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08/03/2024 | FRANCE | N°21/06793

France | France, Tribunal judiciaire de Versailles, Deuxième chambre, 08 mars 2024, 21/06793


Minute n°

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Deuxième Chambre
JUGEMENT du 08 MARS 2024

N° RG 21/06793 - N° Portalis DB22-W-B7F-QKOB


DEMANDEURS :

Monsieur [K] [R], né le 21 février 1958 à [Localité 5] (35), de nationalité française, exerçant la profession de chef d’entreprise ;
représenté par Me Mélodie CHENAILLER, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postulant, Me Léopold LEMIALE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

Madame [C] [H] épouse [R], née le 8 mars 1960 à Washington, de nationalité française, exerçant l

a profession de consultant ;
représentée par Me Mélodie CHENAILLER, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat post...

Minute n°

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Deuxième Chambre
JUGEMENT du 08 MARS 2024

N° RG 21/06793 - N° Portalis DB22-W-B7F-QKOB


DEMANDEURS :

Monsieur [K] [R], né le 21 février 1958 à [Localité 5] (35), de nationalité française, exerçant la profession de chef d’entreprise ;
représenté par Me Mélodie CHENAILLER, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postulant, Me Léopold LEMIALE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

Madame [C] [H] épouse [R], née le 8 mars 1960 à Washington, de nationalité française, exerçant la profession de consultant ;
représentée par Me Mélodie CHENAILLER, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postulant, Me Léopold LEMIALE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

DEFENDERESSES :

La société FONCIA VAL DE SEINE, SAS, immatriculée au RCS sous le N° 559 801 568, dont le siège social est sis [Adresse 2], prise en la personne de son Président Directeur Général, domicilié audit siège,
représentée par Maître Hélène ROBERT, avocats au barreau de VERSAILLES, avocats plaidant/postulant

SAS CONSTATIMMO, Société par actions simplifiée, immatriculée au RCS de LYON sous le n° 432 439 321, dont le siège social est situé [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
représentée par Maître Marion CORDIER de la SELARL SILLARD CORDIER & ASSOCIÉS, avocats au barreau de VERSAILLES, avocats postulant, Me Agnès PEROT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

ACTE INITIAL du 13 Décembre 2021 reçu au greffe le 22 Décembre 2021.

DÉBATS : A l'audience publique tenue le 10 Octobre 2023, les avocats en la cause ont été entendus en leurs plaidoiries par Madame RODRIGUES, Vice-Présidente, siégeant en qualité de juge rapporteur avec l’accord des parties en application de l‘article 805 du Code de procédure civile, assistée de Madame SOUMAHORO Greffier, puis l’affaire a été mise en délibéré au 08 Décembre 2023, prorogé au 30 janvier 2023, puis au 08 Mars 2024.

MAGISTRATS AYANT DÉLIBÉRÉ :
Madame LUNVEN, Vice-Présidente
Madame RODRIGUES, Vice-Présidente
Madame ANDRIEUX, Juge

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [K] [R] et Madame [C] [H] épouse [R] sont propriétaires d’un appartement au sein de la copropriété [Adresse 1] sis [Adresse 1] à [Localité 6], loué et occupé depuis le 10 octobre 2007 par Monsieur [N] et dont la gestion locative était confiée à l’agence FONCIA VAL DE SEINE (ci-après « FONCIA »).

Le 2 avril 2019, Monsieur [R] a informé FONCIA avoir donné congé pour vente à son locataire et que le bail arrivant à échéance le 11 octobre 2019, le mandat de gestion de l’agence FONCIA prendrait fin à cette date.

Le 5 août 2019, un état des lieux de sortie de l’appartement a été réalisé par la société CONSTATIMMO missionnée par l’agence FONCIA.

Par ailleurs, il était prévu un rendez-vous le 4 septembre 2019 avec Monsieur [X] du service Transactions de FONCIA, destiné à discuter de l’évaluation de l’appartement en vue de la vente.

A cette occasion, Monsieur [R] et Monsieur [X] ont constaté que l’appartement était totalement inondé.

En conséquence, la compagnie GENERALI ASSURANCES, assureur du syndicat de copropriété, a missionné le cabinet d’expertise TEXA, lequel a organisé une réunion d’expertise le 4 octobre 2019, à laquelle ont notamment assisté Monsieur [R] accompagné de son propre expert, le syndic de copropriété, un représentant de FONCIA accompagné du cabinet EQUAD représentant MMA ASSURANCES et le cabinet GMC, représentant AXA France, assureur de la société CONSTATIMMO.

Cette réunion a donné lieu à l'établissement d'un « procès-verbal de constatations relatives aux circonstances et l'évaluation des dommages».

A l’issue de cette première expertise, Monsieur [R] a adressé à TEXA un état des pertes incluant la remise en état de l’appartement, pour un total de 21.944,94 euros, puis a fait réaliser à ses frais avancés les travaux de rénovation de son appartement, lesquels ont été achevés le 18 août 2020.

Au motif qu'il ne parvenait à obtenir ni la communication du rapport d'expertise, ni le remboursement du coût des travaux de réfection, Monsieur [R] a mis en demeure le Cabinet TEXA, par courrier du 26 janvier 2021, de lui communiquer sous 8 jours le rapport d’expertise.

Le même jour, Monsieur [R] a mis en demeure la société FONCIA de lui verser la somme de 38.019,20 euros correspondant à son préjudice matériel et immatériel.

Par courriel en date du 29 janvier 2021, la société MMA, assureur de FONCIA, a refusé toute prise en charge du sinistre au motif que :

« Il apparaît pourtant que votre client a donné congé au mandat de gestion de FONCIA (afin de vendre le bien), par envoi de mail du 2 avril 2019. Le dernier locataire a quitté l’appartement le 5 août 2019. Lors de l’état de lieux de sortie du dernier locataire, il n’a été constaté aucun désordre.

Il apparaît donc que le sinistre est survenu après la fin du mandat de gestion de notre assuré, et alors que votre client, Monsieur [R], en avait à nouveau la responsabilité ».

Le 2 mars 2021, Monsieur [R] est parvenu a obtenir le procès-verbal de constatations relatives aux circonstances et l'évaluation des dommages, sans pour autant recevoir le remboursement des frais engagés.

En conséquence, à des fins probatoires, Monsieur [R] a fait établir, le 24 février 2021, un constat d’huissier de justice.

Monsieur et Madame [R] ont vendu l’appartement, objet du présent litige, par acte du 10 septembre 2021.

Soutenant qu'ils demeuraient titulaires d’un droit d’action à l’encontre de FONCIA et de la société CONSTATIMMO concernant les dommages affectant le bien lorsqu’ils étaient encore propriétaires et invoquant l’inaction des sociétés FONCIA et CONSTATIMMO, Monsieur et Madame [R] les ont, par actes d'huissier délivrés les 9 et 13 décembre 2021, fait assigner devant la présente juridiction aux fins de voir constater leur responsabilité respectivement contractuelle et délictuelle et d'obtenir le paiement de diverses sommes d'argent.

Aux termes de leurs dernières écritures notifiées par voie électronique le 23 mars 2023, Monsieur et Madame [R] sollicitent de voir :

Vu les articles 1240, 1991, 1992 et 1994 du Code Civil ;

RECEVOIR Monsieur et Madame [R] en l’ensemble de leurs demandes fins et conclusions,

A titre principal :

• CONSTATER la responsabilité contractuelle de la société FONCIA VAL DE SEINE à l’égard des époux [R] du fait du manquement de la société CONSTATIMMO, son mandataire ;
• CONSTATER la responsabilité délictuelle de la société CONSTATIMMO à l’égard des époux [R] ;

En conséquence :
• CONDAMNER solidairement la société FONCIA VAL DE SEINE et la société CONSTATIMMO à verser aux époux [R] :
- la somme de 3.427,37 euros au titre du préjudice matériel ou à tout le moins à la somme de 2.261,58 euros ;
- la somme de 11.553,59 euros au titre du préjudice immatériel ;
- la somme de 3.000 euros au titre des frais complémentaires engagés ;

• CONDAMNER solidairement la société FONCIA VAL DE SEINE et la société CONSTATIMMO à verser aux époux [R] la somme de 5.000 Euros au titre de leur préjudice de désagrément et de désorganisation de la trésorerie
• CONDAMNER solidairement la société FONCIA VAL DE SEINE et la société CONSTATIMMO à verser aux époux [R] la somme de 3.000 Euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens ;

A titre subsidiaire :
• CONSTATER la responsabilité contractuelle de la société FONCIA VAL DE SEINE à l’égard des époux [R] pour manquement à son obligation de conseil et de surveillance ;

En conséquence :
• CONDAMNER la société FONCIA VAL DE SEINE à verser aux époux [R] :
- la somme de 3.427,37 euros à titre principal au titre de leur préjudice matériel ou à tout le moins à la somme de 2.261,58 euros ;
- la somme de 11 553,59 euros au titre de leur préjudice immatériel ;
- la somme de 3.000 euros au titre des frais d’expertise amiable engagés ;

En tout état de cause :

• DEBOUTER la société FONCIA VAL DE SEINE et CONSTATIMMO de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
• CONDAMNER solidairement la société FONCIA VAL DE SEINE et la société CONSTATIMMO à verser aux époux [R] la somme de 5.000 Euros au titre de leur préjudice de désagrément et de désorganisation de la trésorerie
• CONDAMNER solidairement la société FONCIA VAL DE SEINE et la société CONSTATIMMO à verser aux époux [R] la somme de 3.000 Euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 19 janvier 2023, la société par actions simplifiée FONCIA demande au tribunal de :

Vu l’article 1991 du Code civil,

Vu l’article 1992 du Code Civil,

Débouter Monsieur et Madame [R] de leur demande de condamnation formée à l’encontre de la société FONCIA VAL DE SEINE à défaut de preuve d’une faute commise par le mandataire dans l’exercice de son mandat et d’un lien de causalité avec les préjudices allégués,

En conséquence,

Débouter Monsieur et Madame [R] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.

Condamner Monsieur et Madame [R] à payer à la société FONCIA VAL DE SEINE la somme de 3.000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de Me ROBERT, avocat aux Offres de Droit.

A titre subsidiaire,
-Débouter Monsieur et Madame [R] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.
-Ecarter l’exécution provisoire de droit.
-Condamner Monsieur et Madame [R] à payer à la société FONCIA VAL DE SEINE la somme de 3.000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de Me ROBERT, avocat aux Offres de Droit.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées par le RPVA le 5 octobre 2022, la société par actions simplifiée CONSTATIMMO sollicite de voir :

Vu les articles 1240 et suivants du code civil,
Vu l’article 1353 du code civil,

- Débouter les époux [R] de toutes leurs demandes formées contre la société CONSTATIMMO à défaut de preuve d’une faute et d’un lien de causalité avec les préjudices allégués,
- Condamner les époux [R] ou tout succombant à verser à la société CONSTATIMMO la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et à supporter les entiers dépens, qui pourront être recouvrés directement par Maître [E] pour ceux dont elle aura fait l’avance sans en avoir reçu provision, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux écritures des parties susvisées quant à l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens respectifs.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 13 juin 2023. L'affaire a été plaidée le 10 octobre 2023 et mise en délibéré au 8 décembre 2023, prorogé au 30 janvier 2024 puis au 8 mars 2024 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre préliminaire, il est rappelé que :
- d’une part, en vertu de l’article 768 du Code de procédure civile, le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion,
- d’autre part, les demandes tendant à voir « constater » ou « dire et juger » ne constituent

Sur la responsabilité des sociétés FONCIA VAL DE SEINE et CONSTATIMMO :

Les époux [R] soutiennnent que la vanne d’eau située à l’intérieur de l’appartement n’a pas été fermée lors de l’état des lieux de sortie, ce qui aurait permis d’éviter le dégât des eaux et qu'il ressort clairement du rapport d’expertise réalisé le 26 février 2020, que l’agent de la société CONSTATIMMO n’a effectivement pas refermé la vanne d’eau située dans l’appartement à l’occasion de l’état des lieux de sortie effectué le 5 août 2019 et que, par ailleurs, le procès-verbal de constat d’huissier établi le 24 février 2020 démontre clairement que c’est ce manquement qui a occasionné le dégât des eaux puisque, lorsque la vanne d’eau située dans le logement est fermée et que la vanne d’eau située dans les parties communes reste ouverte, aucun écoulement d’eau se produit ; qu'ainsi, la responsabilité contractuelle de la société FONCIA est engagée en raison de la faute commise par la personne qu’elle a mandatée.

Ils affirment, encore, que FONCIA a également commis des manquements propres dans le cadre de l’exécution de son contrat de mandat en ne vérifiant pas que l’agent de la société CONSTATIMMO avait pris l’ensemble des précautions nécessaires pour éviter que le bien ne soit endommagé par la suite, et ce en violation de son obligation de surveillance à l’égard de la personne qu’elle a mandatée ; qu'en outre, le contrat de mandat prévoit expressément que la mission de la société FONCIA comprend notamment le fait de “Souscrire toutes assurances utiles” et que pourtant elle ne leur a jamais conseillé de prendre une « assurance non-occupant » alors même qu'il s’agit d’une obligation légale s’agissant des biens soumis au statut de la copropriété depuis l’entrée en vigueur de la loi ALUR en 2014, et que si ce type d'assurance avait été souscrit, les conséquences du sinistre auraient nécessairement été prises en charge si bien que FONCIA a manqué à son obligation de conseil.

En réponse aux arguments développées par FONCIA qui affirme qu’il n’est pas démontré que la fuite proviendrait de la rupture du flexible du mitigeur du lave-main, ils notent que la recherche de fuite de l’entreprise ETS réalisée le 2 septembre 2019 ne concerne pas leur appartement de sorte que ce compte rendu de recherche de fuite, qui ne concerne pas le litige en cause, n’a aucune valeur probante et que d'ailleurs c'est la fuite de leur appartement qui s'est propagée aux appartements des étages inférieurs, l’eau s’étant notamment échappée par la gaine technique contenant la descente EU ; que le procès-verbal de constat de la société TEXA relate les faits à la suite d’une réunion du 27 janvier 2020 qui s’est tenue contradictoirement et au cours de laquelle il a clairement été évoqué la rupture du flexible du mitigeur de sorte que le fait que ce document ne soit pas signé par GMC et le cabinet EQUAD n’entache pas la valeur probante de ce document.

Ils affirment, encore, que, contrairement à ce que soutient FONCIA, le cabinet TEXA a pris en compte les éléments apportés par le cabinet EQUAD, dans un mail du 20 août 2020, considérant qu’ils ne devaient pas être retenus car Monsieur [R] a signé un mandat de gérance avec FONCIA, laquelle devait, en cette qualité, s’assurer que le réseau d’eau avait bien été fermé ; que l'assertion de FONCIA selon laquelle la société CONSTATIMMO aurait procédé à la fermeture du robinet d’arrêt général de l’eau lors de l’état des lieux de sortie n'est justifiée que par un simple mail de CONSTATIMMO qui a tout intérêt à répondre en ce sens ; qu'en tout état de cause, le caractère accidentel de la fuite n'est pas un motif d'exonération de responsabilité, alors que c'est bien l’absence de fermeture des deux vannes d’arrivée d’eau par la société CONSTATIMMO qui a permis la réalisation du dégât des eaux.

S'agissant spécifiquement des obligations de FONCIA, les époux [R] font valoir que si le mandat prend bien fin par la perte de son objet, cet événement correspond à l’échéance du bail en cours, soit au 11 octobre 2019 ; que les clés du bien n’ont été remises à Monsieur [R] que le 4 septembre 2019, de telle sorte qu'avant cette date, c’est la société FONCIA qui restait gardienne de la chose et responsable de plein droit des dommages.

Les demandeurs répliquent, en outre, que la société FONCIA tente d’induire le tribunal en erreur en jouant sur une confusion avec la société FONCIA TRANSACTION FRANCE, alors qu'elle n’est absolument pas concernée par la présente affaire, la mise en vente du bien ayant été gérée par l’intermédiaire de Monsieur [X] du service Transactions de FONCIA VAL DE SEINE ; que la société FONCIA TRANSACTION FRANCE est une société à part entière dont le siège social est situé à [Localité 4] ; que le seul mandat que Monsieur [R] ait jamais signé est le mandat avec FONCIA VAL DE SEINE.

En défense, FONCIA fait valoir que les époux [R] s’appuient sur un procès-verbal dressé par l’expert d’assurance du syndicat des copropriétaires qui n’a jamais été accepté par l’expert désigné par son assurance, le cabinet EQUAD, faute pour le cabinet TEXA de prendre en considération les observations qu'elle a développées sur les causes et circonstances du sinistre ; que ce rapport n’est pas contradictoire et ne lui est pas opposable ; qu'en conséquence, l’origine du désordre n’a nullement été parfaitement établi.
Elle reproche aux demandeurs de considérer que la cause génératrice du désordre est la rupture du flexible du mitigeur du lave-main des WC situé dans leur appartement alors que le syndic du syndicat des copropriétaires lui-même, lors de la découverte du sinistre, s’interrogeait sur l’existence d’une fuite en dalle sur le réseau privatif d’un appartement et que l’entreprise mandatée a affirmé avoir vu une fuite active visible le long du tuyau de la descente en PVC de l’immeuble au niveau des parties communes.

Elle soutient, encore, que la société CONSTATIMMO, conformément à la procédure pour l’établissement de l’état des lieux de sortie, a procédé à la fermeture du robinet d’arrêt général de l’eau à la fin de l’établissement du constat des lieux de sortie ; qu'elle ne peut être tenue pour responsable du fait que ce robinet ait pu être ouvert par un tiers après le 5 août 2019, date à laquelle son mandat prenait fin, Monsieur [R] ayant confié la vente à la société FONCIA TRANSACTION.

Elle souligne, également, que les demandeurs ne communiquent pas le rapport d’assurance définitif rendue par la société GENERALI, assureur du syndicat des copropriétaires ; qu'en cours d'instance, les demandeurs ont justifié avoir perçu la somme de 12.046,81euros, au titre de l’indemnité immédiate par l’assurance de la copropriété mais ne précisent pas avoir perçu l’indemnité différée à concurrence de la somme de 3.427,37 euros alors que les travaux ont été réalisés.

S'agissant de ses obligations de mandataire, FONCIA soutient que le mandat de l’agence avait pris fin, par perte de son objet, le 5 août 2019, date de la restitution des clefs par le locataire, de telle sorte que le 2 septembre 2019, date du sinistre, elle n’était plus en charge de la gestion de ce bien ; qu'en effet, les clefs ne sont pas restées en sa possession, mais ont été confiées le 5 août après l’établissement de l’état des lieux de sortie à la société FONCIA TRANSACTION, représentée par Monsieur [X], à laquelle il a été donné mandat de vendre le bien.

Enfin, s'agissant du manquement à son devoir de conseil concernant l’assurance, FONCIA souligne que la proposition de contracter une assurance responsabilité civile imposée par la loi ALUR n’est pas adressée, au propriétaire, par courrier recommandé avec avis de réception mais par lettre simple.

La société CONSTATIMMO souligne que les demandeurs ne rapportent pas la preuve qui leur incombe d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre les deux ; qu'en effet, il résulte du document établi par le cabinet TEXA Expertises (pièce de VEYRAC n°11) en suite du constat contradictoire mené sur les lieux du litige que la cause du sinistre est purement accidentelle, survenue près d’un mois après l’état des lieux de sortie alors qu'il ne lui est pas reproché d’avoir manipulé le flexible ou d’avoir causé sa rupture par une quelconque action manuelle ; que cette fuite étant d’origine accidentelle, elle doit prise en charge au titre de la garantie dégât des eaux souscrite par la copropriété pour les copropriétaires de l’immeuble, comme l’a confirmé le cabinet TEXA Expertises (expert mandaté par GENERALI, assureur de l’immeuble) dans un mail du 4 octobre 2019 adressé à son confrère RAMBOUR Expertise (expert mandaté par Monsieur [R]).

Elle souligne, en outre, que par conclusions du 26 juin 2022, les demandeurs ont finalement admis avoir déjà été indemnisés par la compagnie GENERALI, au titre des travaux réparatoires, à concurrence d’une somme de 12.046,81 euros sur les 17.570,76 euros réclamés, la somme complémentaire de 3.427,37 euros ne correspondant pas au solde des travaux non pris en charge par l’assureur, comme ils l'indiquent de manière inexacte, mais faisant l’objet d’un paiement différé.

Elle reproche aux demandeurs de faire une présentation tronquée des faits pour laisser croire que ce serait l’oubli de la fermeture d’un robinet qui serait à l’origine de la fuite, alors que c’est faux puisque l’eau ne coulait pas à son départ et que le sinistre survenu près d’1 mois plus tard n’est pas de son fait.

Elle rappelle, par ailleurs, qu'elle n’avait pas la gestion de cet appartement, étant uniquement mandatée pour réaliser un constat de l’état de l’appartement au jour de la restitution des clés par le dernier locataire.

Elle souligne, au demeurant, que la vanne située dans les parties communes avait bien été fermée et qu'elle a pu être rouverte par un tiers qui se serait trompé de numéro ou qui aurait manipulé plusieurs vannes pour repérer la sienne ; que si un tiers est intervenu par la suite sur cette vanne située dans les parties communes, accessible aux autres occupants de l’immeuble, elle ne saurait en être responsable.

***

L'article 1240 du code civil prévoir que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Il appartient à celui-ci qui souhaite engager la responsabilité délictuelle d'autrui, de rapporter la preuve d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre cette faute et ce préjudice.

Aux termes de l'article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

Selon l'article 1231-1 du même code, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

L'article 1991 dispose que le mandataire est tenu d'accomplir le mandat tant qu'il en demeure chargé, et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution, et l'article 1992 qu'il répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion.

De son côté, l’article 1992 dispose que le mandataire répond non seulement du dol mais encore des fautes qu’il commet dans sa gestion : néanmoins, la responsabilité relative aux fautes est appliquée moins rigoureusement à celui dont le mandat est gratuit qu’à celui qui reçoit un salaire.

Enfin, l’article 1993 précise que tout mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion et de faire raison au mandant de tout ce qu’il a reçu en vertu de sa procuration quand même ce qu’il aurait reçu n’eût point été dû au mandant.

L'intermédiaire immobilier investi d'un mandat de gestion locative est tenu d'un devoir d'information de son mandant ainsi que d'une obligation de diligence dans l'exécution de sa mission.

En vertu des règles de preuve, il appartient au mandant qui entend engager la responsabilité du mandataire de rapporter la preuve d’une faute de ce dernier dans l’exécution de ses obligations, qui sont de moyens.

A cet égard, cette preuve peut être rapportée par tous moyens, notamment par le biais d’un rapport d’expertise judiciaire.

Toutefois, il est constant qu'un rapport d'expertise amiable est opposable aux tiers, dès lors qu'il est régulièrement versé aux débats et soumis à la libre discussion des parties.

Ce rapport constitue alors un élément de preuve qui pourra être pris en compte dans la mesure où il est corroboré par d'autres pièces, la décision du juge ne pouvant se fonder exclusivement sur une expertise réalisée à la demande de l'une seule des parties.

***

En l'espèce, au soutien de leurs prétentions, les époux [R] produisent un «procès-verbal de constatations relatives aux circonstances et l'évaluation des dommages» rédigé par le cabinet TEXA représentant GENERALI ASSURANCES, assureur du syndicat des copropriétaires.
Cette pièce mentionne clairement dans un préambule intitulé «IMPORTANT» : « Ce document n'a pour but que d'étabIir contradictoirement les constatations et observations des Experts présents, pour donner aux intéressés les éléments objectifs nécessaires à la gestion du sinistre.
Il ne peut être considéré par aucune des parties intéressées comme une reconnaissance des garanties stipulées dans les contrats ou comme une acceptation des responsabilités éventuelles.
Il n'implique donc pas la prise en charge par tel ou tel des assureurs concernés des indemnités qui lui sont réclamées.».

Au surplus, outre le fait que ce constat n'est signé ni par le cabinet GMC, représentant AXA France assureur de CONSTATIMMO, ni par le cabinet EQUAD, représentant MMA ASSURANCES, assureur de FONCIA, il convient de noter que cette pièce se contente de tenir pour acquis qu'« En date du 2 septembre 2019, un important dégât des eaux est survenu en provenance de l'appartement de Monsieur [R], consécutif à une rupture du flexible armé du mitigeur du lave-main des WC».

Pour autant, ne sont versés aux débats ni la déclaration de sinistre qui a été établie consécutivement à la découverte de la fuite d'eau, ni la facture de changement du flexible d'alimentation incriminé, ni tout autre élément ou témoignage de nature à rapporter la preuve que le dégât des eaux résulte, effectivement, d'une fuite sur le robinet d'arrivée d'eau du lave-main.

De même, si dans sa note d'information à la compagnie MMA, le cabinet EQUAD indique au paragraphe «RESUME» : «Le 02 septembre 2019, un sinistre dégât des eaux a été constaté au niveau de l'immeuble sis [Adresse 1] a [Localité 6] (78). Ce sinistre a pour origine la survenance d'une fuite sur le flexible d'aIimentation d'eau froide du lave-mains de l'appartement de la SCI [R], et dont l'assuré a eu la gestion immobiliere locative.», il y a lieu toutefois de relever que là encore, il ne s'agit que d'une affirmation nullement étayée alors même qu'en préambule de cette note est expressément précisé « La présente note d'expertise a pour but d'informer la Compagnie d'assurance MMA de l'état actuel du dossier. Elle ne préjugé en rien des conclusions que les experts signataires seraient amenés a déposer ultérieurement.»

Par ailleurs, il résulte des pièces au dossier qu'en raison d'une fuite d'eau dans un appartement du 1er étage, le syndic de copropriété a fait intervenir, le 2 septembre 2019, les établissements LPCG, intervention qui a fait l'objet d'une facture dans laquelle il est précisé qu'après recherche, la fuite ne venait pas de l'installation de plomberie de cet appartement mais de la descente de l'immeuble, une fuite active étant visible au long de «la descente en PVC ø 100 qui prend EU».

A cette occasion, les établissements LPCG préconisaient de «voir avec le plombier du syndic de l'immeuble, pour refaire une recherche de fuite dans les gaines techniques des appartements de 3, 4 et 5 étages pour voir d'où vient la fuite sur la descente EU.».

Or, n'est produite aucune investigation complémentaire venant clairement établir que cette fuite est sans rapport avec celle affectant l'appartement des demandeurs ou que la fuite de la descente en PVC est la conséquence du sinistre apparu dans l'appartement des époux [R].

En outre, contrairement à ce qu'affirment les demandeurs dans leurs écritures, le sinistre n'a en réalité donné lieu à aucun rapport d'expertise, de telle sorte que l’origine du désordre n’est nullement établie.

Dès lors, faute de démontrer que la fuite constatée le 4 septembre 2019 provient du flexible du robinet des toilettes, ainsi qu'ils l'affirment, et non d'une canalisation sous la garde de la copropriété, les époux [R] échouent à rapporter la preuve d'une faute commise par les sociétés FONCIA et CONSTATIMMO à l'origine du sinistre survenu dans l'appartement litigieux.

Par ailleurs, s'agissant spécifiquement du manquement de FONCIA à son obligation d'information quant à la nécessite de prendre une assurance portant sur le logement inoccupé, force est de constater qu'en tout état de cause, il résulte des débats que les consorts [R] ont été indemnisés par l'assurance de la copropriété et que s'ils n'ont pas perçu l'indemnité complémentaire, c'est faute d'avoir justifié, auprès de l'assureur, de la réalisation des travaux.

En outre, ils ne démontrent pas que l'assurance qu'ils auraient pu souscrire de leur propre fait les auraient indemnisés du préjudice immatériel qu'ils invoquent et des frais d’expertise qu'ils ont engagés.

Dès lors, en l'absence de préjudice, il importe peu que FONCIA ait, ou non, été tenue au devoir de conseiller au demandeurs de souscrire, à l'issue du bail, une assurance de propriétaire non locatif.

En conséquence, à défaut de démontrer une faute imputable aux sociétés FONCIA et CONSTATIMMO, Monsieur et Madame [R] sont déboutés de l'ensemble de leurs demandes d'indemnisation, à savoir celles présentées au titre de leur préjudice matériel, de leur préjudice immatériel, des frais d’expertise engagés et de celui résultant de l’obligation de gérer le sinistre et les travaux de réfection de leur logement.

Sur les autres demandes :

Il y a lieu de condamner les consorts [R], qui succombent, aux dépens dont distraction ainsi qu'il sera précisé au dispositif de la présente décision.
 
Aux termes de l’article 700 du Code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.
 
Les époux [R], condamnés aux dépens, devront verser aux sociétés FONCIA et CONSTATIMMO la somme de 1.500 euros chacune.
 
Enfin, il convient de rappeler que selon les dispositions de l’article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.
 
Le présent jugement est donc assorti de l'exécution provisoire de plein droit.
 

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire, rendu en premier ressort par mise à disposition au greffe,

REJETTE l'ensemble des demandes présentées par Monsieur [K] [R] et Madame [C] [H] épouse [R] ;

CONDAMNE Monsieur [K] [R] et Madame [C] [H] épouse [R] aux dépens avec droit de recouvrement direct au profit de Me Marion Cordier, membre de la SELARL Sillard [E] et associés et de Me [U] pour les dépens dont ils ont fait l'avance sans avoir reçu provision, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [K] [R] et Madame [C] [H] épouse [R] à payer à la société par actions simplifiée FONCIA et la société par actions simplifiée CONSTATIMMO la somme de 1.500 euros, chacune, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que l'exécution provisoire est de droit ;

REJETTE toutes autres demandes plus amples ou contraires.

Prononcé par Madame LUNVEN, Vice-Présidente, assistée de Madame SOUMAHORO greffier, lesquelles ont signé la minute du présent jugement.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Versailles
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 21/06793
Date de la décision : 08/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-08;21.06793 ?
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