TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RENNES
PÔLE SOCIAL
MINUTE N°
AUDIENCE DU 19 Juin 2024
AFFAIRE N° RG 23/01013 - N° Portalis DBYC-W-B7H-KVJA
88D
JUGEMENT
AFFAIRE :
[B] [P]
C/
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE [Localité 3]
Pièces délivrées :
CCCFE le :
CCC le :
PARTIE DEMANDERESSE :
Madame [B] [P]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Laëtitia SIBILLOTTE, avocat au barreau de SAINT-NAZAIRE
PARTIE DEFENDERESSE :
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE [Localité 3]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
représentée par Mme [T] [E], suivant pouvoir
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Président : Madame Guillemette ROUSSELLIER,
Assesseur : Madame Marina COUBARD, Assesseur du pôle social du TJ de Rennes
Assesseur : Madame Ghislaine BOTREL-BERTHOIS, Assesseur du pôle social du TJ de Rennes
Greffier : Madame Elisabeth BIENVENU, lors des débats et Caroline LAOUENAN, lors du délibéré
DEBATS :
Après avoir entendu les parties en leurs explications à l’audience du 13 Mars 2024, l'affaire a été mise en délibéré pour être rendu au 19 Juin 2024 par mise à disposition au greffe.
JUGEMENT :contradictoire et en premier ressort
EXPOSE DU LITIGE
Dans le cadre de ses missions de contrôle, la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de [Localité 3] a procédé à une vérification de la facturation des actes réalisés par Madame [B] [P], masseuse-kinésithérapeute, sur la période du 1er février au 31 mai 2020.
Par courrier daté du 14 décembre 2020, réceptionné le 18 décembre 2020, la CPAM de [Localité 3] a notifié à Mme [P] un indu d’un montant de 6.493,04 euros.
Par courrier daté du 11 février 2021, Mme [P] a saisi d’une contestation la commission de recours amiable de la CPAM, laquelle, en sa séance du 18 janvier 2022, a réduit le montant de la créance de la caisse à la somme de 3.856,62 euros.
Le 22 février 2022, la CPAM de [Localité 3] a délivré une première mise en demeure d’un montant de 6.493,04 euros à Mme [P].
Par lettre recommandée avec accusé de réception expédiée le 23 mars 2022, cette dernière a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Rennes d’un recours. L’affaire, enregistrée sous le numéro RG 22/00280, a été radiée par jugement du 3 octobre 2023, les parties n’ayant pas respecté le calendrier de procédure.
Le 24 mai 2022, la CPAM de [Localité 3] a délivré une seconde mise en demeure d’un montant de 3.856,62 euros à Mme [P].
Par courrier daté du 6 juin 2022, Mme [P] a saisi d’une contestation la commission de recours amiable de la CPAM.
Par lettre recommandée avec accusé de réception expédiée le 4 octobre 2023, Mme [P] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Rennes d’un recours à l’encontre de la décision implicite de rejet de la commission.
L’affaire a été évoquée à l’audience du 13 mars 2024.
Mme [P], dûment représentée, se référant expressément à ses conclusions visées par le greffe, demande au tribunal de :
Prononcer la nullité de la mise en demeure de payer de la CPAM de [Localité 3] du 22 février 2022 ;
Prononcer la nullité de la mise en demeure de payer de la CPAM de [Localité 3] du 24 mai 2022 ;
Annuler la procédure de recouvrement de l’indu initiée par la CPAM de [Localité 3] ;
Condamner la CPAM de [Localité 3] au paiement d’une somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts au profit de Mme [P] ;
Condamner la CPAM de [Localité 3] au paiement d’une somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par Mme [P] ;
Condamner la CPAM de [Localité 3] aux entiers dépens de la procédure ;
A titre subsidiaire :
Infirmer la décision de la commission de recours amiable du 18 janvier 2022 ;
Rejeter en totalité la demande en paiement de prestations indues de la CPAM de [Localité 3] à l’égard de Mme [P] ;
Débouter la CPAM de [Localité 3] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l’encontre de Mme [P] ;
Condamner la CPAM de [Localité 3] aux entiers dépens de la procédure ;
Plus subsidiairement encore :
Avant dire droit, ordonner une expertise technique confiée à un expert spécialisé dans l’interprétation de la liste des actes et prestations prévues à l’article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale (F10) ou à un expert masseur-kinésithérapeute avec pour mission de dire et juger si les cotations appliquées par Mme [P] respectent la nomenclature générale des actes professionnels et à défaut, préciser le montant de l’indu qui serait dû à la CPAM de [Localité 3] ;
Surseoir à statuer sur les demandes de la CPAM de [Localité 3] dans l’attente des conclusions expertales.
Au soutien de ses prétentions, elle fait essentiellement valoir que la mise en demeure du 22 février 2022 n’a pas été imprimée sur un papier à en-tête, que l’expéditeur n’est pas clairement identifié, qu’il n’est pas justifié de la délégation de signature de l’auteur de la lettre et que le montant de l’indu mentionné est en discordance avec le montant de l’indu retenu par la commission de recours amiable. Elle indique que la seconde mise en demeure du 24 mai 2022 n’a pas été imprimée sur un papier à en-tête, que le nom de son auteur n’est pas précisé, que la notification initiale d’indu qui figure en annexe mentionne un montant supérieur à celui sollicité aux termes de la mise en demeure et que les tableaux qui lui ont été communiqués font état de période de mandatement différentes qui excèdent parfois la période de contrôle annoncée.
Sur le fond, Mme [P] se prévaut essentiellement de certificats établis par les médecins prescripteurs attestant des pathologies de ses patients et les cotations retenues. Elle observe par ailleurs que la caisse réclame une somme de 1.324,36 euros alors que l’addition de toutes les sommes qu’elle réclame permet seulement de retenir un indu d’un montant de 439,67 euros.
Sur la demande indemnitaire, Mme [P] expose que la caisse a prélevé et retenu la somme de 6.493,04 euros du 10 décembre 2020 au 10 mars 2021, alors même que durant cette période, elle avait la charge de 3 enfants et se trouvait en arrêt maladie. Elle ajoute avoir dû puiser sur ses deniers personnels pour payer sa remplaçante et que la situation a été particulièrement anxiogène.
En réplique, la CPAM de [Localité 3], dûment représentée, se référant expressément à ses conclusions visées par le greffe, prie le tribunal de :
Débouter Mme [P] de son recours et de l’ensemble de ses demandes ;
A titre reconventionnel :
Condamner Mme [P] au paiement de la somme rectifiée de 1.324,36 euros ;
Délivrer la grosse du jugement.
A l’appui de ses prétentions, la caisse détaille patient par patient les montants pour lesquels elle maintient sa demande de remboursement d’indu.
Sur la demande indemnitaire, elle soutient qu’elle a été informée de l’erreur comptable le 25 février 2021 et qu’elle remboursé l’intégralité des sommes prélevées le 10 mars suivant, soit moins de 15 jours après. Elle ajoute que la date du 10 décembre 2020 correspond non pas à la date du prélèvement mais à la date du « constat initial » de l’indu. La caisse indique qu’à défaut de réponse dans les deux mois à la contestation de l’assurée du 9 mars 2021, cette était considérée comme rejetée et l’organisme pouvait reprendre le recouvrement de sa créance, ce qu’elle a fait les 12 et 18 octobre 2021. Elle explique qu’informée le 21 octobre 2021 de la réclamation de Mme [P], elle a restitué les sommes prélevées le 4 novembre suivant, soit mois de 15 jours après. Elle affirme enfin qu’elle a fait preuve de diligence et que les nombreux échanges de mails versés aux débats démontrent qu’elle a régulièrement tenue l’assurée informée.
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile il convient de se référer aux dernières conclusions du défendeur pour un plus ample exposé de ses moyens et arguments.
A l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré au 19 juin 2024 et rendue à cette date par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l’article 450 du code de procédure civile.
MOTIFS
A titre liminaire, il sera observé que le pôle social du tribunal judiciaire n’est pas une juridiction de recours des décisions rendues par la commission de recours amiable de la CPAM. Si la saisine de cette commission est un préalable obligatoire et nécessaire à la saisine du tribunal judiciaire, ce dernier ne se prononce que sur la décision initiale de l’organisme. Il en résulte qu’il ne peut prononcer l’annulation ou la confirmation de la décision de la commission.
Sur la nullité de la procédure de contrôle.
Aux termes de l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, « I.-A.-En cas d’inobservation des règles de tarification, de distribution ou de facturation :
1° Des actes, prestations et produits figurant sur les listes mentionnées aux articles L. 162-1-7, L. 162-17, L. 165-1, L. 162-22-7, L. 162-22-7-3 et L. 162-23-6 ou relevant des dispositions des articles L. 162-16-5-1, L. 162-16-5-2, L. 162-17-2-1, L. 162-18-1, L. 162-22-3, L. 162-23-1, L. 162-62 et L. 165-1-5 ou des activités de télésurveillance médicale figurant sur la liste mentionnée à l’article L. 162-52 ;
2° Des frais de transports mentionnés aux articles L. 160-8 et L. 160-9-1,
l’organisme de prise en charge recouvre l’indu correspondant auprès du professionnel, du distributeur ou de l’établissement à l’origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l’assuré, à un autre professionnel de santé, à un distributeur ou à un établissement. En contrepartie des frais de gestion qu’il engage lorsque l’inobservation des règles constatée est constitutive d’une fraude du professionnel, du distributeur ou de l’établissement, l’organisme d’assurance maladie recouvre auprès de ce dernier une indemnité équivalant à 10 % des sommes réclamées au titre des remboursements intervenus à tort. Cette indemnité est recouvrée dans les mêmes conditions que les indus recouvrés au titre du présent article. »
L’article R. 133-9-1 du même code dispose par ailleurs que « I.-La notification de payer prévue à l’article L. 133-4 est envoyée par le directeur de l’organisme d’assurance maladie au professionnel, à l’établissement ou au distributeur par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception.
Cette lettre précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées et la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement. Elle mentionne l’existence d’un délai de deux mois à partir de sa réception imparti au débiteur pour s’acquitter des sommes réclamées ainsi que les voies et délais de recours. Dans le même délai, l’intéressé peut présenter des observations écrites à l’organisme d’assurance maladie.
A défaut de paiement à l’expiration du délai de forclusion prévu à l’article R. 142-1 ou après notification de la décision de la commission instituée à ce même article, le directeur de l’organisme de sécurité sociale compétent lui adresse la mise en demeure prévue à l’article L. 133-4 par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception.
Cette mise en demeure comporte la cause, la nature et le montant des sommes demeurant réclamées, la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement, le motif qui, le cas échéant, a conduit à rejeter totalement ou partiellement les observations présentées ainsi que l’existence du nouveau délai d’un mois imparti, à compter de sa réception, pour s’acquitter des sommes réclamées. Elle mentionne, en outre, l’existence et le montant de la majoration de 10 % appliquée en l’absence de paiement dans ce délai, ainsi que les voies et délais de recours.
II.-La majoration de 10 % peut faire l’objet d’une remise par le directeur de l’organisme de sécurité sociale à la demande du débiteur en cas de bonne foi de celui-ci ou si son montant est inférieur à un des seuils, différents selon qu’il s’agit d’un professionnel de santé, d’un établissement de santé ou d’un distributeur, fixés par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale.
III.-Les dispositions des articles R. 133-3, R. 133-5 à R. 133-7 sont applicables à la contrainte instituée par l’article L. 133-4. »
Il résulte par ailleurs des articles R. 122-3, D. 253-6 et D. 253-7 du code de la sécurité sociale que le directeur de l’organisme d’assurance maladie peut déléguer, d’une part et sous sa responsabilité, une partie de ses pouvoirs à certains agents de l’organisme, d’autre part et à titre permanent, sa signature au directeur adjoint et à certains des agents de l’organisme, étant précisé que le directeur est suppléé par le directeur adjoint en cas de vacance d’emploi, d’absence momentanée ou d’empêchement.
Si aucune disposition n’exige à peine de nullité que la notification d’indu soit signée par le directeur ou par un agent de l’organisme titulaire d’une délégation de pouvoir ou de signature de celui-ci (en ce sens, Civ 2e, 16 décembre 2011, n° 10-27.051), il en va autrement de la mise en demeure, qui assortit le montant de l’indu d’une majoration de 10% et qui s’inscrit dans une procédure de mise en recouvrement forcé des sommes dues.
Il appartient ainsi aux juges du fond de vérifier si le signataire de la mise en demeure était muni d’une délégation de pouvoir ou de signature, ou si elle avait été signée par le directeur adjoint en raison de l’empêchement du directeur de la caisse (en ce sens, jurisprudence constante, Civ. 2e, 20 septembre 2012, n° 11-23.609 ; Civ. 2e, 12 octobre 2017, n° 16-21.761 ; Civ. 2e, 14 mars 2019, n° 18-10.743).
En l’espèce, il y a d’emblée lieu d’observer que la première mise en demeure du 22 février 2022 fait état d’un indu d’un montant de 6.493,04 euros, alors qu’à la date de son élaboration, la commission de recours amiable de la CPAM avait déjà réduit le montant de la créance de la caisse à la somme de 3.856,62 euros.
Une telle mention erronée était manifestement de nature à induire la débitrice en erreur sur le montant des sommes demeurant réclamées.
Surtout, la mise en demeure a été signée pour le directeur général et par délégation par Madame [H] [N], directrice comptable et financière.
La caisse, qui ne répond pas au moyen tiré de la nullité de la procédure de contrôle, ne produit pas la délégation de Mme [N].
Elle ne justifie ainsi pas que celle-ci disposait, au 22 février 2022, d’une délégation de pouvoir ou de signature l’habilitant à signer les mises en demeure prises en application de l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, une telle délégation ne pouvant se déduire de sa seule qualité de directrice comptable et financière.
De plus, si la seconde mise en demeure du 24 mai 2022 tient compte de la minoration de l’indu décidée par la commission de recours amiable, elle est à nouveau signée pour le directeur général et par délégation par un directeur comptable et financier, Monsieur [D] [C].
Une nouvelle fois, et outre le fait que l’envoi à quelques mois d’intervalle de deux mises en demeure mentionnant deux montants différents pour une même créance était susceptible d’induire en erreur l’assurée sur la cause, la nature et l’étendue de son obligation, la caisse ne rapporte pas la preuve que M. [C] disposait, au 24 mai 2022, d’une délégation de pouvoir ou de signature l’habilitant à signer les mises en demeure prises en application de l’article L. 133-4 précité, une telle délégation ne pouvant se déduire de sa seule qualité de directeur comptable et financier.
Dans ces conditions, les mises en demeure, qui étaient de nature à tromper l’assurée sur la cause, la nature et l’étendue de son obligation et qui ont été signées par des agents de la caisse dont il n’est pas démontré qu’ils bénéficiaient d’une délégation de pouvoir ou de signature les habilitant à le faire, sont annulées.
Sur le bienfondé de l’indu.
Aux termes des articles 1302 et 1302-1 du code civil, tout paiement suppose une dette et ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution. Celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû doit le restituer à celui de qui il l’a indûment reçu.
Aux termes de l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, en cas d’inobservation des règles de tarification, de distribution ou de facturation d’actes, de prestations ou de produits, l’organisme de prise en charge recouvre l’indu correspondant auprès du professionnel, du distributeur ou de l’établissement à l’origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l’assuré, à un autre professionnel de santé, à un distributeur ou à un établissement.
L’article 5 de la nomenclature générale des actes professionnels (NGAP), qui détermine les « Actes donnant lieu à prise en charge ou remboursement », indique que :
« Seuls peuvent être pris en charge ou remboursés par les caisses d’Assurance Maladie, sous réserve que les personnes qui les exécutent soient en règle vis-à-vis des dispositions législatives, réglementaires et disciplinaires concernant l’exercice de leur profession :
a) les actes effectués personnellement par un médecin ;
b) les actes effectués personnellement par un chirurgien-dentiste ou une sage-femme, sous réserve qu’ils soient de leur compétence ;
c) les actes effectués personnellement par un auxiliaire médical, sous réserve qu’ils aient fait l’objet d’une prescription médicale écrite qualitative et quantitative (sauf dispositions législatives ou réglementaires dérogatoires) et qu’ils soient de sa compétence.
Sauf cas expressément prévu par la présente nomenclature, un acte ne peut être noté par le praticien ou auxiliaire médical et donner lieu à remboursement que si, pendant la durée de son exécution, ce praticien ou auxiliaire médical s’est consacré exclusivement au seul malade qui en a été l’objet. »
L’article 13 de la NGAP, consacré aux « Frais de déplacement pour actes effectués au domicile du malade », expose que :
« Lorsqu’un acte inscrit à la Nomenclature générale des actes professionnels (NGAP) ou à la Classification commune des actes médicaux (CCAM) doit être effectué au domicile du malade, les frais de déplacement du professionnel de santé sont remboursés, en sus de la valeur de l’acte ; ce remboursement est, selon le cas, forfaitaire ou calculé en fonction de la distance parcourue et de la perte de temps subie par le professionnel de santé.
Indemnité forfaitaire de déplacement (IFD)
Lorsque la résidence du malade et le domicile professionnel du médecin généraliste ou spécialiste qualifié, du chirurgien-dentiste omnipraticien ou spécialiste qualifié, de la sage-femme ou de l’auxiliaire médical sont situés dans la même agglomération, ou lorsque la distance qui les sépare est inférieure à deux kilomètres en plaine ou à un kilomètre en montagne, l’indemnité de déplacement est forfaitaire. La valeur de cette indemnité forfaitaire de déplacement est fixée dans les mêmes conditions que celles des lettres clés prévues à l’article 2.
(…)
C) Indemnité horokilométrique (IK)
Lorsque la résidence du malade et le domicile professionnel du professionnel de santé ne sont pas situés dans la même agglomération, et lorsque la distance qui les sépare est supérieure à 2 km en plaine ou 1 km en montagne, les frais de déplacement sont remboursés sur la base d’une indemnité horokilométrique dont la valeur unitaire est déterminée dans les mêmes conditions que celles des lettres clés prévues à l’article 2. »
L’article 14 de cette même nomenclature, qui concerne les « Actes effectués la nuit ou le dimanche », expose quant à lui que :
« Lorsque, en cas d’urgence justifiée par l’état du malade, les actes sont effectués la nuit ou le dimanche et jours fériés, ils donnent lieu, en plus des honoraires normaux et, le cas échéant, de l’indemnité de déplacement, à une majoration.
Sont considérés comme actes de nuit les actes effectués entre 20 heures et 8 heures, mais ces actes ne donnent lieu à majoration que si l’appel au praticien a été fait entre 19 heures et 7 heures.
(…)
B) Actes effectués par les auxiliaires médicaux et par les sages-femmes lorsqu’elles dispensent des soins infirmiers
La valeur des majorations forfaitaires pour actes effectués la nuit et le dimanche ou jours fériés légaux est déterminée dans les mêmes conditions que la valeur des lettres clés prévues à l’article 2.
Pour les actes infirmiers répétés, ces majorations ne peuvent être perçues qu’autant que la prescription du médecin indique la nécessité impérieuse d’une exécution de nuit ou rigoureusement quotidienne.
La majoration forfaitaire pour les actes de nuit effectués par les infirmiers ainsi que par les sages-femmes lorsqu’elles dispensent des soins infirmiers peut faire l’objet d’une différenciation. Les valeurs des majorations sont déterminées dans les mêmes conditions que celles des lettres-clés prévues à l’article 2. »
Selon le titre XIV de la NGAP, qui a trait aux « Actes de rééducation et de réadaptation fonctionnelles » :
« Par dérogation à l’article 5 des Dispositions générales, les actes du titre XIV peuvent être pris en charge ou remboursés par les caisses d’Assurance Maladie, lorsqu’ils sont personnellement effectués par un masseur-kinésithérapeute, sous réserve qu’ils aient fait l’objet d’une prescription écrite du médecin mentionnant l’indication médicale de l’intervention du masseur-kinésithérapeute; le médecin peut, s’il le souhaite, préciser sa prescription, qui s’impose alors au masseur-kinésithérapeute.
(…)
Pour les actes du présent titre, les dispositions de l’article 14-B des Dispositions générales applicables en cas d’urgence justifiée par l’état du malade sont étendues aux actes répétés, en cas de nécessité impérieuse d’un traitement quotidien.
Sauf exceptions prévues dans le texte, la durée des séances est de l’ordre de trente minutes. Hormis les modalités particulières de traitement prévues par le chapitre III, le masseur-kinésithérapeute, ou la sage-femme pour les actes de l’article 8 du chapitre II, se consacre exclusivement à son patient.
Les cotations comprennent les différents actes et techniques utilisés par le masseur-kinésithérapeute, ou la sage-femme pour les actes de l’article 8 du chapitre II, pendant la séance à des fins de rééducation, que ce soient des manœuvres de massage, des actes de gymnastique médicale ou des techniques de physiothérapie. Sauf exceptions prévues dans le texte, ces cotations ne sont pas cumulables entre elles.
À chaque séance s’applique donc une seule cotation, correspondant au traitement de la pathologie ou du territoire anatomique en cause.
Il découle de ces dispositions liminaires spécifiques que, sauf exceptions prévues dans le texte, il n’est pas possible d’appliquer une seconde cotation pour une même séance.
Il est possible d’effectuer deux séances le même jour à la condition d’avoir deux prescriptions distinctes, pour des affections en rapport avec des articles de la NGAP différents, portant sur deux régions anatomiques distinctes et réalisés lors de deux séances distinctes facturées à taux plein par dérogation à l’article 11B de dispositions générales. »
Selon l’article 1er de l’arrêté du 28 février 2006 portant approbation d’un avenant à la convention nationale des masseurs-kinésithérapeutes, « Conformément à l’article 13 des dispositions générales de la NGAP, les frais de déplacement des masseurs kinésithérapeutes pour la réalisation d’actes à domicile sont remboursés par des indemnités forfaitaires dont les montants et les conditions de cotation sont précisées à l’annexe 1 de la présente convention.
Les déplacements médicalement justifiés liés à la réalisation de certains actes du titre XIV de la NGAP, listés ci-dessous, permettent la cotation d’indemnités de déplacement spécifiques à compter du 31 mars 2006 :
– indemnité forfaitaire orthopédique et rhumatologique (IFO) correspondant à un acte de l’article 1er (rééducation de tout ou partie de plusieurs membres ou du tronc et d’un ou plusieurs membres cotée AMS9) ;
– indemnité forfaitaire rhumatismale (IFR) correspondant aux actes de l’article 2 (rééducations des conséquences des affections rhumatismales inflammatoires cotées AMK 7 et 9) ;
– indemnité forfaitaire neurologique (IFN) correspondant aux actes de l’article 4 (rééducations des conséquences d’affections neurologiques et musculaires cotées AMK 7 à 10) ;
– indemnité forfaitaire pneumologique (IFP) correspondant à un acte de l’article 5 (rééducation des maladies respiratoires obstructives, restrictives ou mixtes [en dehors des situations d’urgence] cotée AMK 8).
Les déplacements seront cotés indemnité forfaitaire de sortie (IFS) pour les actes liés à la prise en charge des patients, après intervention orthopédique ou traumatologique, de la sortie d’hospitalisation à J 35 ; ceci conformément aux recommandations de l’HAS à paraître, relatives à une meilleure adéquation de placement en établissement de soins de suite ou de réadaptation (SSR).
Les différentes indemnités forfaitaires de déplacement ne peuvent se cumuler entre elles. »
Les actes donnant lieu à l’application de la lettre clé « AMK » correspondent aux actes divers pratiqués par le masseur-kinésithérapeute.
Les actes donnant lieu à l’application de la lettre clé « PLL » correspondent aux Actes de soins palliatifs pratiqués par le masseur-kinésithérapeute.
En l’espèce, la caisse indique qu’après annulation des périodes hors des dates de mandatement, sa créance s’élève à la somme de 1.324,36 euros.
La caisse indique que « suite à la seconde réclamation du 22 mars 2022 et des conclusions n° 2, reçues le 15 juin 2023, les dossiers à nouveau contestés ont fait l’objet de nouvelles minorations se décomposant comme suit, ceux qui ne l’ont pas été ne figurent donc pas dans le détail ci-dessous et restent bien évidemment dus pour leur entier montant ».
S’agissant de M. [U].
La caisse rappelle elle-même les dispositions de l’article 14-B de la NGAP, dont il résulte que lorsque, en cas d’urgence justifiée par l’état du malade, les actes sont effectués la nuit ou le dimanche et jours fériés, ils donnent lieu, en plus des honoraires normaux et, le cas échéant, de l’indemnité de déplacement, à une majoration, étant entendu que pour les actes infirmiers répétés, ces majorations ne peuvent être perçues qu’autant que la prescription du médecin indique la nécessité impérieuse d’une exécution de nuit ou rigoureusement quotidienne.
Le titre XIV de la nomenclature précise, pour rappel, que les dispositions de l’article 14-B des Dispositions générales applicables en cas d’urgence justifiée par l’état du malade sont étendues aux actes répétés, en cas de nécessité impérieuse d’un traitement quotidien.
Mme [P] produit une attestation du médecin traitant de M. [U], le docteur [O] [M], qui certifie que l’état de santé du patient a nécessité entre décembre 2019 et son décès en mai 2020, « des soins de kinésithérapie respiratoire à domicile quotidien, y compris weekend et jours fériés, dans le cadre d’une prise en charge palliative ».
Le caractère rigoureusement quotidien des soins palliatifs et la nécessité d’assurer un suivi kinésithérapeutique y compris les week-end et jours fériés justifie l’application de la cotation AMK 12 et de la majoration prévue à l’article 14-B de la NGAP.
La caisse estime que l’indu doit être ramené à la somme de 30,48 euros mais ne précise pas à quelle(s) erreur(s) de cotation cet indu se rapporte.
L’indu relatif à la facturation des actes de soins prescrits à M. [U] est annulé.
S’agissant de M. [Z].
Mme [P] produit une attestation du docteur [X], qui certifie que l’état de santé du patient « a nécessité des soins palliatifs de kinésithérapie pour l’année 2020 ».
Aucun document médical n’indique la nécessité d’une prise en charge rigoureusement quotidienne.
A la lecture du tableau fourni par la caisse (pièce n° 7 de la défenderesse), seule l’indemnité de déplacement est contestée.
Mme [P] ne conteste pas cette erreur relative à l’indemnité de déplacement, de sorte que l’indu, ramené par la caisse à la somme de 24,38 euros, est confirmé.
S’agissant de M. [TE].
Mme [P] produit deux attestations du docteur [V], qui certifie que l’état de santé du patient « nécessitait des soins palliatifs de kinésithérapie quotidiens, week-end et jours fériés compris durant l’année 2020 ».
Le caractère rigoureusement quotidien des soins palliatifs et la nécessité d’assurer un suivi kinésithérapeutique y compris les week-end et jours fériés justifie l’application de la cotation AMK 12 et de la majoration prévue à l’article 14-B de la NGAP.
La caisse estime que l’indu doit être ramené à la somme de 7,62 euros mais ne précise pas à quelle(s) erreur(s) de cotation cet indu se rapporte.
L’indu relatif à la facturation des actes de soins prescrits à M. [TE] est annulé.
S’agissant de M. [K].
Mme [P] produit l’ordonnance du docteur [V] comportant les mentions suivantes : « Nombre de séances à déterminer par le kiné ; Faire pratiquer par un kiné DE la rééducation de l’épaule gauche pour la pathologie musculosquelettique ; Faire pratiquer la rééducation au domicile des quatre membres et de la marche de la personne âgée polypathologique ».
De telles mentions justifient l’application de la cotation AMS 9,5.
La caisse estime que l’indu doit être ramené à la somme de 92,82 euros mais ne précise pas à quelle(s) erreur(s) de cotation cet indu se rapporte.
L’indu relatif à la facturation des actes de soins prescrits à M. [K] est annulé.
S’agissant de Mme [F].
La caisse indique que cet indu a été annulé, ce que les mentions du tableau confirment.
S’agissant de Mme [W].
Mme [P] produit une attestation du docteur [A], qui certifie que l’état de santé de la patiente « nécessite bien des séances de kinésithérapie à domicile pour rééducation et renforcement des membres inférieurs ».
La requérante estime qu’il convient d’appliquer la cotation AMS 9,5 et non les cotations AMK 10 ou 8,3.
Il résulte en effet de la NGAP et du « guide pratique de la NGAP en masso-kinésithérapie » (voir p. 24) que la rééducation de tout ou partie de plusieurs membres ou du tronc et d’un ou plusieurs membres obéit à la cotation AMS 9,5.
L’indu relatif à la facturation des actes de soins prescrits à Mme [W] est annulé.
S’agissant de Mme [R].
La caisse reconnaît qu’il convient d’appliquer la cotation AMS 9,5 + IFO et d’annuler l’indu.
S’agissant de Mme [G].
La caisse reconnaît qu’il convient de retenir la cotation AMS 9,5.
Elle estime que l’indu doit être ramené à la somme de 102,44 euros mais ne précise pas à quelle(s) erreur(s) de cotation cet indu se rapporte.
L’indu relatif à la facturation des actes de soins prescrits à M. [K] est annulé.
S’agissant de Mme [I].
Mme [P] produit une attestation du docteur [L], qui certifie que l’état de santé de la patiente « nécessite des soins de kinésithérapie avec rééducation des membres supérieurs et du rachis ».
La caisse reconnaît qu’il convient de retenir la cotation AMS 9,5 + IFO.
Elle expose en revanche que l’argument du férié non prescrit n’ayant pas été contesté, il est maintenu, ce que Mme [P] ne conteste pas devant la juridiction de céans.
L’indu, ramené à la somme de 4,57 euros, est confirmé.
S’agissant de M. [Y].
Mme [P] produit une attestation du docteur [J], qui certifie que le patient « a eu besoin et a reçu de séances de rééducation à domicile pour renforcement des membres inférieurs et prévention des chutes durant toute l’année 2020 ».
La caisse confirme que la cotation AMS 9,5 a été retenue.
Elle ajoute que les jours fériés ne sont pas prescrits, ce que Mme [P] ne conteste pas devant la juridiction de céans.
L’indu, ramené à la somme de 115,56 euros, est confirmé.
S’agissant de Mme [S].
Mme [P] produit une attestation du docteur [AZ], qui certifie que l’état de santé de la patiente « a nécessité la rééducation des membres inférieurs pendant l’année 2020 ».
La caisse ne répond pas à cet argument, mais une nouvelle fois, il convient rappeler qu’il résulte de la NGAP et du « guide pratique de la NGAP en masso-kinésithérapie » (voir p. 24) que la rééducation de tout ou partie de plusieurs membres ou du tronc et d’un ou plusieurs membres obéit à la cotation AMS 9,5.
L’indu relatif à la facturation des actes de soins prescrits à Mme [S] est annulé.
Sur le montant définitif de la condamnation.
La caisse estime que sa créance d’indu s’élève à la somme de 1.324,36 euros.
Elle explique que cette somme correspond à tous les indus non contestés mentionnés dans son tableau (pièce n° 7 de la caisse) et qu’elle tient compte des nouvelles minorations appliquées dans ses dernières conclusions et des annulations relatives à la période de contrôle décelées.
En soustrayant à la somme réclamée par la caisse le montant des indus critiqués dont l’annulation a été prononcée supra, la créance de la caisse s’élève en définitive à la somme de 1.029,20 euros.
Il convient de faire droit à la demande reconventionnelle de la caisse et de condamner Mme [P] à payer à la CPAM de [Localité 3] la somme de ?1.029,2?0 euros au titre de l’indu qui lui a été notifié le 18 décembre 2020.
Sur la demande indemnitaire.
Aux termes de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Pour que la responsabilité civile d’une personne, physique ou morale, soit engagée, le demandeur doit rapporter la preuve d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre la faute et le préjudice.
Au cas d’espèce, Mme [P] se prévaut d’un préjudice financier tenant au fait qu’entre le 10 décembre 2020 et le 10 mars 2021, la caisse aurait retenu par-devers elle la somme de 6.493,04 euros, correspondant au montant initial de l’indu, alors même que durant cette période, elle avait la charge de trois enfants et se trouvait en arrêt maladie, une telle situation l’ayant obligée à puiser sur ses deniers personnels pour payer sa remplaçante.
En réplique, la caisse argue qu’elle a été informée de l’erreur comptable le 25 février 2021 et qu’elle remboursé l’intégralité des sommes prélevées le 10 mars suivant, soit moins de 15 jours après, observant que la date du 10 décembre 2020 mentionné sur son tableau ne correspond pas à la date du prélèvement mais à celle du « constat initial » de l’indu.
La caisse se prévaut d’un tableau partiellement reproduit dans ses écritures que la requérante ne conteste pas puisqu’elle s’y rapporte dans ses propres conclusions. Il résulte des mentions de ce tableau que :
Les 22 février, 26 février et 2 mars 2021, la caisse a procédé à une retenue sur prestations (mention « RPR » dans la seconde colonne du tableau) des sommes de 3.934,51, 87,93 et 2.470,60 euros sur le compte de l’assurée, soit une somme globale de 6.493,04 euros, correspondant au montant initial de l’indu ;
La caisse a remboursé (mention « PAI » dans la seconde colonne du tableau) la somme de 6.493,04 euros à Mme [P] par virement du 10 mars 2021 ;
Les 12 et 18 octobre 2021, la caisse a procédé à une retenue sur prestations des sommes de 37,26 et 2.854,32 euros sur le compte de l’assurée, soit une somme globale de 2.891,58 euros, correspondant à une partie du montant minoré de l’indu suite à la décision de la commission de recours amiable ;
La caisse a remboursé la somme de 2.891,58 euros à Mme [P] par virement du 4 novembre 2021.
Force est de constater que la première ligne du tableau, datée du 10 décembre 2020, soit avant même l’édition de la notification d’indu adressée 4 jours plus tard à l’assurée, ne correspond manifestement pas à une retenue ou un prélèvement.
En effet, d’une part, les retenues et prélèvements ne peuvent être indiqués dans le tableau que par l’inscription d’un nombre négatif suggérant un débit et, d’autre part, Mme [P], qui ne produit aucun relevé de compte bancaire, ne démontre pas avoir été prélevée de la somme de 6.493,04 euros à la date du 10 décembre 2020.
Il résulte néanmoins de ces éléments qu’à deux reprises, la caisse, poursuivant le recouvrement de l’indu, a retenu des sommes à Mme [P] pour des durées comprises entre 8 et 23 jours.
Mme [P] indique avoir contacté la caisse dès le 10 décembre 2020 pour comprendre la raison du prélèvement.
Cependant, outre le fait qu’il a été vu précédemment qu’aucun prélèvement ou retenue n’est intervenue le 10 décembre 2020, la requérante ne rapporte pas la preuve qu’elle a contacté la caisse avant son premier courriel du 25 février 2021.
En tout état de cause, les retenues de février-mars 2021 sont fautives dans leur principe.
En effet, elles sont intervenues alors que la caisse ne disposait d’aucun titre lui permettant de procéder elle-même au recouvrement de la créance contestée, étant rappelé que, contrairement à une contrainte, une mise en demeure, même non-contestée, ne constitue pas un titre exécutoire mais une étape de la procédure de recouvrement.
A supposer même que la créance litigieuse ne puisse pas être considérée comme contestée faute de recours de l’assurée contre la décision de la commission de recours amiable du 18 janvier 2022, la CPAM d’[Localité 2] ne justifie pas du fondement juridique l’autorisant à procéder par voie de retenues sur prestations futures.
Si la caisse d’assurance maladie tient de l’article L. 133-4-1 du code de la sécurité sociale le pouvoir d’effectuer des retenues sur les prestations à venir en fonction de la situation sociale du ménage en cas de versement indu d’une prestation, cet article exclut expressément de son champ d’application les cas mentionnés à l’article L. 133-4 du même code (les indus résultant de l’inobservation par les professionnels de santé des règles de tarification, de distribution ou de facturation) et, plus généralement, les autres cas où une récupération peut être opérée auprès d’un professionnel de santé.
Or, il résulte des termes mêmes des conclusions de la CPAM d’[Localité 2] que c’est sur le fondement de l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale que la caisse a procédé à une vérification de la facturation de Mme [P] et qu’elle lui a notifié l’indu correspondant.
Il est au surplus observé que les retenues de février-mars 2021 sont erronées dans leur montant, la caisse ayant retenu la somme globale de 6.493,04? euros alors même que dès la première retenue du 22 février 2021, l’indu ne s’élevait plus qu’à la somme de 3.856,62 euros.
S’agissant des retenues d’octobre 2021, la caisse indique qu’elles font suite à la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable suite à la contestation de l’assurée du 9 mars 2021. Elle ajoute qu’informée le 21 octobre 2021 de la réclamation de Mme [P], elle a restitué les sommes prélevées le 4 novembre suivant, soit mois de 15 jours après.
Les échanges de courriels versés aux débats démontrent néanmoins que Mme [P] a longuement échangé avec la caisse qui, outre le fait qu’elle a nié avoir reçu les justificatifs fournis en février alors même que l’assurée lui avait transmis une preuve de réception desdits justificatifs, a reconnu que les retenues sur prestations effectuées en octobre 2021 constituaient un « regrettable incident ».
Il est donc suffisamment établi que la caisse, en procédant à cinq reprises à des retenues sur prestations que la loi lui interdisait expressément, les trois premières fois pour un montant trop élevé puis les fois suivantes par erreur, a commis une faute.
S’agissant du préjudice, la caisse ne nie pas que Mme [P] a été placée en arrêt de travail au titre du risque maladie entre février et octobre 2021 et que, suite aux diverses retenues sur prestations qui lui ont été infligées, elle n’a pu être indemnisée de son arrêt de travail, ce, alors même que l’assurée avait trois enfants à charge et qu’elle devait rémunérer sa remplaçante.
Dans ces conditions, la CPAM de [Localité 3] est condamnée à lui verser la somme de 1.000 euros à titre de dommages-intérêts.
Sur les dépens et les frais irrépétibles.
Succombant en l’essentiel de ses demandes, la CPAM de [Localité 3] est condamnée aux dépens par application de l’article 696 du code de procédure civile.
L’équité commande en outre de la condamner à verser à Mme [P] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du même code.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement et par jugement contradictoire, en premier ressort et par mise à disposition au greffe de la juridiction :
ANNULE les mises en demeure des 22 février et 24 mai 2021 délivrées à Madame [B] [P] au titre de la vérification de la facturation des actes réalisés sur la période du 1er février au 31 mai 2020 ;
CONDAMNE Madame [B] [P] à payer à la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 3] la somme de 1.029,20 euros au titre de l’indu qui lui a été notifié le 18 décembre 2020 ;
CONDAMNE la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 3] à verser à Madame [B] [P] la somme de 1.000 euros à titre de dommages-intérêts ;
CONDAMNE la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 3] aux dépens ;
CONDAMNE la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 3] à verser à Madame [B] [P] la somme de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Ainsi jugé et prononcé, les jour, mois et an que susdits.
La greffièreLa vice-présidente