TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE RENNES
Service des contentieux de la protection
[Adresse 2]
[Localité 1]
JUGEMENT DU 09 Août 2024
N° RG 23/08940 - N° Portalis DBYC-W-B7H-KWN3
Jugement du 09 Août 2024
N° : 24/481
S.A. HLM LES FOYERS
C/
[N] [E]
EXÉCUTOIRE DÉLIVRÉ
LE
à Maître GARNIER
Au nom du Peuple Français ;
Rendu par mise à disposition le 09 Août 2024 ;
Par Manon LIPIANSKY, Vice-Président au Tribunal judiciaire de RENNES statuant en qualité de juge des contentieux de la protection, assistée de Annie SIMON, lors des débats et de Géraldine LE GARNEC, Greffier, lors du délibéré ;
Audience des débats : 17 Mai 2024.
Le juge à l'issue des débats a avisé les parties présentes ou représentées, que la décision serait rendue le 09 Août 2024, conformément aux dispositions de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
ENTRE :
DEMANDEUR
S.A. HLM LES FOYERS
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 1]
représentée par Me Charlotte GARNIER, avocat au barreau de RENNES substitué par Me Clémence LAPORTE, avocat au barreau de RENNES
ET :
DEFENDEUR :
M. [N] [E]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 5]
non comparant, ni représenté
I.- EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Par acte sous seing privé en date du 30 novembre 2017, la société S.A. HLM LES FOYERS consentait un bail d’habitation à M. [N] [E] sur des locaux situés [Adresse 4] ([Adresse 4]) à [Localité 5], moyennant le paiement d’un loyer mensuel de 431,03 € (euros).
Par acte de commissaire de justice en date du 28 juillet 2023, la S.A. HLM LES FOYERS délivrait au locataire un commandement de payer la somme principale de 1.980,34 € correspondant à l'arriéré locatif, visant la clause résolutoire prévue dans le contrat.
Ultérieurement, par courrier électronique reçu, le 02 août 2023, la bailleresse signalait à la CCAPEX (Commission de Coordination des Actions de Prévention des Expulsions Locatives) d’ILLE-ET-VILAINE la situation d’impayé d’[N] [E].
Par assignation en date du 24 novembre 2023, la S.A. HLM LES FOYERS saisissait le Juge des Contentieux de la Protection du tribunal judiciaire de Rennes aux fins de :
- Constater la résiliation du bail par effet de la clause résolutoire ;
- Ordonner l’expulsion immédiate, avec suppression des délais légaux, d’[N] [E] ;
- Condamner [N] [E] au paiement des sommes suivantes :
Une indemnité mensuelle d’occupation d’un montant égal à celui du loyer et des charges, à compter de la résiliation du bail et jusqu’à libération des lieux ;
2748,82 € d’arriéré locatif, arrêté au mois d’août 2023, avec intérêts au taux légal à compter du commandement de payer ;
800 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Le 27 novembre 2023, l’assignation était notifiée au Préfet d’ILLE-ET-VILAINE, représentant de l’État dans le département. Aucune enquête sociale ne parvenait au greffe avant l’audience.
II.- PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
À l'audience du 17 mai 2024, la S.A. HLM LES FOYERS modifiait les demandes de son assignation. Elle maintenait sa demande de constat de la résiliation. Elle réévaluait la dette à la somme de 2.364,06 € et le montant du loyer mensuel au jour de l’audience à 576,41 €. Cependant, la bailleresse acceptait d’accorder au locataire des délais de paiement pour apurer le passif locatif et de suspendre les effets de la clause résolutoire pendant la durée du plan de remboursement. A l’appui de ses prétentions, elle relevait la mobilisation du défendeur.
Bien que régulièrement cité par acte délivré à domicile, [N] [E] ne comparaissait pas, ni ne se faisait représenter. La présente décision, susceptible d’appel, sera donc réputée contradictoire.
Il sera renvoyé à l’assignation de la demanderesse pour un plus ample exposé des moyens.
À l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré jusqu’à ce jour, où elle a été mise à disposition des parties au greffe.
III.- MOTIVATION
1. Sur la demande de constat de la résiliation du bail :
1.1. Sur la recevabilité de la demande :
Le commandement de payer a été délivré, le 28 juillet 2023 et la CCAPEX saisie, le 02 août 2023, soit, l’un et l’autre, plus de deux mois avant l’assignation.
L’assignation a été signifiée, le 24 novembre 2023, et une copie transmise à la préfecture d’ILLE-ET-VILAINE qui en a accusé réception, le 27 novembre 2023, soit plus de deux mois avant l’audience au fond.
L’action du demandeur – de la demanderesse est donc recevable conformément aux dispositions de l’article 24 de la Loi du 06 juillet 1989.
1.2. Sur le bien-fondé la résiliation du bail :
Aux termes de l’article 24 de la Loi du 06 juillet 1989 dans sa version en vigueur à la date de conclusion du contrat de bail litigieux : « I.- Toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux [...] ».
En l’espèce, le contrat du 30 novembre 2017 contient une clause résolutoire, reproduite dans le commandement de payer, notifié le 28 juillet 2023, au locataire, pour un montant de 1.980,34 €. Or, vu l’historique des versements, la dette de loyer n’a pas été réglée dans le délai de deux mois suivant la signification du commandement de payer et aucun plan d’apurement du passif n’a été conclu.
Dès lors, il y a lieu de constater l’acquisition de la clause résolutoire et, en conséquence, la résiliation de plein droit du contrat de bail au 29 septembre 2023.
1.3. Sur la suspension de la clause résolutoire et les délais de paiement :
Aux termes de l’article 24 de la Loi du 06/07/1989 : « [...] V.- Le juge peut, à la demande du locataire, du bailleur ou d'office, à la condition que le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu'il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l'article 1343-5 du Code Civil, au locataire en situation de régler sa dette locative [...] ».
En l’espèce, la demanderesse a formulé son accord à l’audience pour accorder des délais de paiement au locataire et suspendre les effets de la clause résolutoire.
Compte tenu de la reprise du versement du loyer par le locataire et du positionnement de la bailleresse à l’audience, il y a lieu d’accorder à [N] [E] des délais pour rembourser l’arriéré locatif et de suspendre les effets de la clause résolutoire sous réserve de respecter le plan d’apurement précisé ci-après.
Ainsi, les mensualités fixées en fonctions des revenus et charges des parties et du montant de la dette peuvent, en l’état, être évaluées à une somme de 50 €, à régler en plus du loyer courant.
En cas de respect de ces modalités de paiement, la clause résolutoire sera donc réputée n’avoir pas joué, et l’exécution du contrat de bail pourra se poursuivre.
L’attention du locataire est toutefois attirée sur le fait qu’à défaut de paiement d’une seule échéance comprenant le loyer et la mensualité d’apurement, la clause résolutoire sera acquise, et le bail résilié de plein droit, sans qu’une nouvelle décision de justice ne soit nécessaire. Dans ce cas, et pour le cas où les lieux ne seraient pas libérés spontanément, la bailleresse pourra faire procéder à son expulsion, et à celle de tout occupant de son chef.
En outre, il convient de rappeler que l'expulsion ne pourrait avoir lieu qu'à l'expiration d'un délai de deux mois suivant la délivrance d'un commandement de quitter les lieux.
2. Sur la demande de condamnation au paiement de l’arriéré locatif :
2.1. Sur la dette locative :
Aux termes de l’article 7 de la Loi du 06 juillet 1989 : « Le locataire est obligé : a) De payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus [...] ».
Aux termes de l’article 1103 du Code civil : « Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ».
Aux termes de l’article de l’article 1353 du Code civil : « Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ».
En l’espèce, la requérante évalue la dette locative au jour de l’audience à 2.364,06. Le décompte arrêté en avril 2024 permet de valider ce montant, soustraction faite des frais de procédure. Malgré la carence d’[N] [E] à l’audience, ce montant de la dette révisé à la baisse par la bailleresse, est plus favorable aux intérêts du défendeur absent et sera donc retenu.
[N] [E] sera donc condamné au paiement de cette somme de 2.364,06 € (loyers, charges et éventuelles indemnités d’occupation au 30 avril 2024) avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision.
Néanmoins, eu égard à la suspension des effets de la clause résolutoire précédemment évoquée, il convient de différer l'exigibilité de cette dette selon les modalités qui seront rappelées au dispositif. En l’état, le plan d’apurement du passif comprendra 36 mensualités fixées à la somme de 50 €, à régler en plus du loyer courant.
Le droit à intérêt pourra être suspendu pendant l’exécution du plan.
2.2. Sur l’indemnité d’occupation pour non-respect du plan d’apurement du passif :
En cas de maintien dans les lieux du locataire ou de toute personne de son chef malgré la résiliation du bail, [N] [E] serait également condamné au paiement d’une indemnité mensuelle d’occupation d’un montant équivalent à celui du loyer et des charges, jusqu’à libération effective et définitive des lieux avec remise des clés.
En cas de contestation, cette indemnité sera fixée à 576,41 € par mois et sera comptabilisée à compter du 01 mai 2024, étant, en partie, déjà comprise dans l’arriéré locatif précité.
3. Sur les demandes accessoires :
Succombant à la cause, [N] [E] sera condamné aux dépens.
En revanche, l’équité commande de laisser à la charge des parties les frais engagés non compris dans les dépens.
En vertu de l’article 514 du Code de procédure civile, l’exécution provisoire est de plein droit.
*
PAR CES MOTIFS,
La juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par jugement mis à disposition au greffe, réputé contradictoire et en premier ressort,
CONSTATE que la dette locative visée dans le commandement de payer du 28 juillet 2023 n’a pas été réglée dans le délai de deux mois ;
CONSTATE, en conséquence, que le contrat conclu, le 30 novembre 2017, entre la société S.A. HLM LES FOYERS, d’une part, et M. [N] [E], d’autre part, sur des locaux situés [Adresse 4] ([Adresse 4]) à [Localité 5] est résilié depuis le 29 septembre 2023 ;
CONDAMNE M. [N] [E] à payer à la société S.A. HLM LES FOYERS la somme de 2.364,06 € (deux mille trois cent soixante-quatre euros et six centimes) d’arriéré locatif arrêté au 30 avril 2024 (créance qui comprend les loyers et charges impayés à la date de résiliation du bail et les indemnités d’occupation à compter de la date de résiliation jusqu’au jour de l’audience), et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision ;
AUTORISE M. [N] [E] à se libérer de sa dette en réglant chaque mois pendant 36 mois, en plus du loyer courant, une somme minimale de 50 € (cinquante euros), la dernière échéance étant majorée du solde de la dette en principal, intérêts et frais ;
DIT que le premier règlement devra intervenir dans les dix jours suivant la signification de la présente décision, puis, pour les paiements suivants, en même temps que le loyer, au plus tard le dixième jour de chaque mois, sauf meilleur accord entre les parties ;
DIT que le droit à intérêt pourra être suspendu pendant la durée du plan ;
SUSPEND les effets de la clause résolutoire pendant l’exécution des délais de paiement accordés à M. [N] [E] ;
DIT que si les délais accordés sont entièrement respectés, la clause résolutoire sera réputée n’avoir jamais été acquise ;
DIT qu’en revanche, pour le cas où une mensualité, qu'elle soit due au titre du loyer et des charges courants ou de l’arriéré, resterait impayée quinze jours après l’envoi d'une mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception :
• le bail sera considéré comme résilié de plein droit depuis le 29 septembre 2023 ;
• le solde de la dette deviendra immédiatement exigible ;
• la bailleresse pourra, à défaut de libération spontanée des lieux et dès l’expiration d’un délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux, faire procéder à l’expulsion de M. [N] [E] et à celle de tous occupants de son chef, au besoin avec l’assistance de la force publique ;
• le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du Code des procédures civiles d'exécution ;
• M. [N] [E] sera condamné à verser à la société S.A. HLM LES FOYERS une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus en cas de poursuite du bail, et ce, jusqu’à la date de libération effective et définitive des lieux et, en cas de difficultés ou de contestation, FIXE cette indemnité à 576,41 € (cinq cent soixante-seize euros et quarante et un centimes) par mois ;
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;
RAPPELLE l’exécution provisoire de droit de la présente décision ;
DÉBOUTE la société S.A. HLM LES FOYERS de sa demande sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [N] [E] aux dépens comprenant, notamment, le coût du commandement de payer du 28 juillet 2023 et de l'assignation du 24 novembre 2023 ;
Ainsi jugé par mise à disposition au greffe, le 09 août 2024, et signé par la juge et la greffière susnommées.
La Greffière, La Juge,