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16/05/2024 | FRANCE | N°21/02937

France | France, Tribunal judiciaire de Valenciennes, Première chambre, 16 mai 2024, 21/02937


N° RG 21/02937 - N° Portalis DBZT-W-B7F-FS2H

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VALENCIENNES


PREMIERE CHAMBRE CIVILE
Affaire n° N° RG 21/02937 - N° Portalis DBZT-W-B7F-FS2H
N° minute : 24/90
Code NAC : 28A
LG/AFB

LE SEIZE MAI DEUX MIL VINGT QUATRE

DEMANDEUR

M. [H] [N] [T]
né le [Date naissance 4] 1958 à [Localité 14], demeurant [Adresse 3]
représenté par Maître Vincent DUSART HAVET membre de la SCP SPEDER DUSART FIEVET, avocats au barreau de VALENCIENNES, avocats plaidant


DEFENDERESSE

Mme [M] [P] [K] veuve [T]
née l

e [Date naissance 6] 1940 à [Localité 15], demeurant [Adresse 2]
représentée par Maître Fabienne MENU membre de la SCP SCP D’AVOC...

N° RG 21/02937 - N° Portalis DBZT-W-B7F-FS2H

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VALENCIENNES

PREMIERE CHAMBRE CIVILE
Affaire n° N° RG 21/02937 - N° Portalis DBZT-W-B7F-FS2H
N° minute : 24/90
Code NAC : 28A
LG/AFB

LE SEIZE MAI DEUX MIL VINGT QUATRE

DEMANDEUR

M. [H] [N] [T]
né le [Date naissance 4] 1958 à [Localité 14], demeurant [Adresse 3]
représenté par Maître Vincent DUSART HAVET membre de la SCP SPEDER DUSART FIEVET, avocats au barreau de VALENCIENNES, avocats plaidant

DEFENDERESSE

Mme [M] [P] [K] veuve [T]
née le [Date naissance 6] 1940 à [Localité 15], demeurant [Adresse 2]
représentée par Maître Fabienne MENU membre de la SCP SCP D’AVOCATS ACTION CONSEILS, avocats au barreau de VALENCIENNES, avocats plaidant

* * *

Jugement contradictoire, les parties étant avisées que le jugement sera prononcé le 30 Novembre 2023 par mise à disposition au greffe prorogé au 16 Mai 2024, et en premier ressort par Madame Leïla GOUTAS, Première Vice-Présidente, assistée de Madame Anne Françoise BRASSART, Adjoint administratif faisant fonction de Greffier

Débats tenus à l'audience publique du 28 Septembre 2023 devant Madame Leïla GOUTAS, Première Vice-Présidente qui en a fait rapport et en a rendu compte au Tribunal en cours de délibéré, conformément aux dispositions des articles 785 et 786 du Code de Procédure Civile, les avocats ne s'y étant pas opposés, assistée de Madame Laure HASDENTEUFEL, Greffier.

Composition du Tribunal lors du délibéré

- Madame Leïla GOUTAS, Première Vice-Présidente,
- Madame Nathalie REGULA, Magistrat à titre temporaire.

* * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [V] [R], née le [Date naissance 8] 1936 à [Localité 11], est décédée le [Date naissance 7] 1991 à [Localité 13].

Elle a laissé pour lui succéder :
M. [N] [T], né le [Date naissance 5] 1933 à [Localité 15], son époux,M. [H] [T], né le [Date naissance 4] 1958 à [Localité 14], son fils.
Elle a fait donation à son époux, M. [N] [T], de l’usufruit sur la totalité de sa succession.

M. [N] [T] est décédé en date du [Date décès 9] 2018 à [Localité 14].

Il a laissé pour lui succéder :
M. [H] [T], son fils,Mme [M] [K], née le [Date naissance 6] 1940 à [Localité 15], son épouse depuis le 6 mai 2000.
Mme [M] [K] a opté pour un quart en pleine propriété de sa succession et l’usufruit sur le surplus.

Faute de partage amiable, par acte d’huissier en date du 1er octobre 2021, M. [H] [T] a fait assigner Mme [M] [K] devant le tribunal judiciaire de Valenciennes afin notamment d’obtenir l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de son père, M. [N] [T].

Par dernières écritures signifiées par RPVA en date du 11 avril 2023, M. [H] [T] sollicite sur le fondement des dispositions des articles 720 et suivants, 815 et suivants du code civil, 1359 et suivants du code de procédure civile, de :
Ordonner l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de M. [N] [T] et désigner Maître [S] [Z], membre de la SCP [Z] et Deldicque, notaires à Condé sur Escaut, aux fins de procéder auxdites opérations,Dire que le notaire commis devra évaluer l’indemnité d’occupation mensuelle due par Mme [M] [K] à l’indivision successorale et en chiffrer le montant pour la période d’occupation de cette dernière,Fixer les créances de restitution dues par la succession de M. [H] [T] aux sommes suivantes :- 22 388,84 euros au titre de la moitié des liquidités figurant sur les comptes bancaires des époux [T]-[R],
- 10 137,85 euros au titre du remboursement du prêt consenti par M. [T] et Mme [R] à leur fils [H],
- Réserver les dépens.

Au soutien de ses intérêts, M. [H] [T] expose que lors du décès de sa mère, son père a opté pour l’usufruit sur la totalité de sa succession de sorte qu’il a conservé les fonds et valeurs de la communauté ayant existé entre lui et sa mère, à charge de les rapporter à son décès, que son père a effectué plusieurs donations de son vivant à lui et à sa belle-mère, Mme [M] [K] et que faute d’accord sur un partage amiable, il a été contraint de saisir la présente juridiction. Il rappelle les éléments d’actif composant la communauté ayant existé entre ses parents soit un montant qu’il chiffre à la somme de 111 375,48 euros hors immeuble. Il estime que la succession de son père a une dette à son encontre constituée de la moitié des liquidités figurant sur les comptes bancaires de ses parents au décès de sa mère, soit une somme de 22 388,84 euros ainsi que du montant de la moitié du prêt que ses parents lui avaient consenti soit la somme de 10 137,85 euros. Il demande l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de son père. S’agissant de sa créance au titre de la moitié des liquidités figurant sur les comptes bancaires de ses parents, il souligne que sa belle-mère n’en conteste pas le principe mais la chiffre à une somme de 21 008,80 euros en ayant déduit le passif successoral mentionné dans la déclaration de succession établie en date du 6 novembre 1991, déduction qu’il conteste en invoquant une jurisprudence de la chambre civile de la cour de cassation en date du 4 novembre 2020. S’agissant de la créance de restitution au titre du remboursement du prêt consenti par ses parents, il estime qu’il importe peu que ce prêt n’ait pas été mentionné dans la déclaration de succession dans la mesure où cette dernière permet de régler les droits de succession et que le fait de la signer n’engage par l’héritier. Il souligne qu’aucun acte de partage n’a été dressé au décès de sa mère dans la mesure où son père a accueilli l’usufruit de la totalité des biens de sa succession et qu’il n’y avait pas lieu de procéder à un partage, acte mettant fin à l’indivision. Il estime rapporter la preuve du prêt consenti par ses parents en produisant la déclaration de contrat de prêt établi en date du 24 août 1990, le décompte des remboursements qu’il a opéré au bénéfice de son père avec les relevés de compte portant le débit des sommes ainsi que les attestations de la comptable de l’exploitation agricole démontrant la réalité du crédit-vendeur, et celle de son conseiller. Il considère que ces éléments sont des commencements de preuve qui permettent d’établir la réalité dudit prêt et justifie la créance de remboursement dont il est en droit de se prévaloir ayant remboursé ce prêt après le décès de sa mère, à hauteur de 10 137,85 euros. S’agissant de l’indemnité d’occupation, il souligne que depuis le décès de son père, il est devenu propriétaire de la moitié de l’immeuble en pleine propriété et nu-propriétaire de l’autre moitié et que Mme [M] [K] bénéficie d’un usufruit que sur une moitié de l’immeuble impliquant qu’elle lui est redevable d’une indemnité d’occupation à son encontre. Il rappelle qu’au décès de sa mère, il est devenu nu-propriétaire de la moitié de cet immeuble, son père bénéficiant de l’usufruit et qu’à son décès, il en a récupéré cet usufruit. Il souligne que si désormais sa belle-mère conteste le principe d’une indemnité d’occupation de cet immeuble, dans le cadre des démarches amiables de partage, elle ne faisait qu’en contester le montant.

Par dernières écritures signifiées par RPVA en date du 06 février 2023, auxquelles il est fait référence pour l’exposé et le détail de l’argumentation, Mme [M] [K] épouse [T] sollicite sur le fondement des dispositions des articles 815 et suivants, 864, 1341, 1347 et 1348 du code civil, et 1359 et suivants du code de procédure civile, de :
Ordonner l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de M. [N] [T],Commettre pour y procéder Maître [S] [Z], membre de la SCP [Z] et Deldicque, notaires à [Localité 11],Réduire à la somme de 21 008,80 euros la créance de restitution due par la succession de M. [N] [T] au titre du quasi-usufruit exercé sur les liquidités provenant de la communauté [T]-[R],Débouter M. [H] [T] du surplus de ses demandes,Dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.
Au soutien de ses intérêts, Mme [M] [K] expose avoir épousé M. [N] [T] en date du 6 mai 2000, sous le régime de la communauté réduite aux acquêts, que son époux lui a fait une donation en date du 10 novembre 2004 par acte notarié, pour le cas où elle lui survivrait et qu’il a également fait une donation à son fils, en date du 3 novembre 2005, de la nue-propriété de la moitié indivise de l’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 15] tout en lui réservant l’usufruit sur cet immeuble. Elle précise avoir opté s’agissant de la succession de son époux pour le quart en pleine propriété et les trois quarts en usufruit. Elle souligne être d’accord avec la demande d’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de son époux ainsi que la désignation de Me [S] [Z]. S’agissant de la créance de restitution au titre des liquidités figurant sur les comptes bancaires des époux [T]-[R], elle reconnaît le principe de cette créance mais en conteste l’évaluation. Elle rappelle que l’actif de communauté s’élevait bien à la somme de 293 722,39 francs, soit 44 777,69 euros mais que la communauté avait un passif de 18 105 francs, soit 2 760,09 euros qui doit être déduit, ce qui permet de chiffrer sa créance à la somme de 21 008,80 euros. Elle souligne que la jurisprudence invoquée ne s’applique pas en l’espèce et que la créance de restitution du quasi-usufruit, a porté que sur les liquidités restant après paiement du passif. S’agissant de la demande de créance de restitution au titre du remboursement d’un prétendu prêt, elle souligne que M. [H] [T] soutient avoir bénéficié d’un prêt de 330 000 francs de ses parents et produit à cette occasion un acte intitulé « déclaration de contrat de prêt » et soutient avoir remboursé ce prêt postérieurement au décès de sa mère alors que son père n’en avait que l’usufruit. Elle estime que cette demande ne saurait prospérer dans la mesure où elle en conteste l’existence. Elle rappelle les dispositions de l’article 864 du code civil, et que ce prêt aurait dû figuré dans l’actif commun de communauté et figuré dans la déclaration fiscale de succession établie en date du 6 novembre 1991 ce qui démontre que cet emprunt n’existait pas. Au surplus, elle souligne que le document cerfa 2062 produit pour étayer l’existence de ce prêt, ne comporte aucun cachet de l’administration fiscale mais une seule signature dont on ignore à qui elle appartient. Elle précise également n’avoir jamais entendu parler de l’existence de cet emprunt consenti du vivant de la première épouse de son conjoint et qui lui aurait été remboursé après son décès. Elle estime que cette demande supposerait que soient ouvertes les opérations de compte liquidation et partage de la communauté ayant existé entre ses parents et que cette créance de leur communauté ait été intégrée à l’actif commun et que M. [H] [T] ne formule pas une telle demande. Elle considère également que l’existence desdits virements de 7 000 francs au cours des années 1991 et 1992 ne sont pas suffisants pour se convaincre que ces derniers aient été effectués au bénéfice de son époux dans la mesure où ils sont intitulés « Mr ou Mme [T] », « virement [T] » ou « virement Mr ou Mme [T] [L] » et que seuls ceux intitulés « Mr [T] [N] » peuvent être reliés à son époux. Elle considère donc que son beau-fils est défaillant dans la charge de la preuve qui lui incombe ce dont il a parfaitement conscience en invoquant les règles dérogatoires en la matière. Elle met en exergue que ce dernier ne produit aucun contrat de prêt signé par ses parents et que s’agissant des deux attestions versées, Mme [A] atteste de l’établissement d’un contrat de prêt crédit vendeur sur lequel le solde dû pour la cession de l’exploitation était indiqué et M. [X] quant à lui explique qu’une convention de vente à crédit écrite a été établie entre les parties. Elle considère donc que si un tel écrit a été établi et que M. [H] [T] ne démontre pas l’avoir perdu par suite d’un cas fortuit ou par force majeure, il ne peut soutenir avoir été dans l’impossibilité matérielle ou morale de se procurer une preuve littérale de cet acte juridique et que le simple fait de l’existence d’un cadre familial est insuffisant à établir cette impossibilité étant précisé que ce prêt a été consenti dans un cadre professionnel. Elle considère au surplus qu’il ne produit aucun commencement de preuve pertinent et qu’il se doit au surplus d’expliquer le quantum de sa demande.
S’agissant de l’indemnité d’occupation, elle conteste en devoir une. Elle soutient que par donation établie en date du 3 novembre 2005, son époux a fait une avance d’hoirie à son fils de la nue-propriété de la moitié indivise de cet immeuble en se réservant l’usufruit de cet immeuble et en lui réservant l’usufruit jusqu’à son décès. Ainsi, elle conteste que la réversion d’usufruit à son bénéfice s’exerce uniquement sur la moitié de cet immeuble. Elle considère donc que dans la mesure où son beau-fils est nu-propriétaire de l’immeuble et qu’elle en est usufruitière, il n’existe aucune indivision entre eux et qu’elle ne doit ainsi pas d’indemnité d’occupation comme l’a rappelé à plusieurs reprises la Cour de cassation. Elle précise avoir dans un premier temps discuté le montant de cette indemnité qu’elle croyait devoir dans la mesure où elle n’est pas une professionnelle du droit et qu’elle n’était pas assistée, lors de ces discussions, de son conseil.

La clôture de l’instruction a été ordonnée le 8 juin 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1. Sur l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de succession :

Aux termes des dispositions de l'article 815 du code civil, nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu'il n'y ait été sursis par jugement ou convention.

Aux termes de l'article 1364 du code de procédure civile, le tribunal ordonne le partage, s'il peut avoir lieu. Lorsque le partage est ordonné, le tribunal peut désigner un notaire chargé de dresser l'acte constatant le partage.

En l'espèce, il ressort des pièces versées au débat par les parties que M. [N] [T] est décédé en laissant pour lui succéder son fils issu de son précédent mariage avec Mme [V] [R], M. [H] [T] et sa deuxième épouse, Mme [M] [K].

Ces derniers s’entendent pour ne pas rester dans l’indivision.

Par voie de conséquence, il conviendra donc d'ordonner l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de M. [N] [T], né le [Date naissance 5] 1933 à [Localité 15], et décédé en date du [Date décès 9] 2018 à [Localité 14].

2. Sur la désignation d’un notaire :

Aux termes de l’article 1364 du code de procédure civile, si la complexité des opérations le justifie, le tribunal désigne un notaire pour procéder aux opérations de partage et commet un juge pour surveiller ces opérations. Le notaire est choisi par les copartageants et, à défaut d’accord, par le tribunal.

En l’espèce, il ressort des pièces versées au débat que l'ancienneté de l'indivision participe à la complexité des opérations au sens de l’article 1364 du code de procédure civile.

Par ailleurs, les parties s’entendent sur la désignation de Me [S] [Z], membre de la SCP [Z] et Deldicque, notaires à [Localité 11].

Par voie de conséquence, il conviendra de désigner Me [S] [Z], membre de la SCP [Z] et Deldicque, notaires à [Localité 11], pour effectuer ladite mission reprise au dispositif.

3. Sur la créance de restitution au titre des liquidités figurant aux comptes des époux [T]-[R] :

Aux termes des dispositions de l’article 587 du code civil, si l’usufruit comprend des choses dont on ne peut faire usage, sans les consommer, comme l’argent, les grains, les liqueurs, l’usufruitier a le droit de s’en servir, mais à la charge de rendre, à la fin de l’usufruit, soit des choses de même quantité et qualité soit leur valeur estimée à la date de la restitution.

Par ailleurs, en vertu des dispositions de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi, les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l’espèce, il ressort des pièces versées au débat que Mme [V] [R], première épouse de M. [N] [T] est décédée en date du 28 mai 1991 à [Localité 13], en laissant pour lui succéder son époux et son fils, M. [H] [T] et qu’elle avait fait une donation à son conjoint de l’usufruit de tous les biens meubles et immeubles composant sa succession.

Il ressort de la déclaration fiscale de sa succession effectuée en date du 6 novembre 1991 que les actifs de communauté au moment de son décès étaient constitués :
Du compte de dépôt n°[XXXXXXXXXX010] ouvert auprès du [12] avec un solde de 18 647,78 francs, soit 2 842,84 euros,Du livret n°[XXXXXXXXXX01] avec un solde de 202,69 francs, soit 30,90 euros,Des parts sociales de la Caisse locale pour un montant de 570 francs, soit 86,90 euros,Du compte Codevi d’un solde de 10 214,42 francs, soit 1 557,18 euros,UNIVAR d’un montant de 76 665,60 francs, soit 11 687,50 euros,VARIUS d’un montant de 20 000 francs, soit 3 048,98 euros,CODEVI d’un montant de 10 421,90 francs, soit 1 588,81euros,PEP n°089 d’un montant de 157 000 francs, soit 23 934,50 eurosSoit une somme totale de 293 722,39 francs, soit 44 777,69 euros.

Il est indéniable que contrairement à ce que soutient M. [H] [T], le passif de communauté doit être déduit des liquidités figurant aux comptes de ses parents ainsi que le passif de succession de sa mère pour établir le montant de la créance due à ce titre.

Ainsi, il ressort de la déclaration fiscale de succession de Mme [V] [R] que la communauté avait un passif d’un montant de 18 105 francs, soit 2 760,09 euros et sa succession, un passif de 3 000 francs, soit 457,35 euros.

Par voie de conséquence, il conviendra donc de fixer la créance de M. [H] [T] à la succession de son père à la somme de 21 008,80 euros correspondant à la demande de Mme [M] [K].

4. Sur la créance de restitution au titre du prêt :

Au titre des dispositions de l’article 864 du code civil, lorsque la masse partageable comprend une créance à l’encontre de l’un des copartageants, exigible ou non, ce dernier en est alloti dans le partage à concurrence de ses droits dans la masse. A due concurrence, la dette s’éteint par confusion. Si son montant excède les droits du débiteur dans cette masse, il doit le paiement du solde sous les conditions et délais qui affectaient l’obligation.

De même, en vertu des dispositions de l’article 1341 du code civil, dans sa version applicable au présent litige, il doit être passé devant notaires ou sous signatures privées de toutes choses excédant une somme ou une valeur fixée par décret, même pour dépôts volontaires, et il n’est reçu aucune preuve par témoins contre et outre le contenu aux actes, ni sur ce qui serait allégué avoir été dit avant, lors ou depuis les actes, encore qu’il s’agisse d’une somme ou valeur moindre.

Par ailleurs, en vertu des dispositions de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l’espèce, force est de constater que M. [H] [T] soutient avoir obtenu de ses parents un prêt 330 000 francs, soit d’un montant de 50 308,18 euros.

Pour l’établir, il produit une déclaration de contrat de prêt, cerfa n°30-1506 précisant que ce prêt a été consenti par ses parents, M. et Mme [N] [T] en date du 17 janvier 1989 pour une durée de quatre ans. Ce document précise que ce prêt familial est sans intérêt avec des mensualités de 6 500 francs en 1989, et de 7 000 francs en 1990, 1991 et 1992 sauf problèmes de trésorerie.

S’il est exact que ce document ne mentionne aucun enregistrement de l’administration fiscale et que ce prêt aurait dû être repris dans la déclaration fiscale de succession de Mme [V] [R], la réalité des remboursements de ce prêt est justifiée tant par les deux attestations de la comptable de l’exploitation du couple [T] qui deviendra celle de leur fils [H], que par le conseiller de gestion à l’AGERN qui l’a aidé à s’installer en reprenant l’exploitation agricole de ses parents, que par les relevés de compte de M. [H] [T] et ce, au montant repris dans la déclaration de contrat de prêt.

Par ailleurs, les relevés de comptes de M. [H] [T] justifient les remboursements des mensualités de 7 000 francs suivants, à savoir, les 31 mai 1991, 27 juin 1991, 30 juillet 1991, 3 septembre 1991, 2 octobre 1991, 5 novembre 1991, 3 décembre 1991, 2 janvier 1992, 31 janvier 1992, 29 février 1992, 6 avril 1992, 30 avril 1992, 26 mai 1992, 4 août 1992, 2 septembre 1992, 28 septembre 1992, 5 novembre 1992 et 3 décembre 1992, soit 18 échéances de 7 000 francs, soit une somme totale de 126 000 francs.

Par voie de conséquence, compte-tenu de sa qualité d’héritier de sa mère, il conviendra donc de fixer la créance de M. [H] [T] au titre du remboursement dudit prêt à la somme de 9 604,29 euros ( 126 000 francs /2).

5. Sur l’indemnité d’occupation de l’immeuble :
Aux termes des dispositions de l’article 617 du code civil, l’usufruit s’éteint par la mort de l’usufruitier, par l’expiration du temps pour lequel il a été accordé, par la consolidation ou la réunion sur la même tête, des deux qualités d’usufruitier er de propriétaire, par le non-usage du droit pendant trente ans, par la perte totale de la chose sur laquelle l’usufruit est établi.

De même, en vertu des dispositions de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi, les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l’espèce, comme il l’a été vu précédemment, M. [N] [T] a bénéficié au décès de sa première épouse, Mme [V] [R], de l’usufruit sur la totalité des biens mobiliers et immobiliers de sa succession.

Or, comme il ressort de la déclaration fiscale de sa succession établie en date du 6 novembre 1991, il dépendait notamment de la communauté ayant existé entre le couple [T] et [R], un immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 15].

Ainsi, au décès de son épouse, M. [N] [T] est devenu propriétaire de la moitié de cet immeuble et usufruitier de l’autre moitié tandis que son fils, M. [H] [T] est devenu nu-propriétaire de la moitié de cet immeuble.

Par donation en date du 3 novembre 2005, M. [N] [T] a fait une donation entre vifs à son fils [H] de la nue-propriété indivise de cet immeuble en s’en réservant l’usufruit et en donnant cet usufruit à son épouse, Mme [M] [K] à son décès.

Or, l’usufruit dont M. [N] [T] bénéficiait sur la moitié de cet immeuble suite au décès de son épouse a pris fin à son propre décès de sorte que son fils est devenu à sa mort, propriétaire de la moitié de cet immeuble et nu-propriétaire de l’autre moitié, tandis que Mme [M] [K] veuve [T] disposait quant à elle, de l’usufruit sur la moitié de cet immeuble.

Ainsi, M. [H] [T] étant notamment propriétaire de la moitié de l’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 15] a droit à une indemnité d’occupation.

Par voie de conséquence, il conviendra donc de dire qu’en sa qualité de propriétaire de la moitié de l’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 15], M. [H] [T] a droit à une indemnité d’occupation mensuelle qui sera fixée par le notaire.

6. Sur les dépens :

Compte-tenu de la nature du litige, les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.

7. Sur l'exécution provisoire :

En application de l'article 515 du code de procédure civile, compte-tenu de la nature de l'affaire et de l'ancienneté du litige, l'exécution provisoire de la présente décision sera ordonnée.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par mise à disposition de la décision au greffe le 30 Novembre 2023, comme cela a été indiqué à l'audience de plaidoirie, puis prorogé au 16 Mai 2024, par jugement contradictoire et en premier ressort :

ORDONNE l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de M. [N] [T], né le [Date naissance 5] 1933 à [Localité 15] (Nord), et décédé en date du [Date décès 9] 2018 à [Localité 14] (Nord),

COMMET à cette fin Maître [S] [Z], membre de la SCP [Z] et Deldicque, notaires à [Localité 11] (Nord), pour procéder aux opérations de compte, de liquidation et partage de la succession de M. [N] [T],

DIT qu’en cas d’empêchement du juge ou notaire commis, il sera procédé à son remplacement par simple ordonnance du Président du tribunal judiciaire à la requête de la partie la plus diligente,

COMMET le juge commissaire de la première chambre civile de ce tribunal pour faire rapport en cas de contestations en application des articles 1364 et suivants du code de procédure civile,

INVITE le notaire à informer le juge commis de toute difficulté et, dans le délai de six mois à compter de ce jugement, de l’avancement des opérations,

RENVOIE les parties devant le notaire commis, afin de faire un état complet des éléments d'actif de ladite indivision en tenant compte à la fois des fruits qui auraient pu être perçus par l’un des indivisaires, mais aussi des dépenses engagées par l’un d’eux et justifiées, et des éventuelles dégradations du fait ou de la faute de l’un des indivisaires, régler le passif qui subsisterait, procéder aux comptes entre les parties, de dresser un projet d’état liquidatif, de réunir les parties afin de leur donner connaissance, et de recueillir leur accord dans un acte de partage, ou à défaut, de dresser un procès-verbal de difficultés et/ou de carence qui relatera leurs contestations et prétentions,

FIXE la créance de M. [H] [T] au titre de restitution au titre des liquidités à la somme de 21 008, 80 euros dans la succession de M. [N] [T],

FIXE la créance de M. [H] [T] au titre du prêt à la somme de 9 604, 29 euros dans la succession de M. [N] [T],

DIT que Mme [M] [K] veuve [T] sera redevable d’une indemnité d’occupation mensuelle sur l’immeuble [Adresse 2] à [Localité 15] (Nord) , qui sera évaluée par le notaire,

DIT que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage,

ORDONNE le retrait du rôle,

ORDONNE l'exécution provisoire du présent jugement.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Valenciennes
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 21/02937
Date de la décision : 16/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-16;21.02937 ?
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