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04/06/2024 | FRANCE | N°23/01472

France | France, Tribunal judiciaire de Versailles, Chambre des référés, 04 juin 2024, 23/01472


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DU
04 JUIN 2024


N° RG 23/01472 - N° Portalis DB22-W-B7H-RTMJ
Code NAC : 56D
AFFAIRE : S.A.S. CM CIC LEASING SOLUTIONS C/ Association ECOLE [3]


DEMANDERESSE

La société CM-CIC LEASING SOLUTIONS,
Société par actions simplifiée, inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de NANTERRE sous le numéro 352 862 346, dont le siège social est situé [Adresse 4], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
représentée par Me Lau

rent BARDET, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 155, Me Mathieu BOLLENGIER-STRAGIER, avocat au barreau d...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DU
04 JUIN 2024

N° RG 23/01472 - N° Portalis DB22-W-B7H-RTMJ
Code NAC : 56D
AFFAIRE : S.A.S. CM CIC LEASING SOLUTIONS C/ Association ECOLE [3]

DEMANDERESSE

La société CM-CIC LEASING SOLUTIONS,
Société par actions simplifiée, inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de NANTERRE sous le numéro 352 862 346, dont le siège social est situé [Adresse 4], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
représentée par Me Laurent BARDET, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 155, Me Mathieu BOLLENGIER-STRAGIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C 495

DEFENDERESSE

ECOLE [3],
Association inscrite au répertoire SIREN sous le numéro 831 468 939, dont le siège social est situé [Adresse 1], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
représentée par Me Magali DURANT-GIZZI, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 671, Me Nadia BELAID, avocat au barreau de PARIS,

Débats tenus à l'audience du : 30 Avril 2024

Nous, Gaële FRANÇOIS-HARY, Première Vice-Présidente au Tribunal Judiciaire de Versailles, assistée de Virginie DUMINY, Greffier,

Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil, à l’audience du 30 Avril 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 04 Juin 2024, date à laquelle l’ordonnance suivante a été rendue :

EXPOSE DU LITIGE

La société CM-CIC LEASING SOLUTIONS a conclu le 1er octobre 2020 avec l’Association ECOLE [3] un contrat de location n°DP9701600 dont l'objet est : "box to cloud Type matériel informatique/Marque Xerox n° série 9026955401 Année 2020".

Par acte de Commissaire de Justice en date du 13 octobre 2023, la société CM-CIC LEASING SOLUTIONS (ci-après CM) a assigné l'Association ECOLE [3] (ci-après ECOLE [2]) en référé devant le Tribunal judiciaire de Versailles.

Aux termes de ses conclusions, la demanderesse sollicite de voir, sur le fondement de l'article 873 alinéa 2 du code de procédure civile :
- débouter ECOLE [2] de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles,
- constater la résiliation du contrat de location n°DP9701600 aux torts et griefs de ECOLE [2] à la date du 22 septembre 2023,
- condamner ECOLE [2] à restituer le matériel objet de la convention résiliée et ce dans la huitaine de la signification de l’ordonnance à intervenir et ce sous astreinte de 20 euros par jour de retard, aux frais du locataire et sous sa responsabilité conformément aux dispositions prévues à l’article 12 des conditions générales de location,
- condamner ECOLE [2] à lui payer les sommes provisionnelles suivantes :
* loyers impayés : 3898,92 euros TTC
* pénalités (art.4.4) : 40 euros HT
* loyers à échoir : 8772,57 euros TTC
* clause pénale : 877,25 euros TTC
Soit un total de : 13.588,74 euros TTC
- avec intérêts au taux contractuels de 1,5 % par mois capitalisés (article 4.4) à compter de la date
de la présentation de la mise en demeure en date du 28 décembre 2022,
- condamner ECOLE [2] à lui payer une somme de 2000 euros sur le fondement de
l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elle fait valoir l’Association défenderesse est en impayés de loyers depuis décembre 2022 et oppose de manière opportune des contestations sérieuses, auxquelles elle s'oppose.

En premier lieu, elle ne conteste pas que Madame [V] (la Trésorière en poste) soit bien la signataire du contrat mais conteste fermement le fait que cette dernière ait pu engager l’Association ; concernant le prétendu défaut de capacité de Madame [V] pour engager la société, la théorie du mandat apparent est parfaitement applicable au cas d’espèce puisque tant la qualité du signataire (trésorière) que le cachet apposé sur le contrat de location ont indéniablement créé une apparence de mandat qui a valablement engagé la locataire ; le contrat a ensuite commencé à être exécuté sans la moindre contestation concernant le pouvoir de la signataire ; la concluante n’avait aucune obligation de vérifier l’identité du signataire.

En deuxième lieu, elle rappelle qu'elle intervient strictement à titre financier, l’association ECOLE [2] ayant négocié les conditions de mise en œuvre du contrat de location directement avec son fournisseur XEROBOUTIQUE, et ayant choisi le matériel et ses spécificités sous sa propre responsabilité, CM n’étant pas intervenue dans le choix du matériel ; en sa qualité de bailleur financier, CM n’a nullement vocation à renseigner le client sur l’utilité ou le fonctionnement du matériel dès lors qu’elle n’intervient que dans le cadre de l’acquisition du matériel aux fins de mise à disposition ; CM a parfaitement respecté ses obligations contractuelles de bailleur financier : acquisition du matériel choisi par l’association ECOLE [2] auprès du fournisseur selon facture versée au débat et sur visa de l’avis de livraison délivrée par le fournisseur XEROBOUTIQUE et mise à disposition de son locataire le matériel financé ; il appartient à l’association ECOLE [2] d’agir uniquement à l’encontre de son fournisseur ; qu'elle rappelle que le fournisseur n’a pas été attrait dans le cadre de la présente procédure et que le juge des référés, juge de l’évidence, n’a pas vocation à statuer sur la nullité d’un contrat de sorte que les demandes subsidiaires de l’association seront nécessairement rejetées.

En troisième lieu, elle relève que la locataire était parfaitement informée du coût de sa location et du montant de ses loyers trimestriels, qu’elle a d’ailleurs réglés pendant de nombreux mois ; le matériel est toujours à sa disposition, fonctionnel et certainement utilisé; le contrat de location est clair et sans équivoque quant à l’engagement pris par la locataire, tant dans la durée que dans le montant des loyers; en tout état de cause, les pratiques dolosives sont alléguées à l’encontre de la société XEROBOUTIQUE, laquelle n’est pas partie à la présente procédure ; aucune obligation d’information ou de conseil ne pèse sur le bailleur financier ; le locataire ne saurait donc opposer valablement à son bailleur le comportement de son fournisseur.

Aux termes de ses conclusions, la défenderesse sollicite de voir :
- juger que le contrat litigieux lui est inopposable,
- condamner la société CM à lui rembourser à titre provisionnel l’ensemble des loyers déjà perçus soit la somme de 7808,34 euros,
- juger que la restitution du matériel objet du contrat sera effectuée aux frais de la société CM,
- débouter la société CM de l’ensemble de ses demandes,
- à titre subsidiaire,
- juger que le contrat litigieux est entaché de dol et qu’il est donc nul,
- condamner la société CM à lui rembourser à titre provisionnel l’ensemble des loyers déjà perçus soit la somme de 7808,34 euros,
- juger que la restitution du matériel objet du contrat sera effectuée aux frais de la société CM,
- débouter la société CM de l’ensemble de ses demandes,
- à titre très subsidiaire,
- juger que la société CM a fait preuve de mauvaise foi dans l’exécution du contrat litigieux,
- juger que la restitution du matériel objet du contrat sera effectuée aux frais de la société CM,
- débouter la société CM de l’ensemble de ses demandes,
- infiniment subsidiairenent, juger n’y avoir lieu à référé du fait des contestations sérieuses et débouter la société CM de l’ensemble de ses demandes,
- en tout état de cause, condamner la société CM à lui verser la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre aux dépens.
Elle soutient que les demandes se heurtent à plusieurs contestations sérieuses de sorte qu’il n’y a pas lieu à référé, à savoir :
- le contrat est inopposable à l’Ecole, puisqu'en l'espèce, il s’avère que c’est Madame [B] [V], trésorière de l’Ecole, qui a signé le contrat avec CM CIC LEASING SOLUTIONS ; or, elle n’est pas représentant légal de l’Ecole et n’avait pas pouvoir pour ce faire, seul son président, Monsieur [J] [Y], est le représentant légal de l’association et détient de tels pouvoirs comme cela résulte des statuts de l’association et de l'AG du 28 janvier 2023 ; il appartenait à la demanderesse, qui oppose la théorie du mandat apparent, de vérifier la qualité du signataire ; par ailleurs, l’exécution du contrat a simplement constitué en des prélèvements automatiques par la demanderesse, sans aucun acte positif de la part de l’Ecole qui n’a pas utilisé le matériel litigieux ;
- le contrat est entaché de dol : il s’avère que le contrat a été signé en même temps que le contrat de location d’un photocopieur, le commercial prétendant par amalgame que cette « box » servait à communiquer par Internet avec la boutique XEROX pour le renouvellement automatique des consommables de ce photocopieur (toners d’encre) ; il s’agissait en fait d’un mensonge car le photocopieur lui-même est connecté et transmet automatiquement ces informations ; le boîtier de connexion de cette « Box to Cloud » n’a d’ailleurs jamais été installé à l’Ecole puisqu’il n’est d’aucune utilité ; c’est donc par des affirmations fallacieuses que Madame [V] a signé le contrat litigieux qui est donc nul ;
- la demanderesse a fait preuve de mauvaise foi dans l’exécution du contrat pour en raison de l'absence de vérification des pouvoirs du signature, des affirmations fallacieuses, du prix disproportionné et du service inutile et non adapté aux besoins de l’Ecole ; de plus, elle a manqué à son devoir de conseil et d’information et n’a pas renseigné l’association quant à la réelle utilité et au fonctionnement du matériel mis à disposition, et ne lui a pas non plus fourni les informations requises.

La décision a été mise en délibéré au 4 juin 2024.

MOTIFS

Sur les demandes de résiliation de contrat et de provision

Il convient de rappeler qu'en l'espèce, l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile s'applique, et non l'article 873 alinéa 2 du même code relatif aux pouvoirs du Président du Tribunal de commerce.

Aux termes de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le Président du Tribunal judiciaire peut, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Dès lors, en application de ces dispositions, et étant rappelé que le juge des référés n'est dès lors pas compétent pour prononcer la résiliation d'un contrat, qui relève de la compétence du juge du fond, la demande de résiliation du contrat de location n°DP9701600 et la demande subséquente de restitution du matériel objet dudit contrat ne sont pas recevables.

L’obligation non sérieusement contestable vise aussi bien les créances d’origine contractuelle, quasi contractuelle, délictuelle ou quasi délictuelle, le juge des référés étant cependant tenu de préciser la nature de l’origine de cette créance ou la nature de l’obligation la fondant.

Il y a une contestation sérieuse chaque fois que la décision du Juge des référés l’obligerait à se prononcer préalablement sur une contestation relative à l’existence d’un droit ou le conduirait à se prononcer sur le fond du litige, par exemple en portant une appréciation sur la validité, la qualification ou l’interprétation d’un acte juridique. Il est constant qu'une contestation serieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir le juge du fond.

L'article 1103 du Code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. L'article 1104 ajoute que les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d'ordre public.

En l'espèce, il n'est pas contesté que la signataire du contrat litigieux est Madame [V], qui dispose de la qualité de trésorière de l’Association cocontractante, et non le représentant de cette dernière.

L'appréciation d'un mandat apparent, allégué par la bailleresse, relève toutefois de la compétence du juge du fond et excède les pouvoirs du juge des référés, juge de l'évidence.

Dès lors, l'absence de certitude sur la validité du présent contrat constitue une contestation sérieuse suffisante pour écarter la compétence du juge des référés, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens.

Il n'y a donc pas lieu à référé sur cette demande provisionnelle au titre des loyers impayés, de même que sur la demande reconventionnelle au titre du trop perçu locatif.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il y a lieu de condamner la demanderesse, partie succombante, à payer à la défenderesse la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Nous, Gaële FRANCOIS-HARY, Première Vice-Présidente au Tribunal judiciaire de Versailles, statuant par ordonnance mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort :

Déclarons irrecevables la demande de résiliation du contrat de location n°DP9701600 et la demande subséquente de restitution du matériel objet dudit contrat,

Disons n'y avoir lieu à référé sur la demande principale de provision,

Disons n'y avoir lieu à référé sur la demande reconventionnelle de provision,

Condamnons la société CM-CIC LEASING SOLUTIONS à payer à l'Association ECOLE [3] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Laissons les dépens à la charge de la demanderesse.

Prononcé par mise à disposition au greffe le QUATRE JUIN DEUX MIL VINGT QUATRE par Gaële FRANÇOIS-HARY, Première Vice-Présidente, assistée de Virginie DUMINY, Greffier, lesquelles ont signé la minute de la présente décision.

Le GreffierLa Première Vice-Présidente

Virginie DUMINYGaële FRANÇOIS-HARY


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Versailles
Formation : Chambre des référés
Numéro d'arrêt : 23/01472
Date de la décision : 04/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-04;23.01472 ?
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