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11/07/2024 | FRANCE | N°23/00467

France | France, Tribunal judiciaire de Valenciennes, Première chambre, 11 juillet 2024, 23/00467


N° RG 23/00467 - N° Portalis DBZT-W-B7H-F5Y2

DTRIBUNAL JUDICIAIRE DE VALENCIENNES

PREMIERE CHAMBRE CIVILE
Affaire n° N° RG 23/00467 - N° Portalis DBZT-W-B7H-F5Y2
N° minute : 24/121
Code NAC : 61A
AD/AFB

LE ONZE JUILLET DEUX MIL VINGT QUATRE

DEMANDEURS

CPAM DU HAINAUT, organisme de sécurité sociale, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 5]
représentée par la SELARL GRILLET - DARE -COULON, avocats au barreau de VALENCIENNES, avocats plaidantr>
M. [J] [T]
né le [Date naissance 3] 1991 à [Localité 9], demeurant [Adresse 4]
représenté par la SELARL GRI...

N° RG 23/00467 - N° Portalis DBZT-W-B7H-F5Y2

DTRIBUNAL JUDICIAIRE DE VALENCIENNES

PREMIERE CHAMBRE CIVILE
Affaire n° N° RG 23/00467 - N° Portalis DBZT-W-B7H-F5Y2
N° minute : 24/121
Code NAC : 61A
AD/AFB

LE ONZE JUILLET DEUX MIL VINGT QUATRE

DEMANDEURS

CPAM DU HAINAUT, organisme de sécurité sociale, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 5]
représentée par la SELARL GRILLET - DARE -COULON, avocats au barreau de VALENCIENNES, avocats plaidant

M. [J] [T]
né le [Date naissance 3] 1991 à [Localité 9], demeurant [Adresse 4]
représenté par la SELARL GRILLET - DARE -COULON, avocats au barreau de VALENCIENNES, avocats plaidant

DÉFENDEUR

M. [F] [K]
né le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 8]
demeurant [Adresse 2]
représenté par Maître Hélène CANDELIER pour la SELARL CANDELIER & DORCHIE, avocats au barreau de VALENCIENNES, avocats plaidant

* * *

Jugement contradictoire, les parties étant avisées que le jugement sera prononcé par mise à disposition au greffe, et en premier ressort par Madame Aurélie DESWARTE, Juge, assistée de Madame Sophie DELVALLEE, Greffier.

Débats tenus à l'audience publique du 18 Avril 2024 devant Madame Aurélie DESWARTE, Juge qui en a fait rapport et en a rendu compte au Tribunal en cours de délibéré, conformément aux dispositions des articles 785 et 786 du Code de Procédure Civile, les avocats ne s'y étant pas opposés, assistée de Madame Sophie DELVALLEE, Greffier.

Composition du Tribunal lors du délibéré

- Madame Aurélie DESWARTE, Juge,
- Madame Nathalie REGULA, Magistrat à titre temporaire.

* * *
N° RG 23/00467 - N° Portalis DBZT-W-B7H-F5Y2

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 3 mars 2016, M. [J] [T] a été mordu par un chien de type Épagneul Breton au niveau des mains alors qu’il promenait son chien de type Husky en compagnie d’un ami en direction de la [Adresse 7] à [Localité 6].

Alléguant que le chien de type Épagneul Breton appartient à Monsieur [F] [K], M. [J] [T] l'a fait assigner en référé par acte d'huissier en date du 19 décembre 2017 devant le tribunal judiciaire de Valenciennes afin que soit ordonnée une expertise médicale.

Par ordonnance de référé du 6 février 2018, le tribunal de grande instance de Valenciennes a ordonné une expertise en commettant le Docteur [O] [E], expert.

Le rapport d'expertise a été rendu le 17 juillet 2018.

Par acte en date du 16 février 2023, M. [J] [T] et la CPAM du Hainaut ont fait assigner M. [F] [K] devant le tribunal judiciaire de Valenciennes afin notamment d’obtenir reconnaissance de responsabilité et indemnisation de son préjudice.

Aux termes de leurs dernières conclusions signifiées par RPVA en date du 9 octobre 2023, auxquelles il est fait référence pour l’exposé et le détail de l’argumentation, M. [J] [T] et la CPAM du Hainaut sollicitent de :
Dire que la responsabilité de M. [F] [K], en sa qualité de propriétaire du chien, est engagée,Le condamner à lui payer les sommes suivantes :- À titre des préjudices patrimoniaux temporaires, les sommes de 2 016 euros au titre de la tierce personne et de 4 688,07 euros au titre des pertes de gains professionnels subis,
- À titre des préjudices patrimoniaux permanents, la somme de 5 000 euros en indemnisation de l'incidence professionnelle,
- À titre des préjudices extra-patrimoniaux temporaires, les sommes de 488,20 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, 6000 euros en réparation des souffrances endurées, 5000 euros en indemnisation du préjudice esthétique temporaire et 3000 euros en indemnisation du préjudice sexuel temporaire,
- À titre des préjudices extra-patrimoniaux permanents, les sommes de 8000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent, 4000 euros au titre du préjudice esthétique permanent et la somme de 5000 euros en réparation du préjudice sexuel définitif,
Condamner M. [F] [K] à payer à la CPAM du Hainaut la somme de 10 615,85 euros au titre de remboursement de ses débours, outre la somme de 1 162 € au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, Le condamner à payer la somme de 3 000 euros à M. [J] [T] et à la somme de 3 000 euros à la CPAM du Hainaut au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, Le condamner aux dépens, en ceux compris les frais d'expertise, Rejeter l'intégralité de ses demandes.
Au soutien de leurs demandes, ils font valoir, s'agissant de la responsabilité du fait d'un animal fondé sur l'article 1243 du code civil que le chien de M. [F] [K] a mordu M. [J] [T] au niveau des deux mains et que l'expert a conclu que les lésions constatées sont en lien direct avec les faits. Sur les moyens en défense soulevés, il expose que M. [F] [K] est propriétaire du chien et que ce dernier ne conclut aucunement que le chien agresseur n’était pas son chien. Il argue en outre que si lors de l'agression une femme a revendiqué sa propriété, il ressort du dépôt de plainte qu’en réalité, cette dernière était la belle-fille du réel propriétaire du chien et qu’aucun transfert de garde ne peut être retenu en raison de la jurisprudence qui relève que ne revête pas la qualité de gardien celui qui promène le chien d'un ami. Il explique, enfin, que le classement sans suite du Procureur de la République a été décidé aux motifs que « le plaignant a été désintéressé à la demande du parquet » et s’étonne du fait que M. [F] [K] ne se soit pas manifesté dans le cadre de la procédure de référé ou durant l'expertise réalisée alors que la première assignation en référé a été signifiée à son domicile et remise à son fils.
S’agissant de l'indemnisation des préjudices, M. [J] [T] sollicite l’indemnisation de son indemnisation sur la base de la nomenclature Dintilhac. Il précise qu’il est surprenant que l'expert n'ait retenu l’existence d'aucune incidence professionnelle dès lors que la gêne des mains a occasionné la baisse de sa performance professionnelle, d'autant qu'en qualité de menuisier-poseur, cette gêne se manifeste lors du port de charges lourdes et lors d'un travail dans des conditions météorologiques défavorables. Il estime également que l'expert a sous-évalué le préjudice esthétique temporaire retenant 1/7 compte tenu des sutures sur les deux mains et des pansements qui devaient être changés tous les deux jours pendant deux semaines et que la gêne ressentie justifie l’indemnisation d'un préjudice sexuel temporaire malgré le rapport d'expertise.
Enfin, s'agissant de l'indemnisation des débours de la CPAM, ils font valoir que cette dernière a versé à ce titre une somme de 10 615,85 euros dont elle justifie et qu’elle est fondée à solliciter une somme de 1 162 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Par dernières écritures signifiées par RPVA en date du 22 septembre 2023, auxquelles il est fait référence pour l’exposé et le détail de l’argumentation, M. [F] [K] sollicite :
À titre principal, le rejet des demandes adverses, La condamnation solidaire de M. [J] [T] et de la CPAM du Hainaut à lui payer la somme de 2000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,À titre subsidiaire :Le rejet de la demande relative au titre de l’assistance tierce personne,Le rejet de la demande au titre de la perte de salaire,Le rejet de la demande relative à l'incidence professionnelle,Le rejeté de la demande relative au préjudice sexuel permanent,Et la réduction à de plus justes proportions des autres demandes formulées en réparation du préjudice corporel.
Au soutien de sa demande principale, il fait valoir, au visa de l'article 9, qu’il n'est nullement démontré qu’il serait propriétaire du chien ou celui qui s'en servait le 03 mars 2016 et qu'il n'est nullement démontré que les blessures subies par M. [J] [T] aient été causées par le chien supposé agresseur et non pas par son propre chien. En outre, il constate que la plainte déposée par ce dernier a été classée sans suite.
Subsidiairement, il mentionne que le rapport d'expertise ne retient pas d’indemnités relatives au besoin d’une tierce personne et conclut à l'irrecevabilité de la pièce 24 produite en demande. Il explique que la perte de salaire peut être justifiée par d’autres paramètres et que s'agissant de l'incidence professionnelle, M. [J] [T] a décidé de poursuivre son activité professionnelle sans poursuivre la rééducation pourtant préconisée par le kinésithérapeute, ni revoir le chirurgien, et qu’aucun élément ne permet de démontrer la gêne au travail. Il précise enfin que l'expert ne retient pas de préjudice sexuel permanent.

La clôture de l’instruction a été ordonnée le 30 janvier 2024.

DISCUSSION

Sur la responsabilité du fait des animaux :
Aux termes des dispositions de l’article 1243 du code civil, le propriétaire d’un animal, ou celui qui s’en sert, pendant qu’il est à son usage, est responsable du dommage que l’animal a causé, soit que l’animal fût sous sa garde, soit qu’il fût égaré ou échappé.

La responsabilité du fait d’un animal suppose d’établir l’intervention matérielle d’un animal dans la réalisation du dommage et son rôle causal dans la survenance de ce dernier.

Le propriétaire de l’animal est présumé en être le gardien. Cette présomption impose au propriétaire de prouver qu’au moment du dommage, il n’était pas le gardien de l’animal.

Par ailleurs, en vertu des dispositions de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi, les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l’espèce, les pièces produites par M. [J] [T] permettent d’établir que ce dernier a bien été mordu gravement sur ses deux mains par un chien en date du 3 mars 2016.

Pour autant, la propriété du chien que ce dernier identifie comme étant le responsable de ses blessures est contestée par M. [F] [K].

Pour établir cette propriété, M. [J] [T] produit uniquement sa plainte effectuée auprès des services de la gendarmerie nationale compagnie de [Localité 8] en date du 4 mars 2016 et la déposition auprès de ces mêmes services de l’ami qui l’accompagnait ce jour-là, M. [I] [Y].

En effet, la déclaration d’un dommage corporel effectuée par ses soins mentionne M. [F] [K] comme propriétaire de l’animal.

Pour autant, il s’agit d’un document déclaratif non corroboré par un procès-verbal signé des deux parties ou d’un constat amiable établi entre eux.

Ainsi, force est de constater que M. [J] [T], dans sa plainte, identifie le propriétaire du chien, comme pouvant être le beau-père de la femme, accompagnant le chien litigieux et qui s’était présentée initialement, à lui, comme son propriétaire.

« (…) je ne comprends la réaction de cette dame qui a fini par dire que de toute façon c’était pas son chien. Cette fille serait la belle fille du propriétaire. »

Ainsi, aux termes de sa plainte, le conditionnel employé par M. [J] [T] démontre que ce dernier n’est pas certain de l’identité dudit propriétaire.

Son ami, M. [I] [Y], est, quant à lui, affirmatif, quant à ce propriétaire, et désigne M. [F] [K]. Pour autant, ses déclarations ne contiennent autre précision qui permettraient de donner du poids à ses affirmations.

« (…) Question : Savez-vous à qui appartient le chien épagneul breton ?
Réponse : le chien appartient à [F] [K] qui demeure [Adresse 7] à [Localité 6]. C’est une belle petite maison en briques, avec un grillage sur le côté de la maison et à l’arrière il y a une pelouse avec des canards, une volière. (…) »

Ainsi, seul ce témoignage sans autre précision permettrait d’identifier la propriété du chien qui est contestée.

Faute de précisions permettant d’apprécier cette désignation, il conviendra donc de considérer que la preuve de la propriété du chien épagneul breton de M. [F] [K] n’est pas établie.

Par voie de conséquence, sans qu’il soit nécessaire d’examiner si ce chien a bien causé les morsures de M. [J] [T], il conviendra donc de le débouter de ses demandes ainsi que celles de la CPAM du Hainaut.

Sur les dépens :
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

M. [J] [T] et la CPAM du Hainaut, parties perdantes, seront condamnés in solidum aux dépens.

3. Sur la demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile :

Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a lieu à condamnation.

L’équité commande de débouter M. [F] [K] de sa demande de condamnation au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

4. Sur l'exécution provisoire :

Aux termes de l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

En l’espèce, il n'y a pas lieu d'écarter l'exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par mise à disposition de la décision au greffe le 11 juillet 2024, comme cela a été indiqué à l'audience de plaidoirie, par jugement contradictoire et en premier ressort :

DÉBOUTE M. [J] [T] et la CPAM du Hainaut de leur demande de dommages et intérêts fondée sur la responsabilité délictuelle du fait des animaux,

CONDAMNE in solidum M. [J] [T] et la CPAM du Hainaut aux dépens,

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,

RAPPELLE que la présente décision est assortie de l’exécution provisoire de plein droit.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Valenciennes
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 23/00467
Date de la décision : 11/07/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-11;23.00467 ?
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