société HUSSON ne pouvant lui être imputés alors que l’inachèvement de ses prestations est uniquement dû à la résiliation unilatérale injustifiée de Monsieur [L] et que le devis de cette société ne correspond pas au marché initial.

Monsieur [L] soutient que l’expertise judiciaire n’a pu être menée à son terme par la faute de la société HYDROSA qui n’a pas consigné les sommes réclamées et ne justifie pas des difficultés financières alléguées, de sorte qu’aucune analyse technique contradictoire et objective de la situation contractuelle n’a pu avoir lieu.

Il rappelle que l’ordre de service relatif aux travaux dont l’entreprise était chargée précisait que les travaux devaient commencer le 2 janvier 2018 et devaient être livrés sous 17 semaines et que la société HYDROSA a signé le planning détaillé daté du
4 décembre 2017 établi par le maître d’œuvre et donc accepté les délais impératifs de réalisation.

Il affirme que la société HYDROSA a cassé des plafonds en enlevant les radiateurs, a négligé les réunions de chantier, s’est abstenue de présenter les fiches techniques des équipements à installer et les plans d’exécution et a réalisé ses prestations sans respecter le marché et les règles de l’art, ce que démontrent les compte-rendus des réunions de chantier.

Il considère que l’expert a commis une erreur d’appréciation en pensant que le chantier était un chantier complet et non une reprise de chantier. Il soutient qu’il ressort des compte-rendus de chantier que les retards de la société ne sont pas liés aux autres lots comme l’expert l’a suggéré mais au retard sur les alimentations de la demanderesse.

Il admet que la société HYDROSA n’était pas tenue d’assister à l’ensemble des réunions mais précise qu’elle était convoquée par le maître d’oeuvre lorsque sa présence était nécessaire, ou lorsqu’elle avait été absente à une réunion à laquelle elle était convoquée, ce qui s’est produit à plusieurs reprises. Il souligne que l’entreprise n’a pas demandé d’exonération de présence aux réunions et n’a jamais averti le maître d’oeuvre de ses absences.

Il dénie toute immixtion fautive mais indique qu’il a dû intervenir du fait de la défaillance de la société dont les carences étaient mises en évidence par le maître d’œuvre.

Il rappelle qu’il a adressé dès le 12 avril 2018 un courrier à l’entreprise aux fins de constater ses carences, l’abandon de chantier, et de la mettre en demeure de reprendre le chantier, se présenter aux réunions et remettre le dossier technique demandé, et qu’il l’a relancée plusieurs fois par la suite, ses retards étant également signalés dans les comptes-rendus de chantier.

Il reproche à la société HYDROSA outre le retard du chantier, les réseaux apparents au lieu d’être encastrés, des radiateurs installés à un emplacement gênant, une douche inutilisable, un chauffage inefficace ainsi que les odeurs d’égout des évacuations. Il fait valoir que le maître d’oeuvre a retenu un retard de 10 semaines imputable à la société HYDROSA.

Il se considère dès lors fondé à résilier unilatéralement le marché aux torts exclusifs de l’entreprise en application de l’article 1794 du code civil d’autant qu’il lui avait préalablement envoyé des courriers de mise en demeure.

****

Il résulte des articles 1103 et 1104 du code civil que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits et qu’ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

En l’espèce, les parties s’accordent sur le fait que le marché a été résilié par le maître d’ouvrage le 10 juillet 2018.

Toutefois, l’entreprise considère que du fait de cette résiliation unilatérale, le paiement de la totalité du marché lui est dû alors que le défendeur soutient avoir résilié aux torts exclusifs de la société et ne lui devoir que le montant des travaux réalisés, déduction faite des pénalités de retard et des moins-values applicables pour non-façons et malfaçons.

Pour justifier la résiliation aux torts exclusifs de la demanderesse, le maître d’ouvrage lui reproche :
- un retard dans la réalisation du chantier,
- des non-façons, malfaçons et non-conformités au marché et aux règles de l’art,
- l’absence de communication des fiches techniques et plans d’exécution,
- ses absences répétées aux réunions de chantier.

Il convient donc de rechercher les conditions dans lesquelles le marché a été résilié afin d’être en mesure de déterminer si des montants restent dus à la société HYDROSA par Monsieur [L].

- Sur la résiliation

L’article 1794 du code civil prévoit que le maître d’ouvrage peut résilier, par sa seule volonté, le marché à forfait, quoique l'ouvrage soit déjà commencé, en dédommageant l'entrepreneur de toutes ses dépenses, de tous ses travaux, et de tout ce qu'il aurait pu gagner dans cette entreprise.

Le maître de l'ouvrage qui a résilié un marché à forfait sur le fondement de cet article n'est pas privé de la possibilité de se prévaloir des manquements de l'entrepreneur à ses obligations contractuelles.

Il ressort des pièces versées aux débats que la société HYDROSA a établi un devis le 22 novembre 2017 adressé à Monsieur [L] et annoté à la main prévoyant la réalisation des lots plomberie et chauffage comprenant :

Pour le lot plomberie
- reprise de l’installation existante, révision des canalisations et sujétions de passage de l’ensemble des canalisations EF EC et évacuations
- WC type GEBERIT
* 2 cuvettes compris abattant, réservoir, robinet d’arrêt et raccordement
* lave main d’angle compris robinetterie et meuble
- Salle d’eau
* fourniture et pose de 2 vasques
* fourniture et pose de 2 meubles vasque
* fourniture et pose de 2 mitigeurs
* 2 bacs à douche type WEDI compris mitigeur thermostatique et pare douche
* baignoire balnéo acrylique compris mitigeur, raccordement électrique et mise en oeuvre
* douche pluie thermostatique
* pare douche
- Cuisine
* attentes diverses pour LL, MAL et évier
* mitigeur pour évier récupéré
* fourniture et pose de cuivre pour réseau gaz en cuisine
* fourniture et pose de 2 robinets à obturation automatique intégré
- Sous-sol
* attentes diverses pour LL et bac à laver
* 2 robinets de puisage compris purge et pose côté extérieur
* fourniture et pose d’une pompe de relevage de type SFA

Pour le lot chauffage
- chaudière à condensation gaz 25KW avec sortie ventouse avec ballon 130l ELM Leblanc
- cheminée toit
- canalisations encastrées chauffage en PER
- fourniture et pose de 3 radiateurs sèche serviette
- fourniture et pose de 16 radiateurs muraux acier FINIMETAL
- mise en place de 15 robinets thermostatiques DANFOSS
- mise en place de 4 robinets manuels DANFOSS
- mise en place de 19 Tés de réglage DANFOSS
- raccordement grenier
- fourniture et pose de tube de gaz de type cuivre du coffret gaz en clôture jusqu’à la chaudière
- fourniture et pose d’une vanne de coupure gaz en dessous de la chaudière
- fourniture d’un certificat QUALIGAZ

Le montant total des travaux initialement prévu de 33.301,21 euros TTC a été corrigé à la main pour être porté à 33.122,11 euros TTC.

Le document n’est pas signé mais les parties s’accordent sur le fait qu’il matérialise leur accord sur les prestations devant être réalisées et le prix correspondant.

La demanderesse soutient que le paiement des travaux supplémentaires prévus au devis du 12 juin 2018 pour un montant total de 2.140,60 euros TTC lui est également dû, ce que le défendeur conteste. Force est toutefois de constater que le devis produit n’est pas signé et que l’entreprise ne rapporte pas la preuve d’un accord du maître d’ouvrage sur ces travaux supplémentaires et leur coût, de sorte que ce devis ne peut être considéré comme liant contractuellement les parties.

La société HYDROSA a signé le 21 décembre 2017 avec le maître d’oeuvre le cahier des clauses administratives particulières (CCAP) qui précise que le marché est conclu entre Monsieur [L], assisté de CD Architectes, et l’entreprise, qu’il s’agit d’un marché à prix global, forfaitaire, ferme et actualisable et que les travaux modificatifs doivent faire l’objet d’un accord préalable écrit du maître de l’ouvrage.

Pour le paiement des prestations, le CCAP prévoit que l’entrepreneur remet chaque mois au maître d’oeuvre un état de situation qui est présenté sous forme cumulative de l’avancement des travaux. Les acomptes sont payés dans les 30 jours de la remise de l’état de situation au maître d’oeuvre et le solde, amputé de la retenue de garantie de 5%, dans les 45 jours après l’expiration du délai défini au cahier des clause administratives générales (CCAG) pour la signification du décompte définitif.

L’article 15 “résiliation” du CCAP stipule que “le marché peut être résilié dans les conditions et formes définies à l’article 22 du CCAG”. Le tribunal constate toutefois que le CCAG n’est pas produit par les parties.

L’article 5 “délais” indique que le délai global d’exécution de l’ensemble des lots est fixé dans l’acte d’engagement et que les délais d’exécution de chaque lot s’inscrivent dans le délai global d’exécution, conformément au calendrier prévisionnel général d’exécution et partent de la première intervention de l’entrepreneur.

Dans l’acte d’engagement signé le même jour par la société HYDROSA, celle-ci s’engage à effectuer les travaux prévus pour un prix total de 33.122,11 euros TTC dans un délai de 17 semaines à compter des dates inscrites sur l’ordre de service prescrivant le commencement des travaux.

L’ordre de service de démarrage de chantier n°1 signé par l’entreprise et le maître d’ouvrage fixant la date de début d’exécution des prestations au 2 janvier 2018, les travaux devaient donc s’achever 17 semaines après cette date, soit le 1er mai 2018.

Le défendeur a mis en demeure l’entreprise de terminer le chantier à deux reprises, par courriers recommandés du 12 avril 2018 et du 14 juin 2018 dans lesquels il demandait également que la totalité des descriptifs techniques et des plans d’exécution lui soit fournie.

Dans un courrier recommandé du 4 juillet 2018, la société HYDROSA considère que toutes ses prestations sont réalisées à l’exception de la pose des radiateurs et du lave-main. Elle explique son retard en indiquant :
- que le retard est collectif
- qu’elle est en attente de l’achèvement de la peinture pour la pose des radiateurs, étant précisé qu’ils avaient été posés mais qu’ils ont été déposés par les peintres
- qu’elle a posé la baignoire comme demandé dans le compte-rendu de chantier n°19B et qu’elle refuse dès lors de la déposer pour la réalisation du carrelage
- qu’elle n’a pas reçu de paiement depuis mars 2018.

Elle indique joindre à ce courrier les plans d’exécution réclamés et demander au maître d’ouvrage de valider la situation n°18-06-21 qui présente un pourcentage d’avancement égal à 75% et de reconsidérer les accusations qu’il porte à son encontre.

Dans un courrier du 9 juillet 2018 signifié par huissier à la société HYDROSA, Monsieur [L] répond que l’installation est incomplète et non fonctionnelle, que les travaux réalisés ne sont conformes ni aux règles de l’art, ni au marché, ni aux préconisations des fabricants. Il prend acte du refus de réaliser les prestations contractuelles notifié selon lui par l’entreprise dans son courrier du 4 juillet et dans un courriel du 5 juillet et résilie en conséquence le marché aux torts et griefs de la société. Il lui fait interdiction de revenir sur le chantier et exige la remise des clés.

Le procès-verbal de constat d’huissier du 10 juillet 2018 réalisé en présence des parties montre que les travaux confiés à la société HYDROSA n’étaient pas terminés à cette date.

Dans son rapport d’expertise judiciaire déposé en l’état le 7 décembre 2020, Monsieur [B] conclut, après l’unique réunion d’expertise du 16 août 2019 :
“- au titre du retard allégué : que le planning des travaux ne prévoyait pas une durée suffisante et de ce fait le retard mis à la charge de la société HYDROSA ne nous paraît pas justifié
- au titre des pénalités pour les absences aux réunions de chantier : elles nous semblent sévères puisque l’entreprise ne pouvait pas être tenue d’assister à toutes les réunions
- sur la qualité d’exécution des ouvrages : il est difficile de porter un avis précis puisque nos constatations relèvent d’un état de travaux achevés par une tierce entreprise. Seuls les constats d’huissier peuvent apporter des informations. Mais le constat a été fait sur des installations et travaux non achevés.
- sur la conformité par rapport aux documents contractuels : il a été observé pour la plomberie, notamment pour l’appareillage sanitaire, de nombreuses distorsions entre le devis HYDROSA et le CCTP mais il semble finalement que cela procède des choix différents opérés par la maîtrise d’ouvrage.
En revanche pour la chaudière, celle mise en place ne correspond pas au devis de la société HYDROSA, notamment pour le principe de l’eau chaude sanitaire.”

- sur le retard

Le seul planning de tâches produit par le défendeur, revêtu de paraphes non identifiés, prévoit un commencement de l’ensemble des travaux de rénovation “indice A” la première semaine de janvier 2018 et une réception la deuxième semaine de mai 2018. Selon ce planning, les travaux de plomberie, chauffage, VMC doivent se dérouler sur 3 semaines, entre fin mars et début avril, pour les appareils et le sous-sol. Les travaux du rez-de-chaussée et du 1er étage n’apparaissent pas sur ce planning qui est donc incomplet.

De plus, l’expert judiciaire indique dans son rapport que cinq plannings ont été établis par le maître d’oeuvre entre le 4 décembre 2017 et le 1er juin 2018, les dates

initialement fixées ayant été recalées à plusieurs reprises par mise à jour successives, or seul le premier planning est versé aux débats.

L’expert considère que le premier planning constitue une prévision et que le cinquième représente la réalité du chantier et précise qu’il y a entre les deux un écart moyen de 14 semaines pour les travaux du rez-de-chaussée et 11 semaines pour ceux de l’étage du fait du “glissement” du calendrier prévisionnel. Il indique que le dernier planning communiqué prévoyait une fin des travaux la semaine 23 (deuxième semaine de juin). Le tribunal déplore que ces plannings successifs ne soient pas communiqués.

En tout état de cause, l’inachèvement des travaux constaté par l’huissier de justice le 10 juillet 2018, non contesté, caractérise un retard d’exécution par rapport au délai contractuellement prévu.

Toutefois, l’entreprise le justifie en grande partie par le fait que les peintures n’étaient pas finies, ce qui l’empêchait de poser les radiateurs et lave- mains. Elle reproche plus généralement aux intervenants en charge des autres lots d’avoir également pris du retard ce qui a empêché la réalisation de ses prestations dans les délais prévus.

Dans les compte-rendus de chantier, aucun retard n’est signalé concernant la société HYDROSA avant le 24 avril 2018. Ceux signalés à cette date sont relatifs à :
- la transmission du dossier d’exécution sur l’ensemble des prestations (douche (encastrée, ronde Grohe, thermostatic, à cartouche), robinetteries etc.),
- la mise en oeuvre de l’aérateur de chute de type Durgo,
- le traçage à la bombe du cheminement des EV le long de l’escalier et raccordement de l’EV dans l’angle de la maison,
- la mise en place de la baignoire.

Les modèles des équipements à installer (vasques et meubles vasque, meuble lave-main) sont précisés pour la première fois dans ce compte-rendu du 24 avril mais il ressort des échanges de courriels entre l’entreprise et le maître d’ouvrage que la validation des meubles, robinets, WC était encore en cours sur le mois de mai 2018, Monsieur [L] donnant les modèles précis à Monsieur [M] dans un courriel du 16 mai 2018.

Il convient de souligner que les compte-rendus du 30 avril et des 7 et 15 mai signalent également un retard de l’entreprise de gros-oeuvre ADF Renov pour la réalisation de la chape sous la baignoire.

Dans les compte-rendus de mai, plusieurs retards sont signalés pour le lot dont est chargée la société HYDROSA mais ceux des 22 et 29 mai ne mentionnent que les retards dans la transmission de précisions relatives au dossier d’exécution et au dossier technique et la mise en place de la baignoire.

Le compte-rendu du 29 mai précise en outre que le planning de l’entreprise de gros-oeuvre doit être recalé et que la réception de l’ensemble des travaux prévue fin mai est repoussée à la deuxième quinzaine de juin.

Enfin, le dernier compte-rendu produit daté du 3 juillet 2018 indique que le dossier d’exécution a finalement été complété par le maître d’ouvrage pour les fiches techniques, que la mise en place de la baignoire est en cours et que les plans sont toujours manquants. Un retard est signalé pour les meubles et vasques des salles de douche, le pare-douche de l’étage, les colonnes de douche et le déplacement et l’encastrement des alimentations, évacuation, nourrices. Il est en outre demandé à la société de fournir un planning précis de la fin de ses interventions “dans le contexte actuel de retard important des prestations”, l’entreprise répondant qu’un tel planning est inutile au regard du peu de travail restant à réaliser.

Il ressort de ces éléments que le chantier a manifestement pris du retard ce qui a entraîné un décalage de la date d’achèvement des travaux initialement prévue au
1er mai à la deuxième quinzaine de juin, sans que les causes de ce retard apparaissent clairement. Le constat d’huissier établi en présence de la société HYDROSA montre que le 10 juillet, plusieurs prestations prévues au devis n’étaient pas réalisées et notamment la pose du lave-main, des radiateurs, du thermostat de la chaudière, des plaques de double touche des WC, le rebouchage des perçages et l’encastrement des canalisations du chauffage en PER, l’entreprise répondant que les prestations ne pouvaient être réalisées du fait des peintures en cours. L’auxiliaire de justice indique néanmoins que les peintures sont terminées au rez-de-chaussée, la pose d’un partie des éléments était donc possible contrairement à ce que soutient l’entreprise.

Il convient toutefois de noter que l’expert judiciaire considère que la durée des travaux prévue initialement dans l’ordre de service était trop courte au regard de l’importance du chantier pour la demanderesse mais également pour les autres entreprise intervenantes, ce qui est confirmé par les cinq recalages de planning, et que la responsabilité de la société dans le retard n’est pas démontrée, la défaillance de l’entreprise en charge du gros oeuvre ayant pu contribuer à ce retard.

Il ne ressort toutefois pas des éléments versés aux débats, et notamment des compte-rendus de chantier, que le retard de l’entreprise chargée du gros oeuvre a empêché la société HYDROSA de réaliser ses prestations, à l’exception du retard dans la réalisation de la chape de la baignoire mentionné dans trois compte-rendus d’avril et mai.

Il en résulte que la société HYDROSA a bien réalisé ses prestations avec retard mais que, la date de fin des travaux ayant été repoussée pour l’ensemble des entreprises à la deuxième quinzaine de juin dans les compte-rendus, et aucun planning précis et à jour n’étant produit, l’entreprise ne peut être considérée comme défaillante dans l’exécution de ses prestations avant le 30 juin 2018. Le retard qui lui est imputable se limite donc à 9 jours, entre la fin du mois de juin et la signification du courrier de résiliation.

- sur la fourniture des fiches techniques et plans d’exécution

L’article 9 “préparation de l’exécution” du CCAP stipule que l’entrepreneur doit établir et présenter au visa du maître d’oeuvre les documents d’exécution des travaux dans la période de préparation de 15 jours à compter de la notification du marché et doit également établir ou faire établir “tous dessins d’exécution, calepins, épures, tracés, détails, ainsi que toutes notes de calcul, notes explicatives et notes justificatives nécessaires à l’exécution des travaux”.

Il ressort des échanges de courriels et des compte-rendus de chantier que les fiches techniques et plans d’exécution ont été transmis au maître d’oeuvre avec un retard très important et après de nombreuses relances.

La société HYDROSA a envoyé des fiches techniques au maître d’ouvrage, avec le maître d’oeuvre en copie, par courriel du 1er mai 2018 et les fiches techniques manquantes ont été fournies directement par Monsieur [L] le 16 mai suivant, cependant, des discussions étant en cours entre les parties sur le choix des équipements jusqu’en mai, il n’apparaît pas clairement que le retard de production de ces fiches soit totalement imputable à la société.

Toutefois, il n’est pas contesté qu’elle n’a communiqué les plans d’exécution que le 4 juillet 2018, alors que les travaux étaient déjà très avancés, et qu’elle a donc commis un manquement à ses obligations contractuelles en ne fournissant pas ces plans dans la période de préparation comme prévu au CCAP.

- sur les malfaçons et non-conformités

Dans son courrier du 9 juillet 2018, le maître d’ouvrage justifie sa décision de résilier le marché également par le fait que l’installation réalisée “n’est ni conforme aux règles de l’art, ni au marché, ni aux préconisations des fabricants. Ces manquements multiples à la qualité d’exécution constituent une tromperie”. Il ajoute que l’entreprise refuse de réaliser ses prestations dans les termes du contrat.

Pour démontrer la mauvaise exécution du marché par la demanderesse, il verse aux débats une liste de “malfaçons et non façons du 10 juillet 2018" reprenant selon lui les constatations de l’huissier. Toutefois, force est de constater que cette liste mentionne de nombreuses malfaçons et non façons non constatées par l’huissier dans son procès-verbal et qu’elle n’a pas été établie de façon contradictoire et ne peut donc être prise en compte.

Il reproche en outre à l’entreprise dans ses écritures les réseaux apparents au lieu d’être encastrés, des radiateurs installés à un emplacement gênant, une douche inutilisable, un chauffage inefficace ainsi que les odeurs d’égout des évacuations. Toutefois, s’il n’est pas contesté que les travaux n’étaient pas achevés au moment de la résiliation intervenue à l’initiative du maître de l’ouvrage le 9 juillet 2018, celui-

ci ne rapporte pas la preuve des malfaçons alléguées, le constat mentionnant essentiellement des non-façons ou des malfaçons que l’entreprise s’engage à rectifier.

L’expert judiciaire a de surcroît précisé qu’il ne pouvait pas faire de constatations concernant ces malfaçons, les travaux ayant été achevés par une autre entreprise, et qu’il convenait donc de se reporter au constat d’huissier qui a toutefois été réalisé alors que les travaux n’étaient pas terminés, les éventuelles malfaçons relevées par l’officier public n’ayant donc pas de caractère définitif.

Monsieur [B] relève une seule non-conformité au contrat concernant le modèle de chaudière. Il indique que la chaudière posée étant de type production d’eau chaude instantanée, elle ne correspond pas à la chaudière avec ballon d’eau chaude de
130 litres prévue au devis. Il ignore la raison de ce changement et précise uniquement que le débit d’eau chaude pour le modèle contractuellement prévu est légèrement supérieur à celui de la chaudière installée.

Le compte-rendu de chantier du 15 février 2018 indique que “la chaudière sera de marque ELM Leblanc Megalis condens 25kW”, le changement de modèle par rapport au devis, qui n’est d’ailleurs pas reproché par le défendeur dans ses courriers de mise en demeure et de résiliation, semble donc avoir été décidé par le maître d’oeuvre, rédacteur des compte-rendus, ou par le maître d’ouvrage et non par l’entreprise.

Concernant la douche, la société HYDROSA répond dans son courriel du 5 juillet 2018 que son positionnement a été décidé par le maître d’ouvrage et ni le constat d’huissier, qui ne mentionne que la hauteur de la barre transversale, ni le rapport d’expertise judiciaire ne permettent de conclure à l’existence une malfaçon d’autant que la hauteur de la douche n’est précisée ni dans le devis ni dans le cahier des clauses techniques particulières.

Enfin, il ne ressort nullement des échanges entre les parties que le professionnel aurait refusé de poursuivre le chantier dans les conditions du marché comme l’affirme le défendeur dans son courrier de résiliation. Le seul refus opposé par la demanderesse dans son courrier du 4 juillet concernant la baignoire, posée pour se conformer aux compte-rendus, qu’elle n’acceptait pas de déposer pour la réalisation des carrelages ; or, le maître d’ouvrage et le maître d’oeuvre ayant exigé la pose de la baignoire en indiquant dans plusieurs compte-rendus que l’entreprise était en retard pour ce poste, le défendeur ne peut valablement lui reprocher son refus de la déposer.

Compte-tenu de ces éléments, aucune malfaçon ou non-conformité ne peut être imputée à la société HYDROSA.

- sur les absence aux réunions de chantier

Le défendeur soutient que la société HYDROSA n’a pas respecté son obligation d’assister aux réunions de chantier alors qu’elle n’avait été convoquée que lorsque sa présence était nécessaire, ou lorsque elle avait été absente de la réunion précédente, ce qui a été le cas tout au long du chantier.

L’entreprise considère pour sa part qu’elle n’était pas tenue d’assister à toutes les réunions, comme le relève l’expert judiciaire.

L’article 2.1 “présence aux rendez-vous de chantier” du CCAP prévoit pourtant que l’entrepreneur est “tenu d’assister aux rendez-vous de chantier provoqués par le maître d’ouvrage ou d’y déléguer un agent qui a pouvoir pour donner sur le champ les ordres nécessaires sur le chantier.” et ajoute que “Le maître d’oeuvre détermine en début de travaux la date et l’horaire des rendez-vous hebdomadaires de chantier.
Le programme de participation de l’entrepreneur aux rendez-vous de chantier doit tenir compte du montant et de la nature des travaux.”

L’expert judiciaire constate que sur 21 compte-rendus établis entre le 10 janvier et le 3 juillet 2018, la société HYDROSA a été présente à 12 réunions étant toutefois précisé qu’elle n’était pas convoquée à la réunion du 24 janvier. Elle a donc été absente 8 fois bien que dûment convoquée, ce qui constitue un manquement contractuel.

****

Il résulte de ce qui précède que du fait du retard dans l’exécution de ses prestations, de l’absence de communication des plans d’exécution dans le délai prévu et de son absence à plusieurs réunions de chantier auxquels elle était convoquée, la société HYDROSA a manqué à ses obligations contractuelles.

La résiliation notifiée par le maître d’ouvrage le 9 juillet 2018 après mise en demeure d’exécuter ses obligations est dont intervenue aux torts de l’entreprise.

- Sur les comptes entre les parties

La société HYDROSA demande à titre subsidiaire, dans le cas où la résiliation lui serait imputée, le règlement des travaux réalisés qui ont fait l’objet de factures restées en souffrance. Elle se base sur son décompte général définitif (DGD) du chantier établi le 17 juillet 2018 pour solliciter le paiement de la somme de 13.604,89 euros au titre des travaux réalisés.

Elle considère qu’elle n’est redevable d’aucune pénalité en l’absence de tout retard dans l’exécution des travaux et dans la fourniture des documents, que le calcul des pénalités pour absence aux réunions de chantier n’est pas expliqué et que l’expert a reconnu qu’elle ne pouvait pas être tenue d’assister à toutes les réunions.

Monsieur [L] souligne que son adversaire a demandé des montants différents en référé puis au fond, à titre principal et à titre subsidiaire, alors que le décompte général définitif devrait nécessairement correspondre à l’ensemble des sommes qu’elle considère pouvoir facturer.

Il considère que le DGD de l’entreprise est inexact et relève les erreurs suivantes :
- sur la ligne « déduction sur avance », la somme de 1.362,43 euros est déduite alors que la somme de 9.082,15 euros TTC a été versée.
- sur la ligne « déduction du règlement n°1 », la somme de 7.148,56 euros est déduite alors que la somme de 8.300,02 euros TTC a été versée.
- la « chaudière à condensation gaz avec ballon » est facturée pour un coût de
3.980 euros alors qu’elle n’a pas été installée.

Il s’étonne que le total des postes s’élève à 33.848,83 euros HT alors que le montant total du marché est de 33.122,11 euros TTC soit 30.111 euros HT. Il reproche en outre à ce décompte de ne pas distinguer la fourniture d’équipements, l’étude d’exécution et la prestation de pose de l’équipement, ce qui fausse les calculs de taux d’avancement, et de ne pas tenir compte des multiples manquements au marché, tant pour l’étude d’exécution, que pour les non-façons, les malfaçons et les retards.

Il rappelle que l’entreprise aurait dû soumettre son DGD au maître d’œuvre pour validation et que le devis complémentaire de 2.160,60 euros ne peut être inclus dans ce décompte dans la mesure où il a été refusé.

Il considère que le décompte à retenir est celui envoyé par le maître d’oeuvre le
18 septembre 2018 qui déduit du marché les travaux de reprise et de finalisation effectués par la société HUSSON et les travaux non réalisés par la demanderesse : pose mitigeur cuisine, panneau baignoire à remplacer, vanne gaz chaudière, Qualigaz, et la somme de 3.000 euros au titre des malfaçons non reprises.

Il soutient en outre que les pénalités suivantes doivent être appliquées :
- Pénalités de retard contractuelles de 1% TTC du montant TTC du marché par jour calendaire de retard (plafonné à 15% du marché).
- Pénalités découlant des absences aux réunions de chantier à hauteur de 150 euros TTC unitaire par réunion.
- Pénalité de 75 euros TTC par jour calendaire de retard pour le défaut de remise des documents par rapport aux délais prescrits par l’article 7.4 des CCAG (dont les plans d’exécution, note de calcul…).

Il en résulte selon lui que la société HYDROSA a reçu la somme de 8.300,77 euros de trop-perçu compte tenu des pénalités dues et des moins-values applicables, dont il demande reconventionnellement le remboursement.

****

Il ressort de l’article 1353 du code civil que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

- sur les travaux réalisés

Deux décomptes généraux définitifs sont produits par les parties, celui de la demanderesse concluant à un solde de 13.604,89 euros TTC en sa faveur et celui du maître d’oeuvre qui aboutit à un trop perçu par l’entreprise de 8.300,77 euros TTC.

Le prix total du marché conclu entre les parties est celui prévu au devis du
22 novembre 2017, soit 30.273,83 euros HT et 33.122,11 euros TTC.

L’entreprise produit une première facture n°17-12-15 datée du 21 décembre 2017 relative à un “acompte pour démarrage de travaux” d’un montant de 9.082,14 euros TTC avec une mention manuscrite indiquant qu’il a été réglé.

Il n’est pas contesté que la deuxième facture n°18-01-8 datée du 23 janvier 2018 d’un montant de 8.300,02 euros TTC après déduction de la retenue de garantie a également été payée par le maître d’ouvrage.

La facture n°18-06-21 du 19 juin 2018 d’un montant de 9.190,73 euros TTC qui porte sur l’“avancement [Localité 3]”, sans plus de précisions sur les travaux réalisés et facturés, n’a en revanche pas été payée.

La société a donc facturé un montant total de 26.572,89 euros TTC correspondant à un peu plus de 80% du marché, et a reçu un règlement de 17.382,16 euros TTC correspondant à 52% du marché.

Dans son décompte général définitif du 17 juillet 2018, la demanderesse considère que les travaux réalisés représentent un montant de 27.676,22 euros HT, soit 91% du marché, auquel s’ajoute le prix de la chaudière s’élevant à 2.786 euros HT. Il convient néanmoins de souligner que la chaudière est déjà comptée au prix de 3.980 euros HT, comme prévu au devis, et que l’ajout d’un montant supplémentaire pour ce poste ne se justifie donc nullement.

Le défendeur expose néanmoins dans le document nommé “analyse du DGD adverse” que les travaux suivants n’ont pas été effectués, ou seulement en partie, et ne sont donc pas dus:
- reprise de l’installation existante, révision des canalisations et sujétions de passage de l’ensemble des canalisations EF EC et évacuations - 1.200 euros HT
- WC mal posé - 255 euros HT
- lave-mains non posé - 210 euros HT
- meubles vasque insuffisants et finitions manquantes - 335 euros HT
- fourniture et pose de vasque dans la salle d’eau - 947,50 euros HT
- fourniture et pose de mitigeurs - 340 euros HT
- défauts d’installation de la douche - 650 euros HT
- défauts d’installation de la baignoire - 891,67 euros HT
- mitigeur pour évier récupéré - 150 euros HT
- robinet de puisage - 40 euros HT
- un seul ROAI posé sur les deux prévus au devis - 110 euros HT
- une attente manquante pour le lave-linge - 64,29 euros HT
- absence d’encastrement du radiateur sèche-serviette - 175,72 euros HT
- défaut d’installation du chauffage - 1.990 euros HT
- encastrement incomplet des canalisations chauffage en PER - 445 euros HT
- encastrement des radiateurs non fait, efficacité insuffisante du système chaudière-réseau- radiateurs- 4.224 euros HT
- robinets thermostatiques non mis en place - 930 euros HT
- robinets manuels non mis en place - 160 euros HT
- Té de réglage non mis en place - 760 euros
- vanne de coupure gaz de la chaudière non posée - 80 euros HT
- certificat QUALIGAZ non fourni - 145 euros HT
soit un montant total de 14.103,18 euros HT de travaux non réalisés représentant 46% du montant du marché.

Toutefois, l’expert judiciaire n’ayant pu constater les non-façons et malfaçons reprochées par le maître d’ouvrage, seul le procès-verbal constat d’huissier du 10 juillet 2018 permet de déterminer l’avancement des prestations au moment de la résiliation, l’officier public relevant les éléments suivants :
- gaines manquantes sur 10 cm au niveau des raccordements de nourrices dans la buanderie
- la chaudière ELM LEBLANC était raccordée électriquement mais le thermostat n’était pas posé. Monsieur [M], représentant de la société, indique que le thermostat sera posé une fois la peinture réalisée.
- un manque de finition à l’endroit des perçages soit des dalles soit des murets où le rebouchage n’est pas effectué. Monsieur [M] indique qu’il est d’accord pour procéder à ces rebouchages.
- des tuyaux sous gaine parcourent le plafond d’une façon libre et non accrochée à différents endroits, l’ensemble doit faire l’objet d’une refixation totale et d’un réalignement.
- les radiateurs et sèche-serviette ne sont pas posés. L’entrepreneur précise qu’ils ont été démontés pour la réalisation des peintures.
- le meuble lave-main du rez de chaussée n’est pas posé, Monsieur [M] indiquant qu’il le sera après la finition des travaux de peinture.
- dans la cabinet de toilette de la chambre du rez-de -chaussée, deux alimentations équipées de PVC rouge et deux tuyaux sont gainés de rouge et sont non encastrés dans la dalle ou dans le mur.
- à l’intérieur de la cabine de douche le haut de la douche est matérialisé par une barre transversale située à 1,85 m de hauteur. L’entrepreneur indique qu’il s’agit du modèle choisi par le maître d’ouvrage.
- les plaques de double touche des WC du rez-de-chaussée et du 1er étage ne sont pas posées. Monsieur [M] indique qu’elles sont en sa possession et qu’elles seront posées.
- au niveau de l’alimentation de la poire de douche au 1er étage, l’huissier constate un problème de verticalité à revoir contrôlé à l’aide d’un niveau que l’entrepreneur s’engage à reprendre.
- une fois le flexible de la douchette équipant la baignoire tiré, de l’eau peut tomber sous la baignoire. Monsieur [M] indique que c’est la conception de la douchette qui est en cause et non la pose.
- problème d’alignement des nourrices dans la salle de bains du 1er étage, à certains endroits le plâtre touche le tuyau sans être protégé par la gaine. Monsieur [M] indique à nouveau qu’il s’engage à reprendre ce poste.

Compte tenu de ces constations faites en présence de la demanderesse, il convient de considérer que les travaux prévus au devis ont été réalisés à hauteur de 80% par la société HYDROSA, le défendeur étant donc redevable d’un montant total de 26.497,69 euros TTC (33.122,11 x 80%) dont doivent être déduits les montants déjà versés.

La somme due par Monsieur [L] à la société HYDROSA au titre des travaux effectués s’élève donc à 9.115,53 euros TTC (26.497,69 - 17.382,16).

- sur les pénalités

Le défendeur soutient que les pénalités suivantes doivent s’appliquer conformément au CCAP:
- 4.968,32 euros de pénalités de retard
- 1.050 euros de pénalités liées aux absences aux réunions de chantier
- 4.500 euros pour retard de remises des documents réclamés

L’article 4 “Pénalités” du CCAP prévoit en effet une pénalité égale à 1% TTC du marché par jour calendaire de retard plafonnée à 15% du marché, sans exigence de mise en demeure préalable.

Il a été constaté que 9 jours de retard peuvent être imputés à la société HYDROSA, de sorte que les pénalités suivantes seront déduites des sommes qui lui sont dues :
33.122,11 x 1% x 9 = 2.981 euros

L’article 4.3 prévoit également une pénalité forfaitaire de 150 euros pour “toute absence non explicitée par un motif sérieux de l’entrepreneur à une réunion de chantier à laquelle il aura été dûment convoqué”. Il ressort des compte-rendus de chantier que l’entreprise a été absente à 8 réunions de chantier auxquelles elle était convoquée, une pénalité de 1.200 euros (150 x 8) sera donc appliquée.

Enfin, l’article 4.4 stipule que “tout retard dans la remise des documents par rapport aux délais prescrits par l’article 7.4 du CCAG (procès-verbaux de matériaux, plans d’exécution, notes de calcul, etc.) sera passible d’une pénalité de 75 € TTC par jour calendaire de retard.” Le CCAG n’est pas produit de sorte que les délais prescrits par l’article 7.4 du CCAG ne sont pas connus. Les pénalités prévues au CCAP ne peuvent donc pas être calculées, quand bien même un retard dans la transmission des plans d’exécution par la demanderesse ressort des pièces versées aux débats. Aucune pénalité ne sera donc appliquée à ce titre.

Compte tenu de ce qui précède, un montant total de pénalités contractuelles de
4.181 euros sera déduit du montant dû par la société HYDROSA.

- sur le préjudice matériel du défendeur

Le défendeur fait valoir que maître d’œuvre a retenu un poste de 3.000 euros HT pour les malfaçons non reprises qu’il entend donc déduire des montants dus en exécution du marché.

Toutefois, il a été établi qu’aucune malfaçon ne peut être retenue à l’encontre de la société au regard des éléments communiqués. Il n’y a donc pas lieu de procéder à ce titre à une retenue, dont le calcul n’est par ailleurs nullement expliqué.

- sur les travaux de finalisation

Monsieur [L] considère que le montant payé à l’entreprise HUSSON pour la reprise et la finalisation du lot confiée à la demanderesse, soit un montant de 9.790 euros TTC, doit être soustrait des sommes dues à l’entreprise .

Toutefois, seuls les travaux effectivement réalisés étant dus à la société HYDROSA par le maître d’ouvrage dans la mesure où la résiliation est prononcée aux torts de l’entreprise, il n’y a pas lieu de déduire le montant des travaux de finalisation de son lot.

****

Compte tenu de ce qui précède, le défendeur sera condamné à verser à l’entreprise au titre du marché la somme de 4.934,53 euros (9.115,53 - 4.181) augmentée des intérêts au taux légal à compter de la présente décision et non du décompte général définitif, le montant réclamé par la demanderesse dans ce document et dans l’assignation n’étant pas entièrement justifié.
La capitalisation des intérêts sera ordonnée dans les conditions de l’article 1231-6 du code civil.

Monsieur [L] sera corrélativement débouté de sa demande reconventionnelle de remboursement d’un trop-perçu de 8.300,77 euros.

Sur la résistance abusive

La société HYDROSA demande 5.000 euros à titre de dommages intérêts pour résistance abusive sur le fondement de l’article 1240 du code civil en faisant valoir que Monsieur [L] a indûment retenu la somme de 18.982,54 euros TTC au titre du marché qu’elle avait commencé à exécuter, qu’elle a de ce fait été contrainte de procéder à de multiples relances et de solliciter la désignation d’un expert judiciaire afin d’établir que ses travaux correspondaient aux demandes du maître d’ouvrage, et avaient été correctement réalisés et qu’aucun manquement ne pouvait lui être imputé.

Elle considère dès lors que son cocontractant a fait preuve de mauvaise foi en refusant de procéder au règlement du solde du marché, ou à tout le moins, des sommes visées dans le décompte général définitif, ce qui lui a porté préjudice compte-tenu de l’ancienneté et de l’importance de sa créance.

Elle rappelle qu’elle n’a pas pu verser la consignation complémentaire demandée par l’expert judiciaire du fait de ses difficultés financières et que le défendeur aurait pu la prendre à sa charge mais ne l’a pas fait, si bien qu’il ne peut aujourd’hui lui reprocher d’être à l’origine de sa carence dans l’administration des preuves susceptibles de démontrer les faits allégués.

Le défendeur considère avoir fait une simple application du DGD rectifié tel qu’émis par le maître d’œuvre et conteste dès lors toute faute de sa part en soutenant par ailleurs que la société ne justifie d’aucun préjudice pouvant donner lieu à indemnisation pour réticence abusive.

****

Il résulte des dispositions de l’article 1231-6 alinéa 3 du code civil que le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant

de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de sa créance.

En l’espèce, la société HYDROSA a établi l’existence de la créance qu’elle détient sur le défendeur mais la contestation par ce dernier du montant dû est insuffisante à rapporter à elle seule la preuve de sa mauvaise foi, d’autant que la résiliation est finalement prononcée aux torts de la demanderesse.

Par ailleurs, la société ne rapporte pas la preuve de l’existence d’un préjudice particulier distinct de celui résultant du retard dans le paiement de la dette qui serait insuffisamment réparé par l’allocation des intérêts au taux légal.

En conséquence, la demande en dommages et intérêts de la demanderesse sera rejetée.

Sur les demandes accessoires

Monsieur [L] qui succombe sera condamné aux dépens, en ce compris les frais d’expertise judiciaire.

En revanche, la résiliation du marché étant aux torts de la demanderesse, il n’est pas équitable de condamner le défendeur à l’indemniser de ses frais irrépétibles. Les parties seront donc déboutées de leurs demandes à ce titre.

Enfin, il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire de la présente décision qui est de droit.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire rendu en premier ressort et mis à disposition au greffe,

Dit que la résiliation du marché conclu entre les parties le 21 décembre 2017 est intervenue le 9 juillet 2018 aux torts de la SAS HYDROSA ;

Condamne Monsieur [K] [L] à verser à la SAS HYDROSA la somme de 4.934,53 euros au titre du solde du marché ;

Dit que cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter de la présente décision et ordonne la capitalisation des intérêts aux conditions légales ;

Déboute la SAS HYDROSA de sa demande de dommage-intérêts au titre de la résistance abusive ;

Déboute Monsieur [K] [L] de sa demande reconventionnelle de remboursement d’un trop-perçu ;

Déboute la SAS HYDROSA et Monsieur [K] [L] de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Monsieur [K] [L] aux dépens comprenant les frais d’expertise judiciaire ;

Dit qu’il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire de la présente décision.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 JUIN 2024 par Mme DUMENY, Vice Présidente, assistée de Madame GAVACHE, greffier, lesquelles ont signé la minute du présent jugement.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Versailles
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 21/06590
Date de la décision : 27/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-27;21.06590 ?
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