La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/05/2024 | FRANCE | N°24/00290

France | France, Tribunal judiciaire de Versailles, Chambre des référés, 07 mai 2024, 24/00290


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DU
07 MAI 2024


N° RG 24/00290 - N° Portalis DB22-W-B7I-R2Z7
Code NAC : 60A
AFFAIRE : [Y] [X] C/ . L’AGENT JUDICIAIRE DE L’ETAT, Mutuelle MAIF, Organisme CPAM des Yvelines


DEMANDEUR

Monsieur [Y] [X]
né le [Date naissance 1] 1983 à [Localité 7], demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Etienne RIONDET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R24, Me Pascal KOERFER, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 31


DEFENDERESSES

L’AGENT JUDICIAIRE DE L’ETAT <

br>domicilié DIRECTION DES AFFAIRES JURIDIQUES, SOUS-DIRECTION DU DROIT PRIVE, BATIMENT CONDORCET-TELEDOC 331, situé [Adresse 4]...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DU
07 MAI 2024

N° RG 24/00290 - N° Portalis DB22-W-B7I-R2Z7
Code NAC : 60A
AFFAIRE : [Y] [X] C/ . L’AGENT JUDICIAIRE DE L’ETAT, Mutuelle MAIF, Organisme CPAM des Yvelines

DEMANDEUR

Monsieur [Y] [X]
né le [Date naissance 1] 1983 à [Localité 7], demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Etienne RIONDET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R24, Me Pascal KOERFER, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 31

DEFENDERESSES

L’AGENT JUDICIAIRE DE L’ETAT
domicilié DIRECTION DES AFFAIRES JURIDIQUES, SOUS-DIRECTION DU DROIT PRIVE, BATIMENT CONDORCET-TELEDOC 331, situé [Adresse 4],
représentée par Me Cécile FLECHEUX, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 241

Mutuelle MAIF
Société d’assurance mutuelle à cotisations variables, entreprise régie par le Code des assurances, identifiée sous le numéro RCS NIORT 775 709 702,, dont le siège social est sis [Adresse 2], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.
représentée par Me Thierry VOITELLIER, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52

CPAM des Yvelines
dont le siège social est sis [Adresse 5], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
non comparante

Débats tenus à l'audience du : 19 Mars 2024

Nous, Gaële FRANÇOIS-HARY, Première Vice-Présidente au Tribunal Judiciaire de Versailles, assistée de Virginie DUMINY, Greffier,

Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil, à l’audience du 19 Mars 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 07 Mai 2024, date à laquelle l’ordonnance suivante a été rendue :

EXPOSE DU LITIGE

Par actes de Commissaire de Justice en date des 2 et 21 février 2024, M. [Y] [X] a assigné la société MAIF, la CPAM DES YVELINES et L'AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT en référé devant le Tribunal judiciaire de Versailles aux fins de voir ordonner une expertise médicale, et condamner la MAIF à lui verser la somme de 15 000 euros à titre de provision et la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il expose que le 19 octobre 2019, alors âgé de 35 ans, il a été victime d’un grave accident de la circulation sur l’A86 à [Localité 8] ; chargé de l’entretien du réseau routier, il a été appelé pour une intervention sur les lieux d’un accident et alors qu’il rédigeait son rapport à bord de son véhicule, il a été violemment percuté par un automobiliste qui arrivait à très grande vitesse ; le choc fut tel qu’il a été éjecté du véhicule à 5 mètres et a perdu connaissance ; à son réveil, il a ressenti de vives douleurs thoraciques et des difficultés respiratoires ; pris en charge en urgence par le SMUR 78, il a présenté à son arrivée à l’Hôpital [6] de nombreuses lésions et a été hospitalisé dans le service d’anesthésie et de réanimation et y restera jusqu’au 27 octobre 2019 ; le 24 octobre 2019, une radiographie thoracique a mis en évidence un pneumothorax et de multiples fractures des côtes à droite ; compte tenu des lésions et de la déformation thoracique, il est décidé de réaliser un scanner thoracique témoignant du déplacement des foyers de fractures ; sur le plan pulmonaire, une dégradation de l’état respiratoire avec une franche désaturation a nécessité une majoration du débit d’oxygène et des séances de ventilation non invasive ; le 21 octobre 2019, il a présenté une atélectasie postéro-basale déclive des deux lobes inférieurs nécessitant que les séances de ventilation se poursuivront jusqu’au 27 octobre 2019 ; sur le plan ophtalmologique, une majoration d’une hémorragie sous-conjonctivale de son œil gauche a été traitée par collyres antiseptiques et lavages ophtalmologiques ; sur le plan analgésique, il a reçu plusieurs traitements par péridurale afin d’améliorer son ampliation thoracique ; sur le plan infectieux, une pneumopathie a été diagnostiquée et traitée par antibiotiques à partir du 27 octobre 2019 ; il a fait l'objet d'arrêts de travail et d'un accompagnement sur le plan psychologique ; que de nouveaux examens ont mis en évidence une tendinopathie du tendon supra-épineux droit à l'épaule, des atteintes oculaires nécessitant un traitement, un syndrome restrictif avec une réduction du volume expiratoire maximal à la première seconde ; la MAIF, assureur du véhicule impliqué dans l’accident a accepté d’intervenir dans ce dossier et le 10 mai 2021, une expertise contradictoire amiable a été organisée par le Docteur [K], mandaté par la MAIF et par le Docteur [J], médecin conseil de victimes, qui ont rendu leur rapport; depuis, la MAIF n’a formulé aucune offre d’indemnisation ; le 14 avril 2022, une commission de réforme s’est réunie et a rendu son avis ; au regard de nouveaux éléments et de l’évolution de l’état de santé de Monsieur [X], il apparaît que les postes de préjudices tels qu’évalués le 10 mai 2021 à l’amiable ne peuvent servir de base à la liquidation de ses préjudices.

Aux termes de ses conclusions, la MAIF sollicite de voir :
- lui donner acte de ses protestations et réserves sur la demande d’expertise judiciaire,
- limiter la provision à une somme de 10.000 euros,
- débouter Monsieur [X] et l’AGENT JUDICIAIRE DE L’ETAT de l’ensemble de leurs autres demandes.

Aux termes de ses conclusions, l' AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT déclare ne pas s’opposer à la demande d’expertise ni sur le principe à la demande de provision, et sollicite que l’indemnité provisionnelle susceptible d’être allouée à Monsieur [X] ne devra être prélevée ni sur les postes « perte de gains professionnels » et « incidence professionnelle » ni sur le « déficit fonctionnel permanent » dans l’hypothèse où une prestation d’invalidité serait versée à la victime par l’ETAT, et de voir condamner la société MAIF à lui verser la somme de 1000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

La CPAM DES YVELINES n'a pas fait d'observations (pas de représentation obligatoire).

La décision a été mise en délibéré au 7 mai 2024.

MOTIFS

Sur la demande d'expertise

L'article 143 du code de procédure civile dispose que "Les faits dont dépend la solution du litige peuvent, à la demande des parties ou d'office, être l'objet de toute mesure d'instruction légalement admissible."

L'article 232 du code de procédure civile ajoute que "Le juge peut commettre toute personne de son choix pour l'éclairer par des constatations, par une consultation ou par une expertise sur une question de fait qui requiert la lumière d'un technicien."

Aux termes de l'article 145 du code de procédure civile : « S'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé. ».

En l'espèce, la mesure demandée est légalement admissible ; le litige potentiel a un objet et un fondement suffisamment caractérisés ; la prétention du demandeur n'est pas manifestement vouée à l'échec ; le demandeur, dont les allégations ne sont pas imaginaires et présentent un certain intérêt, justifie par la production des nombreuses pièces médicales et rapports d'expertise amiable, du caractère légitime de sa demande.

Il y a lieu d'y faire droit, dans les conditions détaillées dans le dispositif.

Sur la demande de provision

Aux termes de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le Président du Tribunal judiciaire peut, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Si le montant de la provision allouée en référé n’a d’autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée, il doit conserver un caractère provisionnel à savoir celui d'une avance dont le montant est, d'une part, destiné à permettre de faire face à des frais justifiés par le demandeur et, d'autre part, à valoir sur la liquidation de son préjudice au regard du montant des indemnités susceptibles d’être retenu.

En l'espèce, il résulte des éléments produits que les séquelles de l'accident sont lourdes et justifient d'ores et déjà le versement d'une provision à hauteur de 15 000 euros.

Au stade des référés, il est prématuré de statuer sur la répartition des postes de préjudices.

Il y a lieu de déclarer commune à la CPAM DES YVELINES la présente ordonnance.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il convient de condamner la société MAIF à verser au demandeur la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le surplus des demandes sera rejeté.

Les dépens seront à la charge de la société MAIF.

PAR CES MOTIFS

Nous, Gaële FRANCOIS-HARY, Première Vice-Présidente, juge des référés, statuant par ordonnance réputée contradictoire et en premier ressort :

Ordonnons une mesure d'expertise,

Désignons pour y procéder le Docteur [Z] [W], pneumologue, expert auprès la Cour d'appel de Versailles, avec mission, après s'être fait communiquer tous documents utiles, avoir consulté toute personne susceptible de l'éclairer et s’être adjoint tout sapiteur de son choix, notamment en ophtalmologie, de :
- convoquer toutes les parties,
- examiner la victime,
- décrire les lésions qu'elle impute,
- dire si ces lésions sont en relation directe et certaine avec les faits décrits,
- donner son avis sur l’existence d’un éventuel état antérieur, d’éventuelles erreurs, imprudences, négligences, manques de précaution, imputables à l’un ou l’autre des intervenants, personnel médical ou établissement,
- fixer la date de consolidation des blessures et si celle-ci n'est pas encore acquise, indiquer le délai à l'issue duquel un nouvel examen devra être réalisé et évaluer les seuls chefs de préjudice qui peuvent l'être en l'état,

SUR LES PRÉJUDICES TEMPORAIRES (avant consolidation) :
- déterminer la durée du déficit fonctionnel temporaire en indiquant s’il a été total ou si une reprise partielle est intervenue et, dans ce cas, en préciser les conditions et la durée,
- le cas échéant, déterminer l’incidence professionnelle de ce déficit fonctionnel temporaire,
- dégager en les spécifiant les éléments propre à justifier une indemnisation au titre du préjudice esthétique temporaire résultant pour la victime de l'altération temporaire de son apparence physique subie jusqu'à sa consolidation ; qualifier l'importance de ce préjudice ainsi défini selon l'échelle à sept degrés,
- dégager, en les spécifiant, les éléments propres à justifier une indemnisation au titre de la douleur en prenant en compte toutes les souffrances, physiques et psychiques, ainsi que les troubles associés que la victime a dû endurer du jour de l'accident à celui de sa consolidation ; qualifier l'importance de ce préjudice ainsi défini selon l'échelle à sept degrés,
- rechercher si la victime était du jour de l'accident à celui de sa consolidation médicalement apte à exercer les activités d'agrément, notamment sportives ou de loisirs, qu'elle pratiquait avant l'accident,

SUR LES PRÉJUDICES PERMANENTS (après consolidation) :
- déterminer si la victime est atteinte d’un deficit fonctionnel permanent, et dans l’affirmative après en avoir précisé les éléments, en chiffrer le taux,
- le cas échéant, dire si l’aide d’une tierce personne est indispensable, dans l’affirmative indiquer la qualification de celle-ci et préciser pour quels actes de la vie courante et pendant quelle durée quotidienne cette aide est indispensable et comment la victime peut être appareillée, décrire les prothèses, orthèses ou aides techniques nécessaires, leur incidence sur la capacité fonctionnelle et éventuellement la fréquence de leur renouvellement,
- dire si des soins postérieurs à la consolidation sont nécessaires, en indiquer la nature, la quantité, la nécessité éventuelle de leur renouvellement, leur périodicité,
- déterminer si la victime en fait état les répercussions des séquelles sur les activités professionnelles, d’agrément, sur la vie sexuelle,
- émettre un avis motivé en discutant de l’imputabilité de la répercussion évoquée aux fait, aux lésions et aux séquelles retenues,
- dégager en les spécifiant les éléments propre à justifier une indemnisation au titre du préjudice esthétique permanent résultant pour la victime de l'altération de son apparence physique persistant après sa consolidation ; qualifier l'importance de ce préjudice ainsi défini selon l'échelle à sept degrés,
- fournir toute précision technique et de fait de nature à permettre la juridiction éventuellement saisie d’apprécier les responsabilités encourues et d’évaluer les préjudices subis,
Fixons à 1500 euros la provision à valoir sur la rémunération de l'expert,

Disons que cette somme sera consignée par le demandeur au plus tard le 20 juin 2024, au Greffe du Tribunal judiciaire de Versailles à la Régie d’avances et de recettes, faute de quoi la désignation de l'expert sera caduque,

Disons que l'expert accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 248 et 263 à 284 du code de procédure civile, en présence des parties ou elles dûment convoquées, qu'il entendra les parties en leurs observations et explications, y répondra, qu'il joindra ces observations à son rapport lorsqu’elles seront écrites et que la demande lui en sera faite, qu’il devra impartir un délai de rigueur pour déposer les pièces justificatives qui lui paraîtront nécessaires et, à l’expiration du délai, aviser le juge de l’éventuelle carence des parties, qu’il vérifiera que les parties ont été à même de débattre des constatations et documents au vu desquels il entend donner son avis et qu’il devra procéder personnellement à ses opérations, avec le cas échéant l’avis d’autres techniciens qu’il aura sollicités,

Disons que l’expert devra déposer un pré-rapport, qu’il devra, lors de l’établissement de sa première note d’expertise indiquer le calendrier des opérations et le coût prévisionnel de la mesure d’expertise, qu’il informera le juge de l’avancement de ses opérations et de ses diligences et qu’il devra déposer un rapport de ses opérations et conclusions qu'il déposera au Greffe du service des expertises de cette juridiction dans le délai de 4 mois à compter de l'avis de la consignation au Greffe,

Disons qu'en cas de refus ou d'empêchement de l'expert, il sera procédé à son remplacement par le Magistrat chargé du contrôle des expertises qui est par ailleurs chargé de la surveillance des opérations d’expertise,

Condamnons la société MAIF à payer à M. [Y] [X] la somme de 15 000 euros à titre de provision à valoir sur son préjudice,

Condamnons la société MAIF à payer à M. [Y] [X] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejetons le surplus des demandes,

Déclarons commune à la CPAM DES YVELINES la présente ordonnance,

Disons que les dépens seront à la charge de la société MAIF.

Prononcé par mise à disposition au greffe le SEPT MAI DEUX MIL VINGT QUATRE par Gaële FRANÇOIS-HARY, Première Vice-Présidente, assistée de Virginie DUMINY, Greffier, lesquelles ont signé la minute de la présente décision.

Le GreffierLa Première Vice-Présidente

Virginie DUMINYGaële FRANÇOIS-HARY


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Versailles
Formation : Chambre des référés
Numéro d'arrêt : 24/00290
Date de la décision : 07/05/2024
Sens de l'arrêt : Désigne un expert ou un autre technicien

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-07;24.00290 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award