Pôle social - N° RG 21/00987 - N° Portalis DB22-W-B7F-QHDD
Copies certifiées conformes délivrées,
le :
à :
- Mme [K] [D]
- CPAM DES YVELINES
- Me [F] [I]
- Me Claire COLLEONY
N° de minute :
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
POLE SOCIAL
CONTENTIEUX GENERAL DE SECURITE SOCIALE
JUGEMENT RENDU LE JEUDI 04 AVRIL 2024
N° RG 21/00987 - N° Portalis DB22-W-B7F-QHDD
Code NAC : 89A
DEMANDEUR :
Mme [K] [D]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Marie LEROUX, avocat au barreau de ROUEN,
DÉFENDEUR :
CPAM DES YVELINES
Département juridique
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Me Claire COLLEONY, avocat au barreau de PARIS,
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Madame Bertille BISSON, Juge Placée statuant à juge unique après avoir reçu l’accord des parties présentes dûment informées de la possibilité de renvoyer l’affaire à une audience ultérieure, en application des dispositions de l’article L. 218-1 du code de l’organisation judiciaire.
Madame Laura CARBONI, Greffière
DEBATS : A l’audience publique tenue le 05 Février 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 04 Avril 2024.
Pôle social - N° RG 21/00987 - N° Portalis DB22-W-B7F-QHDD
EXPOSE DU LITIGE :
Madame [K] [D] a exercé les fonctions d’infirmière. Le 13 avril 2021, elle a déclaré auprès de la Caisse primaire d’assurance maladie (ci-après CPAM) des YVELINES un accident en date du 12 novembre 1991 « injection du rappel à 5 ans du Vaccin GEN HEVAC 9. Diagnostic de myofacite à macrophages post vaccinale » et a sollicité sa prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels. Le certificat médical initial, en date du 15 avril 2021, établi par le Docteur [B] a mentionné une « myofacite à macrophages post vaccinal ».
Par décision du 05 mai 2021, la CPAM a refusé de prendre en charge cet accident, pour cause de prescription.
Le 25 mai 2021, Madame [D] a saisi la Commission de recours amiable (ci-après CRA).
En l’absence de rejet explicite de la CRA, Madame [D] a saisi le Pôle social du Tribunal judiciaire de Versailles, par requête reçue le 27 septembre 2021, afin de contester ces décisions de refus de prise en charge de l’accident déclaré.
Ce recours a été enregistré sous le N° RG 21/00987.
Le 20 mars 2023, la CRA a explicitement rejeté le recours de Madame [D], qui a ainsi de nouveau saisi le Pôle social du Tribunal judiciaire de Versailles, par requête reçue le 28 avril 2022.
Ce recours a été enregistré sous le N° RG 22/00566.
A défaut de conciliation possible entre les parties, l'affaire a été retenue à l'audience du 05 février 2024, le tribunal statuant à juge unique conformément à l'article L.218-1 du code de l'organisation judiciaire, après avoir reçu l'accord des parties présentes dûment informées de la possibilité de renvoyer cette affaire à une audience ultérieure, la liste des assesseurs du pôle social étant en cours de renouvellement et les anciens mandats expirés.
A l’audience, Madame [D], représentée par son conseil, demande au tribunal, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, de déclarer sa demande recevable et d’ordonner la prise en charge de l’accident déclaré le 13 avril 2021 au titre de la législation sur les risques professionnels. En tout état de cause, elle sollicite la condamnation de la CPAM à la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.
Au soutien de ses demandes, elle argue que la prescription biennale n’est pas acquise, puisqu’il est constant que son point de départ débute à compter du jour où l’assurée a eu une pleine connaissance d’un rapport possible entre la vaccination et la maladie et qu’en l’espèce, cette pleine connaissance a débuté en octobre 2020. Elle explique, en outre, que la prescription doit être interprétée au sens des règles du droit commun et que le fait que la victime n’a, faute de connaissance, pas été en mesure de faire valoir ces droits constitue une cause d’interruption.
En défense, la CPAM des YVELINES, représentée par son conseil, demande au tribunal de déclarer irrecevable la demande de Madame [D] pour cause de prescription et de confirmer la décision de refus de prise en charge. En tout état de cause, elle sollicite la jonction entre les deux dossiers, N° RG 21/00987 et RG 22/00566 et le débouté de Madame [D] de l’ensemble de ses demandes.
Au soutien de ses demandes, elle rappelle que l’accident allégué a eu lieu le 12 novembre 1991, que le certificat médical initial a été établi 30 ans après les faits, et que l’assurée a eu connaissance d’un lien entre la maladie et la vaccination lors d’un compte rendu de biopsie en date du 08 octobre 2018.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se rapporter à leurs écritures et observations orales conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
A l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré au 04 avril 2024 par mise à disposition au greffe.
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur la demande de jonction :
Aux termes des articles 367 et 368 du code de procédure civile, le juge peut, à la demande des parties ou d'office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s'il existe entre les litiges un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble. Les décisions de jonction d'instances sont des mesures d'administration judiciaire.
Il existe entre les recours un lien tel qu’il est de l’intérêt d’une bonne justice de les juger ensemble. Dès lors, il convient de prononcer la jonction des recours inscrits au RG N°: 21/00987 et RG N° : 22/00566, l’affaire se poursuivant sous le seul numéro unique RG N°21/00987.
Sur la recevabilité :
Aux termes de l’article L 431-2 du Code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, les droits de la victime ou de ses ayants droit aux prestations et indemnités prévues par le présent livre se prescrivent par deux ans à dater :
1°) du jour de l'accident ou de la cessation du paiement de l'indemnité journalière ;
2°) dans les cas prévus respectivement au premier alinéa de l'article L. 443-1 et à l'article L. 443-2, de la date de la première constatation par le médecin traitant de la modification survenue dans l'état de la victime, sous réserve, en cas de contestation, de l'avis émis par l'expert ou de la date de cessation du paiement de l'indemnité journalière allouée en raison de la rechute ;
3°) du jour du décès de la victime en ce qui concerne la demande en révision prévue au troisième alinéa de l'article L. 443-1 ;
4°) de la date de la guérison ou de la consolidation de la blessure pour un détenu exécutant un travail pénal ou un pupille de l'éducation surveillée dans le cas où la victime n'a pas droit aux indemnités journalières.
La Cour de cassation juge que les droits de la victime d’un accident de travail ou d’une maladie professionnelle se prescrivent pas deux ans à compter soit de l’accident de travail ou de la première constatation médicale de la maladie, soit de la cessation de paiement de l’indemnité journalière, soit de la cessation de travail, lorsqu’il a été procédé à la clôture de l’enquête.
Elle juge également qu’en cas d’affection résultant d’une vaccination obligatoire, la prescription ne court qu’à compter du jour où le salarié a connaissance du rapport possible entre la maladie et la vaccination.
En l’espèce, il résulte des éléments versés aux débats que Madame [D], après une vaccination obligatoire en date du 12 novembre 1991, a par la suite souffert d’une myofacite à macrophages post vaccinale. L’assurée a déclaré cet accident le 13 avril 2021, accompagné d’un certificat médical initial en date du 15 avril 2021 établi par le Docteur [B] mentionnant une « myofacite à macrophages post vaccinal ».
Madame [D] soutient que le Docteur [B] acte en 2020 le diagnostic établi de myofacite à macrophages post vaccinal, en lien avec la vaccination.
Cependant, d’une part, cet élément ne ressort pas de la pièce citée, et, d’autre part, les conclusions du compte-rendu de la biopsie réalisée par Madame [D], en date du 08 octobre 2018, mentionnent expressément « myofacite à macrophages post vaccinal » et font état de « réaction lymphocytaire intense au niveau de l’un des deux foyers d’infiltration ». Il résulte de ces mentions que ce compte-rendu fait explicitement un lien entre la myofacite à macrophages et la vaccination intervenue précédemment. Dès lors, c’est à compter de cette date que Madame [D] a eu connaissance d’un lien possible entre les lésions constatées et la vaccination. La prescription biennale courait donc à compter du 08 octobre 2018, jusqu’au 08 octobre 2020. Or, en l’espèce, la déclaration d’accident du travail a eu lieu le 13 avril 2021. Son action était ainsi prescrite.
Dès lors, il convient de déclarer irrecevable le recours formé par Madame [D] contre la décision de refus de prise en charge de la CPAM des YVELINES, confirmée par la Commission de recours amiable.
Sur les demandes accessoires :
Compte-tenu de la solution apportée au litige, Madame [D] sera déboutée de sa demande formulée au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et, succombant à l’instance, sera condamnée aux entiers dépens.
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal, statuant après débats en audience publique, en premier ressort et par jugement contradictoire mis à disposition au greffe le 04 avril 2024 :
ORDONNE la jonction des recours inscrits au RG N° : 21/00987 et 22/00566, l’affaire se poursuivant sous le seul numéro unique RG N°21/00987 ;
DECLARE IRRECEVABLE le recours formé par Madame [K] [D] contre la décision de la Caisse primaire d’assurance maladie des YVELINES en date du 05 mai 2021 et la décision de la Commission de recours amiable afférente ;
DEBOUTE Madame [K] [D] de sa demande formulée au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples et contraires ;
CONDAMNE Madame [K] [D] aux dépens.
DIT que tout appel de la présente décision doit, à peine de forclusion, être interjeté dans le mois de la réception de la notification de la présente décision.
La GreffièreLa Présidente
Madame Laura CARBONIMadame Bertille BISSON