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28/03/2024 | FRANCE | N°21/04569

France | France, Tribunal judiciaire de Versailles, Quatrième chambre, 28 mars 2024, 21/04569


Minute n°




TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Quatrième Chambre
JUGEMENT
28 MARS 2024



N° RG 21/04569 - N° Portalis DB22-W-B7F-QFXG
Code NAC : 60A


DEMANDEUR :

Monsieur [R] [T]
né le [Date naissance 5] 1953 à [Localité 17]
[Adresse 4]
[Localité 12]

représenté par Me Virginie DESPORT-AUVRAY, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postulant, Me Frédéric SOIRAT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant


DEFENDERESSES :

S.A. AVANSSUR
assureur du véhicule de Monsieur [F], immatricul

ée au RCS de NANTERRE sous le n° 378 393 946, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit sièg...

Minute n°

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Quatrième Chambre
JUGEMENT
28 MARS 2024

N° RG 21/04569 - N° Portalis DB22-W-B7F-QFXG
Code NAC : 60A

DEMANDEUR :

Monsieur [R] [T]
né le [Date naissance 5] 1953 à [Localité 17]
[Adresse 4]
[Localité 12]

représenté par Me Virginie DESPORT-AUVRAY, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postulant, Me Frédéric SOIRAT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

DEFENDERESSES :

S.A. AVANSSUR
assureur du véhicule de Monsieur [F], immatriculée au RCS de NANTERRE sous le n° 378 393 946, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 6]
[Localité 11]

représentée par Maître Stéphanie GAUTIER de la SELARL DES DEUX PALAIS, avocats au barreau de VERSAILLES, avocats postulant, Maître Samia DIDI MOULAI de la SELAS CHETIVAUX SIMON, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant

Copie exécutoire à Me Christophe DEBRAY, Me Virginie DESPORT-AUVRAY
Copie certifiée conforme à Maître Stéphanie GAUTIER,
délivrée le

S.A. PACIFICA
immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 352 358 865, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité
[Adresse 9]
[Localité 8]

représentée par Me Jérôme CHARPENTIER, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, Me Christophe DEBRAY, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postulant

La CPAM DES HAUTS DE SEINE,
[Adresse 2]
[Localité 10]

défaillante

Le CNBF,
[Adresse 1]
[Localité 7]

défaillant

ACTE INITIAL du 06 Juillet 2021 reçu au greffe le 25 Août 2021.

DÉBATS : A l'audience publique tenue le 25 Janvier 2024, après le rapport de Madame , Juge désigné par le Président de la Chambre, l’affaire a été mise en délibéré au 28 Mars 2024.

COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Mme DUMENY, Vice Présidente
Monsieur BRIDIER, Vice-Président
Madame BARONNET, Juge

GREFFIER :
Madame GAVACHE

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 12 juin 2009, Monsieur [R] [T], avocat de profession et alors âgé de 55 ans, a glissé sur une large flaque d’huile de moteur de voiture en traversant la place de parking n°160 située au premier sous-sol de l’immeuble sis [Adresse 3] à [Localité 12].
Il a été conduit aux urgences de l’hôpital de [Localité 16]. Selon le certificat établi le 16 juin 2009 par le Docteur [B], chirurgien, « il présentait des poly-contusions avec érosions du membre supérieur gauche, un traumatisme crânien sans perte de connaissance, mais surtout une fracture fermée cervicale vraie du fémur gauche déplacée qui a justifié un transfert pour intervention le jour même à la clinique [15] ». [R] [T] y a été hospitalisé du 12 au 18 juin 2009 et a été opéré aux fins de réalisation d’une pose de prothèse totale de la hanche gauche.
Il est apparu que la place de parking, lieu du dommage, appartenait aux époux [X] lesquels avaient donné à bail à Monsieur [C] [F] un studio et ladite place de parking.

La Caisse Nationale des Barreaux Français (« CNBF ») qui avait servi des indemnités journalières à Monsieur [R] [T] s’est rapprochée dans un premier temps de la Compagnie PACIFICA, assureur multirisques habitation de Monsieur [F], laquelle a mis en cause la compagnie AVANSSUR, assureur du véhicule de Monsieur [F] selon police n° 290 642 16612.

La société AVANSSUR mandatait le docteur [Y] aux fins d'expertise de Monsieur [R] [T] qui était examiné le 26 septembre 2011. Le docteur [Y] établissait ensuite son rapport d’expertise médicale.

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception en date du 25 octobre 2011, la société AVANSSUR soumettait à Monsieur [T] une « offre définitive » de 16 704 €. Elle relançait celui-ci et son conseil en mars 2014. Au cours de l'année 2019, le conseil de Monsieur [T] s'adressait à la société AVANSSUR en estimant que la somme minimale pour l'indemnisation du préjudice de ce dernier s'élevait à 505.331,19€.

En l'absence d'accord, par exploits d'huissier des 21 et 22 janvier 2020, Monsieur [T] assignait la société AVANSSUR, la société PACIFICA, la CNBF et la CPAM des Hauts de Seine à comparaître devant le tribunal judiciaire de Nanterre. Suite aux conclusions d'incident de la société AVANSSUR, l'affaire était renvoyée devant le tribunal judiciaire de Versailles par ordonnance du 6 juillet 2021, Monsieur [T] étant inscrit au barreau de Paris.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 16 septembre 2022, Monsieur [R] [T] demande au tribunal au visa des articles 1 à 5 de la loi du 5 juillet 1985, ensemble les articles 1231-7, alinéa 1er et 1343-2 du code civil et les articles L. 211-13 et L. 211-14 du code des assurances, de :

À titre principal,
-Condamner la société AVANSSUR à lui payer la somme de 570.580,04 €, avec intérêts au double du taux légal à compter du 12 février 2010 et jusqu’au jour où le jugement à intervenir deviendra définitif et capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du Code civil,

Subsidiairement,
-Condamner la société AVANSSUR à lui verser la somme de 570.580,04 €, avec intérêts au taux légal à compter du jour de l’accident, soit le 12 juin 2009, et capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du Code civil,

En tout état de cause,
-Condamner la société AVANSSUR à lui payer 7 500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
-Condamner la société AVANSSUR aux entiers dépens,
-Ordonner l’exécution provisoire,

À titre infiniment subsidiaire, Vu l’article 1384, alinéa 1er du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause,
-Condamner la société PACIFICA à lui payer la somme de 570.580,04 €, avec intérêts au taux légal à compter du jour de l’accident, soit le 12 juin 2009, et capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil,
-Condamner la société PACIFICA à lui payer 5 000 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,
-Condamner la société PACIFICA aux entiers dépens,
-Ordonner l’exécution provisoire.

La société AVANSSUR demande au tribunal, dans ses dernières écritures communiquées par voie électronique le 6 avril 2022, de se fonder sur les articles 1353 du Code civil et 9 du Code de procédure civile, afin de :

Juger que sont mal fondées, dans leur principe, les demandes de Monsieur [T] formées au titre :
du préjudice matériel (vêtements),
des pertes de gains professionnels,
du préjudice d’agrément,
L'en débouter ;

-Juger que sont mal fondées, dans leur quantum, les demandes de Monsieur [T] formées au titre :
des dépenses de santé actuelles,
de l'assistance par tierce personne,
du déficit fonctionnel temporaire,
des souffrances endurées,
du déficit fonctionnel permanent,
du préjudice esthétique permanent.
-Le débouter de ses demandes ;
-Juger que l’indemnisation à allouer au titre de l'assistance par tierce personne s’élève à la somme de 1.736 euros avec un taux horaire de 14 euros,
-Juger que l’indemnisation à allouer au titre du déficit fonctionnel temporaire s’élève à la somme de 2.569,20 euros,
-Juger que l’indemnisation à allouer au titre du déficit fonctionnel permanent s’élève à la somme de 8.800 euros,
-Juger que l’indemnisation à allouer au titre du préjudice esthétique permanent s’élève à la somme de 800 euros,
-Juger que l’indemnisation à allouer au titre des souffrances endurées s’élève à la somme de 5.000 euros.
-Prononcer toute éventuelle condamnation en derniers et quittances,
-Juger qu’en cas de condamnation de la compagnie AVANSSUR, l’intérêt au taux légal devra courir à compter de la décision à intervenir conformément à l’article 1231-7 du Code de procédure civile,
-Débouter Monsieur [T] ou tout autre partie de leur demande formée au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
-Condamner Monsieur [T] à lui verser la somme de 1.000 € en remboursement de ses frais irrépétibles et aux autres dépens dont le montant pourra être recouvré par Maître Stéphanie GAUTIER Membre de la SELARL DES DEUX PALAIS,
-Débouter Monsieur [T] de sa demande d’exécution provisoire,
-A titre subsidiaire si celle-ci était ordonnée, juger que ladite exécution provisoire sera subordonnée à la constitution par Monsieur [T] d'une garantie (réelle ou personnelle) suffisante pour répondre de toutes restitutions.

Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées par RPVA le 9 novembre 2022, la société PACIFICA vise les dispositions de l’article 1 de la Loi du 5 juillet 1985, au soutien de ses prétentions :

-Juger que l’indemnisation du préjudice de Monsieur [R] [T] doit être prise en charge par la société AVANSSUR ès qualité d’assureur du véhicule de Monsieur [F] d’où provenait la fuite d’huile ayant entraîné sa chute après avoir constaté l’implication dudit véhicule,
La déclarer hors de cause.
-Condamner la partie succombante aux entiers dépens ainsi qu’au versement d’une somme de 3.000,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

A titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire, le tribunal devait entrer en voie de condamnation à son encontre en qualité d’assureur multirisques habitation de Monsieur [F] :
-Dire que la liquidation des préjudices de Monsieur [T] se fera sur la base des conclusions du Docteur [Y],
-Fixer, en deniers ou quittance, le préjudice de Monsieur [T] de la façon suivante, après imputation de la créance des tiers payeurs mais avant imputation des provisions versées :
Dépenses de santé actuelles : débouté
Perte de gains professionnels : débouté
Préjudice matériel : débouté
DFT : 2 051,25 €
Souffrances endurées : 8 000,00€
Tierce personne : 1 736,00 €
DFP : 10 000,00 €
Préjudice esthétique permanent : 800,00 €
Préjudice d’agrément : Débouté
-Rejeter le surplus des demandes, notamment celle relative aux intérêts majorés, ainsi qu'au titre de l'exécution provisoire.

La CPAM des Hauts de Seine et la CNBF n'ont pas constitué avocat de sorte que la présente décision sera réputée contradictoire.

Ainsi que le permet l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières conclusions des parties pour l’exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.
La clôture a été prononcée le 21 mars 2023. L’affaire a été examinée à l’audience tenue le 25 janvier 2024 par la formation collégiale qui a mis sa décision en délibéré à ce jour.

MOTIFS

Sur le principe de l'obligation d'indemnisation

Dans ses dernières conclusions, la société AVANSSUR ne conteste pas le principe de son obligation d'indemnisation de Monsieur [R] [T], sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accident de la circulation, et ne sollicite pas le partage de cette indemnisation avec la société PACIFICA.

Monsieur [R] [T] quant à lui sollicite à titre principal la condamnation de la société AVANSSUR à réparer son préjudice et ne sollicite la condamnation de la société PACIFICA qu'à titre subsidiaire. La société PACIFICA sollicite sa mise hors de cause à titre principal.

Il sera rappelé qu'aux termes de la loi du 5 juillet 1985, un véhicule terrestre à moteur est impliqué dans un accident de la circulation dès lors qu'il est intervenu d'une manière ou d'une autre dans l'accident, ce qui est le cas en l'espèce, l’huile déposée sur le sol du parking et ayant provoqué la chute de Monsieur [T] provenant du véhicule assuré par la compagnie AVANSSUR.

Dès lors, la société AVANSSUR sera condamnée à réparer le préjudice de
M. [T] et la société PACIFICA sera mise hors de cause.

Sur la liquidation des préjudices de Monsieur [T]

L’expert missionné par la société AVANSSUR a fixé la date de consolidation au
30 juin 2010.

I - Préjudices patrimoniaux

Les dépenses de santé actuelles

Monsieur [T] sollicite le remboursement de la somme de 1.799,51 €, correspondant au cumul de 64,92€ payés au centre hospitalier de [Localité 13], 1.245,17€ payés à la clinique [15] et des dépenses de soins pour 489,42 €. Il affirme ne pas avoir souscrit de mutuelle.

Selon la société AVANSSUR, rien ne permet de démontrer que ces dépenses de santé ont été acquittées par Monsieur [T] et qu’elles sont in fine restées à sa charge, ayant pu être prises en charge par une mutuelle. Or l’intéressé ne produit aucun élément sur ce point.

LA CPAM du Puy de Dôme a adressé au tribunal un courrier indiquant qu'elle n'entendait pas intervenir dans l'instance et que le montant des prestations versées au titre du risque maladie s'élevait à 7.794,96€ entre le 12 juin 2009 et le 30 juin 2010, soit 522,59€ pour des frais médicaux et pharmaceutiques et 7.272,37€ pour des frais d'hospitalisation.

****

Monsieur [T] justifie avoir payé au centre hospitalier de [Localité 13] une somme de 64,92 €, le 8 juillet 2019, correspondant au reliquat d'une somme de 186,18€ correspondant à des actes effectués le 12 juin 2009, soit le jour de l'accident à la suite duquel il a été conduit dans cet établissement.
Il prouve avoir réglé à la clinique [15] une somme de 1.245,17 € lors de son séjour du 12 au 18 juin 2009. Il ressort enfin du décompte de prestations payées par le Régime social des indépendants (RSI), qu'une somme de 489,42 € est restée à sa charge.

Dès lors la société AVANSSUR sera condamnée à payer à Monsieur [T] la somme totale de 1.799,51 € à ce titre.

La perte de gains professionnels actuels

Monsieur [T] sollicite à ce titre la somme de 513.936,45€. Il rappelle qu'il a été hospitalisé du 12 juin au 18 juin 2009 puis en arrêt de travail comme suit :
-arrêt total d’activité, du 18 juin 2009 au 14 septembre 2009,
-à sa demande et afin de préserver l’activité du cabinet, arrêt partiel d’activité, du 15 septembre 2009 au 26 octobre 2009 et du 3 novembre 2009 au 30 juin 2010,
-arrêt total d’activité du 26 octobre 2009 au 2 novembre 2009.

Pour l’ensemble de la période d’ITT et d’ITP, le CNBF lui a versé un total de 732,00 €.

Il explique que lors des années 2004 à 2007, son BNC moyen était de 172 923,50 € alors qu'au cours des années 2009 à 2013 son salaire moyen n'était plus que de 58.552,60 €. Il ne prend pas en compte l'année 2008 au motif que celle-ci était atypique puisque a alors été opéré l’apport de son fonds libéral à la SELARL CABINET [T] et qu'il a été nécessaire, afin de modérer l’impact de la plus-value réalisée à cette occasion sur son impôt sur le revenu, de réduire au maximum sa rémunération.

Il détermine ainsi une perte de revenus causée par l'accident au minimum de 57.185,45 € pour l'année 2009 et de 114.371 € pour les 4 années suivantes, 2010, 2011, 2012 et 2013, soit un total de 514.668,45 € dont il convient de déduire la somme de 732 € versée par le CNBF.
En réponse aux arguments de l’assureur, il rappelle que le docteur [Y] a relevé que ses capacités de déplacement étaient altérées et que sa clientèle est disséminée dans toute la France. Il souligne que la chute de ses revenus est établie au regard des chiffres qu'il détaille.

La société AVANSSUR réplique que le médecin expert retient une période d’arrêt des activités professionnelles d’un an (comprenant huit mois de mi-temps thérapeutique) alors que Monsieur [T] sollicite une perte de gains professionnels sur quatre ans et que par ailleurs, il n’a retenu aucune impossibilité pour celui-ci de poursuivre ses activités professionnelles. La défenderesse ajoute que Monsieur [T] ne produit pas les relevés des indemnités journalières qui ont dû être perçues au titre des régimes de prévoyance collective du barreau de Paris ou individuelle.
Elle note enfin que ses revenus professionnels non commerciaux étaient déjà très variables au cours des années 2004 à 2007 et qu'il a changé de régime fiscal à compter de l'année 2008, pour déclarer des traitements et salaires. Pour autant, Monsieur [T] est le gérant et associé majoritaire de la SELARL CABINET [T] depuis le 26 février 2008 et il se verse donc le salaire qu'il souhaite.
La société considère en conséquence que Monsieur [T] échoue dans l'administration de la preuve de son préjudice et conclut au débouté.

****

La perte de gains professionnels correspond en principe au coût économique du dommage pour la victime. Il convient de distinguer la perte de gains professionnels actuels et la perte de gains professionnels futurs, c'est à dire après consolidation.

L'expert a fixé la date de consolidation au 30 juin 2010.

L'accident ayant eu lieu le 12 juin 2009, il convient de calculer la perte de gains professionnels entre ces deux dates, par référence aux revenus perçus précédemment.

Monsieur [T] explique ne pas retenir les revenus déclarés pour l'année 2008 au motif que ceux-ci auraient été minorés volontairement pour limiter l'impact, sur son impôt sur le revenu, de l'apport de son fonds libéral à la SELARL CABINET [T].

Cet argument ne sera pas retenu par le tribunal. D'une part, Monsieur [T] choisit de ne pas préciser le montant de cet apport et n'explique pas sur quelle déclaration de revenus il a déclaré les revenus non déclarés en 2008. Il n'explique pas pourquoi il a choisi de modifier la structure juridique d'exercice de sa profession et le tribunal ne peut pas exclure qu'il ait délibérément choisi de limiter ses revenus par rapport à ceux qu'il percevait jusque-là, pour un motif qui lui est personnel.

Au demeurant, cette hypothèse est cohérente avec le fait que le demandeur déclare au cours des années suivantes des revenus de 50.469€ en 2010, de 60.000€ en 2011 et 2012.

Ainsi Monsieur [T] a déclaré pour l'année 2009 des revenus d'un montant de 60.234€, pour l'année 2008 un montant de 36.000€ et en 2007 de 131.559 €.
Il apparaît ainsi que ses revenus déclarés ont été supérieurs en 2009, année de l'accident, à ceux déclarés en 2008 et qu'ils ont été équivalents en 2009 à ceux déclarés en 2010, année de sa consolidation, en 2011 et 2012 alors qu'il était consolidé.

L'expert note que Monsieur [T] a été arrêté du 18 juin au 14 septembre 2009 puis du 26 octobre au 2 novembre 2009, soit un total d'environ 15 semaines en 2009 et qu'il a par ailleurs été placé en mi-temps thérapeutique du 15 septembre au 26 octobre 2009 et du 3 novembre 2009 au 30 juin 2010, date de sa consolidation, soit pendant
3 mois en 2009 et 6 mois en 2010.

Pour autant il convient de constater que ces arrêts de travail n'ont pas eu d'incidence sur ses revenus supérieurs en 2009 à ceux déclarés en 2008 et équivalents à ceux perçus les années suivantes.

Dès lors la demande au titre de la perte de gains professionnels actuels sera rejetée.

La perte de gains professionnels futurs

Comme il vient d’être expliqué, il apparaît que les revenus de Monsieur [T] n'ont pas diminué à la suite de sa consolidation.

Par ailleurs l'expert médical constate en séquelles une simple gêne à la déambulation prolongée mais il n'indique aucunement que Monsieur [T] ne peut plus exercer sa profession ni que l'AIPP a entraîné une incidence professionnelle.

Dès lors il sera débouté de cette demande.

Frais divers

Monsieur [T] explique qu'après avoir glissé sur une flaque d'huile, il y est demeuré gisant pendant plus d'une heure et que ses vêtements ont été entièrement souillés, imbibés d'huile de vidange, irrécupérables. Pour les remplacer il présente les indemnisations suivantes pour un total de 1299,95 € :
Imperméable : ....240,00 €,
Costume : ...........636,95 €
Écharpe : ..............60,00 €
Polo : .......... 137,00 €
Chemise : .............89,00 €
Pyjama : .............137,00 €

Il répond aux arguments de l’assureur que plusieurs de ses vêtements ont été achetés non par lui mais par son épouse, notamment le costume acheté le lendemain de l'accident et ceux achetés à [Localité 14] ou à [Localité 18].

La société AVANSUR relève que les factures versées aux débats sont soit postérieures à l’accident soit non datées.
Elle estime que ces factures sont absolument dispendieuses : 60 euros pour une écharpe (soldée), 196 euros pour un « polo », s'étonne que Monsieur [T] aurait a priori besoin de deux écharpes en remplacement de celle qui aurait pu éventuellement être endommagée pendant l’accident. Elle observe également que la facture de 414 euros correspondant à l’achat de vêtements est datée du 13 juin 2009 soit le lendemain de l’accident alors que Monsieur [T] est hospitalisé et qu'il n’a manifestement pas pu s’acquitter de cette somme. Pareillement plusieurs achats ont été effectués à [Localité 14] et [Localité 18] au début du mois de juillet 2009, soit trois semaines après l’accident, alors qu'il est mentionné dans le rapport du docteur [Y] que « le patient regagnera son domicile le 18 juin 2009. Il bénéficiera d’un repos strict au lit […] ».

****

Le tribunal observe que la tenue vestimentaire de Monsieur [T] le jour de l’accident n’est pas connue et que l’accident a eu lieu en juin 2009 de sorte qu’il est tout à fait improbable qu’il ait porté un imperméable et une écharpe. Il n'explique pas non plus en quoi son pyjama aurait été « entièrement souillé, imbibé d'huile de vidange, irrécupérable, bons à jeter ».

Dès lors il sera partiellement fait droit à la demande en considérant qu'en effet la chute dans une flaque d'huile a pu engendrer une importante détérioration des vêtements extérieurs.

Il lui sera donc alloué 636,95 € au titre du remplacement de son costume et 89€ pour la chemise soit un total de 725,95€.

Sur l’assistance par tierce personne

Selon le demandeur, il ressort du rapport d’expertise médicale qu'il a fait « appel à une employée de maison au rythme de 40 heures par mois de juin 2009 à janvier 2010, puis de façon dégressive jusqu’en mai 2010 (20 heures en février, 14 heures en mars, 5 heures en avril et 13 heures en mai 2010) ». Il chiffre le coût total de cette assistance à 4 976,13 €. Il explique qu'il convient d’ajouter l’assistance de son épouse, Madame [L] [T], laquelle a sacrifié un mois de congé pour cela.
En réplique aux arguments de son adversaire, Monsieur [T] répond que si effectivement, Madame [S] avait été embauchée avant l’accident, il a modifié totalement la nature et la durée de ses tâches, puisqu’elle a alors été totalement accaparée par l’assistance dont il avait besoin.
Il ajoute que la preuve en est suffisamment établie par le fait que la durée de travail a épousé étroitement l’évolution de son état de santé et qu'elle a pris fin le 31 mai 2010.
Il note enfin que le docteur [Y] a reconnu la nécessité de cette assistance, au cours de la période s’étendant du 12 juin 2009 au 30 juin 2010.

La société AVANSSUR relève quant à elle que l’employée de maison avait d’ores et déjà été engagée par Monsieur [T] avant l’accident puisque l’avis de prélèvement automatique des cotisations sociales en date du 27 juillet 2009 fait état d’une période de travail entre le 1er juin et le 30 juin 2009 et que Monsieur [T] ne verse pas aux débats le contrat de travail. Par ailleurs il n’est pas démontré que son épouse ait été dans l’obligation de prendre un mois de congés pour s’occuper de lui, notamment au moyen des bulletins de salaire pour les mois de juin à août 2019.
Enfin, le médecin expert ne fait aucune mention de la nécessité d’une assistance médicalisée et spécialisée et n’a fait que retranscrire dans son rapport les dires de Monsieur [T] quant à l’assistance dont il aurait bénéficié sans détailler le nombre d’heures journalières nécessaires.
La société demande de limiter l’indemnisation à la somme totale de 1736 € avec un taux horaire de 14 euros (14 euros x 31 jours x 4h/jour).

****

Il ressort du rapport d'expertise qu'une assistance par tierce personne a été nécessaire avant consolidation sans en préciser la raison ni le nombre d'heures hebdomadaires ; il se contente de noter les doléances de la victime.

Il ressort par ailleurs des pièces versées aux débats que Madame [K] [S] était déjà employée par Monsieur [T] avant l'accident puisque celle-ci a effectué 40 heures de travail à son domicile entre le 1er et le 30 juin 2009. Il n’est donc nullement démontré que les heures effectuées par cette employée à compter du 12 juin 2009, date de l’accident, étaient dédiées à l’assistance de Monsieur [T].

Compte tenu de ces éléments, la proposition de réparer le préjudice à hauteur de
4 heures par jour durant 31 jours sera retenue ; en revanche le taux retenu sera fixé à 16€ par heure soit une indemnité de 4x31x16 = 1.984€

II Préjudices à caractère extra-patrimonial

Les préjudices extra-patrimoniaux temporaires

Le déficit fonctionnel temporaire

Selon Monsieur [T], la valeur journalière de la gêne temporaire totale est en moyenne de 27€ et les périodes d’incapacité temporaire totale sont synonymes de gêne temporaire totale.
Il souligne qu'il a été en arrêt total d’activité du 18 juin 2009 au 14 septembre 2009 et du 26 octobre 2009 au 2 novembre 2009, soit 101 jours, puis en arrêt partiel du
15 septembre 2009 au 26 octobre 2009 et du 3 novembre 2009 au 30 juin 2010, soit 280 jours.
Les périodes d’incapacité temporaire partielle subies se sont traduites par une gêne partielle de classe 2.
Il en conclut que ce chef de préjudice doit s’établir au total de 4 617 € ainsi calculé :
-Gêne temporaire totale = 101 jours x 27 € = 2 727 €
-Gêne temporaire partielle = 280 jours x 6,75 € = 1 890 €.

La société AVANSSUR considère que Monsieur [T] ne se base pas sur les conclusions du rapport du docteur [Y] lequel n’a à aucun moment retenu un déficit fonctionnel temporaire total de 101 jours.
Elle propose de retenir une valeur journalière de 24 € et de limiter l’indemnisation à la somme de 2.569,20 € qui se décompose comme suit :
DFT total du 12 au 18 juin 2009, soit 7 jours : 24 € x 7 = 168 €
DFT partiel :
Classe 3 (50%) du 19 juin au 14 septembre 2009, soit 88 jours : 12 € x 88 = 1.056 €
Classe 2 (25%) du 15 septembre 2009 au 14 mars 2010 soit 181 jours : 6 € x 181 = 1.086 €
Classe 1 (10%) du 15 mars au 30 juin 2010 soit 108 jours : 2,4 € x 108 = 259,20 €.

****

Ce chef de préjudice est destiné à compenser la gêne que rencontre la victime dans les actes de la vie courante pendant la maladie traumatique. Il correspond à l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle que va subir la victime jusqu'à sa consolidation.

Au regard de l'opération subie par Monsieur [T], des conséquences sur sa vie quotidienne, son déficit temporaire total sera suffisamment réparé par l’octroi de la somme de 25 € par jour. Il est constant que cette indemnisation est proportionnellement diminuée lorsque l’incapacité temporaire est partielle.
Les experts distinguent 4 niveaux d’incapacité partielle : le niveau I correspond à 10%, le niveau II correspond à 25%, le niveau III correspond à 50% et le niveau IV à 75%.

L’indemnisation sera donc accordée comme suit :
DFT total du 12 au 18 juin 2009, soit 7 jours : 25 € x 7 = 175 €
DFT partiel :
Classe 3 (50%) du 19 juin au 14 septembre 2009, soit 88 jours : 25 € x 50%x 88 = 1.100 €
Classe 2 (25%) du 15 septembre 2009 au 14 mars 2010 soit 181 jours : 25€ x 25% x 181 = 1.131,25€
Classe 1 (10%) du 15 mars au 30 juin 2010 soit 108 jours : 25 € x 10%x108 = 270 €.

Ce poste de préjudice sera donc indemnisé par l'allocation d'une somme de : 175 + 1100 + 1131,25 + 270 = 2.676,25€

Les souffrances endurées

Monsieur [T] rappelle qu'après avoir glissé sur une flaque d'huile, il y est demeuré, gisant et souffrant terriblement, pendant plus d'une heure, qu’il n'a reçu d’antalgique qu’après avoir été pris en charge à l’hôpital de [Localité 16]-[Localité 13]. Il estime que ses souffrances endurées ne sauraient être inférieures à 4/7 et sollicite 18.000€ de dommages-intérêts.

L’assureur AVANSSUR relève que le docteur [Y] a évalué les souffrances à 3,5/7 et se référant à deux décisions de cour d'appel il offre 5.000€.

****

Avec le poste de préjudice des souffrances endurées, il s'agit d'indemniser toutes les souffrances tant physiques que morales subies par la victime pendant la maladie traumatique et jusqu'à la consolidation.

Les souffrances endurées par Monsieur [T] sont évaluées à 3,5/7 par l’expert qui ne précise cependant pas les éléments sur lesquels il fonde sa cotation.

Néanmoins il convient de prendre en compte l'attente des secours pendant une heure, les poly-contusions, le traumatisme crânien et surtout la fracture fermée qui a justifié un transfert pour une intervention le jour-même.

Compte tenu de ces éléments, ce poste de préjudice justifie l'octroi, en réparation, de la somme de 6.000€.

Les préjudices extra-patrimoniaux permanents

Le déficit fonctionnel permanent

Selon le demandeur, le taux d’incapacité ayant été fixé à 8% par le Docteur [Y], ce chef de préjudice peut être liquidé à la somme de 12 480 € quand son adversaire lui propose le versement de la somme de 8.800 €.

Le déficit fonctionnel permanent correspond à un préjudice non économique lié à la réduction du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel après consolidation c'est à dire alors que l'état de la victime n'est plus susceptible d'amélioration par un traitement médical adapté.

Le déficit fonctionnel permanent de [R] [T] est évalué à 8% par l'expert qui relève que la mobilité de la hanche est complète en flexion et en extension mais que l'abduction est réduite de 20° par rapport au côté opposé alors que l'adduction est complète. Il ajoute que la rotation externe de la hanche gauche est réduite de 10° et la rotation interne majorée quant à elle de 10° également.

Au regard des référentiels habituellement utilisés, et s'agissant d'un homme âgé de 56 ans à la date de la consolidation, le déficit fonctionnel permanent justifie l'octroi de la somme de 12.000€ en réparation.

Le préjudice d’agrément

Monsieur [T] expose qu'il a été initié au ski dès son plus jeune âge, qu'il a ainsi pu faire son service militaire dans les chasseurs alpins et a acquis par l'intermédiaire d'une SCI l'appartement dont ses parents étaient propriétaires à Morzine.
Il explique que depuis l'accident il est totalement privé de la possibilité de pratiquer le ski et réclame 10.000€ en compensation.

La société AVANSSUR répond que s’il verse aux débats ses carnets d’école de ski alpin datant des années 1970 et argue de son service militaire dans les chasseurs alpins en 1973, ces éléments sont insuffisants pour pouvoir démontrer la pratique régulière et antérieure des activités sus énoncées et partant pour prétendre à l'indemnisation de ce poste de préjudice.

Le préjudice d'agrément vise exclusivement à réparer le préjudice spécifique lié à l'impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique, sportive ou de loisirs.

En l'espèce, aucune attestation et justificatif ne sont versés aux débats afin de confirmer la pratique régulière de l'activité de ski alpin par Monsieur [T] dans les années qui ont précédé l'accident litigieux, de sorte qu’il n'y a pas lieu à indemnisation de ce chef de préjudice.

Le préjudice esthétique permanent

Monsieur [T] avance qu’au vu de l’évaluation médicale à 1/7 il peut prétendre à une indemnité de 2 000 €. Son adversaire rappelle avoir proposé le versement de 800 € pour la présence d’une cicatrice sur la cuisse gauche et soutient que dans des cas d’espèce similaires, la jurisprudence a alloué la somme de 1.000€.

Ce poste de préjudice vise à réparer l'altération de l'apparence physique de la victime.

L'expert a évalué le préjudice esthétique permanent à 1/7 pour une cicatrice de 8 cm sur la face antéro-externe de la cuisse gauche.

Compte tenu des dimensions et de la localisation de cette cicatrice, ce préjudice sera justement indemnisé par l'octroi de la somme de 1.200€ en réparation.

L’indemnisation s’élève ainsi à un total de 26.385,71 €.

Sur les intérêts

-Monsieur [T] rappelle que par lettre recommandée avec demande d’avis de réception en date du 25 octobre 2011, la société AVANSSUR lui a soumis une offre définitive de 16.704 €.

Il affirme que cette offre est intervenue plus de 8 mois après l’accident et était manifestement insuffisante. Elle doit donc être assimilée à une offre inexistante. Il sollicite en conséquence la condamnation de la société AVANSSUR à assortir la condamnation indemnitaire des intérêts au double du taux légal à compter du
12 février 2010 et jusqu’au jour où le jugement à intervenir deviendra définitif et à ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil.

A titre subsidiaire, si le tribunal ne devait pas retenir le caractère manifestement insuffisant de l’offre définitive, Monsieur [T] sollicite que les intérêts au taux légal courent à compter du jour de l’accident, le 12 juin 2009, et qu’ils soient capitalisés.

-La société AVANSSUR confirme lui avoir adressé le 25 octobre 2011 une offre d’indemnisation définitive à hauteur de 16.704 € à la lumière du rapport du Docteur [Y], cette offre comportant plusieurs postes laissés « en mémoire » dans l’attente de la réception d’un certain nombre de justificatifs. Monsieur [T] n’y ayant pas donné suite, elle l’a relancé ainsi que son conseil les 3 et 11 mars 2014. Or ce n’est que le 13 mai 2019 que le conseil de la victime s’est manifesté sollicitant la somme minimale de 505.331,19 €.
La société AVANSSUR considère que rien ne justifie que l’intérêt au taux légal intervienne à compter du jour de l’accident. Elle ne réplique pas sur la demande du doublement des intérêts.

****

Aux termes de l'article L.211-9 du code des assurances, « Quelle que soit la nature du dommage, dans le cas où la responsabilité n'est pas contestée et où le dommage a été entièrement quantifié, l'assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d'un véhicule terrestre à moteur est tenu de présenter à la victime une offre d'indemnité motivée dans le délai de trois mois à compter de la demande d'indemnisation qui lui est présentée. Lorsque la responsabilité est rejetée ou n'est pas clairement établie, ou lorsque le dommage n'a pas été entièrement quantifié, l'assureur doit, dans le même délai, donner une réponse motivée aux éléments invoqués dans la demande.
Une offre d'indemnité doit être faite à la victime qui a subi une atteinte à sa personne dans le délai maximum de huit mois à compter de l'accident. En cas de décès de la victime, l'offre est faite à ses héritiers et, s'il y a lieu, à son conjoint. L'offre comprend alors tous les éléments indemnisables du préjudice, y compris les éléments relatifs aux dommages aux biens lorsqu'ils n'ont pas fait l'objet d'un règlement préalable.
Cette offre peut avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime. L'offre définitive d'indemnisation doit alors être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation.
En tout état de cause, le délai le plus favorable à la victime s'applique.
En cas de pluralité de véhicules, et s'il y a plusieurs assureurs, l'offre est faite par l'assureur mandaté par les autres. »

L'article L.211-13 du même code dispose quant à lui que : « Lorsque l'offre n'a pas été faite dans les délais impartis à l'article L.211-9, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêt de plein droit au double du taux de l'intérêt légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif. Cette pénalité peut être réduite par le juge en raison de circonstances non imputables à l'assureur. »

Sur le doublement des intérêts

L'accident ayant eu lieu le 12 juin 2009, une offre d'indemnisation devait adressée à Monsieur [T] au plus tard le 12 février 2010. Or aucune pièce ne démontre qu'une telle offre lui a alors été adressée. Ce n’est que le 25 octobre 2011, soit plus de 8 mois après l'accident que la compagnie AVANSSUR a formulé son offre fondée sur le rapport du docteur [Y] remis le 26 septembre 2011 et fixant une date de consolidation. L'offre formulée par AVANSSUR et versée aux débats reprend tous les postes de préjudices retenus par l'expert dans son rapport et propose une indemnisation pour chacun d'eux sauf le poste de l'assistance par une tierce personne qu'il réserve à la production de justificatifs. Cette offre peut être ainsi considérée comme comprenant tous les éléments indemnisables et n'apparaît pas comme manifestement insuffisante.

Dès lors la société AVANSSUR sera condamnée à payer des intérêts au double du taux légal à compter du 12 février 2010 et jusqu'au 25 octobre 2011.

Sur les intérêts au taux légal

Aucun élément ne vient justifier le départ des intérêts à compter de l’accident de juin 2009. Dès lors ceux-ci courront conformément aux dispositions de l'article 1231-7 du code civil, soit à compter du prononcé du jugement.

Sur la capitalisation

Elle interviendra aux conditions légales de l’article 1343-2 du code civil.

Sur les autres prétentions

La société AVANSSUR qui succombe sera condamnée aux dépens.
Monsieur [R] [T] ayant attendu 8 années après l'offre définitive d'indemnisation reçue de la compagnie AVANSSUR pour solliciter une indemnité supérieure, cette absence manifeste de diligence conduit à laisser chacune de ces deux parties conserver la charge de ses frais irrépétibles.
Par ailleurs Monsieur [T] succombant à l'égard de la société PACIFICA, qu’il a assignée à tort, sera condamné à lui verser une indemnité de procédure de 1.500€.

Enfin l'exécution provisoire est de droit et aucun motif n’est développé pour la conditionner à la constitution d'une garantie par Monsieur [T].

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement réputé contradictoire rendu en premier ressort et mis à disposition au greffe,

Met hors de cause la société PACIFICA,

Déclare la compagnie AVANSSUR tenue de réparer les préjudices causés le 12 juin 2009 par le véhicule qu’elle assurait,

Condamne la compagnie AVANSSUR à payer à Monsieur [R] [T] au titre de la réparation de son préjudice, les sommes suivantes :
Fixe les préjudices de Monsieur [R] [T] comme suit :
• Dépenses de santé actuelles1.799,51 €
• Frais divers725,95 €
• Assistance tierce personne temporaire :1.984 €
• Déficit fonctionnel temporaire :2.676,25 €
• Souffrances endurées :6.000 €
• Déficit fonctionnel permanent :12.000 €
• Préjudice esthétique permanent : 1.200 €

Dit qu’elles sont dues en quittances ou deniers ;

Déboute Monsieur [R] [T] de ses demandes au titre de la perte de gains professionnels et du préjudice d’agrément ;

Condamne la compagnie AVANSSUR au paiement des intérêts au double du taux légal sur ces sommes, à compter du 12 février 2010 et jusqu'au 25 octobre 2011 ;

Dit que les intérêts légaux courront à compter du prononcé du présent jugement ;

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;

Dit qu’il n’y a pas lieu d’écarter l'exécution provisoire de droit,

Rejette la demande de constitution d'une garantie par [R] [T],

Déboute Monsieur [R] [T] et la société AVANSSUR de leurs demandes au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Monsieur [R] [T] à payer à la société PACIFICA la somme de 1.500,00 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société AVANSSUR aux entiers dépens de l'instance.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 MARS 2024 par Mme DUMENY, Vice Présidente, assistée de Madame GAVACHE, greffier, lesquelles ont signé la minute du présent jugement.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Versailles
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 21/04569
Date de la décision : 28/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 03/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-28;21.04569 ?
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