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23/04/2024 | FRANCE | N°21/06336

France | France, Tribunal judiciaire de Versailles, Troisième chambre, 23 avril 2024, 21/06336


Minute n°


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Troisième Chambre
JUGEMENT
23 AVRIL 2024


N° RG 21/06336 - N° Portalis DB22-W-B7F-QJVV
Code NAC : 71F



DEMANDEURS :

1/ Monsieur [I] [R]
né le 29 Juillet 1942 à [Localité 8] (15),
demeurant [Adresse 6],

2/ Madame [S] [E] épouse [R]
née le 10 Janvier 1944 à [Localité 10] (75),
demeurant [Adresse 6],

représentés par Maître Stéphane DIDIER, avocat plaidant/postulant au barreau de VERSAILLES.



DÉFENDEUR :

Le syndicat des copropriétaires

de la résidence des [11] sis [Adresse 5] et [Adresse 3] [Localité 9] représenté par son syndic la société A2BCD, société par actions simplifiée immatricul...

Minute n°

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Troisième Chambre
JUGEMENT
23 AVRIL 2024

N° RG 21/06336 - N° Portalis DB22-W-B7F-QJVV
Code NAC : 71F

DEMANDEURS :

1/ Monsieur [I] [R]
né le 29 Juillet 1942 à [Localité 8] (15),
demeurant [Adresse 6],

2/ Madame [S] [E] épouse [R]
née le 10 Janvier 1944 à [Localité 10] (75),
demeurant [Adresse 6],

représentés par Maître Stéphane DIDIER, avocat plaidant/postulant au barreau de VERSAILLES.

DÉFENDEUR :

Le syndicat des copropriétaires de la résidence des [11] sis [Adresse 5] et [Adresse 3] [Localité 9] représenté par son syndic la société A2BCD, société par actions simplifiée immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de VERSAILLES sous le numéro 304 497 183 dont le siège social est situé [Adresse 4], agissant poursuites et diligences de son Président en exercice domicilié en cette qualité audit siège,

représenté par Maître Jérôme NALET de la SELARL LYVEAS AVOCATS, avocat plaidant/postulant au barreau de VERSAILLES.

ACTE INITIAL du 24 Novembre 2021 reçu au greffe le 30 Novembre 2021.

DÉBATS : A l'audience publique tenue le 14 Décembre 2023, M. JOLY, Vice-Président, siégeant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l’article 812 du Code de Procédure Civile, assistée de Madame LOPES DOS SANTOS, Greffier, a indiqué que l’affaire sera mise en délibéré au 08 Février 2024, prorogé au 14 Mars 2024 pour surcharge magistrat, puis au
27 Mars 2024 et 23 Avril 2024 pour les mêmes motifs.

* * * * * *

EXPOSE DU LITIGE

Par acte authentique du 21 décembre 1988, M. [I] [R] et Mme [S]
[E] épouse [R] (ci-après les consorts [R]) ont acquis, en l'état futur d'achèvement, une maison à usage d'habitation située [Adresse 6] à [Localité 9], sur un terrain cadastré section AD n° [Cadastre 1] et [Cadastre 2] (désormais section AS n° [Cadastre 7]), constituant le lot n° 10 de la résidence des [11] sise [Adresse 5] et [Adresse 3].

Cet ensemble immobilier est soumis au statut de la copropriété suivant acte du
20 octobre 1988 contenant état descriptif de division et règlement de copropriété, modifié par acte du 2 décembre 1988.

La copropriété, et plus particulièrement les lots n° 9 et 10, constitués de deux
pavillons appartenant respectivement aux époux [N] et aux époux [R],
sont construits sur une ancienne carrière souterraine de calcaire.

Le 6 septembre 2012, le préfet des Yvelines a publié un arrêté portant
approbation du plan de prévention des risques naturels (PPRN) - mouvements
de terrain liés aux anciennes carrières souterraines - sur la commune de
[Localité 9], aux termes duquel les parcelles des époux [R] et [N] ont
été classées en zone bleue «B2/B3» correspondant à un aléa faible de survenance du risque.

Les prescriptions émises par le PPRN pour les biens situées en zone bleue B2
rendent obligatoire, dans un délai de 2 ans à compter de la date d'approbation
du PPRN, de procéder à des sondages de contrôle des travaux présumés
effectués et, dans un délai de 5 ans à compter de la date d'approbation du PPRN, de procéder au traitement des anomalies ou des vides résiduels
rencontrés.

Dans le prolongement du PPRN, MM. [R] et [N] ont sollicité conjointement, en 2013, un avis géologique auprès du cabinet Diag'Expert, réalisé par M. [D] [M], ingénieur géologue et expert judiciaire près la cour d'appel d'Orléans, lequel a conclu que les cavités avaient été parfaitement
remblayées et que M. le Préfet devait être sollicité par M. le Maire de [Localité 9] afin de requalifier la zone classée B2 au PPRN en zone grise, correspondant à un aléa très faible de survenance du risque.

Par courrier du 18 septembre 2014, la préfecture a rejeté la demande de
reclassement présentée par M. [R], estimant que le rapport effectué par le cabinet Diag'Expert n'était pas suffisant en l'état, l'invitant à faire réaliser des
sondages de contrôle des travaux présumés de remblaiement de cavage,
conformément au PPRN de [Localité 9].

Aux termes d'une assemblée générale des copropriétaires en date du 30 juin 2015, une autorisation a été donnée à M. [N] et à M. [R] de faire procéder, à leur charge, aux sondages de reconnaissance concernant les lots
9 et 10, renvoyant à une prochaine assemblée pour déterminer qui, de la copropriété ou des copropriétaires, supporterait la charge des études, consultations préalables, travaux de sondages et éventuellement de comblement et leurs contrôles.

Le cabinet GSOL, mandaté par les époux [N], dans un rapport rendu le
5 février 2016, a conclu que le risque de désordre par remontée de fontis pouvait
être exclu.

La société Thergéo, mandatée par les époux [R], a pour sa part conclu, dans un rapport du 10 décembre 2015, à la nécessité de procéder à des travaux
d'injections de béton au droit de la carrière le plus tôt possible.

Au vu des conclusions de ce rapport, M. [R] a sollicité l'inscription à
l'ordre du jour de l'assemblée générale des copropriétaires devant se réunir le 2 février 2016, de plusieurs résolutions dont l'objet était la prise en charge, par la copropriété, des travaux de comblement des vides de la carrière et des contrôles de ces travaux.

Lors de cette assemblée générale, les copropriétaires ont rejeté le principe de
la prise en charge, par la copropriété, de ces travaux.

Lors de l'assemblée générale du 22 mai 2017, les mêmes résolutions ont été soumises au vote des copropriétaires, à la demande des époux [R], et ont
été adoptées.

Elles ont toutefois fait l'objet d'une action en annulation à l'initiative des époux
Pfohl.

Afin de mettre un terme à cette procédure, l'assemblée générale des copropriétaires du 19 octobre 2017 a annulé les résolutions attaquées.
M. et Mme [R] ont alors mandaté le bureau d'études 1G Solutions afin d'établir une note technique et de donner un avis sur les rapports précédents, lequel a conclu, les 10 et 16 juin 2018, à la nécessité de prévoir un traitement par injections des remblais de comblement de l'ancienne carrière souterraine.
Concomitamment, la société JL Immo, désignée en qualité de syndic par l'assemblée générale du 11 janvier 2018, a mandaté M. [I] [X] en qualité d'expert-ingénieur, aux fins d'établir un rapport contradictoire en reprenant l'ensemble des études d'ores et déjà réalisées. Dans
son rapport définitif, en date du 16 juillet 2018, M. [X] conclut
que la carrière, qui se trouve sous les lots n° 9 et 10 de la copropriété, ne présente, en l'état, aucun danger et mérite le classement B2 qui lui est actuellement attribué dans le PPRN. Il considère en outre que « le risque de formation d'un fontis est, dans le cas d'espèce, minime, pour ne pas dire inexistant. »

Une assemblée générale des copropriétaires s'est tenue le 7 septembre 2021.

Par acte du 24 novembre 2021, les consorts [R] ont fait assigner le syndicat des copropriétaires en annulation des résolutions 5, 20 et 28 adoptées lors de cette assemblée générale.

Aux termes de leurs conclusions notifiées par voie électronique le
9 mai 2023, les consorts [R] demandent au Tribunal de :

Vu l'article 42 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965
Juger M. [I] [R] et Mme [S] [E] épouse [R] recevables et bien fondés en leur action en annulation des résolutions n°5, 20 et 28 de l'assemblée générale des copropriétaires de la résidence des [11] du 7 septembre 2021 ;

Sur la résolution n°5
1) Vu les articles 18-1 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 et 9-1 du décret n°67-223 du 17 mars 1967
Juger que l'avis de convocation du 28 juin 2021 adressé aux copropriétaires et contenant la liste des projets de résolutions ne contenait aucune précision quant aux modalités d'exercice du droit pour chaque copropriétaire de consulter les pièces comptables du syndicat des copropriétaires ;

Juger que M. et Mme [R] n'ont pas pu exercer leur droit de contrôle des pièces comptables avant la tenue de l'assemblée générale des copropriétaires du 7 septembre 2021 ;

En conséquence, prononcer l'annulation de la résolution n°5 votée par l'assemblée générale des copropriétaires du 7 septembre 2021 ;

2) Vu l'article 14-2 I de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965, l'article 44 4°) du décret n°67-223 du 17 mars 1967 et l'article 4 alinéas 1 et 2 du décret n°2005-240 du 14 mars 2005

Juger que les frais et honoraires résultant d'expertises, non votées préalablement et à l'unanimité par une assemblée générale des copropriétaires, ne sauraient être répartis entre tous les copropriétaires ;

Juger qu'en application de l'article 4 alinéa 1er du décret n°2005-240 du 14 mars 2005, les frais et honoraires d'experts ne peuvent être comptabilisés que lors de l'exercice au cours duquel les prestations sont réalisées (2018) ;

En conséquence, prononcer l'annulation de la résolution n°5 votée par l'assemblée générale des copropriétaires du 7 septembre 2021 ;

3) Subsidiairement, sur la fraude
Juger que les annexes comptables jointes à l'avis de convocation établissent une fraude par le transfert, dans le budget 2020 à approuver, de divers frais exceptionnels (honoraires de Messieurs [X] et [O]), votés par les résolutions n°8 et 18 de la 1ère assemblée générale du 25 février 2020 et par la résolution n°4 de l'assemblée générale du 19 juin 2020, toutes en cours de contestations devant le présent Tribunal
(RG : 20/02410 et 20/05032) ;

En conséquence, prononcer l'annulation de la résolution n°5 votée par l'assemblée générale des copropriétaires du 7 septembre 2021.

Sur la résolution n°20
Vu les articles 14-2 I. de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 et 44 du décret n°67-223 du 17 mars 1967

Juger qu'en application de l'article 44 du décret du 17 mars 1967, certains frais exceptionnels comme le solde des honoraires de M. [X], expert et de M. [Y], géomètre, ne pouvaient être intégrés dans l'avenant au budget prévisionnel pour 2021 ;

En conséquence, prononcer l'annulation de la résolution n°20 votée par l'assemblée générale des copropriétaires du 7 septembre 2021.

Sur la résolution n°28
Vu les articles 12 et 13 du règlement de copropriété de la Résidence des [11] du 20 octobre 1988
Vu les articles 9 et 25 b) de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 et la jurisprudence y afférente

Juger que le vote de la résolution n°28 constitue une violation des dispositions du règlement de copropriété en ce que les nouveaux portails et portillons installés par les époux [N] sans autorisation préalable de l'assemblée générale ont pour effet de rompre l'harmonie visuelle de l'aspect extérieur de l'immeuble et partant, de porter atteinte à sa destination ;

Juger que l'assemblée générale ne pouvait donner aux époux [N] une autorisation a postériori (ratification) à la majorité de l'article 25 de la loi du
10 juillet 1965 pour des travaux entraînant une atteinte à la destination de l'immeuble ;

Juger en outre que la vote de la résolution n°28 constitue une fraude en ce qu'une action au fond, notamment en dépose du portail et du portillon nouveaux à l'initiative de M. et M me [R], est pendante devant le Tribunal de céans (RG : 21/04716) ;

En conséquence, prononcer l'annulation de la résolution n°28 votée par l'assemblée générale des copropriétaires du 7 septembre 2021.

En toutes hypothèses,
Confirmer l'exécution provisoire du jugement à intervenir ;

Condamner le syndicat des copropriétaires de la résidence des [11], représenté par son syndic la société A2BCD, à payer à M. et à Mme [R] la somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du CPC ;

Condamner le syndicat des copropriétaires de la résidence des [11], représenté par son syndic la société JL IMMO, aux entiers dépens de l'instance dont les frais et honoraires des Commissaires de justice relatifs à la signification de l'assignation et du jugement à intervenir, les frais du timbre BRA (16 €) ainsi que le droit de plaidoirie (13 €), avec distraction au profit de Maître Stéphane DIDIER, avocat postulant,conformément à l'article 699 du CPC ;

Dire que, conformément à l'article 10-1 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965,
M. et Mme [R], copropriétaires demandeurs, seront exonérés de leur quote-part pour les dépens, frais et honoraires exposés par le syndicat dans la présente procédure au titre des charges générales d'administration.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le
12 avril 2023, le syndicat des copropriétaires de la résidence Les [11] demande au Tribunal de :

Vu la Loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ainsi que la jurisprudence y afférente ;
Vu le Décret n°67-223 du 17 mars 1967 ainsi que la jurisprudence y
afférente ;
Vu les articles 9, 699 et 700 du Code de procédure civile ;
Vu les pièces versées aux débats.

Il est demandé au Tribunal Judiciaire de céans de :

JUGER le Syndicat des Copropriétaires de la résidence des [11] sise [Adresse 5] et [Adresse 3] – [Localité 9], représenté par son Syndic la Société A2BCD, recevable et bien-fondé en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

DEBOUTER Monsieur [I] [R] et Madame [S] [E] épouse [R] de l'intégralité de leur demandes, fins et conclusions.

CONDAMNER SOLIDAIREMENT Monsieur [I] [R] et Madame [S] [E] épouse [R] à payer au Syndicat des Copropriétaires de la résidence des [11] sise [Adresse 5] et [Adresse 3] [Localité 9], la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONDAMNER SOLIDAIREMENT, sur le fondement de l'article 699 du Code de Procédure Civile, Monsieur [I] [R] et Madame [S] [E] épouse [R] aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de la SELARL FEUGAS AVOCATS.

Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétentions des parties, il convient de renvoyer aux écritures déposées conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

La clôture a été prononcée le 6 septembre 2023.


MOTIFS DE LA DÉCISION

Il est rappelé que les demandes des parties tendant à voir le tribunal "constater" ou "dire et juger" ne constituant pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions, il n'y a pas lieu de statuer sur celles-ci.

Sur l'annulation de la résolution N°5

Cette résolution porte sur l'approbation des comptes de l'exercice 2020.

Au soutien de leur demande d'annulation, les consorts [R] font valoir, à titre principal, la violation des articles 18-1 de la loi du 10 juillet 1965 et 9-1 du décret du 17 mars 1967.

Il ressort de l'article 18-1 susvisé que pendant le délai s'écoulant entre la convocation à l'assemblée et la tenue de celle-ci, les pièces justificatives des charges de la copropriété sont tenues à la disposition de tous les copropriétaires par le syndic selon les modalités précisées par décret en Conseil d'Etat.

Aux termes de l'article 9 alinéa 1 er du décret du 17 mars 1967 :
« La convocation contient l'indication des lieu, date et heure de la réunion, ainsi que l'ordre du jour qui précise chacune des questions soumises à la délibération de l'assemblée. À défaut de stipulation du règlement de copropriété ou de décision de l'assemblée générale, la personne qui convoque l'assemblée fixe le lieu et l'heure de la réunion. La convocation indique le lieu, le ou les jours et les heures de consultation des pièces justificatives des charges. »

Aux termes de l'article 9-1 du décret :

« Pendant le délai s'écoulant entre la convocation de l'assemblée générale appelée à connaître des comptes et la tenue de celle-ci, le syndic tient les pièces justificatives des charges mentionnées à l'article 18-1 de la loi du 10 juillet 1965 susvisée, en original ou en copie, et classées par catégories à la disposition de chaque copropriétaire pendant une durée qui ne peut être inférieure à un jour ouvré et doit être, en tout cas, appropriée à la dimension de la copropriété.

Le syndic fixe le lieu de la consultation des pièces justificatives des charges, soit à son siège, soit au lieu où il assure habituellement l'accueil des copropriétaires, le ou les jours et les heures auxquels elle s'effectue, qui doivent être indiqués dans la convocation mentionnée à l'article 9.

Lorsqu'il s'agit d'un syndic professionnel, ces jours et heures doivent être fixés pendant les jours et heures d'accueil physique déterminés dans le contrat de syndic.

Le copropriétaire peut se faire assister par un membre du conseil syndical.

Pendant le délai mentionné au premier alinéa, il peut également se faire assister par son locataire ou autoriser ce dernier à consulter en ses lieu et place les pièces justificatives de charges récupérables mentionnées à l'article 23 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.

Tout copropriétaire peut obtenir une copie des pièces justificatives à ses
frais. »

Le syndicat des copropriétaires fait valoir que les requérants ne démontrent aucun grief, qu'ils avaient identifié les charges et qu'ils leur était loisible de les consulter. Il ajoute que les pièces comptables étaient jointes à la convocation des copropriétaires.

Toutefois, il apparaît que les demandeurs n'ont pas été mis en mesure préalablement à l'assemblée générale de contrôler les justificatifs comptables afférents aux charges, lesquels ne figurent pas dans l'annexe comptable jointe à la convocation. Dans ces conditions, force est de constater que les prescriptions de l'article 18-1 de la loi du 10 juillet 1965 et du décret de 1967 en ses articles précités n'ont pas été respectées.

Les demandeurs sont donc bien fondés dans leur demande d'annulation de la résolution N°5 de l'assemblée générale du 7 septembre 2021, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres moyens.

Sur l'annulation de la résolution N°20

Les époux [R] font valoir, sur le fondement de l'article 14-2 I de la loi du 10 juillet 1965, que le solde des honoraires de M. [X] et le solde des honoraires de M. [Y] ne pouvaient pas être réintégrés dans le budget prévisionnel.

L'article 14-2 I de la loi du 10 juillet 1965 précise que les dépenses pour travaux dont la liste est arrêtée par l'article 44 du décret de 1967 sont exclues du budget prévisionnel.

Aux termes dudit article 44, ces dépenses hors budget sont notamment celles afférentes aux études techniques telles que les diagnostics et consultations.

Chacune de ces dépenses hors budget doivent, en vertu de ces dispositions, impérativement faire l'objet d'un examen et d'un vote séparé de l'assemblée générale distincts de l'examen et du vote du budget prévisionnel.

Au regard de ces principes, le syndicat des copropriétaires ne saurait utilement soutenir comme il le fait dans ses écritures que les règles d'exigibilité des dépenses correspondant aux études techniques ne relèvent que de la convention des parties.

Il est en revanche bien fondé à soutenir que les dispositions combinées des articles 14-2 de la loi du 10 juillet 1965 et de l'article 44 du décret du 17 mars 1967 visent les dépenses pour travaux. Les honoraires dus pour des études ayant pour objet de vérifier l'existence d'un risque, comme c'est le cas en l'espèce, n'entrent pas dans cette catégorie.

Il s'ensuit que l'irrégularité invoquée par les époux [R] n'est pas établie et qu'ils devront être déboutés de leur demande d'annulation.

Sur l'annulation de la résolution N°28

Aux termes de l'article 9 du code de procédure civile, «il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.»

Au soutien de leur demande d'annulation, les consorts [R] font valoir que le portail et le portillon édifié par les époux [N] viennent rompre l'harmonie de la résidence. Ils versent aux débats un procès-verbal de constat. Ils en déduisent qu'il est porté atteinte à la destination de l'immeuble, ces travaux ne pouvant donc être adoptés à la majorité de l'article 25 b de la loi du 10 juillet 1965.

Le syndicat des copropriétaires rétorque que le constat communiqué est en noir et blanc, que l'harmonie visuelle n'implique pas une couleur uniforme et que le règlement de copropriété prévoit le changement de peinture avec l'autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires.

En l'espèce, il ressort du constat d'huissier versé aux débats par les consorts [R] que le portail qui ferme l'entrée des consorts [N] est en fer forgé de couleur bleu pâle et que le portillon est de couleur noir, les autres portails de la résidence étant en bois de teinte bois foncé.

Le constat mentionne à ce titre une harmonie visuelle entre les lots composant la copropriété à l'exception du portillon et du portail des consorts [N].

En dépit de ces constatations, il est exact que l'absence de photographies en couleurs relativise l'appréciation de la rupture dans l'harmonie visuelle. En tout état de cause, les demandeurs ne rapportent pas la preuve qui leur incombe d'une atteinte à la destination de l'immeuble.

Ils seront par conséquent déboutés de leur demande d'annulation de la résolution N°28.

Sur les autres demandes

Les époux [R], qui succombent pour l'essentiel de leurs demandes, seront condamné aux dépens, avec faculté pour la SELARL FEUGAS de les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Il serait inéquitable de laisser à la charge du syndicat des copropriétaires la totalité des frais non compris dans les dépens qu'ils ont exposés. Les époux [R] seront condamnés à lui verser la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

En application de l'article 514 du code de procédure civile, le jugement est, de
droit, exécutoire à titre provisoire.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier
ressort,

Annule la résolution n° 5 de l'assemblée générale du 7 septembre 2021,

Déboute M. et Mme [R] du surplus de leurs demandes,

Condamne solidairement M. et Mme [R] à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence des [11] à [Localité 9] (78) la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne solidairement M. et Mme [R] aux dépens qui pourront être recouvrés directement par la SELARL FEUGAS conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

Rappelle que le présent jugement est exécutoire de plein droit par provision,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 AVRIL 2024 par M. JOLY, Vice-Président, assisté de Madame LOPES DOS SANTOS, Greffier, lesquels ont signé la minute du présent jugement.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT
Carla LOPES DOS SANTOS Eric JOLY


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Versailles
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 21/06336
Date de la décision : 23/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 29/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-23;21.06336 ?
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