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15/04/2024 | FRANCE | N°20/02425

France | France, Tribunal judiciaire de Rennes, 1re chambre civile, 15 avril 2024, 20/02425


Cour d'appel de Rennes
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RENNES
[Adresse 6] - tél : [XXXXXXXX01]



15 Avril 2024


1re chambre civile
50D

N° RG 20/02425
N° Portalis : DBYC-W-B7E-IWYQ








AFFAIRE :


[S] [W]
[C] [R] épouse [W]


C/


S.A.S. PROCOPI
S.A.S.U CASTORAMA FRANCE





copie exécutoire délivrée

le :

à :


COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ


PRESIDENT : Dominique FERALI, première vice-présidente

ASSESSEU

R : David LE MERCIER, vice-président

ASSESSEUR : Grégoire MARTINEZ, juge


GREFFIER : Karen RICHARD lors des débats et lors du prononcé du jugement, qui a signé la présente décision.


DÉBATS

A l’audience publiqu...

Cour d'appel de Rennes
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RENNES
[Adresse 6] - tél : [XXXXXXXX01]

15 Avril 2024

1re chambre civile
50D

N° RG 20/02425
N° Portalis : DBYC-W-B7E-IWYQ

AFFAIRE :

[S] [W]
[C] [R] épouse [W]

C/

S.A.S. PROCOPI
S.A.S.U CASTORAMA FRANCE

copie exécutoire délivrée

le :

à :

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

PRESIDENT : Dominique FERALI, première vice-présidente

ASSESSEUR : David LE MERCIER, vice-président

ASSESSEUR : Grégoire MARTINEZ, juge

GREFFIER : Karen RICHARD lors des débats et lors du prononcé du jugement, qui a signé la présente décision.

DÉBATS

A l’audience publique du 11 décembre 2023
Grégoire MARTINEZ assistant en qualité de juge rapporteur sans opposition des avocats et des parties

JUGEMENT

Rendu au nom du peuple français
En premier ressort, contradictoire,
prononcé par Madame Dominique FERALI ,
par sa mise à disposition au greffe le 15 avril 2024,
date indiquée à l’issue des débats.

Jugement rédigé par Grégoire MARTINEZ.

DEMANDEURS :

Monsieur [S] [W]
Madame [C] [R] épouse [W]
[Adresse 7]
[Localité 2]
représenté par la SELARL Horizons, barreau de Rennes

DEFENDERESSES :

S.A.S. PROCOPI
[Adresse 9]
[Localité 3]
représentée par Me Armelle PRIMA-DUGAST, barreau de Rennes,

S.A.S.U CASTORAMA FRANCE
[Adresse 10]
[Localité 5]

représentée par Me Chevet, barreau de Rennes,
FAITS ET PROCEDURE

Par acte authentique dressé le 13 juillet 2016 par Me [E], notaire à [Localité 8], M. et Mme [M] ont acquis auprès de M. et Mme [W] un bien immobilier situé [Adresse 4] à [Localité 8] pour un montant de 428 000 € comprenant notamment une piscine extérieure, acquise auprès de la société Castorama le 7 janvier 2009 pour un montant de 5 100 € et fabriquée par la société Cerland devenue Procopi.

Se plaignant de désordres, les époux [M] ont, par acte du 10 octobre 2017, assigné les époux [W] en référé-expertise devant le tribunal de grande instance de Saint-Malo. L’expertise a été ordonnée le 9 novembre 2017 et M. [D] a été désigné expert. Elle a été étendue à la société Castorama par ordonnance du 26 avril 2018 puis à la société Procopi par ordonnance du 22 novembre 2018 et à la société ISB France par ordonnance du 20 décembre 2018.

L’expert a déposé son rapport le 9 décembre 2019.

Le 15 avril 2020, les époux [W] et ont signé un protocole d’accord transactionnel avec les époux [M] au terme duquel ils se sont engagés à verser la somme de 37 735,09 € contre la renonciation par les époux [M] à toute prétentions complémentaires, instance ou action.

Par acte du 10 avril 2020, M. et Mme [W] ont assigné la société Castorama devant le tribunal judiciaire de Rennes en paiement.

Par acte du 29 mai 2020, la société Castorama a assigné la société Procopi en intervention forcée.

Par conclusions d’incident du 12 mai 2021, la société Castorama a saisi le juge de la mise en état d’une fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande des époux [W] fondée sur la garantie des vices cachés qui a été rejetée par ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Rennes le 2 décembre 2021, confirmée par un arrêt de la cour d’appel de Rennes du 28 avril 2022.

Par conclusions récapitulatives n° 2, notifiées via le RPVA le 21 novembre 2022, M. et Mme [W] demande au tribunal de :
« - Déclarer la société CASTORAMA irrecevable en tous ses moyens sauf à la débouter de toutes ses prétentions,
- Condamner la société CASTORAMA à verser à Monsieur et Madame [W] la somme de 36.903,49€ avec intérêts légaux à compter de l’assignation et capitalisation des intérêts,
- Condamner la société CASTORAMA à verser à Monsieur et Madame [W] la somme de 8.500€ au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,
- Condamner la société CASTORAMA aux dépens qui comprendront en application des dispositions de l’article R 631-4 du Code de la consommation, l'intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement prévus à l'article L. 111-8 du code des procédures civiles d'exécution »

Par conclusions récapitulatives, notifiées via le RPVA le 9 décembre 2022, la société Castorama demande au tribunal de :
« - Dire et juger que les époux [W] ne rapportent pas la preuve de l’existence d’un vice caché affectant la structure bois de la piscine acquise auprès de la société CASTORAMA,
- Dire et juger que les désordres constatés résultent d’une usure accélérée liée au montage non conforme de la piscine litigieuse par les époux [W],
- Débouter les époux [W] de l’ensemble de leurs prétentions, fins et moyens à l’encontre de la société CASTORAMA,
- Condamner les époux [W] à verser à la société CASTORAMA la somme de 2 000,00 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,
- Condamner les époux [W] aux entiers dépens de l’instance,
En tout état de cause,
- Condamner, le cas échéant, sur le fondement de la garantie des vices cachés et ou de la responsabilité contractuelle, la société PROCOPI à garantir la société CASTORAMA de l’ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre dans le cadre du présent litige,
- Débouter la société PROCOPI de sa demande formulée au titre des disposition de l’article 700 du Code de procédure civile et des dépens,
- Réduire la demande formulée par les époux [W] au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,
- Dire n’y avoir lieu à l’exécution provisoire du jugement à intervenir. »

Par conclusions récapitulatives, notifiées via le RPVA le 31 mai 2022, la société Procopi demande au tribunal de :
« -DEBOUTER la société CASTORAMA de la demande de garantie formée à l’encontre de la société PROCOPI, la demande principale des époux [W], fondée sur la garantie des vices cachés, la garantie décennale, ou la garantie fabricant contractuel devant être rejetée.
-CONDAMNER la société CASTORAMA à verser à la société PROCOPI la somme de 2 000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
-CONDAMNER la même aux entiers dépens de l’instance.
A titre subsidiaire,
-LIMITER l’indemnité due aux consorts [W] à la somme de 4 656 € en tenant compte de la vétusté de la piscine bois.
-DIRE n’y avoir pas lieu à exécution provisoire du jugement à intervenir. »

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé à ces dernières conclusions pour l'exposé des moyens.

Le 9 février 2023, la clôture a été ordonnée et l’affaire a été fixée ensuite à l’audience du 11 décembre 2023.

MOTIFS

Sur l’action récursoire contre le vendeur de la piscine :

Sur le fondement de la garantie des vices cachés et sur le fondement d’une garantie commerciale, les époux [W] demandent que la société Castorama soit condamnée à lui rembourser les sommes suivantes, qu’elle a versées aux époux [M] aux termes du protocole d’accord transactionnel :
-23 280 € au titre de la reprise de la piscine ;
-10 554,12 € au titre des frais d’expertise judiciaire ;
-49,37 € au titre des frais d’assignation en référé ;
-1 020 € au titre du préjudice de jouissance ;
-2 000 € au titre des frais irrépétibles ;

Sur la garantie des vices cachés :

Sur le fondement de l’article 1641 du code civil, les époux [W] se prévalent des conclusions du rapport d’expertise pour soutenir que la piscine était affectée d’un vice caché au moment de la vente, tenant à la non-conformité du traitement du bois, provoquant un pourrissement prématuré de la structure la rendant inutilisable. Ils soutiennent que le défaut de montage est sans incidence.

A l’inverse, la société Castorama conteste la qualification de vice caché en soutenant que le pourrissement prématuré du bois résulte d’un défaut de montage imputable à M. [W] qui a enterré partiellement la piscine alors que la notice de montage excluait ce type d’installation. Elle conteste les conclusions de l’expert sur la prépondérance du défaut de traitement du bois.

De même, la société Procopi conteste la qualification de vice caché en soutenant que le défaut, qui est apparu principalement dans les parties enterrées, est imputable à une pose non conforme à ses prescriptions.

Selon l’article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

En l’espèce, la piscine en bois est vendue en kit à monter soi-même selon une notice de montage prévoyant une mise en œuvre hors sol uniquement (pièce n° 1 Castorama). En dépit de ces prescriptions, M. [W] a enterré les trois quarts du bassin lors de l’installation.

Dans son rapport, l’expert décrit le désordre comme une dégradation de la structure bois constituant le bassin et le local technique. Il conclut que le désordre trouve son origine dans le traitement du bois imputable au fabricant. L’expert note également que la pose enterrée est non conforme.

Néanmoins, l’expert s’est adjoint les services d’un sapiteur qui a conclu (pièce n° 9 Procopi) que le bois employé pour la piscine a eu un traitement anormal compte tenu du nombre d’altérations biologiques dans des zones enterrées mais également dans les zones hors sol qui ne devraient pas être affectées par le pourrissement. Le sapiteur indique qu’un bois traité de classe 4 ne présenterait pas les altérations constatées. Il impute le défaut au fournisseur.

D’ailleurs, la notice de montage en p. 3 indique que : « les produits en contact avec le sol, traités en classe 4, sont ainsi protégés contre les attaques d’insectes et le pourrissement dû à l’humidité »

Il résulte de ces éléments que le défaut de traitement du bois existait au moment de la vente, qu’il a engendré un pourrissement prématuré de bois et que le défaut de pose, bien qu’indéniable, est indifférent à l’apparition du défaut.

L’expert relève que le désordre est évolutif et peut provoquer un effondrement de la structure. La piscine est d’ailleurs inutilisable depuis juin 2017. Ainsi, le défaut présente un degré de gravité suffisant et rend la chose impropre à l’usage.

La piscine était bien atteinte d’un vice caché au moment de la vente qui la rend impropre à l’usage. L’action en garantie est fondée.

L’action en garantie des vices cachés, il n’est pas utile de statuer sur l’application de la garantie commerciale.

Sur les sommes à devoir :

Les sommes demandées par les époux [W] ne sont pas contestées dans leur principe et leur montant par la société Castorama.

La société Procopi fait état de la vétusté de la piscine dont elle estime la durée de vie à 7 ans pour contester devoir une quelconque somme. A titre subsidiaire, elle demande de limiter le montant des frais de reprise de la piscine en appliquant un coefficient de vétusté pour ne retenir que 2/10ème de la somme soit 4 656 €.

Selon l’article 1645, si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur. Il résulte de ce texte une présomption irréfragable de connaissance par le vendeur professionnel du vice de la chose vendue, qui l'oblige à réparer l'intégralité de tous les dommages qui en sont la conséquence. (Com., 19 mai 2021, pourvoi n° 19-18.230);

La qualité de vendeur professionnel des sociétés Castorama et Procopi ne sont pas discutées. L’action indemnitaire est autonome et vise à réparer le préjudice subi par l’acquéreur. Les sommes demandées par les époux [W] aux époux [M] sont la conséquence directe de l’apparition du pourrissement. Ces sommes constituent le préjudice réparable.

Il n’y a pas lieu d’appliquer un coefficient de vétusté qui doit théoriquement relever de l’application d’un contrat d’assurance qui n’est pas produit, en l’espèce, et non d’une estimation qui relève de l’affirmation. Au demeurant, l’existence d’une garantie décennale du fabricant implique une durée de vie espérée pour l’acquéreur d’au moins dix ans. En outre, il est relevé que l’évaluation de la reprise par l’expert suivant un devis de la société Depann’ piscine n’est pas contredite. Et les autres sommes ne sont pas contestées.

Ainsi, la société Castorama est condamnée à verser à M. et Mme [W] la somme de 36 903,49€ en réparation de son préjudice avec les intérêts à taux légal à compter de l’assignation outre la capitalisation des intérêts dus pour une année entière.

Sur l’appel en garantie contre le fournisseur :

La société Castorama sollicite la garantie de son fournisseur.

Le vice caché étant établi comme un défaut de traitement du bois imputable au fabricant, il y a lieu de condamner la société Procopi à relever et garantir la société Castorama de l’ensemble des condamnations qui sont prononcées. 

Sur les frais d’instance :

La société Castorama, partie succombante, sera condamnée aux dépens ainsi qu’à une somme de 6 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal,

CONDAMNE la société Castorama à verser à M. et Mme [W] la somme de 36.903,49 € en réparation de son préjudice avec les intérêts à taux légal à compter de l’assignation outre la capitalisation des intérêts dus pour une année entière ;

CONDAMNE la société Castorama au dépens ;

CONDAMNE la société Castorama à verser à M. et Mme [W] la somme de 6 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Procopi à relever et garantir la société Castorama de toutes les condamnations prononcées à son encontre ;

DEBOUTE les parties de leurs autres demandes ;

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Rennes
Formation : 1re chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/02425
Date de la décision : 15/04/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 22/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-15;20.02425 ?
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