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06/05/2024 | FRANCE | N°23/00287

France | France, Tribunal judiciaire de Versailles, Procédure accélérée fond, 06 mai 2024, 23/00287


Minute n° :






TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES

JUGEMENT
PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE AU FOND

06 MAI 2024





N° RG 23/00287 - N° Portalis DB22-W-B7H-RE5K
Code NAC : 28D




DEMANDERESSE :

Madame [P], [M], [T] [O]
née le [Date naissance 2] 1954 à [Localité 7] (25),
demeurant [Adresse 5],

Non comparante, représentée par Maître Claire QUETAND-FINET, avocat plaidant/postulant au barreau de VERSAILLES.



DÉFENDEUR :

Monsieur [D], [L], [Y] [H]
né le [Date naissance 1] 19

49 à [Localité 9] (25),
demeurant [Adresse 4],

Non comparant, représenté par Maître Nathalie JOURDE-LAROZE, avocat plaidant/postulant au barreau de VERSAILLES.







DÉBA...

Minute n° :

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES

JUGEMENT
PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE AU FOND

06 MAI 2024

N° RG 23/00287 - N° Portalis DB22-W-B7H-RE5K
Code NAC : 28D

DEMANDERESSE :

Madame [P], [M], [T] [O]
née le [Date naissance 2] 1954 à [Localité 7] (25),
demeurant [Adresse 5],

Non comparante, représentée par Maître Claire QUETAND-FINET, avocat plaidant/postulant au barreau de VERSAILLES.

DÉFENDEUR :

Monsieur [D], [L], [Y] [H]
né le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 9] (25),
demeurant [Adresse 4],

Non comparant, représenté par Maître Nathalie JOURDE-LAROZE, avocat plaidant/postulant au barreau de VERSAILLES.

DÉBATS TENUS À L'AUDIENCE DU : 15 MARS 2024

Nous, Pauline DURIGON, Vice-Présidente, assistée de Carla LOPES DOS SANTOS, Greffier,

Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil, à l’audience du
15 Mars 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 06 Mai 2024, date à laquelle le jugement suivant a été rendu.

* * * * * *

EXPOSE DU LITIGE

Madame [P] [O] et Monsieur [D] [H] se sont mariés le
11 septembre 1971 à [Localité 7] (25) sans avoir fait précéder leur union
d'un contrat de mariage. De leur union est née [V], le [Date naissance 3] 1972
à [Localité 11] (25).

Les époux ont acquis le 21 octobre 1985, un bien immobilier sis [Adresse 4] (78) ayant constitué le domicile conjugal.

Par ordonnance de non conciliation en date du 16 juin 1988, le domicile conjugal a été attribué à Monsieur [D] [H] à titre onéreux.

Par jugement en date du 22 mars 1989, le tribunal de grande instance de Versailles a prononcé le divorce des époux, commis Monsieur le Président de la chambre interdépartementale des Notaires à Versailles ou son délégataire afin de procéder à la liquidation des droits respectifs des parties. Maître [C], Notaire à [Localité 8] (78), a été désigné pour procéder aux opérations de liquidation du régime matrimonial des ex-époux et il a dressé le 6 juillet 1995 un procès-verbal de difficultés, qui est resté sans suite.

Reprochant à Monsieur [D] [H] de ne pas avoir répondu à ses différentes demandes pour relancer les opérations de liquidation de leur régime matrimonial, Madame [P] [O] a, par acte de commissaire de justice en date du
9 mai 2023, assigné Monsieur [D] [H] devant le juge aux affaires familiales du tribunal de Versailles aux fins de liquidation et de partage de leurs intérêts patrimoniaux.

Par acte de commissaire de justice délivré le 23 février 2023, Mme [P] [O] a fait assigner Monsieur [D] [H] devant le président du tribunal judiciaire de Versailles statuant selon la procédure accélérée au fond et demande de :

« Vu l’article 481-1 du code de procédure civile,
Vu les articles 815-11 et 1380 du code civil,
Vu l’intégralité des pièces versées au débat,

- Fixer la montant de l’indemnité d'occupation due par Monsieur [D] [H] à l’indivision à 1.487,50 euros par mois, à titre provisionnel,

- Condamner Monsieur [D] [H] à payer à Mme [P] [O] sa part de l’indemnité d’occupation due depuis cinq ans la période non couverte par la prescription soit 44.625 euros (somme à parfaire au jour de la décision) à titre provisionnel,

- Condamner Monsieur [D] [H] au paiement de 1.800 euros sur le fondent de l’article 700 du code de procédure civile,

-Condamner Monsieur [D] [H] aux entiers dépens,

-Prononcer l’exécution provisoire de la décision. »

Mme [P] [O] expose que le divorce a été prononcé le 22 mars 1989, que le domicile conjugal, qui est un bien commun, a été attribué à titre onéreux à Monsieur [D] [H] aux termes de l’ordonnance de non conciliation. Elle ajoute que Monsieur [D] [H] se maintient dans le domicile conjugal.
Elle indique que Maître [C], Notaire commis pour réaliser les opérations de compte liquidation partage du régime matrimonial des ex-époux, a établi un procès-verbal de difficultés en 1995.
Elle estime sa demande justifiée. Elle précise qu’une procédure est en cours devant le juge aux affaires familiales pour voir désigner un nouveau notaire pour procéder aux opérations de liquidation de la communauté.

Par conclusions développées à l'audience, Monsieur [D] [H] conclut à l’irrecevabilité des demandes de Madame [P] [O] en raison du fait qu’il n’y a pas eu d’ouverture des opérations de compte liquidation partage. Il demande un sursis à statuer dans l’attente de l’établissement des comptes du Notaire qui chiffrera le montant de l’indemnité d’occupation. Il sollicite une expertise pour le chiffrage de l’indemnité d’occupation. Il conclut au fond au débouté des demandes de Madame [P] [O].

En cours de délibéré, et conformément à la demande du président à l’audience, les parties ont adressé le jugement du juge aux affaires familiales de Versailles du
15 mars 2024. Il ressort de ce jugement que le juge aux affaires familiales a :

« Ordonné l’ouverture des opérations de compte liquidation partage de la communauté ayant existé entre les époux [O]/[H] et de l’indivision post communautaire subsistant entre eux ;

Renvoyé les parties devant Maître [U] [Z], Notaire à [Localité 8] (78), [Adresse 6], ainsi désigné pour procéder à ces opérations, dans le cadre des dispositions des articles 1364 et suivants du Code de procédure civile ;

Commis le juge du cabinet 9 pour en surveiller le déroulement et dresser rapport en cas de difficulté ;

Dit qu’en cas d’empêchement, le notaire et le magistrat commis pourront être remplacés par simple ordonnance rendue sur requête ;

Autorisé le notaire désigné à prendre tous renseignements utiles auprès de la direction générale des finances publiques, à interroger le fichier FICOBA afin d’obtenir la liste exhaustive des comptes bancaires ouverts au nom des parties, ainsi que fichier FICOVIE et le fichier détenu par l'AGIRA ;

Dit qu’il appartiendra au notaire commis de préciser la consistance exacte de la masse à partager, de procéder, au besoin, à la constitution des lots pour leur répartition, et réaliser, en cas de besoin, leur tirage au sort ;

Autorisé le notaire désigné à prendre tous renseignements utiles auprès de la direction générale des finances publiques par l’intermédiaire du fichier national des comptes bancaires et assimilés (FICOBA) ;

Dit qu’il appartiendra au notaire commis de préciser la consistance exacte de la masse à partager, de procéder, au besoin, à la constitution des lots pour leur répartition, et réaliser, en cas de besoin, leur tirage au sort ;

Dit que conformément aux dispositions de l'article 1365 du code de procédure civile, sila valeur ou la consistance des biens le justifie, le notaire désigné pourra s'adjoindre un expert, choisi d'un commun accord entre les parties ou, à défaut, désigné par le juge commis, à frais partagés et avancés à charge de compte lors de la liquidation des intérêts patrimoniaux ;

Débouté Madame [P] [O] de sa demande sur le fondement de l’article 700du code de procédure civile ;

Rejeté toute autre demande plus ample ou contraire ;

Ordonne le retrait du rôle et dit que l'affaire pourra être rappelée à tout moment à l'audience du juge commis à la diligence de ce dernier, du notaire désigné, des parties ou de leurs conseils ;

Ordonné l'emploi des dépens en frais généraux de partage ;

Dit que la présente décision sera signifiée par Huissier de Justice par la partie la plus diligente, faute de quoi elle ne sera pas susceptible d'exécution forcée.

Dit que la présente décision sera susceptible d'appel dans le mois de la signification par voie d'Huissier, et ce, auprès du Greffe de la Cour d'Appel de Versailles. »

L’affaire, appelée à l'audience du 12 mai 2023, a fait l’objet de trois renvois, le président ayant précisé lors du dernier renvoi pour l’audience du 15 mars 2024 qu’il s’agissait d’un ultime renvoi pour plaidoirie aucun autre renvoi n’étant possible, a été mise en délibéré au 6 mai 2024.

MOTIFS

Sur la recevabilité des demandes

L'article 815-11 du code civil dispose : « Tout indivisaire peut demander sa part annuelle dans les bénéfices, déduction faite des dépenses entraînées par les actes auxquels il a consenti ou qui lui sont opposables.
A défaut d'autre titre, l'étendue des droits de chacun dans l'indivision résulte de l'acte de notoriété ou de l'intitulé d'inventaire établi par le notaire.
En cas de contestation, le président du tribunal judiciaire peut ordonner une répartition provisionnelle des bénéfices sous réserves d'un compte à établir lors de la liquidation.
A concurrence des fonds disponibles, il peut semblablement ordonner une avance en capital sur les droits de l'indivisaire dans le partage à intervenir. »

L'article 1380 du code de procédure civile dispose que les demandes formées en application de l'article 815-11 du code civil sont portées devant le président du tribunal judiciaire qui statue selon la procédure accélérée au fond.

Aucune disposition ne subordonne la saisine du président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond à l’ouverture des opérations de compte liquidation partage.
D’ailleurs, Monsieur [D] [H] s’est contenté de soulever cette irrecevabilité sans fonder juridiquement cette demande.

Il convient donc de déclarer recevable la demande de Madame [P] [O].

Sur la demande de sursis à statuer

L'article 378 du code de procédure civile dispose que : « la décision de sursis suspend le cours de l'instance pour le temps ou jusqu'à la survenance de l'événement qu'elle détermine. »

L'article 379 du même code précise que « le sursis à statuer ne dessaisit pas le juge. A l'expiration du sursis, l'instance est poursuivie à l'initiative des parties ou à la diligence du juge, sauf la faculté d'ordonner, s'il y lieu, un nouveau sursis. »

Le juge doit apprécier l'opportunité d'un sursis à statuer dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice.

Monsieur [D] [H] demande le sursis à statuer dans l’attente de l’établissement des comptes des parties par le Notaire.
Il doit être relevé que la demande de sursis à statuer n’est pas justifiée, la détermination de l’indemnité d’occupation n’ayant pas d’incidence sur l’issue de la présente procédure.

La demande de sursis à statuer n’est pas fondée et sera rejetée.

Sur la demande de fixation d'indemnité provisionnelle

L'article 815-11 du code civil dispose : « Tout indivisaire peut demander sa part annuelle dans les bénéfices, déduction faite des dépenses entraînées par les actes auxquels il a consenti ou qui lui sont opposables.
A défaut d'autre titre, l'étendue des droits de chacun dans l'indivision résulte de l'acte de notoriété ou de l'intitulé d'inventaire établi par le notaire.
En cas de contestation, le président du tribunal judiciaire peut ordonner une répartition provisionnelle des bénéfices sous réserves d'un compte à établir lors de la liquidation.
A concurrence des fonds disponibles, il peut semblablement ordonner une avance en capital sur les droits de l'indivisaire dans le partage à intervenir. »

L'article 1380 du code de procédure civile dispose que les demandes formées en application de l'article 815-11 du code civil sont portées devant le président du tribunal judiciaire qui statue selon la procédure accélérée au fond.

Il est de principe que l'indemnité d'occupation privative devant être assimilée à un revenu accroissant l'indivision, chaque indivisaire peut solliciter sa part annuelle dans les bénéfices résultant pour celle-ci, et ce, même s'il n'est pas établi que le bien aurait été productif de revenus sans occupation.

En sa qualité d’indivisaire, Madame [P] [O] peut demander, sur le fondement de l’article 815-11 du code civil, sa part annuelle dans les bénéfices, déduction faite des dépenses entraînées par les actes auxquels elle a consenti ou qui lui sont opposables.

Il est constant que Monsieur [D] [H] occupe de manière privative le bien immobilier indivis ayant constitué le domicile conjugal des ex-époux depuis le
16 juin 1988. Il est donc redevable d’une indemnité d’occupation au titre de sa jouissance privative du bien indivis.

Madame [P] [O] est bien fondée à solliciter une provision sur l’indemnité d’occupation due pour la période non prescrite à savoir les cinq années précédant l’assignation délivrée le 22 février 2023.

Madame [P] [O] verse aux débats des estimations réalisées par des agences immobilières aux termes desquelles l’agence [10] évalue la valeur locative mensuelle du bien entre 1.500 et 1.700 euros et l’agence principale entre 1.350 et 1.400 euros. Elle propose de retenir une valeur locative mensuelle de 1.487,50 euros.

Monsieur [D] [H] s’oppose à cette demande et sollicite une expertise judiciaire pour évaluer le bien immobilier et sa valeur locative.

Il doit être relever qu’une mesure d’expertise ne peut palier la carence des parties dans l’administration de la preuve. En l’espèce, Monsieur [D] [H] qui occupe le bien immobilier est tout à fait en mesure de solliciter des agences immobilières pour faire estimer la valeur locative. Sa demande d’expertise n’est pas justifiée au vu des estimations produites par Madame [P] [O] permettant au tribunal de déterminer la valeur locative du bien. Il sera débouté de sa demande d’expertise.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments qu’il convient de fixer la valeur
locative mensuelle du bien immobilier indivis à 1.487,50 euros ; le montant de l’indemnité d’occupation due par Monsieur [D] [H], par mois, s’élève donc à 734,75 euros par mois.

Monsieur [D] [H] sera condamné à payer à Madame [P] [O] la somme de 734,50 euros par mois pour la période du 23 février 2018 jusqu’au présent jugement à savoir le 6 mai 2024, au titre de sa part de l’indemnité d’occupation.

Sur les autres demandes

L’exécution provisoire est de droit.

Monsieur [D] [H] qui succombe sera condamné aux dépens.

Les circonstances d’équité tendent à justifier de condamner Monsieur [D] [H] à payer à Madame [P] [O] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

PAR CES MOTIFS

Statuant selon la procédure accélérée au fond par jugement contradictoire et en premier ressort, par mise à disposition au greffe,

Déclare recevable la demande de Madame [P] [O],

Déboute Monsieur [D] [H] de toutes ses demandes,

Dit que Monsieur [D] [H] est redevable d’une indemnité d’occupation due à l’indivision,

Fixe le montant mensuel de l’indemnité d’occupation due par Monsieur [D] [H] à Madame [P] [O] à la somme de 734,75 euros à titre provisionnel,

Condamne à titre provisionnel Monsieur [D] [H] à payer à Madame [P] [O] la somme de 734,75 euros, par mois, à compter du 23 février 2018 jusqu’au 6 mai 2024 au titre de l’indemnité d’occupation due,

Condamne Monsieur [D] [H] à payer à Madame [P] [O] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur [D] [H] à payer les dépens de la présente procédure,

Rappelle que le jugement est exécutoire par provision.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 MAI 2024 par Pauline DURIGON, Vice-Présidente, assistée de Carla LOPES DOS SANTOS, Greffier, lesquelles ont signé la minute de la présente décision.

LE GREFFIERLA VICE-PRÉSIDENTE
Carla LOPES DOS SANTOS Pauline DURIGON


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Versailles
Formation : Procédure accélérée fond
Numéro d'arrêt : 23/00287
Date de la décision : 06/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 12/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-06;23.00287 ?
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