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27/03/2024 | FRANCE | N°21/00020

France | France, Tribunal judiciaire de Rennes, Ctx protection sociale, 27 mars 2024, 21/00020


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RENNES
PÔLE SOCIAL


MINUTE N°

AUDIENCE DU 27 Mars 2024

AFFAIRE N° RG 21/00020 - N° Portalis DBYC-W-B7E-JBZD

89B

JUGEMENT



AFFAIRE :

[P] [I]

C/

Société [8], CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE D’ILLE ET VILAINE






Pièces délivrées :

CCCFE le :






CCC le :


PARTIE DEMANDERESSE :

Monsieur [P] [I]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Gaëlle PENEAU-MELLET, avocat au barreau de RENNES, substituée Ã

  l’audience par Me Youssef MAZROUI, avocat au barreau de RENNES


PARTIES DEFENDERESSES :

Société [8]
[Adresse 10]
[Localité 7]
représentée par Me Valérie LE BRAS, avocat au barreau de PARIS

CAISSE PR...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RENNES
PÔLE SOCIAL

MINUTE N°

AUDIENCE DU 27 Mars 2024

AFFAIRE N° RG 21/00020 - N° Portalis DBYC-W-B7E-JBZD

89B

JUGEMENT

AFFAIRE :

[P] [I]

C/

Société [8], CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE D’ILLE ET VILAINE

Pièces délivrées :

CCCFE le :

CCC le :

PARTIE DEMANDERESSE :

Monsieur [P] [I]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Gaëlle PENEAU-MELLET, avocat au barreau de RENNES, substituée à l’audience par Me Youssef MAZROUI, avocat au barreau de RENNES

PARTIES DEFENDERESSES :

Société [8]
[Adresse 10]
[Localité 7]
représentée par Me Valérie LE BRAS, avocat au barreau de PARIS

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE D’ILLE ET VILAINE
[Adresse 6]
[Localité 2]
représentée par M. [L] [D], suivant pouvoir

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Madame Guillemette ROUSSELLIER,
Assesseur : Monsieur Hervé BELLIARD, Assesseur du pôle social du TJ de Rennes
Assesseur : Monsieur Michel COLLET, Assesseur du pôle social du TJ de Rennes
Greffier : Madame Rozenn LE CHAMPION,lors des débats et Caroline LAOUENAN, lors du délibéré

DEBATS :

Après avoir entendu les parties en leurs explications à l’audience du 10 Janvier 2024, l'affaire a été mise en délibéré pour être rendu au 27 Mars 2024 par mise à disposition au greffe.

JUGEMENT :contradictoire et en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

La société [8] (la société) a pour activité la fabrication et la commercialisation de salades traiteurs.
Monsieur [P] [I] (le salarié) a été engagé par la société dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée en date du 31 octobre 2016, en qualité de préparateur de cuisson. Le salarié avait préalablement travaillé en qualité d’intérimaire depuis le 7 mai 2015.

Le 21 juin 2017, le salarié a été victime d’un accident du travail.
Suivant la déclaration d’accident du travail du 22 juin 2017, le 21 juin 2017 à 1h45 alors que le salarié était en poste « selon les dires de l’opérateur, il transportait un chariot de matière. En ouvrant une porte relevante, un second opérateur serait arrivé en face avec un chariot auto porté catégorie 1 et l’aurait heurté au niveau du pied ». Il est précisé que le siège des lésions est le pied gauche et la nature des lésions un gonflement.
Un certificat médical initial a été établi le 21 juin 2017.
Suivant un courrier daté du 4 juillet 2017, la caisse primaire d’assurance maladie d’Ille-et-Vilaine (la caisse) a notifié à la société la décision de reconnaissance du caractère professionnel de l’accident survenu le 21 juin 2017.

Puis, par courrier du 22 juillet 2020, la caisse a notifié à la société la décision de prise en charge d’une nouvelle lésion pour ce même salarié.

Par courrier daté du 24 novembre 2020, la caisse a notifié à la société la fixation d’un taux d’incapacité permanente de 49 % dont 9 % pour le taux professionnel à compter du 27 septembre 2020 pour le salarié. Il est fait état d’une forme sévère d’algodystrophie avec impotence fonctionnelle du membre inférieur gauche.
La société a contesté cette décision devant la commission médicale de recours amiable qui a confirmé ce taux. La société a alors saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Vannes qui, par jugement du 7 novembre 2022, a dit que le taux médical d’incapacité opposable à la société est de 5 %.
Appel a été formé contre cette décision par la caisse.

Le salarié a été déclaré inapte à son poste de travail par le médecin du travail. Il a été licencié pour inaptitude suivant un courrier en date du 22 octobre 2020.

Monsieur [I] a alors saisi la présente juridiction suivant une requête réceptionnée le 16 décembre 2020 au greffe de la présente juridiction.

Préalablement, le salarié a également saisi le conseil de prud’hommes de Rennes le 9 décembre 2020 afin qu’il soit notamment dit que le licenciement dont il a fait l’objet est sans cause réelle et sérieuse et que l’employeur soit notamment condamné à lui verser la somme de 5000 € à titre de dommages et intérêts pour mise en danger du salarié.
Suivant un jugement du 25 octobre 2022, le conseil de prud’hommes a débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse mais a fait droit à la demande de rappel d’indemnité de licenciement à hauteur de 1372,80 euros. La demande en dommages et intérêts pour mise en danger a été rejetée, la juridiction ayant relevé que la société démontre que l’entretien des chariots a été réalisé.
Le salarié a formé appel contre cette décision.

Suivant des conclusions dites n°2 remises à l’audience du 10 janvier 2024, il demande au tribunal de bien vouloir :
dire et juger que l’accident du travail dont il a fait l’objet le 21 juin 2017 est dû à la faute inexcusable de son employeur la société [8] ; lui allouer la majoration de la rente qui lui est versée par la caisse primaire d’assurance maladie ;dire que la majoration devra suivre l’évolution de son taux d’incapacité permanente partielle ;dire qu’il incombera à la caisse primaire d’assurance-maladie de faire l’avance de cette majoration suivant l’article L. 452-2 du code de la sécurité sociale et ce indépendamment de son recours auprès de la structure employeur ;commettre tel expert qu’il plaira au tribunal afin de se prononcer sur les postes listées à l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale et de se prononcer sur les périodes du déficit fonctionnel temporaire total ou partiel.
À titre provisionnel, il sollicite que le tribunal :
condamne la société [8] à lui verser la somme de 5000 € à titre de dommages-intérêts au titre de son préjudice corporel ;dise et juge qu’il appartiendra à la caisse primaire d’assurance maladie de faire l’avance de la provision au titre de l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale indépendamment de son recours à l’encontre de l’employeur ;ordonner l’exécution provisoire de la décision intervenir ;condamner la société [8] à lui verser la somme de 2000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Le salarié fait valoir en substance qu’il s’est fait heurter par un chariot conduit par un étudiant sans expérience et sans CACES alors que le sol était glissant et que les roues du chariot n’étaient pas adaptées à ce sol. Il relève également qu’il n’y avait pas de klaxon sur le chariot et que la société ne démontre pas que le chariot faisait l’objet d’un contrôle et de visites périodiques. Il estime ainsi que l’accident du travail a été facilité par l’employeur qui, ayant conscience du danger, n’a pas mis à disposition des salariés un matériel adéquat. Il souligne également qu’il n’a jamais reçu la moindre formation de façon individualisée à la sécurité alors qu’il était travailleur de nuit. Il souligne que la société n’a jamais produit la fiche du poste du salarié, ni son document unique d’évaluation des risques ainsi que la liste des postes de travail présentant des risques particuliers.
Au vu de l’ensemble de ces éléments, il estime que l’employeur a bien commis une faute inexcusable.

En réponse, suivant des conclusions dites n°5, la société demande au tribunal de bien vouloir débouter le salarié de sa demande de reconnaissance de l’existence d’une faute inexcusable imputable à son employeur et de l’intégralité des demandes en résultant. Il sollicite également la condamnation du salarié à lui verser la somme de 1500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
À titre subsidiaire, il sollicite qu’une expertise judiciaire soit ordonnée aux frais avancés de la caisse primaire d’assurance maladie, expertise portant sur le déficit fonctionnel temporaire ainsi que sur les préjudices énumérés à l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, à l’exception de la perte de chance ou de la diminution des possibilités de promotion professionnelle, soit les souffrances physiques et morales endurées avant consolidation, le préjudice esthétique et le préjudice d’agrément. Sur la provision, la société demande au tribunal de lui donner acte de ce qu’elle s’en rapporte. Elle demande en revanche que soit déclarée irrecevable la demande de condamnation au versement de cette provision formulée directement à son encontre.
La société demande également la condamnation de la caisse primaire d’assurance maladie d’Ille-et-Vilaine à faire l’avance de toutes les sommes qui seront éventuellement allouées aux salariés et de débouter en conséquence ce dernier de toute demande de condamnation formulée directement à son encontre. Elle demande au tribunal de juger que la caisse primaire d’assurance maladie d’Ille-et-Vilaine ne pourra récupérer que la majoration de l’indemnité en capital auprès de l’employeur calculée sur la base d’un taux d’incapacité permanente partielle de 5 %.
En tout état de cause, elle sollicite que le salarié soit débouté de sa demande indemnitaire formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile, à tout le moins, la ramener à de plus justes proportions.

La société relève en premier lieu que le salarié bénéficiait d’un contrat de travail à durée indéterminée de sorte que les moyens relatifs au fait qu’il était soi-disant affecté sur un poste de travail présentant des risques particuliers pour sa santé et n’aurait pas bénéficié d’une formation renforcée à la sécurité sont totalement inopérants, les dispositions invoquées soit l’article L. 4154-3 du code du travail étant inapplicables en l’espèce.
Sur la faute inexcusable prouvée, la société soutien que le conducteur du chariot n’était pas sans expérience pour avoir bénéficié le 17 mai 2017 d’une formation à la conduite des chariots automoteurs à conducteur porté de catégorie 1 et des transpalettes gerbeurs. Elle précise que le salarié a obtenu à l’issue de cette formation une note de 63/70 pour la conduite des véhicules de catégorie 1 et une note de 78/90 pour la conduite des transpalettes gerbeurs et a été déclaré apte par le formateur à la conduite de ces véhicules. Elle souligne également que ce salarié a bénéficié le 4 juillet 2017 d’une formation accueil et intégration avec notamment un module portant sur la sécurité et l’environnement au travail comprenant les règles de déplacements sur le site. Selon elle, la conduite des chariots élévateurs à conducteur porté de catégorie 1 et des transpalettes gerbeurs ne nécessite pas la possession du CACES. Elle relève en outre que Monsieur [I] ne possède également pas ce CACES mais qu’il avait bénéficié de la même formation que le conducteur du chariot au moment de l’accident, Monsieur [K], et avait également bénéficié d’une formation sur la sécurité et l’environnement dans l’entreprise pendant une journée entière avec un test d’évaluation finale et un test théorique. La société estime ainsi qu’elle avait parfaitement respecté la réglementation applicable en matière de conduite de certains équipements de travail mobiles ou servant au levage de charges en délivrant à Monsieur [K] et à Monsieur [I] une formation adéquate à la conduite de ces équipements de travail puis, à l’issue de cette formation et au regard des résultats obtenus lors des tests d’évaluation des salariés, une autorisation de conduite.
La société fait également valoir qu’il n’est pas démontré que le chariot conduit par Monsieur [K] roulait trop vite, ni même que le sol était glissant ou encore que les roues du chariot n’étaient pas adaptées au sol en question. Elle rappelle que la déclaration d’accident du travail a été rédigée sur la base des déclarations du salarié et ne précise pas que le chariot roulait trop vite ou que le freinage n’aurait pas été efficace en raison d’un sol glissant ou de roues non adaptées au sol. Elle précise à ce titre que les locaux de la société sont équipés de carrelage antidérapant pour cuisine et de sols industriels. Elle indique verser aux débats un rapport effectué suite à un audit suivant lequel les activités de production et notamment la zone U2 respectait les exigences définies dans le référentiel IFS Food version six, en niveau supérieur, avec une note de 98,68 %, les sols se voyant attribuer une note de A correspondant à une conformité totale. Elle conclut que le sol des locaux dans lequel s’est produit l’accident était spécialement adapté à l’activité de la société. S’agissant des chariots utilisés, elle précise que le chariot en cause était équipé de roues motrices spécial sol glissant et que la location du véhicule incluait également la maintenance du chariot avec des visites générales périodiques de contrôle, roulabilité incluse. Pour ce qui est de l’entretien et des visites périodiques sur les transpalettes/chariot, elle précise que le chariot en cause était un T20SP, n’étant pas soumis à l’arrêté du 1er mars 2004. Elle précise que pour ce genre d’équipement, le contrat de maintenance avec la société [4] suffisait à répondre à l’obligation prévue à l’article L. 4321-1 du code du travail. Elle souligne qu’aucune anomalie sur la roulabilité n’a été mentionnée. Elle indique également qu’il y avait bien un klaxon. Elle relève que le conseil de prud’hommes saisi par le salarié l’a débouté de sa demande relative au fait que le matériel mis à sa disposition n’était pas adapté et a rejeté de ce fait le manquement à l’obligation de sécurité allégué.
À titre subsidiaire, elle demande de fixer la mission d’expertise au poste de préjudices listés dans son dispositif.

La caisse primaire d’assurance maladie d’Ille-et-Vilaine a également déposé des conclusions à l’audience du suivant lesquelles elle demande au tribunal de lui décerner acte de ce qu’elle déclare s’en remettre à justice pour statuer sur l’existence d’une faute inexcusable de l’employeur à l’origine de l’accident du salarié le 21 juin 2017.
Dans l’hypothèse où la faute inexcusable de l’employeur serait reconnue, elle demande au tribunal de :
lui décerner acte de ce qu’elle déclare s’en remettre à justice sur la demande de majoration de la rente qui a été versée au salarié sur la base d’un taux d’incapacité de 49 % tel qu’attribué le 23 mars 2021 ;constater qu’un litige en lien avec l’opposabilité du taux d’incapacité attribuée au salarié à l’égard de la société est à ce jour pendant devant la cour d’appel de Rennes ;lui décerner acte de ce qu’elle déclare s’en remettre à justice sur la demande de mise en œuvre d’une expertise formulée par le salarié ;limiter le cas échéant la mission de l’expert au seul poste de préjudices non expressément couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale ;dire et juger que la caisse dispose d’une action récursoire à l’encontre de l’employeur pour les indemnités qui seront à devoir du fait de sa faute inexcusable, en vertu de l’article L. 452-3-1 du code de la sécurité sociale ;condamner la société à lui rembourser l’ensemble des indemnités et provision dont elle sera amenée à faire l’avance au salarié dans les suites de la reconnaissance de sa faute inexcusable, à savoir : la majoration de la rente dans la limite du taux qui est opposable à l’employeur ; les frais d’expertise ; la provision sollicitée par l’assuré d’un montant de 5000 €.
Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il convient de se référer à leurs conclusions sus-citées, et ce en application de l’article 455 du code de procédure civile.

A l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré au 27 mars 2024 et rendue à cette date par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l’article 450 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la faute inexcusable.

Selon l’article L.452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l’accident est dû à la faute inexcusable de l’employeur ou de ceux qu’il s’est substitué dans la direction, la victime ou ses ayants-droits ont droit à une indemnisation complémentaire.

L’employeur commet une faute inexcusable lorsqu’il avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé son salarié et s’est abstenu de prendre une mesure destinée à l’en prémunir.
La faute de l’employeur doit également être en lien direct avec l’accident ou la maladie du salarié.

La preuve de la conscience qu’avait ou qu’aurait dû avoir l’employeur du danger auquel était exposé le salarié incombe à celui-ci.
Il incombe donc à la victime d'un accident du travail invoquant la faute inexcusable de l'employeur de rapporter la preuve que celui-ci n'a pas pris les mesures nécessaires pour le préserver du danger auquel il était exposé.
Le juge n'a pas à s'interroger sur la gravité de la négligence de l'employeur et doit seulement contrôler, au regard de la sécurité, la pertinence et l'efficacité de la mesure que l'employeur aurait dû prendre.

Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l’employeur ait été la cause déterminante de l’accident survenu au salarié mais il suffit qu’elle ait été une cause nécessaire à la production du dommage subi par le salarié, alors même que d’autres fautes auraient concouru au dommage, pour que la responsabilité de l’employeur soit engagée ; d’autre part, la faute de la victime n’a pas pour effet d’exonérer l’employeur de la responsabilité qu’il encourt en raison de sa faute inexcusable (en ce sens, Cass. Ass. Plén. 24 juin 2005, pourvoi n°03-30.038, Bull., n° 7).

Selon l’article L. 4121-1 du Code du travail, l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ; ces mesures comprennent notamment des actions de prévention des risques et de la pénibilité au travail, des actions d’information et de formation et la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés. L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.

Sur la faute inexcusable présumée.

Dans certaines hypothèses, une présomption de faute inexcusable a été instaurée par le législateur. Il en est ainsi pour les salariés titulaires d’un contrat de travail à durée déterminée, les salariés temporaires et les stagiaires en entreprise victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, alors qu’affectés à des postes de travail présentant des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité (dont la définition est donnée à l’article R4624-23 du code du travail), ils n’auraient pas bénéficié de la formation à la sécurité renforcée prévue par l’article L. 4154-2 du Code du travail (article L. 4154-3 du Code du travail).

Il résulte en effet de l’alinéa 1er de l’article L. 4154-2 du Code du travail que les dits salariés doivent bénéficier d’une formation renforcée à la sécurité ainsi que d’un accueil et d’une information adaptés dans l’entreprise dans laquelle ils sont employés. L’obligation de formation incombe à la société utilisatrice laquelle ne peut se retrancher derrière la formation fournie par la société d’intérim et l’ancienneté du salarié dans le métier. Il appartient à la société utilisatrice d’apporter la preuve de la formation à la sécurité renforcée donnée au salarié intérimaire.

La présomption joue :
•même si les circonstances de l’accident sont indéterminées ;
•quelle que soit l’expérience précédente du salarié victime ;
•même si le matériel employé est d'utilisation courante ;
•même si la victime a commis une faute d’imprudence ou une erreur grossière.

L'absence constatée de formation à la sécurité, pénalement sanctionnée, suffit à caractériser la faute inexcusable (en ce sens Cass. soc., 12 déc. 2002, no 01-00.712).

Mais il s’agit d’une présomption simple. L’employeur pourra donc la renverser en rapportant la preuve que les éléments permettant de retenir l’existence d’une faute inexcusable ne sont pas réunis à savoir, ou que le poste n'était pas à risque, ou, s'il l'était, que le salarié a bénéficié d'une formation à la sécurité renforcée.

Dès l’instant où la présomption est écartée, il appartient à la victime d’établir l’existence d’une faute inexcusable.

En l’espèce cependant, le salarié était employé par la société dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée.
Dans ces conditions, la présomption de faute inexcusable n’a pas vocation à s’appliquer à cet accident.

Sur la faute inexcusable prouvée.

Sur l’absence de CACES.

Il n’est pas contesté que le véhicule qui a heurté le salarié était conduit par Monsieur [Y] [K], salarié embauché dans le cadre d’un contrat à durée déterminée et que sa mission a débuté le 16 mai 2017 et s’est achevée le 31 août 2017.

Il est également constant que le véhicule conduit par Monsieur [K] et qui a heurté le salarié est un transpalette porté de type T20SP, correspondant au véhicule visé dans le contrat de location conclu avec la société [5] 16 novembre 2015 soit un véhicule de catégorie 1.
Le salarié soutient que pour conduire un tel véhicule, Monsieur [K] aurait dû être titulaire du CACES.
Le CACES est le certificat d’aptitude à la conduite en sécurité, dispositif d’évaluation des connaissances et du savoir-faire des conducteurs de certains équipements de travail mobiles automoteurs ou servant au levage. Il permet de s’assurer que les salariés disposent des compétences théoriques et pratiques nécessaires à la conduite en sécurité de ce type d’engins.

La société indique elle que le salarié ayant conduit le transpalette en cause ne devait pas être titulaire du CACES mais dispose bien d’une autorisation de conduire en sécurité.

Suivant l’article R. 4323-55 du code du travail, dans sa version en vigueur depuis le 1er mai 2008,
« La conduite des équipements de travail mobiles automoteurs et des équipements de travail servant au levage est réservée aux travailleurs qui ont reçu une formation adéquate.
Cette formation est complétée et réactualisée chaque fois que nécessaire. »

L’article R. 4323-56 dudit code, dans sa version en vigueur depuis le 1er janvier 2007, précise que :
« La conduite de certains équipements présentant des risques particuliers, en raison de leurs caractéristiques ou de leur objet, est subordonnée à l'obtention d'une autorisation de conduite délivrée par l'employeur.
L'autorisation de conduite est tenue à la disposition de l'inspection du travail et des agents du service de prévention des organismes de sécurité sociale.
Les travailleurs titulaires de cette autorisation de conduite bénéficient du suivi individuel renforcé prévu aux articles R. 4624-22 à R. 4624-28 en application du II de l'article R. 4624-23. »

Ainsi, la formation peut prendre deux formes :
la formation interne donnant accès à une autorisation de conduite ; la formation CACES, donnant lieu à l’acquisition d’un attestation de formation.
Ainsi, contrairement à ce qu’allègue le salarié, il n’est pas nécessaire de disposer du CACES pour conduire le transpalette en cause mais l’autorisation de conduite délivrée par l’employeur est elle requise.

En l’espèce, Monsieur [Y] [K] est bien titulaire d’une autorisation de conduite en sécurité délivrée par son employeur le 17 mai 2017 relative au chariot élévateur à conducteur porté catégorie 1 et transpalette gerbeur. La fiche d’état de présence relative à la formation pour la conduite de ce chariot est bien signée par ce salarié et le programme de formation est produit aux débats. Enfin, la fiche récapitulative du candidat permet de constater qu’il a obtenu les points requis pour la conduite du véhicule en cause.
Dans ces conditions, il n’est pas établi comme allégué que le conducteur du chariot qui a heurté le salarié ne bénéficiait pas d’expérience et de l’autorisation requise pour la conduite dudit chariot.
Il convient de relever à ce titre que Monsieur [P] [I] bénéficie de la même autorisation délivrée le 12 avril 2017 par son employeur.
Enfin, Monsieur [Y] [K] avait également bénéficié d’une session du 4 juillet 2017 d’intégration et d’accueil au sein de la société.

Sur les circonstances de l’accident (vitesse excessive, sol glissant, roues du chariot non adaptées au sol).

Le salarié soutient également que le chariot conduit par Monsieur [Y] [K] roulait trop vite, que le sol était glissant et que les roues du chariot n’étaient pas adaptées au sol.

S’agissant de la vitesse à laquelle le véhicule était conduit par Monsieur [Y] [K], il n’est versé aux débats aucune pièce en attestant. La déclaration d’accident du travail ne fait pas état de telles circonstances. Il convient de relever à ce titre que suivant le document intitulé « enquête accident » correspondant selon le salarié à l’enquête du CHST du 28 septembre 2017, il est renseigné sous l’item « vitesse » : « hypothèse ». Le compte rendu d’accident du travail versé aux débats par le salarié (pièce n°3) ne fait également pas état d’une mention relative à la vitesse.
Dans ces conditions, il n’est pas justifié de cette circonstance.

Pour ce qui est du caractère glissant du sol, il convient à nouveau de constater que suivant l’enquête du CHSCT, il est mentionné pour l’item « glissade » : « hypothèse ». La déclaration d’accident du travail ne fait pas état d’un sol glissant ou d’une glissade. De même, le compte rendu suscité ne précise pas cette circonstance, la seule mention « voir avec BM pour vérifier l’état des roues pour éviter le glissement trop fréquent » ne permet d’en conclure qu’en l’espèce le sol était glissant et qu’il y a eu une glissade du chariot ou du salarié, aucune mention ne faisant état d’une telle caractéristique et ne s’agissant là que de mesures proposées.
Le salarié fait valoir que le sol était systématiquement graisseux mais il n’est produit aucune pièce en justifiant. Et, le seul fait qu’il soit précisé sur le contrat de location en face de l’item « renseignements complémentaires » : « roues motrices sol glissant » ne permet d’en conclure que le jour de l’accident le sol était effectivement glissant.
En tout état de cause, même si le sol était glissant, il n’est pas justifié en l’espèce que l’accident est dû à cette circonstance, le compte rendu d’accident du travail n’en fait pas état, de même que la déclaration d’accident du travail ou encore le compte rendu du CHSCT.

Contrairement à ce que soutient le salarié, il est bien précisé dans la déclaration d’accident du travail que le lieu de l’accident est « MIX buffet U2 » à [Localité 7], mention correspondant sans ambiguïté à l’unité n°2. De même, l’enquête du CHSCT précise pour le lieu exact de l’accident « réception U2 ». Il est ainsi justifié que l’accident a bien eu lieu dans cette unité.
La société fait valoir à ce titre qu’elle a fait poser des carreaux commandés le 1er mars 2016 correspondant à un carrelage antidérapant pour cuisines et sols industriels et a fait procéder par la suite à une pose d’un tel carrelage dans le cadre d’une extension et d’un « remodeling » de l’unité de production n°2. Elle justifie du bon de commande du 1er mars 2016 et du dossier d’ouvrages exécutés du 12 septembre 2017 relatif à cette unité de production n°2. Néanmoins il n’est pas justifié que le carrelage anti-dérapant commandé en 2016 a bien été posé dans l’unité n°2 et le dossier d’ouvrages exécutés est en date du 12 septembre 2017 soit postérieur à l’accident et ne peut donc être retenu.
Cependant, ainsi que le relève la société, le rapport d’inspection en date du 20 décembre 2016 établi par les services de la préfecture du Morbihan relatif à l’inspection de l’unité n°2 de l’établissement situé à [Localité 7] fait état pour les locaux et équipements d’une conformité, la seule mention d’une « non conformité mineure » étant relative à la présence de condensation au plafond de la salle de cuisson. Ainsi, alors que l’inspection a porté notamment sur les locaux et équipements, il n’est pas fait état du caractère glissant du sol, une conformité étant retenue pour la maintenance des locaux et équipements ainsi que pour le nettoyage et la désinfection des locaux et équipements.
Il est ainsi établi au vu de ces éléments que l’équipement de l’unité n°2 avait fait l’objet en décembre 2016 soit 6 mois avant l’accident, d’un rapport d’inspection faisant état d’une conformité des locaux et équipements.
Il convient d’en déduire que même si la société était consciente des risques de glissade, le matériel au sol était manifestement adapté.

Pour ce qui est des roues du chariot en cause, il est mentionné sur le contrat de location dudit véhicule du 16 novembre 2015, « roue motrice sol glissant », justifiant par la même que consciente de ce risque, le véhicule loué était équipé de roues adaptées. Cet équipement est confirmé par le courriel de la société [4] (pièce n°19 de la société). Il ne peut être ainsi soutenu que les roues du véhicule loué n’étaient pas adaptées à la situation étant observé en tout état de cause que les circonstances de l’accident ne font pas état d’un rôle causal desdites roues.

Sur l’entretien du véhicule et le système de freinage.

S’agissant du système de freinage, il convient à nouveau de rappeler qu’il n’est pas fait état d’une défectuosité à ce titre ou du caractère non adapté du système de freinage dans le cadre de l’accident. Aucune pièce ne vient au soutien de cette allégation du salarié.

Suivant l’article L. 4321-1 du code du travail,
« Les équipements de travail et les moyens de protection mis en service ou utilisés dans les établissements destinés à recevoir des travailleurs sont équipés, installés, utilisés, réglés et maintenus de manière à préserver la santé et la sécurité des travailleurs, y compris en cas de modification de ces équipements de travail et de ces moyens de protection ».

L’article L. 4321-2 dudit code précise pour sa part que « Il est interdit de mettre en service ou d'utiliser des équipements de travail et des moyens de protection qui ne répondent pas aux règles techniques de conception du chapitre II et aux procédures de certification du chapitre III du titre Ier ».

Suivant le contrat de location longue durée versé aux débats, le numéro du contrat du chariot en cause est le LL7319. Et, suivant les éléments donnés par la société [4], société de location, le matricule du véhicule correspondant à ce contrat de location du 16 novembre 2015 et le matricule 31G01824.
Or, il est justifié que des interventions ont eu lieu sur ce transpalette soit :
le 6 janvier 2017 pour « travaux suite contrôle [9], prise en charge du chariot, graissage roulement moteurs de traction, essais satisfaisant » ; le 5 mai 2017 pour « entretien, visite intermédiaire, prise en charge du chariot, réalisation de l’entretien du chariot selon le check list, essai satisfaisant » ;le 19 mai 2017 pour « remplacement roue motrices, prise en charge du chariot, remplacement de la roue motrice, essai satisfaisant » ;le 2 juin 2017 pour « roue stab + klakon, prise en charge du chariot, remplacement des galets stab, des bagues, des axes, remplacement du cache klaxon, graissage, essai satisfaisant » ;le 15 juin 2017 pour « remplacement galets de fourches, prise en charge chariot, remplacement des galets de fourche, graissage, essai satisfaisant ».
Ainsi, contrairement à ce que soutient le salarié, il est justifié de l’entretien du transpalette au vu des interventions susvisées.

Et, si la société soutient que le transpalette porté T20 SP ne relève pas des vérifications prévues à l’arrêté du 1er mars 2004 relatif aux vérifications des appareils et accessoires, il convient néanmoins de constater que le véhicule a fait l’objet entre le 10 octobre 2016 le 12 octobre 2016, soit moins d’un an avant l’accident, d’une vérification générale périodique par [9], le numéro de série du véhicule étant bien précisé sur ce contrôle soit 31GO1824. Il convient de préciser à ce titre que le rapport de vérification vise l’article 6b, 6c et 9 de l’arrêté, dans sa version en vigueur au moment du contrôle, l’article 6b étant relatif à un essai de fonctionnement qui consiste à s’assurer notamment de l’efficacité de fonctionnement des freins, l’article 9 portant sur un « examen qui a pour objet de vérifier le bon état de conservation de l’appareil de levage et de ces supports, et de déceler toute détérioration susceptible d’être à l’origine de situations dangereuses intéressant notamment les éléments essentiels suivants :
a) Dispositifs de calage, amarrage et freinage, destinés à immobiliser dans la position de repos les appareils de levage mobiles ;
b) Freins ou dispositifs équivalents destinés à arrêter, puis à maintenir, dans toutes leurs positions, la charge ou l'appareil ;
c) Dispositifs contrôlant la descente des charges ;
d) Poulies de mouflage, poulies à empreintes ;
e) Limiteurs de charge et de moment de renversement ;
f) Dispositifs limitant les mouvements de l'appareil de levage et de la charge tels que limiteurs de course, limiteurs de relevage, limiteurs d'orientation, dispositifs anticollision, dispositifs parachutes ;
g) Crochets et appareils de préhension mécanique, électromagnétique ou pneumatique ;
h) Câbles et chaînes de charge.
Cet examen comprend un examen visuel détaillé, complété en tant que de besoin d'essais de fonctionnement ».
Le résultat de la vérification indique qu’il existe un bruit anormal au roulage à vérifier. Et suivant la fiche d’intervention suscitée du 6 janvier 2017, cette vérification a eu lieu suite à l’examen de [9].
Cependant, une fois de plus, il n’est pas établi que ce bruit anormal a joué un rôle dans l’accident du salarié alors qu’il est justifié de la réalisation d’une vérification des équipements en application de l’arrêté suscité, le transpalette n’étant pas soumis à une vérification mensuelle et quatre interventions de la société de location ayant été effectuées en 2017, toutes faisant état d’essais satisfaisants.
La roulabilité a ainsi bien fait l’objet d’une intervention de même que le klaxon.

Sur la formation à la sécurité du salarié.

Le salarié a bénéficié d’une formation des nouveaux embauchés « cuisson U2 » en août 2016.
Il a bénéficié d’une formation sécurité environnement de niveau 1 suivant l’attestation de présence produite aux débats.
Il a validé une formation à la suite d’une évaluation finale en date du mois de décembre 2016 et a obtenu un test théorique formation « produits chimiques » en avril 2017.
Le salarié s’est également vu délivré par l’employeur une autorisation de conduite en sécurité le 12 avril 2017 pour le chariot élévateur à conducteur porté catégorie un et le transpalette gerbeur.

Il résulte ainsi de l’ensemble de ces éléments que la société, a mis en œuvre des mesures pour préserver la sécurité de ses salariés par le biais des divers formations suscitées, de la mise à disposition de locaux adaptés et d’un chariot transpalette ayant fait l’objet d’une vérification annuelle et d’interventions de techniciens suivant lesquelles les essais étaient satisfaisants.

S’il n’est pas justifié que le salarié, qui travaillait de nuit au moment de l’accident, bénéficiait d’un suivi de son état de santé par le médecin du travail en vertu des articles R. 3122-11 et suivants du code du travail, dans leur version en vigueur depuis le 1er janvier 2017, il n’est pas exposé en quoi cela peut permettre d’établir la faute inexcusable alléguée. Il en est de même pour le défaut de production de la fiche de poste du salarié et le document unique d’évaluation des risques et la liste des postes de travail présentant des risques particuliers, le salarié n’étant pas intérimaire comme il l’a déjà été relevé pour ce dernier point.

Il résulte ainsi en définitive de l’ensemble de ces éléments que la société a pris en l’espèce les mesures nécessaires pour préserver la sécurité des salariés au moyen de formations adaptées notamment à la conduite du véhicule en cause, à la mise à disposition de locaux conformes et à la mise à disposition de moyens de travail ayan fait l’objet de vérifications par divers professionnels.

La faute inexcusable alléguée n’est ainsi pas établie.

Les demandes formées à ce titre par le salarié sont rejetées.

Sur les dépens et les frais irrépétibles.

L'équité commande de condamner le salarié à verser à la société la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Partie perdante, le salarié est tenu aux dépens.

Sur l’exécution provisoire.

Compatible avec la nature de l’affaire, elle est ordonnée.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant après débats en audience publique, par jugement rendu contradictoirement, en premier ressort et par mise à disposition au greffe :

DEBOUTE Monsieur [P] [I] de l’ensemble de ses demandes ;

CONDAMNE Monsieur [P] [I] à verser à la société [8] la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [P] [I] aux dépens de l’instance ;

ORDONNE l'exécution provisoire de la présente décision.

Le greffierLa présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Rennes
Formation : Ctx protection sociale
Numéro d'arrêt : 21/00020
Date de la décision : 27/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 09/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-27;21.00020 ?
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