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18/06/2024 | FRANCE | N°22/01324

France | France, Tribunal judiciaire de Versailles, Ctx protection sociale, 18 juin 2024, 22/01324


Pôle social - N° RG 22/01324 - N° Portalis DB22-W-B7G-Q7SK


Copies certifiées conformes  délivrées,
le :
à :
- [X] [R]
- CONSEIL DEPARTEMENTAL DES YVELINES
- Me Layla SAIDI
N° de minute :


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
POLE SOCIAL

CONTENTIEUX MEDICAL DE LA SECURITE SOCIALE



JUGEMENT RENDU LE MARDI 18 JUIN 2024



N° RG 22/01324 - N° Portalis DB22-W-B7G-Q7SK

Code NAC : 88M


DEMANDEUR :

M. [X] [R]
[Adresse 2]
[Localité 4]

assisté de Me Layla SAIDI, avocat au barreau

de PARIS, avocat plaidant



DÉFENDEUR :

CONSEIL DEPARTEMENTAL DES YVELINES
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par M. [W] [H], muni d’un pouvoir ...

Pôle social - N° RG 22/01324 - N° Portalis DB22-W-B7G-Q7SK

Copies certifiées conformes  délivrées,
le :
à :
- [X] [R]
- CONSEIL DEPARTEMENTAL DES YVELINES
- Me Layla SAIDI
N° de minute :

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
POLE SOCIAL

CONTENTIEUX MEDICAL DE LA SECURITE SOCIALE

JUGEMENT RENDU LE MARDI 18 JUIN 2024

N° RG 22/01324 - N° Portalis DB22-W-B7G-Q7SK

Code NAC : 88M

DEMANDEUR :

M. [X] [R]
[Adresse 2]
[Localité 4]

assisté de Me Layla SAIDI, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

DÉFENDEUR :

CONSEIL DEPARTEMENTAL DES YVELINES
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par M. [W] [H], muni d’un pouvoir régulier

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Madame Sophie COUPET, Vice-Présidente
M. [D] [S], représentant du collège employeurs et salariés indépendants
Mme [V] [N], représentante du collège salariés

Madame Marie-Bernadette MELOT, Greffière

DEBATS :
A l’audience publique tenue le 14 Mai 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 18 Juin 2024.
EXPOSE DU LITIGE

Le 23 juin 2022, Monsieur [X] [R] (né le 25 août 1977) a déposé une demande de prestation de compensation du handicap (PCH) auprès de la Maison départementale des personnes handicapées des Yvelines (ci-après MDPH).
La Présidente de la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH), dont dépend la MDPH a, par décision en date du 28 juillet 2022, rejeté la demande de Monsieur [X] [R], au motif que celui-ci ne remplit pas les conditions d’attribution de la PCH.
Par l’intermédiaire de son conseil, Monsieur [X] [R] a, par courrier recommandé avec avis de réception daté du 29 septembre 2022, formé un recours administratif préalable obligatoire ( RAPO), aux fins de contester la décision de refus de la CDAPH du 28 juillet 2022.
La Présidente de la CDAPH de la MDPH des Yvelines a, par décision en date du 13 octobre 2022, confirmé le bien-fondé de la décision de refus d’attribution de la PCH en date du 28 juillet 2022.
Par l’intermédiaire de son conseil, Monsieur [X] [R] a, par requête transmise au greffe par courrier recommandé avec avis de réception expédié le 04 novembre 2022, saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Versailles afin de contester la décision explicite de rejet de la CDAPH du 13 octobre 2022.
A défaut de conciliation possible entre les parties, l’affaire a été appelée pour la première fois à l’audience en date du 14 mai 2024.
Lors de cette audience, Monsieur [X] [R], représenté par son conseil, demande au tribunal de :
Par jugement avant dire droit,
- ORDONNER la réalisation d’une nouvelle expertise médicale avec désignation en qualité d’expert d’un médecin rattaché au Tribunal ;
- DÉTERMINER si l’état de santé de Monsieur [X] [R] répond aux conditions d’octroi de la prestation de compensation de handicap ;
Par suite,
- OCTROYER à Monsieur [X] [R] le bénéfice de la prestation de compensation de handicap.
En tout état de cause,
- CONDAMNER la MDPH à verser à Monsieur [X] [R] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
- CONDAMNER la MDPH aux entiers dépens de l’instance.
Au soutien de ses prétentions, il explique qu’à la suite d’un accident de la circulation survenu le 16 juin 2019, il est atteint d’un stress post-traumatique très important et d’autres pathologies avec des répercursions très importantes sur sa vie quotidienne. Il précise être accompagné par son épouse dans toutes ses démarches et devoir recourir à l’assistance d’une tierce personne. Il considère que la mise en œuvre d’une expertise médicale s’avère nécessaire afin de déterminer l’impact de ses pathologies sur les actes de la vie. Il précise que, contrairement à ce que soutient la MDPH, le certificat médical fait état de ses problèmes d’orientation dans le temps et dans l’espace (p.6, Cerfa).

En défense, la MDPH des Yvelines, représentée par son mandataire, demande au Tribunal de :
- DIRE mal fondé le recours introduit par Monsieur [X] [R] ;
- DIRE que Monsieur [X] [R] ne présentait pas deux difficultés graves et une difficulté absolue le rendant éligible à la prestation de compensation du handicap de manière générale ainsi qu’à la prestation de compensation du handicap volet aide humaine lors de ses demandes ;
- CONFIRMER, par conséquent, la décision de la CDAPH en date du 13 octobre 2022 soit le rejet de la demande de prestation de compensation du handicap ;
- REJETER pour le surplus, l’intégralité des demandes de Monsieur [X] [R].
La MDPH rappelle qu’en raison du taux d’incapacité compris entre 50 et 79% attribué au titre de ses problèmes de stress post-traumatique, Monsieur [X] [R] s’est vu attribuer une allocation aux adultes handicapés (AAH) et une carte mobilité inclusion (CMI), mention priorité, pour la période du 21 avril 2022 au 31 mai 2026, ainsi qu’une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH), sans limitation de durée. Concernant la PCH, volet aide humaine, la MDPH rappelle que l’intéressé doit répondre aux conditions d’exigibilité de l’octroi de la PCH générale, c’est-à-dire rencontrer deux difficultés graves ou une difficulté absolue dans la réalisation des 19 activités listées couvrant les 4 domaines de la vie : mobilité, entretien personnel, communication et relations avec autrui. A ce titre, la MDPH indique qu’au vu du certificat médical simplifié Cerfa, Monsieur [X] [R] ne présente aucune difficulté à la mobilité, il est parfaitement autonome en ce qui concerne son entretien personnel (items cotés en “A”), il n’a aucune difficulté de communication malgré sa pathologie psychiatrique, ni dans ses relations avec les autres puisqu’il a une bonne maîtrise de soi et vis-à-vis des autres ; il présente des retentissements quant à son orientation dans le temps et dans l’espace, sans plus de précisions. Ne remplissant pas les conditions d’éligibilité pour accéder à la PCH, la MDPH indique avoir rejeté la demande de monsieur sans étudier la PCH, volet aide humaine.
À l’issue des débats, les parties ont été avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile que le délibéré sera rendu publiquement par mise à disposition au greffe le 18 juin 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’attribution de la prestation de compensation du handicap et la demande d’expertise:
Aux termes de l’article D.245-4 du code de l’action sociale et des familles, a le droit ou ouvre le droit, à la prestation de compensation, dans les conditions prévues à ce chapitre pour chacun des éléments prévus à l'article L.245-3, la personne qui présente une difficulté absolue pour la réalisation d'une activité ou une difficulté grave pour la réalisation d'au moins deux activités telles que définies dans le référentiel figurant à l'annexe 2-5 et dans des conditions précisées dans ce référentiel. Les difficultés dans la réalisation de cette ou de ces activités doivent être définitives, ou d'une durée prévisible d'au moins un an.
Le référentiel pour l'accès à la prestation de compensation, prévu à l’annexe 2-5, précise que, pour avoir accès à la prestation de compensation du handicap, l’intéressé doit présenter une difficulté absolue pour la réalisation d'une activité ou une difficulté grave pour la réalisation d'au moins deux des activités dans la liste suivante :
Activités du domaine 1 - mobilité :
– se mettre debout ;
– faire ses transferts ;
– marcher ;
– se déplacer (dans le logement, à l'extérieur) ;
– avoir la préhension de la main dominante ;
– avoir la préhension de la main non dominante ;
– avoir des activités de motricité fine.

Activités du domaine 2 - entretien personnel :
– se laver ;
– assurer l'élimination et utiliser les toilettes ;
– s'habiller ;
– prendre ses repas.

Activités du domaine 3 - communication :
– parler ;
– entendre (percevoir les sons et comprendre) ;
– voir (distinguer et identifier) ;
– utiliser des appareils et techniques de communication.

Activités du domaine 4 - tâches et exigences générales, relations avec autrui :
– s'orienter dans le temps ;
– s'orienter dans l'espace ;
– gérer sa sécurité ;
– maîtriser son comportement.
– entreprendre des tâches multiples.

Dans ce référentiel, les niveaux de difficulté sont définis ainsi :
- la difficulté grave (élevée, extrême) suppose que l'activité est réalisée difficilement et de façon altérée par rapport à l'activité habituellement réalisée,
- la difficulté absolue (totale) suppose que l’activité ne peut pas du tout être réalisée sans aide, y compris la stimulation, par la personne elle-même.
- les difficultés modérées supposent que l’activité est réalisée avec difficulté mais avec un résultat final normal. Elle peut par exemple être réalisée plus lentement ou en nécessitant des stratégies et des conditions particulières.
En l’espèce, il résulte du certificat médical simplifié Cerfa rempli par le Docteur [C] [A] (médecin généraliste), les 30 avril 2021 et 17 mai 2022, et joint à la demande de prestations déposée le 23 juin 2022 que :
Pôle social - N° RG 22/01324 - N° Portalis DB22-W-B7G-Q7SK

Monsieur [X] [R] ne présente aucune difficulté absolue ou grave à effectuer l’une des activités du domaine 1, puisque tout a été évalué en “A” (réalisé sans difficulté et sans aucune aide) voire “entre A et B” (B étant: réalisé avec difficulté mais sans aide humaine). Il peut donc se mettre débout, faire ses transferts, marcher, se déplacer dans le logement et à l’extérieur, avoir la préhension de la main dominante (et non dominante), avoir des activités de motricité fine. Il est, en effet, indiqué un ralentissement moteur, il a besoin de pauses, mais peut se déplacer à l’extérieur sans être accompagné, justifiant ainsi les items cotés “entre A et B”.
Quant aux activités du domaine 2, Monsieur [R] ne présente aucune difficulté absolue ou grave, puisque tout a été évalué en “A” (réalisé sans difficulté et sans aucune aide). Il peut se laver, assurer l’élimination et utiliser les toilettes, s’habiller (déshabiller) et prendre ses repas.
S’agissant des activités du domaine 3, la pathologie psychiatrique de Monsieur [X] [R] n’entraîne aucune abolition de fonction. Il ne présente aucune difficulté absolue ou grave, puisque il peut parler, entendre (percevoir les sons et comprendre), voir (distinguer et identifier) et utiliser des appareils et techniques de communication, les items ayant été cotés en “A” et “entre A et B”.
Au niveau des activités du domaine 4, Monsieur [X] [R] ne rencontre pas de difficultés grave ou absolue car il assure la gestion de sa sécurité personnelle et la maîtrise de son comportement vis-à-vis des autres, les items ayant été cotés en “A”. Quant à l’orientation dans le temps et l’espace, le médecin avait indiqué un “ralentissement locomoteur”, sans plus de précision, les items n’étant pas renseignés. Toutefois, un ralentissement locomoteur n’entraîne pas nécessairement une impossibilité de s’orienter dans le temps et dans l’espace, ce ralentissement signifie simplement, à défaut d’autres précisions explicites du médecin, que ces activités sont réalisées avec un peu plus de temps, c’est-à-dire une cotation en B.
Au regard de ce certificat médical, il apparaît donc que monsieur [X] [R] ne présentait pas au jour de la demande du 23 juin 2022 deux difficultés graves ou une difficulté absolue parmi les 19 actes figurant dans le référentiel figurant à l'annexe 2-5.
Pour combattre cette position, Monsieur [X] [R] indique dans ses conclusions qu’il “se trouve profondément atteint dans sa vie quotidienne au point que bon nombre d’actes de la vie quotidienne lui sont totalement irréalisables seul, de sorte qu’il a besoin de l’aide et de l’assistance de son épouse pour leur réalisation”. Il déclare avoir besoin de sa femme pour se lever le matin puisqu’elle l’aide à se préparer, à s’habiller. Il précise qu’il est particulièrement démotivé chaque matin et qu’il ne se meut qu’avec l’aide et l’assistance de son épouse.
Pour en justifier, il verse aux débats :
- un certificat médical du Docteur [C] [A] (généraliste) du 11 juin 2019, attestant que l’intéressé présente un état de stress post-traumatique ;
- un certificat médical du Docteur [M] [G] (psychiatre) daté du 10 février 2021, assurant le suivi régulier de Monsieur [X] [R] depuis le 01 juillet 2019 pour un syndrome de stress post-traumatique, décrivant son état psychologique et son traitement médical;
- un certificat médical du Docteur [C] [A] (généraliste) non daté, listant les affections dont est atteint l’intéressé, à savoir : diabète de type II, gonarthrose et lombalgies récurentes, allergies respiratoires et stress post-traumatique suivi par un psychiatre.
Or, ces éléments médicaux ne sont pas de nature à remettre en cause les termes du certificat médical du 30 avril 2021, certificat d’ailleurs établi par le même professionnel de santé, le Docteur [C] [A]. En effet, aucun de ces certificats médicaux ne contredit l’évaluation initiale et certifie qu’au jour de la demande, l’intéressé rencontrait une difficulté absolue pour l’une des 19 activités ou une difficulté grave pour au moins deux de ces activités.

En l’absence d’élément médical de nature à remettre en cause les éléments pris en compte par la MDPH, le tribunal, suffisamment éclairé, rejette la demande d’expertise.
Dès lors, les décisions de la Présidente de la CDAPH auprès de la MDPH des Yvelines en date des 28 juillet 2022 et 13 octobre 2022 seront confirmées et, par conséquent, Monsieur [X] [R] sera débouté de toutes ses demandes.

Sur les dépens :
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
Monsieur [X] [R], succombant à l’instance, sera tenu aux entiers dépens.

Sur l’article 700 du code de procédure civile :
L’article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Monsieur [X] [R], tenu aux dépens, sera débouté de sa demande.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant après débats en audience publique, par jugement contradictoire en premier ressort et mis à disposition au greffe le 18 juin 2024 :

CONFIRME les décisions rendues par la Présidente de la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) siégeant auprès de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) des Yvelines des 28 juillet 2022 et 13 octobre 2022, ayant refusé à Monsieur [X] [R] la prestation de compensation du handicap (PCH) ;
DÉBOUTE Monsieur [X] [R] de toutes ses demandes;
CONDAMNE Monsieur [X] [R] aux entiers dépens.

DIT que tout appel de la présente décision doit, à peine de forclusion, être interjeté dans le mois de la réception de la notification de la présente décision.

La GreffièreLa Présidente

Madame Marie-Bernadette MELOTMadame Sophie COUPET


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Versailles
Formation : Ctx protection sociale
Numéro d'arrêt : 22/01324
Date de la décision : 18/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-18;22.01324 ?
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