RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE de SAINT ETIENNE
CONTENTIEUX GÉNÉRAL ET TECHNIQUE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE ET CONTENTIEUX DE L’ADMISSION A L’AIDE SOCIALE
(spécialement désigné en application de l’article L. 211-16 du code de l’organisation judiciaire)
N° RG 23/00049 - N° Portalis DBYQ-W-B7H-HWKU
Dispensé des formalités de timbre d’enregistrement
(Art. L. 124-1 du code de la sécurité sociale)
JUGEMENT DU 28 juin 2024
N° minute :
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Lors des débats et du délibéré :
Présidente : Madame Fabienne COGNAT-BOURREE
Assesseur employeur : Monsieur Pierre CHAUMIER
Assesseur salarié : Monsieur Ahmed BARGACH
assistés, pendant les débats de Madame Camille GRAND, greffière ;
DEBATS : à l'audience publique du 22 mai 2024
ENTRE :
Monsieur [J] [U]
demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Sophie MATHIEU, avocate au barreau de SAINT-ETIENNE
ET :
Le DEPARTEMENT DE LA LOIRE
dont l’adresse est sis [Adresse 3]
non comparant
Affaire mise en délibéré au 28 juin 2024.
EXPOSE DU LITIGE
Par requête du 24 janvier 2023, Monsieur [J] [U] a saisi le tribunal judiciaire de Saint-Etienne afin d'être dispensé de droit de fournir toute aide à Monsieur [R] [U] au titre de la participation laissée à la charge des débiteurs d'aliment et mis à sa charge par le département de la Loire par décision du 16 août 2022 confirmée suite au recours du débiteur d'aliments par le président du département de la Loire.
Le requérant conteste la décision du département de la Loire lui imposant une participation en sa qualité d'obligé alimentaire de son père [R] [U] au titre des frais d'hébergement au sein de l'EHPAD DU PAYS DE [Localité 2], estimant que ce dernier a gravement manqué à ses obligations légales envers l'ensemble de la fratrie (quatre enfants dont le requérant) expliquant avoir été placé en foyer dès l'âge de 9 ans sur décision judiciaire.
Les parties ayant été régulièrement convoquées, l'affaire a été examinée à l'audience du 22 mai 2024.
Le requérant demande au tribunal d'annuler la décision du département de la Loire le considérant comme débiteur d'aliments de son père et lui réclamant en cette qualité une participation à hauteur de 166 euros. Il explique qu'il a été placé en foyer de l'âge de 09 ans jusqu'à celui de 20 ans en raison de malnutrition, de parents violents incapables de gérer leurs enfants. Il fait valoir qu'il n'a jamais plus eu de contact avec ses parents depuis son mariage en 2011 et qu'ils n'ont exercé que de manière très épisodique les droits de visite octroyés par le juge des enfants.
Le département de la Loire qui n'a pas conclu, est absent et non représenté.
Les parties ont été informées que la décision était mise en délibéré au 28 juin 2024 par mise à disposition au greffe.
MOTIFS
Sur la demande principale
L'article 205 du code civil dispose que les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin.
L'article 207 du même code dispose que les obligations résultant de ces dispositions sont réciproques. Néanmoins, quand le créancier aura lui-même manqué gravement à ses obligations envers le débiteur, le juge pourra décharger celui-ci de tout ou partie de la dette alimentaire.
L'article 208 du même code prévoyant alors que les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame, et de la fortune de celui qui les doit.
L'article L.132-6 du code de l'action sociale et des familles dispose que les personnes tenues à l'obligation alimentaire instituée par les articles 205 et suivants du code civil sont, à l'occasion de toute demande d'aide sociale, invitées à indiquer l'aide qu'elles peuvent allouer aux postulants et à apporter, le cas échéant, la preuve de leur impossibilité de couvrir la totalité des frais.
Les enfants qui ont été retirés de leur milieu familial par décision judiciaire durant une période d'au moins trente-six mois cumulés au cours des douze premières années de leur vie sont, sous réserve d'une décision contraire du juge aux affaires familiales, dispensés de droit de fournir cette aide.
Cette dispense s'étend aux descendants des enfants susvisés.
La proportion de l'aide consentie par les collectivités publiques est fixée en tenant compte du montant de la participation éventuelle des personnes restant tenues à l'obligation alimentaire. La décision peut être révisée sur production par le bénéficiaire de l'aide sociale d'une décision judiciaire rejetant sa demande d'aliments ou limitant l'obligation alimentaire à une somme inférieure à celle qui avait été envisagée par l'organisme d'admission. La décision fait également l'objet d'une révision lorsque les débiteurs d'aliments ont été condamnés à verser des arrérages supérieurs à ceux qu'elle avait prévus.
Au cas d'espèce, Monsieur [J] [U] justifie :
- D'un courrier du président du Conseil Départemental de la Loire du 29 octobre 2021 attestant que le requérant a été pris en charge par le département sur ordonnance du tribunal pour enfant de Roanne, d'un second courrier du 06 janvier 2023 attestant que le requérant né le 10 août 1979 a été pris en charge par le département de la Loire du 25 janvier 1990 au 1er septembre 1999, par ordonnance du tribunal pour enfant de Roanne,
- L'existence d'un dossier d'assistance éducative et d'un dossier de tutelles aux prestations sociales a été confirmée par les services du greffe ainsi que le versement de ces dossiers aux archives départementales le 7 juillet 2020 sous les références 3424W,
- Un article de presse mentionnant l'incendie du Palais de justice de Roanne détruisant les archives rendant impossible la production du dossier assistance éducative du requérant,
Le département de la Loire établit la part contributive de Monsieur [U] à la somme de 166 euros.
Cependant, en considération de l'ensemble de ces éléments il convient de faire application des dispositions légales sus visées Monsieur [J] [U] justifiant d'un placement dès l'âge de neuf ans et durant une période d'au moins 36 mois cumulés.
Aussi, Monsieur [J] [U] sera dispensé de participer en fonction de ses facultés contributives aux frais d'hébergement de son père [R] [U].
Compte tenu de la nature du litige et de l'équité, chaque partie conservera la charge de ses dépens.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal judiciaire de Saint-Etienne, spécialement désigné en application de l’article L. 211-16 du code de l’organisation judiciaire, statuant en audience publique, après avoir délibéré conformément à la loi, par décision réputée contradictoire et en premier ressort, mise à disposition au greffe :
CONFIRME la décision du département de la Loire du 16 août 2022 en ce qu'elle désigne Monsieur [J] [U] comme débiteur d'aliments de son père [R] [U] ;
DISPENSE Monsieur [J] [U] du versement de sa part contributive et ce en application de l'article 132-6 du code de l'action sociale et des familles ;
DEBOUTE les parties du surplus de leur demande ;
DIT que chaque partie conservera la charge de ses dépens.
RAPPELLE que les parties peuvent interjeter appel dans le délai d’un mois à compter de la notification de la présente décision, par une déclaration datée et signée que la partie ou tout mandataire fait ou adresse par pli recommandé au greffe de la cour d'appel de Lyon ; que la déclaration doit être accompagnée de la copie de la décision et mentionner, pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de l'appelant et, pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l'organe qui les représente légalement ainsi que les nom et domicile de la personne contre laquelle l'appel est dirigé ou, s'il s'agit d'une personne morale, sa dénomination et son siège social, les pièces sur lesquelles l'appel est fondé et, le cas échéant, le nom et l'adresse du représentant de l'appelant devant la cour.
Le présent jugement a été signé par Madame Fabienne COGNAT-BOURREE, présidente, et par Madame Camille GRAND, greffière présente lors du prononcé.
LA GREFFIERE : LA PRESIDENTE :
Madame Camille GRAND Madame Fabienne COGNAT-BOURREE
Copie certifiée conforme délivrée à :
Me Sophie MATHIEU
Monsieur [J] [U]
Etablissement public DEPARTEMENT DE LA LOIRE
Le