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21/05/2024 | FRANCE | N°21/01667

France | France, Tribunal judiciaire de Rennes, 1re chambre civile, 21 mai 2024, 21/01667


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE RENNES


21 Mai 2024


1re chambre civile
50G

N° RG 21/01667 - N° Portalis DBYC-W-B7F-JE5G


AFFAIRE :


S.C.I. MFE PARTNERS 2

C/

[U] [B]






PREMIERE CHAMBRE CIVILE



COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE


PRESIDENT : Dominique FERALI, Première vice-présidente

ASSESSEUR : Philippe BOYMOND, Vice-Président

ASSESSEUR : Grégoire MARTINEZ, Juge


GREFFIER: Karen RICHARD lors des débats et Séraphin LARUELLE lors du pr

ononcé, qui a signé la présente décision.


DEBATS


A l’audience publique du 04 Décembre 2023



JUGEMENT


En premier ressort, contradictoire,
prononcé par Madame Dominique FERALI...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE RENNES

21 Mai 2024

1re chambre civile
50G

N° RG 21/01667 - N° Portalis DBYC-W-B7F-JE5G

AFFAIRE :

S.C.I. MFE PARTNERS 2

C/

[U] [B]

PREMIERE CHAMBRE CIVILE

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE

PRESIDENT : Dominique FERALI, Première vice-présidente

ASSESSEUR : Philippe BOYMOND, Vice-Président

ASSESSEUR : Grégoire MARTINEZ, Juge

GREFFIER: Karen RICHARD lors des débats et Séraphin LARUELLE lors du prononcé, qui a signé la présente décision.

DEBATS

A l’audience publique du 04 Décembre 2023

JUGEMENT

En premier ressort, contradictoire,
prononcé par Madame Dominique FERALI,
par sa mise à disposition au Greffe le 21 Mai 2024,
après prorogation de la date du délibéré.

Jugement rédigé par Monsieur Philippe BOYMOND.

ENTRE :

DEMANDERESSE :

S.C.I. MFE PARTNERS 2
Société civile immobilière au capital de 10 000 €, inscrite au RCS de COUTANCES sous le numéro 824 643 217, dont le siège est [Adresse 1], agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Me Bruno CRESSARD, avocat au barreau de RENNES

ET :

DEFENDEUR :

Monsieur [U] [B]
[Adresse 4]
[Localité 2]

représenté par Maître Julien DERVILLERS de la SELARL PROXIMA, avocats au barreau de RENNES

***

EXPOSE DU LITIGE
Suivant acte authentique du 29 juillet 2020, la société civile immobilière (SCI) MFE Partners 2 a consenti à Monsieur [U] [B] une promesse unilatérale de vente d'un local industriel et de bureaux situé [Adresse 6] (35) au prix de 1 300 000 €.
La vente a été soumise à l'accomplissement de conditions suspensives, notamment d'obtention d'un ou plusieurs prêts par le bénéficiaire et une indemnité d'immobilisation, mais avec dispense de versement immédiat, d'un montant de 130 000 € a, par ailleurs, été stipulée.

Un terme extinctif a été fixé au 02 novembre 2020 à 16 heures mais il a été prévu que la réalisation de la condition suspensive tenant au financement, par l'obtention du ou des prêts, devait intervenir au plus tard dans un délai de cinquante jours à compter de la signature de la promesse.
Par courriel du 28 octobre 2020, le bénéficiaire a avisé le notaire du promettant de ce qu'il n'avait pas obtenu de financement, lequel lui a rappelé en retour qu'il devait lui justifier de deux refus de prêt.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 novembre 2020, le promettant a mis en demeure le bénéficiaire d'avoir à lui payer la somme de 130 000 € au titre de l'indemnité d'immobilisation.
Par acte de commissaire de justice du 05 mars 2021, la SCI MFE Partners 2 a assigné Monsieur [U] [B] devant le tribunal judiciaire de Rennes, sur le fondement des articles 1101 et suivants du code civil, aux fins d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 130 000 €, avec intérêts de droit à compter du 26 novembre 2020, sous le bénéfice des dépens et de l'allocation d'une somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions n°3 notifiées par le RPVA le 22 février 2023, la SCI MFE Partners 2 demande désormais au tribunal de :
Vu les articles 1101 et suivants du code civil,
Vu l’acte notarié en date du 29 juillet 2020,
Condamner Monsieur [B] au paiement de la somme de 130.000 € avec intérêts de droit sur cette somme à compter de la mise en demeure qui lui fut adressée en date du 26 novembre 2020,
Le condamner au paiement d’une somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Le condamner aux entiers dépens dont distraction au profit des avocats de la cause par application des dispositions de l’article 699 du même code.
Par conclusions récapitulatives n°2 notifiées par le RPVA le 13 avril 2023, Monsieur [U] [B] demande au tribunal de :
Vu les articles 1103, 1104, 1186 et 1187 du code civil,
Vu la promesse de vente litigieuse,
Débouter la SCI MFE PARTNERS 2 de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Condamner la SCI MFE PARTNERS 2 à la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamner la SCI MFE PARTNER 2 aux entiers dépens de procédure et d’instance,
Écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

Par ordonnance du 04 mai 2023, le juge de la mise en état a clôturé l'instruction de l'affaire et a fixé l'audience de plaidoirie à la date du 04 décembre suivant.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé à leurs écritures susvisées.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande formée au titre de l'indemnité d'immobilisation

Il résulte des articles 1103, 1104, 1304, 1304-3 et 1353 du code civil qu'il appartient à l'acquéreur d'un bien immobilier de démontrer qu'il a sollicité un prêt conforme aux caractéristiques définies dans la promesse de vente et qu'à défaut de cette preuve, la condition suspensive doit être réputée comme accomplie (Civ.1ère 7 mai 2002 n° 99-17.520 Bull.n° 124 et Civ.1ère 13 novembre 1997 n° 95-18.276 Bull. n° 310).

Il revient, ensuite, au promettant de rapporter la preuve que le bénéficiaire d'une promesse de vente sous condition suspensive d'obtention d'un prêt, qui démontre avoir présenté au moins une demande de prêt conforme aux caractéristiques stipulées, a empêché l'accomplissement de la condition (Civ. 3ème 06 octobre 2010 n° 09-69.914 Bull. n° 183 et Civ. 3ème 26 mai 2010 n° 09-15.317 Bull. n° 103).

La SCI MFE Partners 2 sollicite la condamnation de M. [B] à lui payer le montant de l'indemnité d'immobilisation stipulée à l'acte. Elle expose à cet effet que cette somme a pour but de l'indemniser de l'immobilisation de son bien, entre juillet et décembre 2020 et affirme que le défendeur, s'agissant du financement de l'acquisition, n'a ni satisfait à ses obligations, ni n'en a justifié. Elle indique qu'il résulte des deux attestations qu'a produites ce dernier, lesquelles ne mentionnent pas les caractéristiques des prêts sollicités, que les deux demandes de financement n'ont pas été déposées simultanément, en violation des stipulations de la promesse.
Il en résulte, selon elle, que la condition suspensive n'a défailli que par la faute de l'intéressé.
Pour s'opposer à cette prétention, M. [B] prétend que la condition suspensive relative au financement étant défaillie, les conditions de la promesse n'ont donc pas été réalisées de sorte que la clause relative à l'indemnité d'immobilisation ne serait pas applicable. Il ajoute que la promesse étant devenue caduque, il est dès lors libéré de toute obligation. Il soutient encore que le fait d'avoir, ou non, déposé des demandes de financement conformes à la promesse est « complètement » indifférent à la mobilisation de la clause relative à l'indemnité d'immobilisation. Il prétend à cet égard que la SCI MFE Partners 2 confond indemnité d'immobilisation et clause pénale et qu'en l'espèce, aucune clause de ce type ne figure à l'acte litigieux. Il en déduit que le prétendu manquement qui lui est reproché est donc dépourvu de sanction.
En fin d'instance toutefois, il a contesté dans ses dernières conclusions avoir empêché la réalisation de la condition suspensive, en prétendant avoir vainement recherché des financements. Il affirme que la défaillance de ladite condition n'est donc imputable qu'aux banques.
Il conclut au débouté.
La clause relative à l'obtention de prêts a été stipulée comme suit par les parties (pièce demandeur n°1, pages 12 et 13) :

« Le bénéficiaire déclare avoir l'intention de recourir pour le paiement du prix de cette acquisition à un ou plusieurs prêts rentrant dans le champ d'application de l'article L 313-40 du code de la consommation et répondant aux caractéristiques suivantes :
- (…) tout organisme bancaire
- montant maximal (…) 1 468 825 €
- durée maximale de remboursement : 15 ans
- taux nominal d'intérêt maximal : 2,5 % l'an (hors assurances)
- garantie (…).
Toute demande non conforme aux stipulations contractuelles (…) entraînera la réalisation fictive de la condition au sens du premier alinéa de l'article 1304-3 du code civil.
(…)
Le bénéficiaire s'engage, en cas de non obtention du financement demandé, à justifier de deux refus de prêt répondant aux caractéristiques ci-dessus. En conséquence, le bénéficiaire s'engage à déposer simultanément deux demandes de prêt ».

Les parties ont également convenu, comme suit, du sort de l'indemnité d'immobilisation (ibid, page 11) :

« (…)Dans le cas où toutes les conditions suspensives ayant été réalisées, et faute par le bénéficiaire ou ses substitués d'avoir réalisé l'acquisition dans les délais et conditions ci-dessus, ce dernier s'oblige irrévocablement au versement de celle-ci, à première demande du promettant et à titre d'indemnité forfaitaire pour l'immobilisation entre ses mains du bien pendant la durée des présentes ».

M. [B] verse aux débats (sa pièce n°3) un courrier du Crédit mutuel de Bretagne, daté du 28 octobre 2020, lequel lui indique laconiquement que sa « demande de financement du 09 septembre 2020 concernant les besoins de son entreprise » ne pourra recevoir une suite favorable. Le courriel qu'il a reçu, le 17 décembre 2020 (pièce demandeur n°6), de la BNP Paribas, lui répond de façon guère moins laconique que sa demande de financement, formée à une date qui n'est même pas précisée, pour son « projet d'acquisition d'un bâtiment sur [Localité 5], pour un montant de 1 300 000 €, via un financement de 1 468 835 € » ne pourra elle non plus recevoir une suite favorable.
M. [B], d'évidence, ne démontre pas avoir sollicité un prêt conforme aux caractéristiques définies dans la promesse de vente et dans les conditions de temps sur lesquelles les parties s'étaient accordées. Il en résulte, en application tant de l'article 1304-3 du code civil que de la promesse litigieuse, qu'ayant empêché l'accomplissement de la condition suspensive relative au financement, celle-ci est dès lors réputée accomplie.
Il ne soutient pas, par ailleurs, que les conditions suspensives de droit commun stipulées à la promesse ont défailli.
Il est, enfin, constant qu'il n'a pas procédé à l'acquisition du bien immobilier objet de la promesse.
Ses arguments relatifs à l'inapplicabilité de la clause portant indemnité d'immobilisation, en conséquence de la caducité de la promesse et de l'absence de caractère sanctionnateur de cette clause, sont inopérants. Une telle clause n'a pas, en effet, pour objet de sanctionner le bénéficiaire défaillant mais constitue le prix de l'exclusivité qui lui a été consentie, de sorte qu'elle doit précisément produire effet en cas de caducité de la promesse du fait du défaut de réalisation de la vente (Civ.1ère 05 décembre 1995 n° 93-19.874 Bull. n° 452).
Il s'ensuit que la vente du bien litigieux ne s'étant pas réalisée, par la défaillance de M. [B], celui-ci est redevable de l'indemnité d'immobilisation sur laquelle se sont accordées les parties.

Il sera en conséquence condamné à payer à la SCI MFE Partners 2 la somme de 130.000 €, avec intérêts au taux légal à compter du 30 novembre 2020, date de sa mise en demeure (pièce demandeur n° 4).

Sur les demandes annexes
Partie succombante, Monsieur [U] [B] sera condamné aux dépens, en application de l'article 696 du code de procédure civile.
Maître [T] [F] n’allègue pas avoir avancé des dépens sans recevoir provision. Il n’y a donc pas lieu de lui accorder un droit de recouvrement direct.
L'équité commande, en outre, de condamner Monsieur [B] à payer à la SCI MFE Partners 2 la somme de 1 500 € au titre des frais non compris dans les dépens.

La nature de l'affaire n'étant pas incompatible avec l'exécution provisoire de droit de la présente décision, il n'y a dès lors pas lieu de l'écarter.
DISPOSITIF
Le tribunal :
CONDAMNE Monsieur [U] [B] à payer à la SCI MFE Partners 2 la somme de 130 000€ (cent trente mille euros), avec intérêts au taux légal à compter du 30 novembre 2020 ;

le CONDAMNE aux dépens ;

le CONDAMNE à payer à la SCI MFE Partners 2 la somme de 1 500 € (mille cinq cents euros) au titre des frais non compris dans les dépens ;

REJETTE toute autre demande, plus ample ou contraire.

La greffièreLa présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Rennes
Formation : 1re chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/01667
Date de la décision : 21/05/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-21;21.01667 ?
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