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30/05/2024 | FRANCE | N°23/00070

France | France, Tribunal judiciaire de Valenciennes, Première chambre, 30 mai 2024, 23/00070


N° RG 23/00070 - N° Portalis DBZT-W-B7H-F5DW

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VALENCIENNES


PREMIERE CHAMBRE CIVILE
Affaire n° N° RG 23/00070 - N° Portalis DBZT-W-B7H-F5DW
N° minute : 24/105
Code NAC : 88A
LG/AD/AFB


LE TRENTE MAI DEUX MIL VINGT QUATRE


DEMANDERESSE

POLE EMPLOI HAUTS DE FRANCE, dont le siège social est sis [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
représentée par Maître Valérie BIERNACKI membre de la SELARL DRAGON BIERNACKI PIRET, avocats au barreau de DO

UAI, avocats plaidant



DÉFENDEUR

M. [J] [V]
né le 07 Mai 1980 à [Localité 3] ([Localité 3]), demeurant [Adresse 2]...

N° RG 23/00070 - N° Portalis DBZT-W-B7H-F5DW

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VALENCIENNES

PREMIERE CHAMBRE CIVILE
Affaire n° N° RG 23/00070 - N° Portalis DBZT-W-B7H-F5DW
N° minute : 24/105
Code NAC : 88A
LG/AD/AFB

LE TRENTE MAI DEUX MIL VINGT QUATRE

DEMANDERESSE

POLE EMPLOI HAUTS DE FRANCE, dont le siège social est sis [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
représentée par Maître Valérie BIERNACKI membre de la SELARL DRAGON BIERNACKI PIRET, avocats au barreau de DOUAI, avocats plaidant

DÉFENDEUR

M. [J] [V]
né le 07 Mai 1980 à [Localité 3] ([Localité 3]), demeurant [Adresse 2]
représenté par Maître Yazid LEHINGUE, avocat au barreau de DOUAI, avocat plaidant

* * *

Jugement contradictoire , les parties étant avisées que le jugement sera prononcé le 10 Mai 2024 par mise à disposition au greffe prorogé à la date de ce jour, et en premier ressort par Madame Leïla GOUTAS, Première Vice-Présidente, assistée de Madame Anna BACCHIDDU, Greffier.

Débats tenus à l'audience publique du 15 Février 2024 devant :

- Madame Leïla GOUTAS, Première Vice-Présidente,
- Madame Aurélie DESWARTE, Juge,
- Madame Nathalie REGUAL, Magistrat à titre temporaire,

assistées de Madame Anna BACCHIDDU, Greffier.

* * *

EXPOSÉ DU LITIGE :

M. [J] [V], inscrit sur les listes des demandeurs d'emploi, s'est vu notifier une décision de refus d'attribution de l'allocation retour à l'emploi, en date du 20 décembre 2018, au motif qu'il a démissionné de son dernier emploi. Cette décision lui proposait après une période de 21 jours de chômage de solliciter un nouvel examen de sa situation.

Après cette période, l'instance paritaire a considéré que les efforts de reclassement justifiés par ce dernier étaient insuffisants de sorte qu'une nouvelle décision de refus d'attribution de l'allocation retour à l'emploi lui a été notifiée en date du 28 septembre 2020.

En date du 10 juillet 2022, M. [J] [V] a saisi le tribunal Administratif de Lille afin de contester la décision rendue en date du 28 septembre 2020, lui refusant une reprise de droits au titre de l'attribution de l'allocation retour à l'emploi.

Par ordonnance en date du 11 août 2022, le juge administratif s'est déclaré incompétent pour examiner sa demande.

Le 12 août 2022, M. [J] [V] a saisi le Pôle social du Tribunal Judiciaire de Valenciennes afin d'obtenir la nullité de la notification de la décision rendue par Pôle Emploi et l'admettre au bénéfice de l'allocation retour à l'emploi et à titre subsidiaire annuler la décision rendue par Pôle Emploi pour non-motivation et non-justification de sa décision, et le condamner à lui payer la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par décision rendue en date du 16 décembre 2022, le Pôle social du Tribunal Judiciaire de Valenciennes s'est déclaré incompétent pour connaître la requête déposée par M. [J] [V] et a renvoyé cette affaire devant la première chambre civile du Tribunal Judiciaire de Valenciennes.

Aux termes de ses dernières écritures signifiées par RPVA en date du 8 septembre 2023, Pôle Emploi Hauts de France sollicite sur le fondement des dispositions des articles L5312-10 du Code du travail, vu l'accord d'application 12 du 14 avril 2017, Vu l'article 5422-1 du Code du travail, de :
-Juger régulière la notification de la décision de refus de l'ARE en date du 28 septembre 2020,
-Débouter M. [J] [V] de l'ensemble de ses demandes,
-Condamner M. [J] [V] à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
-Le condamner aux dépens.

Au soutien de ses intérêts, s'agissant de la nullité de la décision de refus, Pôle Emploi conteste le raisonnement de M. [J] [V] dans la mesure où ce dernier a d'ores et déjà saisi le Tribunal Administratif de Lille qui s'est déclaré incompétent au profit du Tribunal Judiciaire et que ce dernier n'a pas contesté cette décision. Il souligne que la notification prévoit le délai dans lequel la contestation doit être effectuée et précise qu'elle doit être faite devant le tribunal judiciaire compétent et qu'ainsi, la juridiction compétente pour connaître la contestation de cette décision est bien précisée. Il estime d'ailleurs que ce point ne peut faire grief à M. [J] [V] dans la mesure où ce dernier a saisi les juridictions compétentes.
Sur le rejet, il rappelle que l'allocation retour à l'emploi ne peut être attribuée que si les conditions d'ouverture de droits prévues par le règlement d'assurance chômage sont remplies et que notamment seul le chômage involontaire est indemnisable. Il rappelle que M. [J] [V] s'est inscrit sur les listes des demandeurs d'emploi, qu'il a repris une activité pour le compte de la société [4] à compter du 28 novembre 2018, puis qu'il a démissionné de cette activité le 7 décembre 2018. Il rappelle que la rupture du contrat de travail, pendant la période d'essai à l'initiative du salarié, quand bien même si elle est autorisée par le Code du travail, est considérée comme une démission au regard de l'assurance chômage et ne permet pas de bénéficier des allocations chômages. Il mentionne qu'ainsi, un rejet par courrier en date du 20 décembre 2018 lui a été notifié. Il précise que le salarié ayant quitté volontairement son emploi et dont l'état de chômage se prolonge contre sa volonté peut solliciter le réexamen de sa situation devant les instances paritaires en application de l'accord n°12, ce qu'a fait M. [J] [V]. Il met en exergue qu'en application de cet accord, les instances paritaires régionales apprécient de façon discrétionnaire, les situations qui leur sont soumises s'agissant de mesure individuelle dérogatoire en faveur d'une personne en considération de sa situation. Il souligne que dans ces cas, seule la régularité de la procédure suivie et la conformité de la décision au règlement de l'assurance chômage et à un texte d'application donnent lieu au contrôle juridictionnel. Il mentionne que s'agissant de la situation de M. [J] [V] la période d'examen de 121 jours, portaient du 8 décembre 2018 au 7 avril 2019, que ce dernier a, durant cette période, été en arrêt maladie du 11 février au 31 décembre 2019, et que même si la période d'examen devait être reportée jusqu'au 25 février 2020, ce dernier n'a effectué que deux formations de quelques jours en janvier 2019 et que l'instance paritaire a estimé, de manière discrétionnaire, que ses efforts de reclassements étaient insuffisants. Il estime que la procédure et la conformité au règlement annexé ont bien été respectées.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par RPVA en date du 08 août 2023, auxquelles il est fait référence pour l'exposé et le détail de l'argumentation, M. [J] [V] sollicite en application des dispositions de l'article L5422-4 du code du travail, et de la loi du 11 juillet 1979, de :
-Déclarer nulle la notification de refus d'ARE en date du 28 septembre 2020, et de l'admettre au bénéfice de l'ARE,
-À titre subsidiaire, d'annuler la décision de Pôle Emploi pour non motivation et non justification de sa décision,
-Condamner Pôle Emploi à lui payer la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
-Le condamner aux dépens.

Au soutien de ses intérêts, M. [J] [V] expose qu'il s'est vu notifier en date du 28 septembre 2020 un refus de l'allocation retour à l'emploi au motif que ses efforts de reclassement n'étaient pas suffisants pour permettre une reprise des allocations chômage, qu'il a formé un recours amiable et que Pôle Emploi a maintenu sa décision ce qui explique la présente saisine. Il soutient que la notification de cette décision est nulle car elle mentionne le tribunal judicaire sans plus de précision alors que c'est le tribunal administratif qui est compétent et que dans la mesure où cette notification n'est pas régulière, cette dernière est nulle. Sur le fond, il souligne que Pôle Emploi dans sa décision de refus de lui faire bénéficier de l'allocation de retour à l'emploi ne fournit aucun motif et ce, en contrariété avec la loi du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs et qu'il en va de même des recours amiables exercés. Il considère qu'il convient dès lors de considérer que ce refus n'est pas fondé. Il précise essayer de trouver un emploi, mais qu'il a été quasiment en arrêt maladie toute l'année 2019 et que la médecine du travail a constaté qu'il souffrait de lombosciatiques cliniques rendant compliqué son maintien dans l'emploi et qu'il l'a orienté vers la constitution d'un dossier MDPH. Il souligne également essayé en vain de se former et de rechercher un emploi.

L'ordonnance de clôture a été rendue en date du 9 novembre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1.Sur la nullité de la décision de refus :

a. Sur la notification irrégulière de la décision :

Aux termes des dispositions de l'article 480 du code de procédure civile, le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche.

En l'espèce force est de constater que M. [J] [V] a préalablement saisi le Tribunal Administratif de Lille d'une requête enregistrée en date du 10 juillet 2022 pour contester la décision rendue en date du 28 septembre 2020 par laquelle le directeur de l'agence Pôle Emploi lui a refusé sa demande de reprise de droits au titre de l'allocation retour à l'emploi et que ce dernier, par ordonnance rendue en date du 11 août 2022, s'est déclaré incompétent pour en connaître.

Les pièces versées par les parties permettent également d'établir que cette décision n'a pas été contestée par ses soins.

Ainsi, cette décision a définitivement statué quant à la juridiction compétente pour connaître son recours de sorte que son argumentation basée sur le fait que la décision de refus serait nulle, faute pour la notification de mentionner le tribunal administratif comme compétent, est inexacte.

Par voie de conséquence, il conviendra donc de rejeter sa demande de nullité de la décision de refus compte-tenu de sa notification irrégulière.

b. Sur l'absence de motif :

Aux termes des dispositions de l'article L. 5312-10 du code du travail, au plan local, une instance paritaire est placée au sein de chaque direction régionale de Pôle emploi. Considérées comme la déclinaison territoriale des organisations nationales d'employeurs et de salariés gestionnaires de l'assurance chômage, les instances paritaires régionales (IPR) sont chargées dans ce domaine :
- d'exercer de façon générale, une veille sur l'application de la convention d'assurance chômage adoptée par les Partenaires sociaux,
- de statuer sur des situations individuelles relevant de catégories de cas limitativement énoncées par l'accord d'application n° 12 du 14 mai 2014.

Ces instances paritaires régionales tiennent les attributions particulières listées par l'accord de l'application n° 12 du 14 mai 2014, de l'article 7 de la convention du 14 mai 2014 relative à l'indemnisation du chômage et de l'article 48 du règlement général annexé à cette convention.

Ainsi, l'accord d'application n° 12 énumère les cas dans lesquels les demandeurs d'emploi peuvent saisir les instances paritaires régionales afin que leur situation soit examinée au regard des textes applicables dont le départ volontaire d'un emploi précédemment occupé.

Ces instances paritaires apprécient, de façon discrétionnaire, les situations qui leur sont soumises dans la mesure où elles doivent prendre ou non une mesure individuelle dérogatoire en faveur d'une personne, en considération de sa situation.

En cas de recours, seules la régularité de la procédure suivie et la conformité de la décision au règlement de l'assurance chômage et à un texte d'application donnent lieu au contrôle juridictionnel.

En l'espèce, force est de constater qu'aucune irrégularité quant à la procédure suivie n'est invoquée.

M. [J] [V] soutient que la décision rendue à son encontre n'est pas motivée.

Or, force est de constater que contrairement à ses affirmations, cette décision est motivée par " après examen des pièces que vous avez fournies pour justifier vos démarches, l'instance paritaire n'a pas jugé vos efforts de reclassement suffisants pour permettre une reprise de vos allocations de chômage ".

Cette décision est prise au surplus discrétionnairement par l'instance paritaire régionale et portait sur la période des 121 jours qui suivaient le refus de l'attribution retour à l'emploi prise en date du 8 décembre 2018, soit du 8 décembre 2018 au 7 avril 2019.

Or, les pièces produites par M. [J] [V] sont toutes postérieures à cette date.

Ainsi, la décision prise par l'instance paritaire régionale a respecté la procédure et est conforme au règlement de l'assurance chômage et au texte d'application.

Par voie de conséquence, il conviendra donc de rejeter la demande d'annulation de la décision rendue en date du 28 septembre 2020.

2. Sur les dépens :

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

En application de ces dispositions, M. [J] [V] ayant succombé, sera condamné aux dépens.

3. Sur la demande de condamnation au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile :

L'article 700 du code de procédure civile dispose que dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.

En l'espèce, l'équité commande de rejeter la demande de Pôle Emploi.

4. Sur l'exécution provisoire :

Aux termes de l'article 515 du code de procédure civile, hors les cas où elle est de droit, l'exécution provisoire peut être ordonnée, à la demande des parties ou d'office, chaque fois que le juge l'estime nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire, à condition qu'elle ne soit pas interdite par la loi.

En l'espèce, compatible avec la nature du litige, il conviendra donc d'ordonner l'exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS

Statuant par mise à disposition de la décision au greffe le 10 mai 2024, comme cela a été indiqué aux parties prorogée au 30 mai 2024, et par jugement contradictoire :

REJETTE les demandes de M. [J] [V],

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,

CONDAMNE M. [J] [V] aux dépens,

ORDONNE l'exécution provisoire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Valenciennes
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 23/00070
Date de la décision : 30/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 05/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-30;23.00070 ?
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