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14/03/2024 | FRANCE | N°22/01540

France | France, Tribunal judiciaire de Versailles, Quatrième chambre, 14 mars 2024, 22/01540


Minute n°




TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Quatrième Chambre
JUGEMENT
14 MARS 2024



N° RG 22/01540 - N° Portalis DB22-W-B7G-QPY5
Code NAC : 63A


DEMANDERESSE :

Madame [E] [H]
née le [Date naissance 3] 1970 à [Localité 9]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 7]

représentée par Me Carole-Anne GREFF, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat plaidant/postulant


DEFENDEURS :

Monsieur [Y] [U]
Médecin spécialisé en chirurgie orthopédique, exerçant au CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE

[11] situé [Adresse 1] à [Localité 10]
[Adresse 2]
[Localité 6]

représenté par Me Magali DURANT-GIZZI, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postula...

Minute n°

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Quatrième Chambre
JUGEMENT
14 MARS 2024

N° RG 22/01540 - N° Portalis DB22-W-B7G-QPY5
Code NAC : 63A

DEMANDERESSE :

Madame [E] [H]
née le [Date naissance 3] 1970 à [Localité 9]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 7]

représentée par Me Carole-Anne GREFF, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat plaidant/postulant

DEFENDEURS :

Monsieur [Y] [U]
Médecin spécialisé en chirurgie orthopédique, exerçant au CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE [11] situé [Adresse 1] à [Localité 10]
[Adresse 2]
[Localité 6]

représenté par Me Magali DURANT-GIZZI, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postulant, Me Chrystelle BOILEAU, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

Copie exécutoire à Me Magali DURANT-GIZZI, Me Samia KASMI
Copie certifiée conforme à l’origninal à Me Carole-anne GREFF
délivrée le

CAISSE PRIMAIRE D’ ASSURANCE MALADIE DES YVELINES (CPAM 78),
prise en son représentant legal, domieilié en eette qualite audit siege
[Adresse 8] - Direction des affaires juridiques - dép
artement recours contre tiers
[Localité 5]

représentée par Me Samia KASMI, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postulant, Me Maher NEMER, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

ACTE INITIAL du 08 Mars 2022 reçu au greffe le 14 Mars 2022.

DÉBATS : A l'audience publique tenue le 11 Janvier 2024, après le rapport de Monsieur BRIFIER, Juge désigné par le Président de la Chambre, l’affaire a été mise en délibéré au 14 Mars 2024.

COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Mme DUMENY, Vice Présidente
Monsieur BRIDIER, Vice-Président
Madame BARONNET, Juge

GREFFIER :
Madame GAVACHE

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [E] [H] avait été victime d’une fracture du fémur droit à l’âge de
4 ans qui a été opérée en 1975 puis en 1997 avec mise en place d’une butée de hanche antéro-externe. En 2001, elle bénéficiait de l’ablation de la vis d’ostéosynthèse de butée associée à une plastie cutanée.

A compter de 2015, Madame [H] consultait le docteur [Y] [U] qui, au vu de la coxarthrose douloureuse de la hanche droite, lui préconisait la mise en place d’une prothèse totale de la hanche droite par voie antérieure et en chirurgie ambulatoire.

L’opération avait lieu le 6 août 2015 par le docteur [U]. Lors du testing peropératoire, il était noté une stabilité de la prothèse, avec un piston de 1 centimètre, jugée normale par l’opérateur. Par la suite, il a constaté une luxation sur la table opératoire, alors que selon son compte-rendu, la prothèse était parfaitement stable. Face à cette hanche instable, une ré-intervention était réalisée avec ablation de l'ancienne prothèse de hanche et mise en place d'une tige fémorale plus grande et latéralisée. Madame [H] est restée hospitalisée jusqu'au 11 août 2015.

De retour à domicile elle a présenté des troubles à type d’hyperesthésie et de paresthésie violentes. Elle a alors fait l’objet de soins infirmiers à domicile, mais aussi de séances de kinésithérapie.

Madame [H] a alors saisi la Commission régionale de conciliation et d'indemnisation (CRCI) en raison de ses préjudices et de la souffrance endurée.

La société SHAM, assureur du centre hospitalier de [11] adressait à Madame [H] une proposition indemnitaire le 28 mars 2018 puis, suite au prononcé de la consolidation de son état de santé, lui faisait une seconde proposition indemnitaire le 12 novembre 2018.

Estimant cette offre insuffisante, Madame [E] [H] a formulé une demande de revalorisation des différents préjudices auprès de la société SHAM et de l’établissement hospitalier par courrier recommandé avec avis de réception en date du 28 janvier 2019.

En l'absence de réponse, Madame [E] [H] a assigné le docteur [Y] [U] et la CPAM des Yvelines devant le présent tribunal, par exploit d’huissier en date du 8 mars 2022.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 28 février 2023, Madame [E] [H] demande au tribunal, au visa de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique, de :
-Juger ses demandes recevables et bien fondées à l’encontre du Docteur [U]
-Juger le Docteur [U] responsable des conséquences dommageables qu'elle a subies,
-Juger que le montant de la créance de la CPAM des Yvelines restant due par le Docteur [U] après recours de la Caisse auprès du Centre Hospitalier de Meulan–Les Mureaux s'élève à la somme de 102.162,79 euros ;
-Condamner le Docteur [U] in solidum avec la compagnie d’assurance de responsabilité civile à lui verser les sommes suivantes :
50.000 euros au titre du manquement au devoir d’information éclairée de la patiente;
40.000 euros au titre de l’absence de soins attentifs et diligents ;
50.000 euros au titre du défaut de consentement de la patiente ;
2.507,06 euros au titre des frais divers d’assistance tierce personne avant consolidation ;
36.954,02 euros au titre de la perte de gains professionnels avant consolidation ;
102.162,79 euros au titre des dépenses de santé futures ;
80.000 euros au titre de l’assistance tierce personne ;
240.624,95 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels ;
80.000 euros au titre de l’incidence professionnelle ;
500.000 euros au titre de la perte des droits à la retraite ;
1.133,75 euros au titre des périodes de déficits fonctionnels temporaire et total avant consolidation ;
35.000 euros au titre des souffrances endurées avant consolidation ;
2.500 euros au titre du préjudice esthétique temporaire ;
15.000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent après consolidation ;
2.500 euros au titre du préjudice esthétique permanent ;
30.000 euros au titre du préjudice d’agrément et des troubles dans les conditions de l’existence ;
60.000 euros au titre de la perte de chance de survie à une prochaine intervention ;
60.000 euros au titre du préjudice d’impréparation,

-Juger que la condamnation à intervenir portera intérêts moratoires à compter de la présentation de la présente assignation, outre capitalisation des intérêts échus à la date du jugement à intervenir ;
-Juger que l’indemnisation du préjudice se fera sous forme de capital ;
-Condamner le docteur [U] in solidum la compagnie d’assurance de responsabilité civile à lui verser la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens, outre intérêts moratoires et capitalisation des sommes à intervenir à compter du dépôt de la présente assignation jusqu’à la date de la décision à intervenir,
-Prononcer l’exécution provisoire de la présente décision.

Monsieur [Y] [U] demande quant à lui au tribunal, au visa des articles 1355 du code civil et L.1142-1 et suivants du code de la santé publique, dans ses dernières conclusions notifiées le 4 avril 2023, de :

in limine litis
-constater l’incompétence de la présente juridiction,
-constater l’autorité de la chose jugée,
-dire irrecevable et mal fondée l’action introduite par Madame [H],
-rejeter toutes les demandes formulées à l’encontre du Docteur [U],

A titre principal
-Débouter Madame [E] [H] de l’ensemble de ses demandes ;
-Débouter la CPAM des Yvelines de l’ensemble de ses demandes ;
-Mettre hors de cause le docteur [U] ;

En tout etat de cause
-Condamner Madame [E] [H] ou tout succombant à verser au docteur [U] la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile dont distraction au profit de Maître Chrystelle BOILEAU ;
-Condamner Madame [E] [H] à verser au Docteur [U] la somme de 3.000 euros au titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
-Condamner Madame [E] [H] ou tout succombant aux entiers dépens.

La CPAM des Yvelines enfin, dans ses conclusions notifiées le 8 juin 2022 se fonde sur l’article L.376-1 du code de la sécurité sociale, pour voir

- La recevoir en ses demandes et l’y déclarer bien fondée,
- Condamner le Dr [U] à lui verser la somme de 59.215,87 €, au titre des prestations déjà versées dans l’intérêt de la victime toutes réserves étant faites pour les prestations non connues à ce jour et pour celles qui pourraient être versées ultérieurement,
- Dire que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la demande,
- Condamner le Dr [U] à lui verser les arrérages à échoir, au fur et à mesure de leur engagement, pour un capital représentatif s’élevant à la somme de 61.317,19 €,
avec intérêt de droit à compter de leur engagement ou du jugement à intervenir si le tiers opte pour un versement en capital,
- Condamner le Dr [U] à lui verser la somme de 3.000,00 €, par application de l’article 700 du code de procédure civile,
- Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant appel et sans constitution de garantie,
- Condamner également les mêmes en tous les dépens dont distraction au profit de la SELARL BOSSU & ASSOCIES.

Ainsi que le permet l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières conclusions des parties pour l’exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

La clôture a été prononcée le 9 mai 2023. L’affaire a été examinée à l’audience collégiale du 11 janvier 2024 et mise en délibéré à ce jour.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'incompétence du tribunal judiciaire de Versailles

-Le docteur [U] soutient qu'en application du principe de la séparation des pouvoirs, la juridiction administrative est seule compétente pour connaître de la responsabilité d’une administration publique et de la réparation des dommages qui en résulterait et qu'il est de jurisprudence constante que la question de la réparation des dommages qui seraient causés par l’activité des médecins hospitaliers relève de la compétence de la juridiction administrative.

Il argue qu'il est mis en cause par Madame [H] pour des soins dispensés dans le cadre de l’exercice relevant exclusivement de son activité en secteur public hospitalier et qu'il bénéficie, par son statut d’exercice, à l’occasion de ses fonctions, d’une protection organisée par la collectivité publique dont il dépend conformément aux règles fixées par les textes applicables, et notamment la loi n°83-643 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

Il soutient que Madame [H] ne soulève que des griefs exclusivement liés à la prise en charge médicale hospitalière dans le cadre de son exercice médical en secteur public hospitalier et qu'aucune de ces observations ne serait susceptible de concerner sa responsabilité personnelle dans la mesure où, s’il exerce parfois dans un cadre libéral, il a pris en charge Madame [H] exclusivement et uniquement dans le cadre de son activité en secteur public.

-Madame [H] ne se prononce pas.

****

Il est constant que les articles 75 et suivants relatifs à l'exception d'incompétence sont inscrits dans le chapitre II du titre cinquième du livre 1er du code de procédure civile intitulé « Les exceptions de procédure. »

Aux termes de l'article 789 du même code, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les exceptions de procédure (…). »
Selon l'article 791, « Le juge de la mise en état est saisi par des conclusions qui lui sont spécialement adressées distinctes des conclusions au sens de l'article 768, sous réserve des dispositions de l'article 1117. »

En l'espèce, il ne ressort pas de la procédure que le juge de la mise en état ait été saisi par des conclusions qui lui ont été spécialement adressées et distinctes des conclusions au fond. En tout état de cause, étant une compétence exclusive du juge de la mise en état, le juge du fond n'est donc pas compétent pour se prononcer sur la compétence du tribunal judiciaire de Versailles.

La demande sera déclarée irrecevable.

Sur l'autorité de la chose jugée

-Le docteur [U] rappelle que Madame [H] a, par voie de requête et mémoires déposés les 24 mai 2019 et 13 mars 2020, demandé au Tribunal administratif de Versailles de condamner le CHI de [11], son assureur SHAM et le Docteur [U], solidairement, à lui verser la somme de 1.388.382,57 euros au titre de l’indemnisation de ses préjudices en réparation de ses préjudices suite à sa prise en charge par le Docteur [U] en 2015.

Il soutient que Madame [H] assigne devant la juridiction judiciaire :
-les mêmes parties pour les actes de prévention de diagnostic ou de soins dispensés lors de sa prise en charge en 2015,
-Pour la même cause, soit la responsabilité du Docteur [U], chirurgien, l’ayant pris en charge en 2015 et l’indemnisation de ses préjudices au regard des conclusions du rapport d’expertise du Docteur [B] [X], chirurgien orthopédique, et du Docteur [L] [T], neurologue,
-Pour le même objet, soit la condamnation solidaire du Docteur [U] et de la SHAM à lui verser la somme de 1.388.382,57 euros en indemnisation de ses préjudices.

Et que le juge du tribunal administratif de Versailles a déjà statué sur l’ensemble des arguments, objet et cause, de la demanderesse.

-Madame [U] répond que le présent contentieux n’a pas pour objet de revoir juger ce qui a déjà été tranché devant le Tribunal administratif, mais bien d’évaluer la responsabilité personnelle du Docteur [U] dans sa prise en charge et de le voir répondre des manquements retenus contre lui. Elle ajoute qu’il n’y a ni identité des parties, ni identité de cause, de sorte que l’autorité de la chose jugée est inopérante au cas présent.
Au surplus, Madame [H] affirme qu'elle n’a d’autre recours que de saisir la juridiction judiciaire aux fins de faire valoir ses demandes à l’encontre du docteur [U] puisque le tribunal administratif de Versailles lui-même s’est déclaré incompétent pour en connaître.
****

Il est constant que la question de la chose jugée relève des fins de non-recevoir telles que listées par l'article 125 du code de procédure civile.

Or, aux termes de l'article 789 du même code, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour : « 6° Statuer sur les fins de non-recevoir. »

Selon l'article 791 du même code, « Le juge de la mise en état est saisi par des conclusions qui lui sont spécialement adressées distinctes des conclusions au sens de l'article 768, sous réserve des dispositions de l'article 1117. »

En l'espèce, il ne ressort pas de la procédure que le juge de la mise en état ait été saisi par des conclusions qui lui ont été spécialement adressées et distinctes des conclusions au fond. En tout état de cause, étant une compétence exclusive du juge de la mise en état, le juge du fond n'est donc pas compétent pour se prononcer sur la question de l'autorité de la chose jugée.

La demande sera donc déclarée irrecevable.

Sur la responsabilité du docteur [U] et la réparation des préjudices allégués

Madame [H] affirme qu'il résulte des rapports d’expertise que la responsabilité du Docteur [U] exerçant ès qualité de chirurgien orthopédique au sein du Centre hospitalier de [11] dans la réalisation de son préjudice est établie et, comme telle, est non contestable. Au soutien elle développe trois arguments : l'absence d'information suffisante, le défaut de recueil du consentement de la patiente et le défaut d'assistance et de suivi de la patiente correspondant au défaut de soins attentifs et diligents.

Sur l'absence d'information suffisante de Madame [H] par le docteur [U]

Madame [H] reproche une faute médicale au docteur [U] en tant que manquement à son devoir d'information et se réfère au rapport de la CRCI.

En premier lieu Madame [H] note que le compte-rendu opératoire ne reflète en aucun cas la réalité des faits, qu'elle n’a pas été reprise dans la foulée sur la table d’opération mais après une première tentative de réduction de la luxation, et face à la persistance de cette luxation, la reprise chirurgicale a été décidée. En second lieu, elle relève que les experts s’étonnent « du délai de onze jours entre les gestes opératoires et la rédaction du compte-rendu opératoire, postérieurement à la sortie de la patiente. »

Madame [H] affirme également avoir fait l'objet d'une très mauvaise prise en charge de sa douleur lorsqu’elle était dans le service d’hospitalisation.
S’agissant de l’établissement du diagnostic de la complication, le Docteur [U] n’a jamais explicitement évoqué le diagnostic de lésion du nerf fémoro-cutané.

Elle considère que le compte-rendu de consultation du 27 octobre 2015 n’est pas conforme, dans la mesure où elle a été obligée par le chirurgien de faire quelques pas sans ses béquilles, ce qui était très douloureux et quasiment impossible pour elle.
Concernant le choix du protocole envisagé par le Dr [U], le rapport de la CRCI critique « le choix initial de la voie d’abord antérieure qui, du fait de la morphologie de Madame [H] et de ses antécédents chirurgicaux, l’exposait indéniablement au risque neurologique. »

Enfin, elle expose que le défaut de respect de l’obligation d’information par le docteur [U] est expressément constaté par le rapport expertal. Or selon elle, il appartient au médecin de faire la preuve que ce devoir d’information a bien été rempli, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

En outre et à titre post-opératoire, bien qu’informé des douleurs aiguës subies par sa patiente, le chirurgien se contentera de multiplier les doses de morphine sans prescrire d’examen complémentaire. En ne procédant à aucune recherche des causes des souffrances endurées, il a ainsi manqué à son devoir d’assistance, mais aussi à son obligation de procurer des soins attentifs et diligents à sa patiente.

Enfin, Madame [H] ajoute que le Docteur [U] n’a nullement rempli son obligation d’information sur les risques post-opératoires nouveaux, apparus des suites de son intervention, ce dernier n’ayant pas pris soin d’informer sa patiente de la possible persistance de douleurs, ni même et surtout de l’atteinte du nerf fémoro-cutané, laquelle sera d’ailleurs constatée plusieurs mois après l’opération, par électromyogramme, et dont la prise en charge a été effectuée auprès du centre de traitement de la douleur auprès duquel elle a dû trouver secours.

Madame [H] conclut qu'il résulte de l’ensemble de ces éléments que la faute, constatée par le rapport de la CRCI et ouvrant droit à réparation intégrale de son préjudice est indépendante du manquement au devoir d’assistance duquel le docteur [U] s’est détourné, par excès de confiance et légèreté blâmable.

De même, l’absence de suivi dans l’information de son état et des risques nouveaux apparus entre chacune des trois interventions ne pourra qu’être constatée, outre les constatations médicales erronées relatives « aux suites simples » déclarées par le Docteur [U].

De la seule constatation de ces manquements déontologiques par le Docteur [U], elle demande au tribunal de le condamner in solidum avec la compagnie d’assurance de responsabilité civile, à lui verser la somme de 50.000 euros au titre du manquement au devoir d’information, outre 40.000 euros au titre de l’absence de soins attentifs et diligents à leur patiente.

Sur le défaut de recueil du consentement de la patiente

Selon Madame [H], il résulte des faits et des pièces versées aux débats que si elle a effectivement donné son consentement aux soins dans le cadre de la première intervention, les suites chirurgicales et les reprises n’ont jamais été abordées avec elle, tant les raisons de la reprise que celles de la luxation.

De la même manière, son consentement à subir trois anesthésies générales dans une même journée avec les risques de comorbidité n’ont pas été soumis à son consentement, lui causant un préjudice.

Elle demande la condamnation du Docteur [U] in solidum avec la compagnie d’assurance à 50.000 euros de dommages-intérêts à ce titre.

-Le docteur [U] ne répond pas spécifiquement sur l'absence d'information suffisante, le défaut de recueil du consentement de la patiente ou encore le défaut d'assistance et de suivi de celle-ci. Il rappelle qu'il exerce en qualité de chirurgien orthopédique au sein du CHI de [11], établissement public de santé, que l’ensemble des griefs de Madame [H] ne constitue aucunement des fautes détachables du service et ne résulte exclusivement que de la prise en charge médicale d’acte de prévention, de diagnostic ou de soins dispensés en 2015. Il ajoute qu'en tout état de cause, l’ensemble des préjudices résultant de sa prise en charge au sein du CHI ont d’ores et déjà été intégralement indemnisés par SHAM en sa qualité d’assureur, selon les conclusions expertales ayant analysé la globalité de la prise en charge.
Il ajoute que le jugement du tribunal administratif de Versailles du 11 janvier 2022 a statué sur l’ensemble des manquements argués par Madame [H], lesquels sont les mêmes en la présente instance, tant sur le principe de la responsabilité et son application pour la fraction de 15% retenue au titre de la perte de chance, que sur la nature et le montant des préjudices indemnisables.

Il n'est selon lui retenu, ni même argué une faute dite personnelle de sa part puisque la totalité des arguments et griefs relèvent de la prise en charge médicale dispensée par lui-même en 2015 dans le cadre du service public hospitalier, appréciés en application des dispositions des articles L.1142-1 et suivants du code de la santé publique, et ont été pris en compte et indemnisés par SHAM, en qualité d’assureur du CHI.
En conséquence, il demande de débouter Madame [H] et la CPAM des Yvelines de l’ensemble de leurs demandes, celles-ci ayant déjà été jugées par le jugement du tribunal administratif de Versailles du 11 janvier 2022 ayant autorité de la chose jugée et de le mettre hors de cause.

****

S'agissant de la responsabilité des professionnels de santé, l'article L.1142-1 CSP dispose « I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute.
Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère.
II. - Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire.
Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret. »

S'agissant du devoir d'information et de l'obligation de recueil du consentement du patient, aux termes de l‘article L. 1111-2 du code de la sante publique : « Toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. (...) Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d‘informer peuvent l'en dispenser. / Cette information est délivrée au cours d’un entretien individuel. / (...) En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l'établissement de santé d'apporter la preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut être apportée par tout moyen (…) ».

Quant au devoir d'assistance, l'article L.1110-5 du code de la santé publique dispose : «  Toute personne a, compte tenu de son état de santé et de l'urgence des interventions que celui-ci requiert, le droit de recevoir, sur l'ensemble du territoire, les traitements et les soins les plus appropriés et de bénéficier des thérapeutiques dont l'efficacité est reconnue et qui garantissent la meilleure sécurité sanitaire et le meilleur apaisement possible de la souffrance au regard des connaissances médicales avérées. Les actes de prévention, d'investigation ou de traitements et de soins ne doivent pas, en l'état des connaissances médicales, lui faire courir de risques disproportionnés par rapport au bénéfice escompté. Ces dispositions s'appliquent sans préjudice ni de l'obligation de sécurité à laquelle est tenu tout fournisseur de produits de santé ni de l'application du titre II du présent livre. / (...) ». Aux termes de l‘article R. 4127-8 du même code : « [le médecin] doit, sans négliger son devoir d‘assistance morale, limiter ses prescriptions et ses actes à ce qui est nécessaire à la qualité, à la sécurité et à l'efficacité des soins. /Il doit tenir compte des avantages, des inconvénients et des conséquences des différentes investigations et thérapeutiques possibles. ».

Le tribunal considère opportun à ce stade de la décision de rappeler qu'il ressort du jugement du tribunal administratif de Versailles du 11 janvier 2022 versé aux débats que Madame [H] dans le cadre de cette procédure demandait notamment :
-de condamner le centre hospitalier de [11], son assureur la société hospitalière d’assurances mutuelles et le docteur [U], solidairement, à lui verser la somme totale de l.067.757,62 euros, en réparation des préjudices subis à l’occasion de sa prise en charge en août 2015 par l'établissement.
Elle soutenait notamment que :
-le centre hospitalier a manqué à son devoir d’assistance en méconnaissance de l'article L.110-5 du code de la santé publique, ses douleurs post-opératoires n’ont notamment pas été prises en compte et le chirurgien ne s‘est pas enquis de l’évolution post-opératoire de l'état de la patiente ;
-le centre hospitalier a également manqué à son obligation d’information, le chirurgien n’a notamment jamais explicitement évoqué le diagnostic de lésion du nerf fémoro-cutané ;
-son consentement n’a pas été recueilli quant aux reprises chirurgicales en méconnaissance de 1’article 36 du code de déontologie des médecins et de l'article R. 4127-36 du code de la santé publique ;
-le choix de pratiquer l'intervention par la voie d'abord antérieure est constitutif d’une faute compte-tenu notamment de ses antécédents chirurgicaux ;
Elle demandait la réparation de ses préjudices comme suit :
- 50 000 euros au titre du manquement au devoir d'information éclairée de la patiente,
- 40 000 euros au titre de l’absence de soins attentifs et diligents,
- 50 000 euros au titre du défaut de consentement de la patiente,
- 2 507,06 euros au titre des frais divers d’assistance par une tierce personne avant consolidation,
- 36 954,02 euros an titre de la perte de gains professionnels avant consolidation,
- 102 162,79 euros au titre des dépenses de santé futures,
- 80 000 euros au titre de l'assistance par une tierce personne,
- 240 624,95 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels,
- 80 000 euros au titre de l’incidence professionnelle,
- 500 000 euros au titre de la perte des droits à la retraite,
- 1 133,75 euros au titre des périodes de déficit fonctionnel temporaire avant consolidation,
- 35 000 euros au titre des souffrances endurées avant consolidation,
- 2 500 euros au titre du préjudice esthétique temporaire,
- 15 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent après consolidation,
- 2 500 euros au titre du préjudice esthétique permanent,
- 30 000 euros au titre du préjudice d'agrément et des troubles dans les conditions d’existence,
- 60 000 euros au titre de la perte de chance de survie à une prochaine intervention,
- 60 000 euros au titre du préjudice d’impréparation.

Il apparaît ainsi que les demandes financières formulées devant le présent tribunal judiciaire sont identiques à celles sur lesquelles le juge administratif a statué.

Relativement à l'absence d'information suffisante de Madame [H], notamment quant aux risques cardiaques accrus inhérents aux trois anesthésies générales subies au cours d’une même journée, le tribunal administratif explique qu'à supposer qu'elle n’ait effectivement pas été informée de ces risques, ce défaut n’aurait entraîné aucune perte de chance de se soustraire au dommage résultant de la lésion de son nerf fémoro-cutané, dès lors que ce dommage est sans lien avec les anesthésies.

Le rapport d'expertise définitif du 10 mai 2017 relève que « à la relecture des courriers échangés entre le chirurgien et le médecin traitant, qui signalent avoir exposé les différentes complications pouvant survenir au cours de cette intervention et qu'une documentation avait bien été remise à la patiente, l'information a été donnée et le consentement éclairé a été recueilli. Par contre il ne semble pas que les possibilités thérapeutiques aient été exposées de même que le choix de voie d'abord et surtout le risque de complications neurologiques. »

Dans ses conclusions dans la présente instance, et s'agissant du devoir d'information, Madame [H] n'explique aucunement quel est le dommage qu'elle aurait subi en raison du manquement du docteur [U] à son obligation d'information. En particulier elle n'indique à aucun moment qu'elle aurait renoncé à l'opération compte tenu du risque de complications neurologiques s’il lui avait été exposé.

Dès lors, en l'absence de préjudice démontré, sa demande pour manquement à l’obligation d'information sera rejetée.

S'agissant de l'absence de soins attentifs et diligents, il ressort du rapport d'expertise que Madame [H] a été opérée le 6 août et est restée hospitalisée jusqu'au 11 août 2015. Le docteur [U] a établi une ordonnance de [V] le 18 août 2015 du fait de l'intensité des paresthésies, puis une nouvelle ordonnance le 20 août 2015 pour du Dafalgan, du Topalgic, du Profenid et du Mopral. La patiente était alors suivie par un kinésithérapeute. Le chirurgien la revoyait et rédigeait un courrier daté du
2 septembre 2015 adressé au kinésithérapeute et au médecin traitant dans lequel il signalait que la marche dans son cabinet s'effectuait sans canne et que face aux douleurs neuropathiques, il orientait la patiente vers un référent du traitement de la douleur. Il la revoyait le 27 octobre 2015 et adressait un courrier à son médecin traitant. Madame [H] était par ailleurs suivie par le docteur [W] au centre de prise en charge de la douleur qui la recevait le 8 janvier 2016 puis le 31 mars 2016.

Il ressort de ces éléments que Madame [H] ne démontre pas en quoi le docteur [U] aurait manqué à la délivrance de soins attentifs et diligents, conduisant au rejet de sa demande.

S'agissant du défaut par le docteur [U] du recueil du consentement de Madame [H], le juge administratif reprend sa motivation précédente et explique que celle-ci n’a subi aucune perte de chance puisque son dommage n’est aucunement en lien avec les anesthésies générales successives qu'elle a subies le 6 août 2015.

Les experts dans leur rapport relèvent que le compte rendu opératoire ne reflète en aucun cas la réalité des faits, que la patiente n'a pas été reprise dans la foulée sur la table d'opération mais après une première tentative de réduction de la luxation, restée vaine. Par ailleurs, les experts s'étonnent du délai de onze jours entre les gestes opératoires et la rédaction du compte-rendu opératoire, postérieurement à la sortie de la patiente.

Pour autant, dans ses conclusions dans la présente instance, la demanderesse n'explique aucunement quel est le dommage qu'elle aurait subi en raison du manquement du chirurgien à son obligation de recueillir son consentement. Il convient de remarquer à cet égard que les experts, s'ils contestent le choix initial d'une intervention par une voie antérieure reprenant l'ancienne cicatrice, ne critiquent à aucun moment le choix de ré-intervenir en raison de la luxation de la prothèse de hanche.

Dès lors, la demande ne peut prospérer.

Sur l'indemnisation des autres postes de préjudice

Les experts expliquent que la patiente présentait une dysplasie de hanche dans ses antécédents et avait bénéficié de 2 interventions chirurgicales par une voie antérieure HUETER comportant dans un premier temps la mise en place d'une butée de hanche vissée et dans un deuxième temps, en reprenant la même voie d'abord, l'ablation de cette vis. Ils précisent que cette voie d'abord comporte un risque majeur de lésion du nerf fémoro-cutané, risque accru avec le nombre d'interventions reprenant la même cicatrice et qu'il aurait été judicieux d'utiliser une autre voie d'abord, vierge, permettant d'éviter ce type de complications neurologiques. Ils évaluent la perte de chance à 15%.

Ils exposent que la survenue du dommage est mono factorielle, qu'il s'agit d'une atteinte du nerf fémoro-cutané survenue lors de l'intervention chirurgicale réalisée le 6 août 2015. Compte tenu de ces éléments, le juge administratif a estimé que les préjudices devaient être indemnisés à hauteur de 15% du quantum fixé pour chacun d'eux, le choix thérapeutique erroné ayant fait perdre une chance à Madame [H] d'échapper à la lésion du nerf fémoro-cutané.

Compte tenu des conclusions des experts et de l'absence de remise en cause par Madame [H], dans ses conclusions dans la présente instance, de l'évaluation de ce taux de perte de chance, il convient de retenir ce taux de 15% dans la réparation de ses préjudices.

Il convient de rappeler que le juge administratif a condamné le centre hospitalier à verser à Madame [H] les sommes suivantes, compte tenu du taux de perte de chance retenu :
-Pour l'aide par une tierce personne 635,70€,
-Pour la perte de gains professionnels 4.578€,
-Pour la perte de gains professionnels futurs 6.400,46€ + 15.527,04€
-Pour l'incidence professionnelle 3.000€
-Pour le déficit fonctionnel temporaire, 281,30€,
-Pour les souffrances endurées, 811,50€,
-Pour le déficit fonctionnel permanent : 1.333€
-Pour le préjudice esthétique temporaire : 225€
-Pour le préjudice esthétique permanent : 145€

Le tribunal administratif a rejeté les demandes relatives au préjudice d'agrément et troubles dans les conditions d'existence : comme étant déjà indemnisées au titre des souffrances endurées et du déficit fonctionnel permanent ; il a rejeté la perte de chance de survie à une prochaine intervention et le préjudice d'impréparation.

-Pour les dépenses de santé, le tribunal administratif a condamné le centre hospitalier à payer à la CPAM 15% des sommes de 15.161,53€ et de 18.370,23€, soit une somme de 5.029,78€

Au regard des conclusions des experts qui expliquent que la survenue du dommage est mono factorielle et causée par l'atteinte du nerf fémoro-cutané, il s'en déduit que le dommage est exclusivement imputable à l'acte médical opéré par le docteur [U]. Or il ressort de la décision du tribunal administratif qu'il s'est prononcé sur l'ensemble de ces postes de préjudice reconnaissant ainsi qu'il appartenait au centre hospitalier de prendre en charge la faute du médecin comme étant une faute commise dans le cadre de sa mission service public.

Ainsi l'ensemble de ces préjudices ont déjà été indemnisés par la décision du tribunal administratif du 11 janvier 2022 de telle sorte qu'il ne reste plus de préjudice indemnisable. Ceci conduit à débouter Madame [E] [H] de l'ensemble de ses demandes.

Sur les demandes formulées par la CPAM des Yvelines

Dans ses conclusions formulées dans le cadre du contentieux devant le juge administratif, la CPAM des Yvelines avait fait état d'une créance de 120.533,02€ dont elle demandait le remboursement au centre hospitalier de [11], outre les prestations non connues à ce jour, et l'indemnité forfaitaire de gestion d'un montant de 1.080€.
Dans les conclusions déposées dans le cadre du présent litige, la CPAM des Yvelines fait état d'un total de prestations du même montant, soit 120.533,02 €.

S'agissant de la perte de gains professionnels actuels, le juge administratif, comme il a déjà été mentionné, a condamné le centre hospitalier à verser à Madame [H] une somme de 4.578€ et expliqué qu'aucune somme ne revenait à la CPAM des Yvelines.
S'agissant de la perte de gains professionnels futurs, le juge administratif s'est prononcé dans le même sens, concluant qu'aucune somme ne revenait au tiers payeur.
S'agissant des dépenses de santé actuelles et futures, le juge administratif a condamné le centre hospitalier à verser à la CPAM des Yvelines une somme de 5.029,78€ au titre de celles-ci après application du taux de 15% déjà mentionné.
Le juge administratif a également condamné l’établissement à payer une indemnité forfaitaire de gestion de 1.114€ et a assorti la somme due à la CPAM des intérêts au taux légal à compter du 19 juin 2019.

A l'instar de ce qui a été développé s'agissant du préjudice de Madame [H], il convient de constater que l'ensemble des demandes formulées dans la présente instance par la CPAM des Yvelines sont identiques à celles formulées devant le juge administratif, que celui-ci s'est déclaré compétent et a statué sur chacune d'elles, alors même qu'il considère que le dommage de Madame [H] est exclusivement lié à l'acte opératoire et relève donc de la faute exclusive du docteur [U], commise dans l'exercice de sa mission de service public et à ce titre prise en charge dans ses conséquences financières par le centre hospitalier et son assureur.

Dès lors, la juridiction constate que l'ensemble des demandes de la CPAM ont déjà été indemnisés par la décision du tribunal administratif du 11 janvier 2022 de telle sorte qu'il ne reste plus de préjudice indemnisable.

En conséquence, la CPAM des Yvelines sera déboutée de l'ensemble de ses prétentions.

Sur la demande du docteur [U] pour procédure abusive

Selon le docteur [U], la présente action est caractéristique d’un abus de droit d’agir en justice, qui devra être sanctionné par l’allocation de dommages et intérêts et ce sur le fondement de la théorie de l'abus de droit.
Madame [H] ni la CPAM des Yvelines ne se prononcent sur cette demande.

Sur ce,

Aux termes de l’article 32-1 du code de procédure civile, le plaideur qui « agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d’un maximum de 10.000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés »

En l'espèce, Madame [H] n'ayant pas obtenu pleinement satisfaction devant la juridiction administrative au regard des demandes financières formulées a décidé d'agir en justice devant le juge judiciaire sur le fondement de la faute personnelle du médecin l'ayant opérée.

Si ses demandes sont effectivement identiques dans les deux actions en justice alors qu'elle a déjà été partiellement indemnisée par le juge administratif, y compris pour son dommage relevant de la faute exclusive du docteur [U], ces éléments ne sont pas suffisants pour caractériser une action fautive ou de mauvaise foi.

La demande sera donc écartée

Sur les demandes accessoires

Madame [H] étant déboutée de l'ensemble de ses demandes, elle sera condamnée aux dépens de la présente instance dont la distraction sera ordonnée au profit de la SELARL BOSSU & ASSOCIES et de Maître Chrystelle BOILEAU.

Mme [H] sera condamnée à payer à Monsieur [U] la somme de 3.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et corrélativement déboutée de sa demande de ce chef. La CPAM ne tournant sa demande que contre le médecin qui ne succombe pas ne peut voir sa demande prospérer.

Enfin aucun motif ne conduit à écarter l’exécution provisoire de plein droit du présent jugement.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire rendu en premier ressort et mis à disposition au greffe,

Déclare irrecevables devant le tribunal les demandes de Monsieur [Y] [U] au titre de l'incompétence de la juridiction et de l'autorité de la chose jugée ;

Déboute Madame [E] [H] de l'ensemble de ses demandes ;

Déboute la CPAM des Yvelines de l'ensemble de ses demandes ;

Déboute Monsieur [Y] [U] de sa demande au titre de la procédure abusive ;

Condamne Madame [E] [H] aux dépens de l'instance et accorde le bénéfice de distraction à la SELARL BOSSU & ASSOCIES et à Maître Chrystelle BOILEAU ;

Condamne Madame [E] [H] à payer à Monsieur [Y] [U] la somme de 3.000,00 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et rejette les demandes formées de ce chef par Madame [H] et la CPAM.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 MARS 2024 par Mme DUMENY, Vice Présidente, assistée de Madame GAVACHE, greffier, lesquelles ont signé la minute du présent jugement.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Versailles
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 22/01540
Date de la décision : 14/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-14;22.01540 ?
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