TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE RENNES
Cité Judiciaire
2nde CHAMBRE
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
JUGEMENT DU 08 Avril 2024
N° RG 23/06036 - N° Portalis DBYC-W-B7H-KQ3F
JUGEMENT DU :
08 Avril 2024
MAIF
C/
GROUPAMA LOIRE BRETAGNE
EXÉCUTOIRE DÉLIVRÉ
LE
à
Au nom du Peuple Français ;
Rendu par mise à disposition le 08 Avril 2024 ;
Par Caroline ABIVEN, Vice-Président au Tribunal judiciaire de RENNES, assistée de Aline SAVIN, Greffier lors des débats et de Graciane GILET, Greffier lors du prononcé ;
Audience des débats : 22 Janvier 2024.
Le juge à l'issue des débats a avisé les parties présentes ou représentées, que la décision serait rendue le 08 Avril 2024, conformément aux dispositions de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
Et ce jour, le jugement suivant a été rendu par mise à disposition au greffe ;
ENTRE :
DEMANDEUR
Société d’assurance mutuelle MAIF do,t le siège social est [Adresse 1] prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
représentée par Maître Laura LUET, avocat au barreau de RENNES
ET :
DEFENDEUR :
LA CAISSE RÉGIONALE D’ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES BRETAGNE PAYS DE LA LOIRE DITE GROUPAMA LOIRE BRETAGNE dont le siège social est [Adresse 2] prise en la personne de son représentant légal
domicilié en cette qualité audit siège
représentée par Maître Fabienne MICHELET, avocat au barreau de RENNES, substituée à l’audience par Maître Philippe ARION, avocat au barreau de RENNES
EXPOSE DU LITIGE
Le 24 juillet 2014, Madame [N] [H], assurée auprès de la société MAIF, a été victime d'un accident de la circulation mettant en cause un véhicule assuré auprès de la société GROUPAMA LOIRE BRETAGNE.
La société MAIF a, en vertu du contrat d'assurance souscrit par la victime, versé la somme de 6 240 € à Madame [N] [H] au titre des frais de chambre particulière pendant sa période d'hospitalisation du 26 août au 23 décembre 2014.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 mars 2019, la MAIF a sollicité, auprès de la société GROUPAMA, le remboursement des indemnités versées à l'assurée.
Par courriers du 6 mai 2021 et du 20 janvier 2022, la société GROUPAMA a refusé de prendre en charge ces frais.
La société MAIF a contesté ce refus de prise en charge et, par acte de commissaire de justice du 22 août 2023, a fait assigner la société GROUPAMA LOIRE BRETAGNE devant le tribunal judiciaire de Rennes aux fins de voir, au visa des articles L. 131-2 et L. 211-25 du code des assurances et des dispositions de la loi du 5 juillet 1985 :
- Condamner la société GROUPAMA à régler à la MAIF, subrogée dans les droits de son assurée Madame [N] [H], la somme de 6 240 € avec intérêts au taux légal à compter du 26 mars 2019,
- Condamner la société GROUPAMA à régler à la MAIF la somme de 2000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens,
- Dire n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de la décision à intervenir.
A l'audience du 22 janvier 2024, la MAIF estime qu'elle est fondée à solliciter le remboursement des indemnités versées à son assurée en réparation du préjudice subi des suites de l'accident de la circulation dans la mesure où elle est subrogée dans les droits de la victime, à concurrence de ces indemnités. A ce titre, la demanderesse invoque les articles L. 131-2 et L. 211-25 du code des assurances, outre l'article 29 de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985.
Par ailleurs, la MAIF relève que l'article 5 du contrat d'assurance prévoit sa subrogation dans les droits de la victime lorsque la responsabilité d'un tiers est engagée, si bien qu'elle bénéficie d'une subrogation tant légale que conventionnelle.
Enfin, la MAIF soutient que ces frais de chambre particulière peuvent faire l'objet d'une indemnisation par l'assureur au titre des " frais divers " ou des " dépenses de santé actuelles", justifiant son recours subrogatoire contre la société GROUPAMA, assureur du tiers responsable.
La société GROUPAMA expose que les frais de chambre particulière n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 29, 3° de la loi du 5 juillet 1985. Elle estime, au contraire, qu'il s'agit de frais divers et de dépenses somptuaires n'ouvrant pas droit à indemnisation, si bien que la MAIF n'est pas subrogée dans les droits de Madame [N] [H] et qu'elle doit être déboutée de ses demandes.
En outre, la société GROUPAMA conteste le montant de l'indemnité versée par la MAIF, soutenant que les frais de chambre particulière s'élèvent à la somme de 1 456 € et non 6 240 €, contrairement à ce que la MAIF prétend.
En cet état, l'affaire a été mise en délibéré, la décision étant rendue par sa mise à disposition au greffe le 8 avril 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande de paiement
En vertu de l'article L.131-2 du code des assurances, " Dans l'assurance de personnes, l'assureur, après paiement de la somme assurée, ne peut être subrogé aux droits du contractant ou du bénéficiaire contre des tiers à raison du sinistre.
Toutefois, dans les contrats garantissant l'indemnisation des préjudices résultant d'une atteinte à la personne, l'assureur peut être subrogé dans les droits du contractant ou des ayants droit contre le tiers responsable, pour le remboursement des prestations à caractère indemnitaire prévues au contrat. "
Selon l'article L. 211-25 du même code, " Lorsqu'il est prévu par contrat, le recours subrogatoire de l'assureur qui a versé à la victime une avance sur indemnité du fait de l'accident peut être exercé contre l'assureur de la personne tenue à réparation dans la limite du solde subsistant après paiements aux tiers visés à l'article 2 de la même loi du 5 juillet 1985. Il doit être exercé, s'il y a lieu, dans les délais impartis par la loi aux tiers payeurs pour produire leurs créances."
Aux termes de l'article 29 de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985, " Seules les prestations énumérées ci-après versées à la victime d'un dommage résultant des atteintes à sa personne ouvrent droit à un recours contre la personne tenue à réparation ou son assureur :
1. Les prestations versées par les organismes, établissements et services gérant un régime obligatoire de sécurité sociale et par ceux qui sont mentionnés aux articles 1106-9, 1234-8 et 1234-20 du code rural ;
2. Les prestations énumérées au II de l'article 1er de l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l'Etat et de certaines autres personnes publiques ;
3. Les sommes versées en remboursement des frais de traitement médical et de rééducation ;
4. Les salaires et les accessoires du salaire maintenus par l'employeur pendant la période d'inactivité consécutive à l'événement qui a occasionné le dommage ;
5. Les indemnités journalières de maladie et les prestations d'invalidité versées par les groupements mutualistes régis par le code de la mutualité, les institutions de prévoyance régies par le code de la sécurité sociale ou le code rural et les sociétés d'assurance régies par le code des assurances. "
En l'espèce, la MAIF sollicite le paiement de la somme de 6 240 €, versée à son assurée au titre des frais de chambre particulière pendant la durée de son hospitalisation du 26 août au 23 décembre 2014, hospitalisation rendue nécessaire par l'accident de la circulation mettant en cause un véhicule assuré par la société GROUPAMA. La MAIF justifie de ces frais par deux factures des 15 et 23 décembre 2014 ainsi que par une quittance subrogative en date du 12 octobre 2016.
Ces frais de chambre particulière correspondent à des frais de traitement de rééducation dans l'établissement PASORI à [Localité 5]. A ce titre, les indemnités versées par la MAIF correspondent aux " sommes versées en remboursement des frais de traitement médical et de rééducation " en application de l'article 23, 3° de la loi du 5 juillet 1985.
Il en résulte que la MAIF est subrogée dans les droits de son assurée, Madame [N] [H], contre le tiers responsable et son assureur pour le remboursement des indemnités qu'elle lui a versées au titre des frais de chambre particulière.
Par conséquent, en tant qu'assureur du tiers responsable, la société GROUPAMA sera condamnée à verser la somme de 6 240 € à la MAIF, subrogée dans les droits de Madame [N] [H], avec intérêts aux taux légal courant à compter de la mise en demeure du 26 mars 2019, conformément à l'article 1344-1 du code civil.
Sur les demandes accessoires
Conformément à l'article 696 du code de procédure civile, la société GROUPAMA, partie perdante, doit supporter les dépens, en ce compris les frais relatifs à la sommation de payer.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la MAIF les frais non compris dans les dépens qu'elle a été contrainte d'exposer pour la défense de ses intérêts en justice. En compensation, il convient de lui allouer une indemnité de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
En application de l'article 514 du code de procédure civile, la présente décision est exécutoire par provision. Il n'y a pas lieu de l'écarter.
PAR CES MOTIFS,
Le tribunal, après débats en audience publique, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort,
CONDAMNE la société GROUPAMA LOIRE BRETAGNE à payer à la MAIF, subrogée dans les droits de Madame [N] [H], la somme de 6240 € (six mille deux cent quarante euros) au titre du remboursement des indemnités versées à la victime, avec intérêts au taux légal à compter du 26 mars 2019,
DEBOUTE la société GROUPAMA LOIRE BRETAGNE de ses demandes,
CONDAMNE la société GROUPAMA LOIRE BRETAGNE à payer à la MAIF la somme de 1 500 € (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
MAINTIENT l'exécution provisoire de la présente décision,
CONDAMNE la société GROUPAMA LOIRE BRETAGNE aux dépens.
Ainsi jugé par mise à disposition au greffe le 8 avril 2024, et signé par la juge et la greffière susnommées.
La Greffière La Présidente