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02/04/2024 | FRANCE | N°23/01552

France | France, Tribunal judiciaire de Versailles, Chambre des référés, 02 avril 2024, 23/01552


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DU
02 AVRIL 2024


N° RG 23/01552 - N° Portalis DB22-W-B7H-RVHS
Code NAC : 35G
AFFAIRE : [Y] [M] C/ [J] [C], S.C.I. UBAYE


DEMANDERESSE

Madame [Y] [M]
née le [Date naissance 4] 1978 à [Localité 7] (MAROC), demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Céline BORREL, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 122, Me Alexis ZEKRI-POSTACCHINI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E 740


DEFENDEURS

Monsieur [J] [C]
né le [Date naissance 5] 1955 à [Localité 8],

demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Dan ZERHAT, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 731, Me Pierre Edouard GOND...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DU
02 AVRIL 2024

N° RG 23/01552 - N° Portalis DB22-W-B7H-RVHS
Code NAC : 35G
AFFAIRE : [Y] [M] C/ [J] [C], S.C.I. UBAYE

DEMANDERESSE

Madame [Y] [M]
née le [Date naissance 4] 1978 à [Localité 7] (MAROC), demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Céline BORREL, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 122, Me Alexis ZEKRI-POSTACCHINI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E 740

DEFENDEURS

Monsieur [J] [C]
né le [Date naissance 5] 1955 à [Localité 8], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Dan ZERHAT, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 731, Me Pierre Edouard GONDRAN DE ROBERT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G210

La S.C.I. UBAYE
SCI inscrite au RCS de VERSAILLES sous le numéro 841 129 745, dont le siège social est sis [Adresse 6] prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.
représentée par Me Dan ZERHAT, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 731, Me Pierre Edouard GONDRAN DE ROBERT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G210

Débats tenus à l'audience du : 27 Février 2024

Nous, Gaële FRANÇOIS-HARY, Première Vice-Présidente au Tribunal Judiciaire de Versailles, assistée de Virginie DUMINY, Greffier,

Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil, à l’audience du 27 Février 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 02 Avril 2024, date à laquelle l’ordonnance suivante a été rendue :

EXPOSE DU LITIGE

Suivant statuts en date du 1er juin 2018, enregistrés le 17 juillet 2018, Monsieur [J] [C] et la SPFPL de chirurgiens-dentistes Queyras, dont il est gérant, ont constitué une société civile immobilière, dénommée SCI UBAYE, Monsieur [J] [C] étant désigné en qualité de gérant statutaire.

Son capital social de 1000 euros est divisé en 1000 parts sociales d'une valeur nominale de 1 euro. Monsieur [J] [C] détenait 999 parts et la SPFPL de chirurgiens-dentistes Queyras 1 part.

La SCI UBAYE a acquis le 21 décembre 2018, à l'aide de deux prêts immobiliers, des locaux à usage professionnel situés, [Adresse 6].

Monsieur [J] [C] est également gérant et associé unique de la SELARL de chirurgiens-dentistes des Ecrins, et était également gérant et associé de la SELARL de chirurgiens-dentistes DE LAUDET avec notamment la SPFPL de Chirurgiens-Dentistes QUEYRAS et Madame [Y] [M].

Monsieur [J] [C] a cédé le fonds libéral de la SELARL des Ecrins à la SELARL de chirurgiens-dentistes DE LAUDET, le 31 décembre 2021.

Aux termes d’une assemblée générale en date du 22 octobre 2022, Monsieur [J] [C] a été révoqué de son mandat de gérant, en raisons des profondes dissensions entre les associés et co-gérants à propos de la gestion de la SELARL DE LAUDET.

Aux termes d’une ordonnance de référé en date du 14 février 2023 et par jugement en date du 6 avril 2023, le juge des référés et le Tribunal judiciaire de Versailles ont confirmé la régularité de la révocation du mandat de gérant de Monsieur [J] [C].

Suivant acte notarié en date du 27 mai 2021, Monsieur [J] [C] a cédé 300 parts sociales de la SCI UBAYE à Madame [Y] [M], moyennant la somme de 314.877 euros, de sorte que le capital social est réparti de la manière suivante :
- Monsieur [J] [C] : 699 parts,
- La SPFPL de Chirurgiens-Dentistes Queyras (représentée par Mr [J] [C]) : 1 part,
- Madame [Y] [M] : 300 parts.

Par acte de Commissaire de Justice en date du 10 novembre 2023, Mme [Y] [M] a assigné M. [J] [C] et la SCI UBAYE en référé devant le Tribunal judiciaire de Versailles.

Aux termes de ses conclusions, la demanderesse sollicite de voir :
- débouter Monsieur [J] [C] de l’ensemble de ses demandes,
- révoquer Monsieur [J] [C] de ses fonctions de gérant de la SCI UBAYE,

- désigner un administrateur provisoire avec les pouvoirs les plus étendus pour gérer et administrer la SCI UBAYE dans l’intérêt social, avec notamment pour mission de:
* convoquer une assemblée générale ordinaire pour l'approbation annuelle des comptes pour les exercices 2021 et 2022,
* pour ce faire, de se faire remettre par Monsieur [J] [C] les bilans et comptes de résultat de chacun de ces exercices, ainsi que les pièces comptables y afférentes (notamment factures et relevés bancaires),
* à défaut de bilans et comptes de résultat existant, de les faire établir à partir des pièces comptables (notamment factures et relevés bancaires) remises par Monsieur [J] [C],
* régulariser la situation locative avec la SELARL DE LAUDET et notamment faire estimer la valeur locative des locaux occupés par la SELARL DE LAUDET,
* s'entourer de tous les conseils de sachants qui lui apparaitront nécessaires,
* régulariser la situation financière avec la banque,
* rapprocher les associés en conflit,
* convoquer une assemblée générale ordinaire pour la désignation d’un gérant à l’issue du règlement de la crise sociale,
- dire que les frais d'intervention l’administrateur provisoire seront à la charge de Monsieur [J] [C],
- condamner Monsieur [J] [C] à payer à Madame [Y] [M] la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.

Elle rappelle qu'après révocation de Monsieur [J] [C] et la reprise de la gestion ayant permis d’accéder aux comptes de la société et de découvrir de multiples fraudes et irrégularités, Monsieur [J] [C] et la SPFL QUEYRAS qu’il dirige, ont par la suite été exclus de la société, par décision des associés le 20 mai 2023 (procès-verbal de l’AGE du 20/05/2023) ; qu'elle a également découvert que Monsieur [J] [C], gérant et associé majoritaire à 70%, était totalement défaillant dans la gestion de la SCI UBAYE.

Elle soutient que compte tenu de la situation urgente et de danger imminent, elle se voit contrainte de solliciter la révocation du mandat de gérant de Monsieur [J] [C] ainsi que la désignation d’un administrateur provisoire.

Elle relève que dans le cadre de sa gestion, Monsieur [J] [C] a commis de nombreux manquements contraires aux intérêts la SCI UBAYE qui justifient la révocation en urgence de son mandat de gérant, à savoir :
- l’absence de convocation d’assemblée annuelle d'approbation des comptes : Monsieur [J] [C], gérant, a refusé de rendre compte annuellement de sa gestion par un rapport écrit sur l'activité de la société et de soumettre les comptes, 2021 et 2022, à l'approbation des associés, en violation des dispositions de l'article 1856 du Code civil, et des stipulations statutaires ; qu'il sait pertinemment que les comptes doivent être remis chaque année et qu’une assemblée générale doit être réunie pour les approuver une fois par an, et ne peut donc se prévaloir de la communication le 6 décembre 2023, soit un mois après la saisine de la présente juridiction, des bilans des exercices 2021 et 2022 ; qu'il a agi de la même manière lorsqu’il était gérant de la SELARL DE LAUDET et qu’il a dû être révoqué par les autres associés afin de leur permettre de régulariser notamment l’approbation des comptes annuels 2021 ;
- les faux documents d’assemblée générale : Monsieur [J] [C], gérant, a transféré le siège social de la SCI UBAYE en établissant un procès-verbal mentionnant faussement une réunion des associés et une décision prise à l’unanimité alors même que Madame [Y] [M] n’a jamais été convoquée ;
- les fautes de gestion de nature à compromettre l'intérêt social ou le fonctionnement de la société, à savoir :
* les comptes 2021 et 2022 présentent de nombreuses anomalies (impôt sur les sociétés, chiffre d’affaires, dettes ...) ;
* mise à disposition des locaux de la SCI UBAYE au profit de la SELARL de chirurgiens-dentistes des Ecrins puis à la SELARL DE LAUDET sans établir de bail ni loyer et sans l’autorisation de l’assemblée générale des associés ;
* litige opposant désormais la SCI UBAYE à la SELARL de chirurgiens-dentistes DE LAUDET, cessionnaire du fonds libéral de la SELARL des Ecrins, concernant le montant du loyer ;
- la mauvaise gestion financière de la SCI UBAYE : Monsieur [J] [C], gérant, met gravement en danger financièrement la SCI UBAYE, par son inaction, ses fraudes et sa désinvolture, en n’assurant plus le paiement des dépenses de la SCI (échéances de crédits, taxe foncière, impôt sur les sociétés, charges de copropriété) ; c’est ainsi que la banque de la SCI UBAYE a, par courrier du 16 mars 2023, annoncé la clôture du compte en raison d’impayés.

Elle rappelle que deux conditions sont nécessaires pour justifier la désignation d’un administrateur provisoire : l’atteinte au fonctionnement normal des organes sociaux, et le fait que l'intérêt social soit exposé à un péril imminent ; que la nomination d'un administrateur provisoire se justifie également en présence d’anomalies graves de fonctionnement imputable au gérant.

Elle sollicite donc la désignation d’un administrateur provisoire compte tenu de la demande de révocation du mandat de gérant de Monsieur [J] [C], et de l'importance des dysfonctionnements constatés, contraires à l’intérêt social, et en raison de l'urgence qu'il y a à intervenir immédiatement du fait d'un risque de préjudice social irrémédiable, constitué par la menace de dépôt de bilan.

Aux termes de leurs conclusions, les défendeurs sollicitent de voir :
- dire n’y avoir lieu à référé et débouter Madame [Y] [M] de l’ensemble de ses demandes,
- à titre subsidiaire, désigner un expert afin d’estimer la valeur locative du bien loué par la SCI UBAYE à la SELARL DE LAUDET, les frais de l’expert seront à la charge de Mme [M],
- condamner Madame [Y] [M] au paiement de la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Il fait valoir que l’urgence n’est pas démontrée, ni l’existence d’un différend qui justifierait la prise de mesures provisoires aussi graves que la révocation du gérant; qu'aucun blocage de la société n’existe, et qu'en tout état de cause, les éléments ci-après décrits démontrent l’existence d’une contestation sérieuse quant aux prétendus motifs légitimes retenus.

Il explique :
- avoir adressé les comptes 2021 et 2022, rappelant que la loi n’impose aucun délai pour préparer ces comptes et rendre compte de la gestion de l’année, et que s’agissant des rapports annuels, en application de l’article L.232-1 IV du Code de Commerce, toutes les sociétés commerciales quelle qu’en soit la forme, sont dispensées de l’obligation d’établir un rapport de gestion si elles répondent à la définition des petites entreprises, comme en l'espèce la SCI UBAYE ;
- que la prétendue mise à disposition à titre gratuit des locaux de la SCI n’est prouvée par aucun élément ;
- le procès-verbal de transfert du siège social du 1er juillet 2021 n’a jamais été remis en cause jusqu’à ce jour, y compris par Madame [M] ;
- les comptes de la SCI ont été clôturée face à l’impossibilité d’honorer les prêts en raison uniquement du défaut de paiement de loyer de la SELARL de LAUDET dont Madame [M] est le gérant ; c’est la raison pour laquelle la SCI UBAYE a assigné la SELARL de LAUDET en paiement des loyers devant le Tribunal judiciaire de Versailles saisi au fond.

Il rappelle que l'administration provisoire se justifie essentiellement en cas d'absence de direction générale, et peut être déclenchée si une crise survient dans la direction lorsque deux conditions sont réunies : une mésentente grave entre les associés qui fasse obstacle au fonctionnement normal de la société ou la mette en péril ; il faut donc une paralysie des organes de gestion de la société ou un grave conflit entre les associés et une situation d'urgence, c'est-à-dire l'existence d'un péril imminent pour la société ; qu'en l'espèce, les organes sociaux ne sont pas paralysés par ce conflit d’associés, Madame [M] ne détenant qu’une fraction minoritaire (30%) du capital social, qui ne bloque pas l’adoption de résolutions en assemblée, et aucun organisme social n’a été lésé, la SCI UBAYE étant à jour de ses obligations.

La décision a été mise en délibéré au 2 avril 2024.

MOTIFS

Sur la demande de révocation

Aux termes de l’article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence de différents.

Aux termes de l’article 835 alinéa 1er du code de procédure civile, le Président du Tribunal judiciaire peut, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le dommage imminent est le le dommage qui n'est pas encore réalisé mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer.

L’article 1851 du Code civil dispose que "Sauf disposition contraire des statuts le gérant est révocable par une décision des associés représentant plus de la moitié des parts sociales. Si la révocation est décidée sans juste motif, elle peut donner lieu à dommages-intérêts.
Le gérant est également révocable par les tribunaux pour cause légitime, à la demande de tout associé.
Sauf clause contraire, la révocation d'un gérant, qu'il soit associé ou non, n'entraîne pas la dissolution de la société. Si le gérant révoqué est un associé, il peut, à moins qu'il n'en soit autrement convenu dans les statuts, ou que les autres associés ne décident la dissolution anticipée de la société, se retirer de celle-ci dans les conditions prévues à l'article 1869 (2ème alinéa)."

L’article 1855 du même code prévoit que "Les associés ont le droit d'obtenir, au moins une fois par an, communication des livres et des documents sociaux, et de poser par écrit des questions sur la gestion sociale auxquelles il devra être répondu par écrit dans le délai d'un mois."

L'article 1856 ajoute que "Les gérants doivent, au moins une fois dans l'année, rendre compte de leur gestion aux associés. Cette reddition de compte doit comporter un rapport écrit d'ensemble sur l'activité de la société au cours de l'année ou de l'exercice écoulé comportant l'indication des bénéfices réalisés ou prévisibles et des pertes encourues ou prévues."

Par ailleurs, en l'espèce, aux termes de l’article 21 des statuts de la SCI UBAYE, "1 -L’assemblée générale ordinaire est réunie au moins une fois par an à l’effet de prendre connaissance du compte-rendu de gestion de la gérance et du rapport écrit sur l’activité de la société au cours de l’exercice écoulé. Elle statue sur cette reddition de compte, approuve ou redresse les comptes et décide l’affectation et la répartition des bénéfices."

L’article 25 prévoit également que "La gérance doit tenir une comptabilité conforme aux usages en vigueur. (...) Ces documents accompagnés d’un rapport de la gérance sur l’activité de la société doivent être soumis aux associés dans les six mois de la clôture de l’exercice."

Il est établi que le comportement du gérant qui compromet l'intérêt social ou entrave le fonctionnement de la société caractérise un motif légitime de révocation dudit gérant. Autrement dit, constitue une cause légitime de révocation judiciaire la violation des règles légales ou statutaires, le manquement aux obligations du mandat social ou la mauvaise gestion de nature à compromettre l'intérêt social, notamment l'absence de tenue d'une comptabilité, des défauts de communication de documents et des manquements aux obligations légales relatives à la tenue des assemblées générales, l’absence de compte-rendu de la gestion annuelle, l'absence de convocation de l'assemblée annuelle d'approbation des comptes, la mauvaise gestion financière du gérant caractérisée par un découvert bancaire ...

La désignation d'un administrateur provisoire est ainsi justifiée en cas d'atteinte au fonctionnement normal des organes sociaux, et par le fait que l'intérêt social soit exposé à un péril imminent, dès lors notamment que les dispositions légales et statutaires relatives à la tenue des assemblées générales, à la convocation et à l'information des associés ne sont pas respectés, lorsque le gérant est dans l'incapacité de rendre compte de sa gestion, de justifier de l'encaissement des loyers et de présenter tant des comptes approuvés que les procès-verbaux de l'assemblée générale, ou dès lors que la société connaît d'incontestables difficultés financières et que l'associé minoritaire peut nourrir de légitimes inquiétudes quant à sa survie, résultant d'anomalies graves de fonctionnement imputable au gérant.

Une mésentente grave entre associés ne permet la désignation d'un administrateur provisoire que si elle fait obstacle au fonctionnement normal de la société, soit parce qu'elle entraîne la paralysie des organes de direction, soit parce qu'elle met en péril la société elle-même. La désignation judiciaire d'un administrateur provisoire est une mesure exceptionnelle qui suppose rapportée la preuve de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et menaçant celle-ci d'un péril imminent ; si, en dépit des mésententes, le bon fonctionnement de la société est assuré, cette nomination ne peut être envisagée.

En l'espèce, il apparaît que M. [C], en sa qualité de gérant de la SCI UBAYE, ne respecte pas les dispositions légales et statutaires susvisées, et notamment son obligation de communication annuelle aux associés des livres et des documents sociaux ainsi que son obligation de reddition de compte aux termes d'un rapport écrit d'activité annuelle de la société, dont il ne justifie aucunement.

De même, l'assemblée générale annuelle aux fins de reddition, d'approbation des comptes et d'affectation et de répartition des bénéfices n'est pas réunie.

Enfin, le gérant ne justifie nullement de la tenue d'une comptabilité, accompagnée d’un rapport de gérance.

De surcroît, par courrier en date du 16 mars 2023, la Banque Société Générale a notifié à la SCI UBAYE, conformément à la lettre de préavis du 29 décembre 2022, la clôture du compte n°[XXXXXXXXXX01], et par courriers du 27 avril 2023, a mis en demeure la SCI UBAYE d'avoir à lui régler la somme de 36 792,92 euros au titre des échéances impayées du crédit n°219002100611 d'un montant de 750 000 euros, et la somme de 21 161,14 euros au titre des échéances impayées du crédit n°220276101455 d'un montant de 440 000 euros.

De même, par mise en demeure du 15 novembre 2022, la Direction Générale des Finances Publiques des Mureaux a notifié à la SCI UBAYE un commandement de payer d'un montant total de 11 435 euros.

Il apparaît également que les conditions de mise à disposition des locaux de la SCI UBAYE au profit de la SELARL de chirurgiens-dentistes des Ecrins puis à la SELARL DE LAUDET restent opaques et entraînent un litige opposant la SCI UBAYE à la SELARL de chirurgiens-dentistes DE LAUDET, cessionnaire du fonds libéral de la SELARL des Ecrins, concernant le montant d'un prétendu loyer.

L'ensemble de ces éléments constitue autant de carences et de négligences imputables à M. [C] en sa qualité de gérant, caractérisant des signaux d'alerte sur la gestion financière de la SCI UBAYE, caractérisant ainsi un motif légitime de révocation judiciaire de M. [C], et justifiant en conséquence la désignation d'un administrateur provisoire.

Au stade des référés, il n'apparaît pas nécessaire de mettre à la charge de M. [C] les frais d'intervention de l'administrateur provisoire.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il y a lieu de condamner in solidum les défendeurs, parties succombantes, à payer à la demanderesse la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les défendeurs seront condamnés in solidum aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Nous, Gaële FRANCOIS-HARY, Première Vice-Présidente au Tribunal judiciaire de Versailles, statuant par ordonnance mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort :

Ordonnons la révocation de Monsieur [J] [C] de ses fonctions de gérant de la SCI UBAYE,

Désignons Maître [P] [G], en qualité d'administrateur provisoire de la SCI UBAYE avec pour mission de :
- convoquer une assemblée générale ordinaire pour l'approbation annuelle des comptes pour les exercices 2021 et 2022,
- pour ce faire, se faire remettre par M. [J] [C] l'ensemble des documents comptables de chacun de ces exercices,
- à défaut de bilans et comptes de résultat existant, de les faire établir à partir des pièces comptables remises,
- procéder à toutes vérifications et investigations nécessaires pour déterminer la situation locative avec la SELARL DE LAUDET,
- procéder à toutes vérifications et investigations nécessaires pour déterminer la situation financière avec la ou les banque(s) de la SCI UBAYE,
- convoquer une assemblée générale ordinaire pour la désignation d’un gérant à l'issue des opérations d'administration provisoire,

Disons n'y avoir lieu de mettre à la charge de M. [J] [C] les frais d'intervention de l’administrateur provisoire,

Condamnons in solidum M. [J] [C] et la SCI UBAYE à payer à Mme [Y] [M] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamnons in solidum M. [J] [C] et la SCI UBAYE aux dépens.

Prononcé par mise à disposition au greffe le DEUX AVRIL DEUX MIL VINGT QUATRE par Gaële FRANÇOIS-HARY, Première Vice-Présidente, assistée de Virginie DUMINY, Greffier, lesquelles ont signé la minute de la présente décision.

Le GreffierLa Première Vice-Présidente

Virginie DUMINYGaële FRANÇOIS-HARY


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Versailles
Formation : Chambre des référés
Numéro d'arrêt : 23/01552
Date de la décision : 02/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-02;23.01552 ?
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