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05/07/2024 | FRANCE | N°22/00771

France | France, Tribunal judiciaire de Rennes, Ctx protection sociale, 05 juillet 2024, 22/00771


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RENNES
PÔLE SOCIAL


MINUTE N°

AUDIENCE DU 05 Juillet 2024

AFFAIRE N° RG 22/00771 - N° Portalis DBYC-W-B7G-J5XI

88M

JUGEMENT



AFFAIRE :

[C] [W] épouse [Y]

C/

MAISON DEPARTEMENTALE DES PERSONNES HANDICAPEES D’ILLE ET VILAINE






Pièces délivrées :

CCCFE le :






CCC le :


PARTIE DEMANDERESSE :

Madame [C] [W] épouse [Y]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Gaëlle PENEAU-MELLET, avocat au barreau de R

ENNES, substitué à l’audience par Me Youssef MAZROUI, avocat au barreau de RENNES

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/006883 du 02/12/2022 accordée par le bureau d’aide juridict...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RENNES
PÔLE SOCIAL

MINUTE N°

AUDIENCE DU 05 Juillet 2024

AFFAIRE N° RG 22/00771 - N° Portalis DBYC-W-B7G-J5XI

88M

JUGEMENT

AFFAIRE :

[C] [W] épouse [Y]

C/

MAISON DEPARTEMENTALE DES PERSONNES HANDICAPEES D’ILLE ET VILAINE

Pièces délivrées :

CCCFE le :

CCC le :

PARTIE DEMANDERESSE :

Madame [C] [W] épouse [Y]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Gaëlle PENEAU-MELLET, avocat au barreau de RENNES, substitué à l’audience par Me Youssef MAZROUI, avocat au barreau de RENNES

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/006883 du 02/12/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de RENNES)

PARTIE DEFENDERESSE :

MAISON DEPARTEMENTALE DES PERSONNES HANDICAPEES D’ILLE ET VILAINE
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Mme [N] [D], suivant pouvoir

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Madame Magalie LE BIHAN,
Assesseur : Claude GUYON, Assesseur du pôle social du TJ de Rennes
Assesseur : Madame Clotilde GALOGER, Assesseur du pôle social du TJ de RENNES
Greffier : Madame Rozenn LE CHAMPION,
Greffier : Madame Rozenn LE CHAMPION, lors des débats et Caroline LAOUENAN, lors du délibéré

DEBATS :

Après avoir entendu les parties en leurs explications à l’audience du 09 Février 2024, l'affaire a été mise en délibéré pour être rendu le 24 mai 2024, puis prorogé au 5 juillet 2024 par mise à disposition au greffe.

JUGEMENT : contradictoire et en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE :
Suivant formulaire transmis le 4/08/2020, Mme [C] [W] épouse [Y] a formé auprès de la maison départementale des personnes handicapées d’Ille-et-Vilaine (ci-après MDPH) une demande aux fins de solliciter le bénéfice de l’allocation aux adultes handicapés, du complément de ressources, de la carte mobilité inclusion mention « invalidité » et « stationnement ».
Suivant notification du 29/11/2021, la MDPH lui a accordé un plan personnalisé de compensation comprenant l’attribution d’une carte mobilité inclusion mention « priorité », la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, une orientation professionnelle vers le marché du travail et a rejeté les demandes portant sur l’AAH, le complément de ressources, la CMI mention « stationnement ».
Le 04/05/2022, Mme [Y] a formé un recours administratif contre cette décision.
Suivant notification du 6/07/2022, la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) a informé cette dernière du rejet de sa demande par décision du 05/07/2022.
Suivant requête déposée au greffe le 10/08/2022, Mme [Y] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire d’un recours à l’égard de cette décision.
Suivant ordonnance du 20/01/2023, une consultation médicale sur la personne de Mme [Y] a été ordonnée et confiée au Docteur [X] [O].
L’examen a été réalisé le 28/04/2023 et le rapport transmis au greffe ainsi qu’à l’ensemble des parties.
L’affaire a été appelée à l’audience du 9/02/2024 après plusieurs renvois ordonnés à la demande des parties.
A cette audience, se fondant sur les termes de sa requête, à laquelle son conseil s’est expressément rapporté, Mme [Y] demande au pôle social de :
-retenir un taux d’incapacité égal ou supérieur à 80%,
-retenir l’existence d’une restriction substantielle et durable à l’emploi.
En réplique et suivant conclusions écrites visées par le greffe le 20/09/2022, auxquelles son représentant s’est expressément référé, la MDPH d’Ille et Vilaine demande quant à elle de :
-rejeter toutes les demandes de Mme [Y],
-confirmer qu’elle relève d’un taux d’incapacité permanente supérieur ou égal à 50% mais strictement inférieur à 80%,
-confirmer que Mme [Y] ne subit pas de restriction substantielle et durable d’accès à l’emploi,
-confirmer la décision de la CDAPH en date du 5/07/2022 en ce qu’elle refuse le bénéfice de l’AAH à Mme [Y],
-rejeter toute demande de condamnation financière de la MDPH.
A l'issue des débats, la décision a été mise en délibéré au 24/05/2024, puis prorogée au 5/07/2024, et rendue à cette date par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.
MOTIFS :
En application des articles L. 821-1, L. 821-2 et D. 821-1 du code de la sécurité sociale, pour prétendre à l'AAH, il est nécessaire de présenter à la date de la demande :
- soit un taux d'incapacité supérieur ou égal à 80 %,
- soit un taux d'incapacité compris de 50 à 79 % et de justifier, du fait de son handicap, d'une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi.
Aux termes de l'article D. 821-1-2 du même code "Pour l'application des dispositions du 2° de l'article L. 821-2, la restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi subie par une personne handicapée qui demande à bénéficier de l'allocation aux adultes handicapés est appréciée ainsi qu'il suit :
1° La restriction est substantielle lorsque le demandeur rencontre, du fait de son handicap même, des difficultés importantes d'accès à l'emploi. A cet effet, sont à prendre en considération :
a) Les déficiences à l'origine du handicap ;
b) Les limitations d'activités résultant directement de ces mêmes déficiences ;
c) Les contraintes liées aux traitements et prises en charge thérapeutiques induits par le handicap ;
d) Les troubles qui peuvent aggraver ces déficiences et ces limitations d'activités.
Pour apprécier si les difficultés importantes d'accès à l'emploi sont liées au handicap, elles sont comparées à la situation d'une personne sans handicap qui présente par ailleurs les mêmes caractéristiques en matière d'accès à l'emploi.
2° La restriction pour l'accès à l'emploi est dépourvue d'un caractère substantiel lorsqu'elle peut être surmontée par le demandeur au regard :
a) Soit des réponses apportées aux besoins de compensation mentionnés à l'article L. 114-1-1 du code de l'action sociale et des familles qui permettent de faciliter l'accès à l'emploi sans constituer des charges disproportionnées pour la personne handicapée ;
b) Soit des réponses susceptibles d'être apportées aux besoins d'aménagement du poste de travail de la personne handicapée par tout employeur au titre des obligations d'emploi des handicapés sans constituer pour lui des charges disproportionnées ;
c) Soit des potentialités d'adaptation dans le cadre d'une situation de travail.

3° La restriction est durable dès lors qu'elle est d'une durée prévisible d'au moins un an à compter du dépôt de la demande d'allocation aux adultes handicapés, même si la situation médicale du demandeur n'est pas stabilisée. La restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi est reconnue pour une durée de un à cinq ans.
4° Pour l'application du présent article, l'emploi auquel la personne handicapée pourrait accéder s'entend d'une activité professionnelle lui conférant les avantages reconnus aux travailleurs par la législation du travail et de la sécurité sociale.
5° Sont compatibles avec la reconnaissance d'une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi :
a) L'activité à caractère professionnel exercée en milieu protégé par un demandeur admis au bénéfice de la rémunération garantie mentionnée à l'article L. 243-4 du code de l'action sociale et des familles ;
b) L'activité professionnelle en milieu ordinaire de travail pour une durée de travail inférieure à un mi-temps, dès lors que cette limitation du temps de travail résulte exclusivement des effets du handicap du demandeur;
c) Le suivi d'une formation professionnelle spécifique ou de droit commun, y compris rémunérée, résultant ou non d'une décision d'orientation prise par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées mentionnée à l'article L. 241-5 du code de l'action sociale et des familles."
Enfin, le guide barème pour l'évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées figurant en annexe 2-4 du code de l’action sociale et des familles indique des fourchettes de taux d'incapacité, identifiant suivant les chapitres, trois à cinq degrés de sévérité (en général 4) :
- forme légère : taux de 1 à 15 % ;
- forme modérée : taux de 20 à 45 % ;
- forme importante : taux de 50 à 75 % ;
- forme sévère ou majeure : taux de 80 à 95 %.
Un taux de 50 % correspond à des troubles importants entraînant une gêne notable dans la vie sociale de la personne. L'entrave peut soit être concrètement repérée dans la vie de la personne, soit compensée afin que cette vie sociale soit préservée, mais au prix d'efforts importants ou de la mobilisation d'une compensation spécifique. Toutefois, l'autonomie est conservée pour les actes élémentaires de la vie quotidienne.
Un taux d'au moins 80 % correspond à des troubles graves entraînant une entrave majeure dans la vie quotidienne de la personne avec une atteinte de son autonomie individuelle. Cette autonomie individuelle est définie comme l'ensemble des actions que doit mettre en œuvre une personne, vis-à-vis d'elle-même, dans la vie quotidienne. Dès lors qu'elle doit être aidée totalement ou partiellement, ou surveillée dans leur accomplissement, ou ne les assure qu'avec les plus grandes difficultés, le taux de 80 % est atteint. C'est également le cas lorsqu'il y a déficience sévère avec abolition d'une fonction.
L'approche évaluative en vue de la détermination du taux d'incapacité doit notamment être globale, en ce sens que, même si le repérage des différentes déficiences est nécessaire, en revanche pour la détermination du taux d'incapacité, les taux mentionnés dans les différents chapitres ne s'ajoutent pas de façon arithmétique sauf précision contraire indiquée dans le chapitre correspondant.

Au cas d’espèce, il ressort des éléments communiqués aux débats que Mme [Y] présentait, au jour de la demande d’AAH, une rectolite hémorragique ainsi qu’une maladie de Crohn évolutive.
Il en résulte qu’elle présente des troubles du transit nécessitant un traitement régulier, lequel est à l’origine également d’une pathologie asthmatique et d’allergies.
En revanche, le médecin expert relève que le certificat médical complété le 3/07/2020 par le Docteur [E] et annexé à la demande d’AAH ne décrit aucun retentissement fonctionnel et relationnel de ces symptômes dès lors que l’intéressée réalise sans difficulté et sans aucune aide l’ensemble des items décrits concernant la mobilité et capacité motrice, la communication ou la cognition. Il ajoute également qu’aucun retentissement sur la vie relationnelle ou sociale n’est décrit.
Le Docteur [O] confirme cette analyse dès lors qu’il relève lui-même que Mme [Y] est autonome pour les gestes de la vie quotidienne.
Mme [Y] ne produit aucun élément justificatif de nature à infirmer ces constats et à établir l’existence d’entraves majeures dans la vie quotidienne ou l’autonomie individuelle, le simple fait de présenter un trouble de la concentration ou un essoufflement étant insuffisant à justifier l’attribution d’un taux de 80%.
Dès lors, la caractérisation d’un taux d’incapacité compris entre 50 et 79% est justifiée et Mme [Y] sera déboutée de sa demande tendant à voir fixer ce taux à 80%.
S’agissant de la restriction substantielle et durable d’accès à l’emploi, il convient de relever que :
-le Docteur [O] considère que les restrictions présentées par Mme [Y] pour son accès à l’emploi peuvent être surmontées par un aménagement du poste de travail,
-Mme [Y] ne produit aucune pièce justificative de nature à démontrer l’existence d’une telle restriction substantielle et durable à l’emploi et ne justifie d’aucune démarche d’insertion professionnelle alors même qu’elle a bénéficié d’une orientation professionnelle vers le marché du travail.
Enfin, il doit être rappelé que le bénéfice d’une pension d’invalidité est distinct de toute restriction substantielle et durable à l’emploi et ne répond pas aux mêmes critères d’appréciation de sorte qu’il n’induit pas en lui-même l’existence d’une telle RSDAE et il appartient à Mme [Y], sur qui repose la charge de la preuve, d’en faire la démonstration, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
Ce faisant, il n’est pas établi l’existence d’une restriction substantielle et durable d’accès à l’emploi.
En conséquence, Mme [Y] doit être considérée comme ne pouvant prétendre au bénéfice de l’allocation aux adultes handicapés et sera déboutée de son recours, sans qu’il y ait lieu de confirmer la décision de la CDAPH.
Partie perdante, elle sera condamnée aux dépens, à l’exclusion des frais de consultation médicale restant à la charge de la caisse nationale d’assurance-maladie.

PAR CES MOTIFS :
Le tribunal, statuant après débats en audience publique, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et par mise à disposition au greffe de la juridiction,
DEBOUTE Madame [C] [Y] de son recours,
CONDAMNE Madame [C] [Y] aux dépens, à l’exception des frais de consultation médicale restant à la charge de la caisse nationale d’assurance-maladie.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Rennes
Formation : Ctx protection sociale
Numéro d'arrêt : 22/00771
Date de la décision : 05/07/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 22/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-05;22.00771 ?
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