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26/03/2024 | FRANCE | N°22/00059

France | France, Tribunal judiciaire de Rennes, 2ème chambre civile, 26 mars 2024, 22/00059


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE RENNES


26 Mars 2024


2ème Chambre civile
28A

N° RG 22/00059 -
N° Portalis DBYC-W-B7F-JRIJ


AFFAIRE :


[X] [M] [G] [N] [F]


C/

[W] [F]
[D] [F]



copie exécutoire délivrée
le :
à :




DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



COMPOSITION DU TRIBUNAL

PRESIDENT : Sabine MORVAN, Vice-présidente

ASSESSEUR : Jennifer KERMARREC, Vice-Présidente,

ASSESSEUR : Julie BOUDIER, Magistrat, ayant statué seule, en tant que juge rapporteur, sans

opposition des parties ou de leur conseil et qui a rendu compte au tribunal conformément à l’article 805 du code de procédure civile


GREFFIER : Fabienne LEFRANC lors de la mise à dispositio...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE RENNES

26 Mars 2024

2ème Chambre civile
28A

N° RG 22/00059 -
N° Portalis DBYC-W-B7F-JRIJ

AFFAIRE :

[X] [M] [G] [N] [F]

C/

[W] [F]
[D] [F]

copie exécutoire délivrée
le :
à :

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

COMPOSITION DU TRIBUNAL

PRESIDENT : Sabine MORVAN, Vice-présidente

ASSESSEUR : Jennifer KERMARREC, Vice-Présidente,

ASSESSEUR : Julie BOUDIER, Magistrat, ayant statué seule, en tant que juge rapporteur, sans opposition des parties ou de leur conseil et qui a rendu compte au tribunal conformément à l’article 805 du code de procédure civile

GREFFIER : Fabienne LEFRANC lors de la mise à disposition qui a signé la présente décision.

JUGEMENT
Selon la procédure sans audience (article L. 212-5-1 du Code de l’organisation judiciaire) et avec l’accord des parties
En premier ressort, contradictoire,
prononcé par Madame Julie BOUDIER
par sa mise à disposition au Greffe le 26 Mars 2024,
date indiquée à l’issue du dépôt des dossiers
Jugement rédigé par Madame Julie BOUDIER,

ENTRE :

DEMANDERESSE :

Madame [X] [M] [G] [N] [F]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représentée par Maître Isabelle CELERIER de la SELARL CELERIER, avocats au barreau de RENNES, avocats plaidant/postulant

ET :

DEFENDEURS :

Madame [W] [F]
[Adresse 9]
[Adresse 9]
représentée par Maître Hélène LAUDIC-BARON de la SELARL LBP AVOCAT, avocats au barreau de RENNES, avocats plaidant/postulant

Monsieur [D] [F]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
représenté par Maître Hélène LAUDIC-BARON de la SELARL LBP AVOCAT, avocats au barreau de RENNES, avocats plaidant/postulant

Exposé du litige

Monsieur [D] [F] est décédé le [Date décès 8] 2013 à [Localité 17], laissant, pour recueillir sa succession, son épouse, madame [L] [O], ses trois enfants, [D], [W] et [X].

Madame [L] [O] épouse [F] est décédée le [Date décès 4] 2019, laissant, pour recueillir sa succession, ses trois enfants, [D], [W] et [X].

Madame [O] n’a laissé aucune disposition testamentaire.

Antérieurement à leur décès, les parents avaient consenti différentes donations au profit de leurs enfants.

Ainsi et notamment :

- Par acte de Me [B], notaire à [Localité 17], le 23 décembre 1978, monsieur [D] [F] (fils) a reçu une donation en avancement d’hoirie, constituée d’un appartement situé à [Adresse 6], appartement revendu en 1987.

- Par acte de Me [B], notaire à [Localité 17], le 23 décembre 1978, madame [W] [F] a reçu une donation en avancement d’hoirie, constituée d’un appartement situé à [Adresse 6], appartement toujours en sa possession.

- Par acte de Me [C], notaire à [Localité 17], en date des 19, 22 et 25 mars 1994, les trois enfants ont reçu, chacun, une donation. La donation à [D] [F], par préciput et hors part, portait sur 232 parts sociales de la société [14], pour une valeur de 23 200 francs. Les donations respectives à mesdames [W] et [X] [F], en avancement d’hoirie, portaient sur 199 part de ladite société chacune, pour un montant de 11 900 francs.

- Par acte de donation-partage reçu par Me [C], notaire à [Localité 17], en date du 26 décembre 2005, [D] [F] a reçu une donation de 80 189 € outre plusieurs lots immobiliers sis [Adresse 6], pour un montant de 8 994 €, [X] [F] a reçu plusieurs lots immobiliers sis [Adresse 6], pour un montant de 39 712 €, [W] [F] a reçu un lot immobilier sis [Adresse 6], pour un montant de 228 €.

A défaut de pouvoir procéder au partage des biens à l’amiable, madame [X] [F] a sollicité un partage en justice.

***

C’est dans ces conditions que par assignation du 28 décembre 2021, madame [X] [F] a assigné son frère, monsieur [D] [F] (fils) et sa soeur, madame [W] [F], devant le tribunal judiciaire de Rennes.

Dans ces dernières conclusions, signifiées par voie électronique le 18 août 2023, [X] [F] demande au tribunal de :

Ordonner les opérations de liquidation partage de la succession de Madame [L] [O] veuve [F], née le [Date naissance 5] 1929 à [Localité 13] et décédée le [Date décès 4] 2019 à [Localité 17]

Désigner Maître [Y] [K], Notaire à [Localité 17], pour procéder aux opérations

Désigner l'un de Messieurs les Juges du siège pour surveiller les opérations et faire rapport en cas de difficulté

Dire et juger qu'en cas d'empêchement des Juges ou Notaire commis, il sera pourvu à leur remplacement par Ordonnance de Monsieur le Président du Tribunal Judiciaire de RENNES rendue sur simple requête

Dire et juger que Madame [X] [F] devra rapporter à la succession la somme de 117 680 € au titre des donations de sommes d'argent dont elle a bénéficié

Dire et juger que Monsieur [D] [F] devra rapporter à la succession :
. la somme de 53 358 € au titre de la donation en avancement d'hoiries dont il a bénéficié le 23 décembre 1978
. la somme de 177 437,61 € au titre des donations de sommes d'argent dont il a bénéficié

Juger que Monsieur [D] [F] devra justifier de l'utilisation éventuelle des fonds pour l'acquisition de ses biens immobiliers

Dire et juger que Madame [W] [F] devra rapporter à la succession :
. la somme de 53 358 € au titre de la donation en avancement d'hoirie dont il a bénéficié le 23 décembre 1978,
. la somme de 262 911 € au titre de la donation des sommes d'argent dont elle a bénéficié pour l'acquisition de son appartement à [Localité 27]
. la somme de 97 183,14 € au titre du solde des dons manuels perçus

Juger que Madame [X] [F] devra rétablir à la succession la somme de 4 000 € versée pour son compte au titre des droits de succession

Juger que Monsieur [D] [F] devra rétablir à la succession les loyers qu'il a encaissés pour la location de la maison de [Localité 15] en 2020.

Juger que Monsieur [F] devra restituer à l'indivision les meubles qu'il a pris [Adresse 6] (service de vaisselle, verres en cristal, argenterie, tableaux) sachant que ces biens figurent sur l'inventaire successoral.

Condamner Monsieur [D] [F] et Madame [W] [F] à payer à Madame [X] [F] la somme de 3 000 € en application de l'Article 700 du Code de Procédure Civile

Dire n'y avoir lieu d’écarter l'exécution provisoire compatible avec la nature de l'affaire et nécessaire en raison de son ancienneté

Dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de compte liquidation partage avec faculté de distraction au profit des Avocats constitués conformément aux dispositions de l'Article 699 du Code de Procédure Civile.

A l'appui de sa demande, elle fait valoir que sur le fondement des articles 815 et 840 du code civil, elle est fondée à solliciter le partage judiciaire, vu l’impossibilité d’un partage amiable.

Elle note que Me [K] a réalisé différents projets de partage et qu’elle a proposé des rencontres, sans parvenir à obtenir un accord des parties. Elle ajoute que les trois héritiers ont été convoqués par LRAR à l’étude de Me [K] le 1er décembre 2021 et que si [D] [F] et [W] [F] ont accusé réception de cette convocation, ils ne se sont pas rendus au rendez-vous tandis qu’elle même avait fait le déplacement depuis [Localité 10]. Elle ajoute que l’assignation de son frère et de sa soeur en justice fait suite à cette carence de leur part. Au regard de l’impossibilité de réaliser un partage amiable, elle s’estime fondée à demander un partage judiciaire.

En ce qui concerne le choix du notaire, elle indique que les défendeurs ne sont pas légitimes à demander la désignation d’un autre notaire que Me [K], relevant que cette dernière était initialement leur notaire à eux et non pas le sien, que cette dernière a bien entendu leurs demandes et que le fait qu’elle ne suive pas leurs souhaits ne signifie pas qu’elle soit impartiale pour autant. Elle ajoute que le premier rendez-vous a eu lieu à l’étude de ce notaire, où tous les héritiers et leurs conseils étaient présents. Elle note que les défendeurs ont fait obstacle au travail du notaire en ne communiquant pas tous les documents sollicités et en refusant de répondre aux propositions de rendez-vous et à la convocation adressée par LRAR. Elle souligne que le notaire a fait preuve d’une totale impartialité en demandant aux parties d’argumenter sur leurs différends. Elle ajoute qu’à partir du moment où le tribunal judiciaire va se charger de trancher les points litigieux (définition et montant des rapports), il n’y a pas de raison valable d’écarter le notaire initialement choisi. Dans ces conditions, elle sollicite que Me [K] soit désignée pour procéder aux opérations de partage.

Concernant l’actif successoral à partager, la demanderesse indique que celui-ci est composé de comptes bancaires et bien mobiliers, outre trois biens immobiliers : une maison à [Localité 15], un ensemble immobilier sis à [Adresse 19], des biens et droits immobiliers sis à [Adresse 30], auxquels s’ajoutent, selon elle, les rapports dus par les héritiers au titre de donations dont ils ont bénéficié. A cet égard, elle soutient, contrairement aux défendeurs, que les donations perçues doivent être rapportées à la succession.

Elle explique que l’acte de donation-partage en date du 26 décembre 2005 n’a pas eu pour objet, ni pour effet de rétablir l’égalité entre les trois héritiers.

Elle indique à ce titre que les défendeurs ne peuvent prétendre que les héritiers auraient convenu que la soulte due dans le cadre de la donation-partage aurait été versée directement entre eux (sans passer par la comptabilité du notaire) et en même temps assurer qu’il y a eu renonciation au règlement des soultes. Elle ajoute que si renonciation il y avait eu, ce qu’elle conteste, l’acte sous seing privé pour décider des modalités du règlement des soultes (hors comptabilité du notaire), aurait été inutile.

La demanderesse note que seule l’étude de l’acte est à même de révéler si les donations antérieures y avaient été incorporées, ce qui n’est pas le cas. Elle ajoute que les éléments apportés par les défenseurs ne sont pas probants.

Sur l’intervention de leurs parents donateurs pour déclarer qu’il y avait égalité entre les trois enfants, elle indique que cette observation concerne uniquement la donation-partage du 26 décembre 2005, et non les donations effectuées antérieurement. A cet égard, elle rappelle qu’en 1978, son frère et sa soeur avaient perçu une donation en avancement d’hoirie chacun tandis qu’elle-même n’en avait pas perçue. Elle indique que ses parents ne pouvaient donc envisager d’incorporer les donations antérieures à la donation-partage sans rétablir l’égalité du partage soit sans opérer une donation équivalente. A défaut de rétablir l’égalité, l’incorporation des donations antérieures dans la donation-partage aurait eu pour effet de porter atteinte à la réserve héréditaire. La demanderesse en déduit que les donations antérieures n’ont pas été incorporées dans la donation-partage du 26 décembre 2005 et qu’elle est donc fondée à en demander le rapport.

S’estimant fondée à demander le rapport des donations antérieures à la donation-partage du 26 décembre 2005, elle rappelle qu’elle-même, son frère et sa soeur s’étaient initialement accordés pour ne rapporter que les donations manuelles qu’ils avaient reçues en plus par rapport aux autres. Elle n’avait alors pas évoqué certaines des donations manuelles reçues par les uns et les autres puisqu’elles étaient égalitaires. Elle ne s’oppose pas à ce que chacun des co-héritier rapporte les dons manuels qu’il a reçus. Toutefois, elle sollicite que le rapport se fonde sur des justificatifs de ces donations et non des allégations “fantaisistes”. Elle propose alors de retenir, comme donations à rapporter, les éléments suivants :
- pour [X] [F] :
. 45 735 € reçus le 18 octobre 1999
. 45735 € reçus le 6 septembre 2000
. 1 200 € reçus le 19 septembre 2005
. 20 900 € reçus le 9 décembre 2005
. 1 610 € reçus le 13 novembre 2007
. 1 000 € reçus le 21octobre 2008
. 1 500 € reçus le 18 décembre 2013.

Elle indique ne pas avoir reçu de donation en avancement d’hoirie. Par ailleurs, en réponse aux défendeurs, qui assurent qu’elle a perçu bien plus d’argent de la part de ses parents, elle indique que sa soeur [W] ne peut tirer une preuve de relevés bancaires de ses parents qu’elle a elle-même annotés.

Elle demande que la somme de 117 680 € correspondant au total des sommes perçues de la part de ses parents soit rapportée à sa valeur nominale.

En réponse à son frère et sa soeur, qui assurent qu’elle a acquis un bien immobilier ayant augmenté en valeur grâce à l’argent donné par ses parents, elle estime rapporter suffisamment la preuve de ce que le bien en question a été acquis avec l’argent de son conjoint, Monsieur [R]. Ce dernier a acquis le terrain sur lequel la maison est construite, avec ses fonds, le reste ayant été financé par un prêt contracté par le couple. Elle ajoute que la construction de la maison a été financée grâce à un prêt immobilier contracté par le couple et aucunement grâce à l’argent donné par ses parents. Ainsi, elle exclut être redevable d’une quelconque récompense qui tiendrait compte de la valeur actuelle de la maison, l’argent reçu en donation n’ayant nullement servi à acquérir le terrain ou à financer la construction.

Elle ajoute au surplus que la Cour de cassation estime que l’acquisition d’un terrain ne vaut pas acquisition d’un bien au sens de l’article 869 du code civil, quand bien même des dons manuels seraient intervenus postérieurement pour financer la construction (Civ 1ère, 21 mai 1997).

Dans ces conditions, la demanderesse sollicite que seule la somme de 117 680 € soit soumise à rapport.

- pour [W] [F] :
. 53 358 € reçus en avancement d’hoirie le 23 décembre 1978.
. 158 163, 14 € au titre de plusieurs dons manuels, dont 60 980 € ont été utilisés pour l’acquisition d’un appartement à [Localité 27]. (Restent alors : 97 183,14€)
. 262 911 € (rapport dû sur la base de la valeur actuelle de l’appartement : 60 980/187 970 x 810 420)

SOIT : 474 432, 14 €.

- pour [D] [F] :
. 53 358 € reçus en avancement d’hoirie le 23 décembre 1978.
. 257 647, 61 € au titre de dons manuels, dont il faut retirer 80 189 € repris dans la donation-partage du 26 décembre 2005, soit un montant restant de 177 437, 61 €, à ré-évaluer éventuellement selon les justificatifs fournis (ou non) par l’intéressé, qui aurait acquis différents biens immobiliers dont la valeur a augmenté, grâce aux dons manuels reçus.

En ce qui concerne les sommes dues ou payées pendant l’indivision successorale, la demanderesse précise d’une part qu’elle rétablira à la succession la somme de 4 000 € versée pour son compte au titre des droits de succession. A ce sujet, elle précise qu’elle a souhaité, pour payer les droits de succession, vendre un local dont elle avait reçu pleine propriété de la part de ses parents lors de la donation-partage du 26 décembre 2005. Craignant une action en revendication de la part de ses co-héritiers, elle a sollicité leur accord pour cette vente, accord qu’elle n’a pas obtenu. C’est pour cette raison, explique-t-elle, qu’elle n’a pas eu les moyens de régler les frais de succession, qui ont été avancés par l’indivision, et qu’elle souhaite rembourser ce jour.

D’autre part et s’agissant des pénalités pour retard de la déclaration de succession, elle décline toute responsabilité et refuse de se voir condamnée à payer les pénalités de retard. Elle explique que pour déposer la déclaration de succession, le notaire, Me [K] a eu besoin d’une évaluation précise des actifs immobiliers. Or, figurait dans l’actif de la succession un local commercial, sis [Adresse 30], qui avait fait l’objet d’une offre d’achat de la part du locataire, la société [23]. Elle indique que son frère et sa soeur ont refusé l’offre, qu’ils estimaient trop basse et que c’est ainsi que la déclaration de succession a été rendue tardivement et uniquement au nom de madame [X] [F], ses cohéritiers ne souhaitant pas faire leur déclaration de succession avec le même notaire. Ayant réglé sa part des pénalités de retard, la demanderesse affirme ne pas être responsable de ce retard et refuse de payer le reste des pénalités.

Pour continuer, la demanderesse sollicite, contrairement à ses co-héritiers qui souhaitent lui faire porter seule cette charge, que les frais de saisie et de blocage du compte [11] soient supportés par l’indivision dans la mesure où ils résultent de l’intervention des services fiscaux pour régler le solde des pénalités dues pour le retard du dépôt de la déclaration de succession.

Toujours relativement aux sommes dues à l’indivision, la demanderesse sollicite que les loyers perçus par monsieur [D] [F] (fils) pour la location de la maison de [Localité 15] depuis le décès de leur mère soient restitués par lui. Notant que son frère, tout en se dispensant de payer les frais d’électricité, d’eau et de gaz, a mis le bien en location sur le site Abritel, elle sollicite qu’il restitue les loyers à l’indivision.

S’agissant de la taxe foncière du [Adresse 6], réglée par l’indivision, la demanderesse fait remarquer que la taxe n’est pas à son nom, suggérant qu’elle n’a pas à la régler seule.

Enfin, la demanderesse sollicite que son frère restitue à la succession les biens figurant sur l’inventaire successoral et dont il a pris possession dans l’immeuble sis [Adresse 6] (service de vaisselle, verres en cristal, argenterie, tableaux).

Précisant ses intentions quant à la répartition des biens après rapport et remboursement des sommes dues à l’indivision, la demanderesse sollicite que soit ordonné le partage suivant :
- à monsieur [F] seraient attribués : l’ensemble des biens immobiliers sis [Adresse 31] et la moitié des biens sis [Adresse 30]. Il serait également amené à verser une soulte à hauteur de 47 594,64 € à la demanderesse au titre de l’avancement d’hoiriesqu’il a perçu en 1978.
- à madame [W] [F] seraient attribués : la moitié des biens situés [Adresse 30]. Elle serait également amenée à verser une soulte à sa soeur (en confondant les sommes dues au titre des rapports des donations de chacune), à hauteur de 54 168,72€.
- à la madame [X] [F] seraient attribués : le bien sis à [Localité 15], les soultes de ses co-héritiers et par confusion le rétablissement de la somme qu’elle doit au titre des droits de succession lui incombant.

Aux termes de leurs dernières conclusions, signifiées par voie électronique le 25 septembre 2023, [D] [F] et [W] [F] demandent au tribunal de :

-Les RECEVOIR en toutes leurs demandes et les disant bien fondés ;

-ORDONNER les opérations de compte liquidation-partage de la succession de Madame [L] [O] veuve [F] ;

-DESIGNER pour y procéder le Président de la Chambre des Notaires d’[Localité 21] ou tout Notaire par lui délégué à l’exception de Me [K], Notaire à [Localité 17] ;

-DESIGNER tel Magistrat qu’il plaira avec pour mission de veiller aux opérations ;

-DIRE qu’en cas d’empêchement du Magistrat ou du Notaire il sera pourvu à leur remplacement par Ordonnance du Président du Tribunal Judiciaire de RENNES saisie par requête.

-A titre principal :

-JUGER n’y avoir lieu au rapport des donations consenties et en conséquence DEBOUTER
Madame [X] [F] de ses demandes de rapport ;

-A titre subsidiaire :

-JUGER que Madame [X] [F] devra rapporter à la succession la donation manuelle
reçue le 18 octobre 1999 d’un montant de 300.000,00 francs, et dont elle a bénéficié pour l’acquisition d’une maison sise à [Localité 33], et évaluée au regard de la plus-value réalisée ;

-ENJOINDRE à Madame [X] [F] de communiquer au Notaire désigné l’acte d’achat
du bien sis [Localité 33] ;

-JUGER que Madame [X] [F] devra rapporter en plus la somme de 93.648,21euros
correspondant aux autres donations par elle reçues ;

-JUGER que Monsieur [D] [F] devra rapporter à la succession la somme de 53.357,15 euros au titre de la donation reçue le 23 décembre 1978 ;

-JUGER que Monsieur [D] [F] devra rapporter à la succession la somme de 4.500,00 euros au titre des dons manuels par lui reçus ;

-JUGER que Madame [W] [F] devra rapporter à la succession la somme de
53.358,00 euros au titre de la donation reçue le 23 décembre 1978 ;

-JUGER que Madame [W] [F] devra rapporter à la succession la somme de
173.854,53 euros au titre de la donation d’un montant de 280.000,00 francs dont elle a bénéficié pour l’acquisition d’un appartement sis à [Localité 27] ;

-JUGER que Madame [W] [F] devra rapporter en plus à la succession la somme de 16.384,62 euros ;

-JUGER que [X] [F] devra rétablir à la succession la somme de 4.000,00 euros versée pour son compte au titre des droits de succession.

-JUGER qu Madame [X] [F] devra rétablir à Monsieur [D] [F] et Madame
Catherine BINOIS la somme de 1981 euros chacun au titre des sommes indument perçues par elle lors du paiement des droits de succession.

En tout état de cause :

-JUGER que la succession devra verser à Monsieur [D] [F] la somme de 4857.97
euros au titre des charges qu’il a supportées seul pour un bien successoral.

-JUGER que Madame [X] [F] devra verser à la succession la somme de 1022.74 euros au titre des frais de saisine et de blocage du compte supportés par la succession pour elle.

-JUGER que Madame [X] [F] devra verser à la succession la somme de 514 euros au titre de la Taxe Foncière 2019 réglée par la succession au profit de Madame [X] [F].

-ENJOINDRE à Madame [X] [F] de communiquer la totalité des relevés de compte
relatifs à la succession qu’elle a en sa possession ;

-DEBOUTER Madame [X] [F] de ses plus amples demandes.

En défense, [D] et [W] [F] constatent, avec leur soeur, l’impossibilité d’un partage amiable et ne s’opposent pas à ce que soit ordonnée l’ouverture des opérations de comptes liquidation partage. En revanche, ils refusent que Me [K], notaire, soit désignée pour procéder aux opérations. Ils contestent avoir saisi cette dernière de la succession de leurs parents et assurent que c’est madame [X] [F] qui l’a choisie. Déplorant l’absence de prise en compte de leurs remarques et demandes, ils constatent la responsabilité du notaire dans l’impossibilité de parvenir à un partage amiable. Ainsi par exemple, relèvent-ils que malgré leurs remarques, le notaire a refusé de tenir compte des dernières estimations du bien sis à [Localité 15] et qu’il a donc continué à le sous-estimer, faisant obstacle à une juste évaluation des biens figurant à la succession. Ils estiment que seules les observations et demandes de [X] [F] étaient prises en compte, à défaut des leurs. Ils ajoutent avoir proposé d’autres dates de rendez-vous, qui n’ont pas été retenues. Par ailleurs, ils reprochent à Me [K] de n’avoir pas déposé la déclaration de succession dans les temps, entraînant pour eux des pénalités. A ce sujet, ils déplorent avoir été contraints de régler des pénalités alors même que la déclaration envoyée (en retard), l’était sur les seules déclarations et pour le compte de leur soeur, [X] [F]. Ils remettent alors en question l’impartialité du notaire. Par ailleurs, ils relèvent qu’il serait contreproductif de désigner pour les opérations de partage un notaire qui, d’une part n’est pas parvenu à proposer un projet accepté par toutes les parties, et d’autre part, a suscité une “certaine défiance” chez les héritiers. Dans ces conditions, les défendeurs sollicitent que soit désigné le président de la chambre des notaires d’[Localité 21] ou tout notaire délégué par lui.

S’agissant de l’actif successoral, les défendeurs assurent qu’il est composé d’une maison à [Localité 15] estimée à 611 500 €, d’un ensemble immobilier sis à [Adresse 18], des droits immobiliers sis [Adresse 30].

Les défendeurs contestent le principe du rapport à la succession et à titre subsidiaire, leur montant.

Les défendeurs ne nient pas avoir été bénéficiaires, chacun, d’une donation en avancement d’hoiries le 23 décembre 1978. Ainsi, [D] [F] admet avoir reçu un bien (lot immobilier sis [Adresse 6]), qu’il a revendu pour la somme de 57 357, 15 €. [W] [F] admet quand à elle avoir reçu un lot immobilier en avancement d’hoiries à la même date, d’une valeur de entre 50 000 et 55 000 €.

Ils rappellent par ailleurs que :
- chaque héritier ([X] [F] y compris, donc) a reçu des parts de la société [14] en avancement d’hoiries le 19, 22 et 25 mars 1994.
- [W] [F] a reçu la somme de 42 685,72 € en janvier 2000, par tradition manuelle
- [X] [F] a reçu la somme de 45 734,70 € en septembre 2000,par tradition manuelle
- [X] [F] a reçu la somme de 45 734,72 € le 18 octobre 1999, par tradition manuelle
- [X] [F] a reçu la somme de 20 900 €, le 9 décembre 2005, par tradition manuelle

Ils font valoir que par acte notarié du 26 décembre 2005, une donation-partage portant sur la somme de 80 189 € au profit de [D] [F], outre plusieurs lots immobiliers d’une valeur de 8 994 €, plusieurs lots immobiliers sis [Adresse 6] au profit de [X] [F] pour un montant de 39 712 €, un lot immobilier pour [W] [F], pour un montant de 228 €.

Ils affirment qu’il était prévu le règlement de soultes par monsieur [F] (fils) au profit de ses co-héritières. Néanmoins, par acte sous seing privé en date du même jour, passé devant Me [C], notaire, ils ont décidé que “ces sommes n’ont pas été versées par la comptabilité du Notaire, mais directement entre les parties, dès avant ce jour. (...) Monsieur [D] [F] et Madame [L] [F], donateurs (...) interviennent ici pour déclarer qu’il y a égalité entre leurs trois enfants”. Ils précisent que cette renonciation au versement des soultes s’expliquait pas les donations manuelles reçues par [W] et [X] [F]. Ils font remarquer que la soulte due à Madame [W] [F] (42 813€) était d’un montant équivalent à la donation manuelle perçue en janvier 2000. Ils relèvent, sur la base d’un reçu de l’étude de Me [B], notaire, “pour part frais donation-partage par M et Mme [F] à leurs enfants” que les parents avaient la volonté de réaliser une donation-partage dès 1978. Dans ces conditions, ils estiment qu’il serait inéquitable et contraire à la volonté des donateurs, de retenir que les lots reçus en 1978 par [W] et [D] sont rapportables alors que celui reçu par [X] ne l’est pas. Considérant que l’acte de donation-partage du 26 décembre 2005 est venu rétablir l’égalité successorale, ils assurent qu’il n’y a pas lieu pour eux à rapporter les donations antérieures à la succession. Ils ajoutent que les documents manuscrits qu’ils produisent (qui ont permis à Me [C] de préparer la donation-partage) traduisent la volonté des époux [F] d’arriver à une égalité entre leurs enfants. Ainsi, ces documents portent décompte des donations reçues précédemment, à savoir 112 812 € pour [W], 91 469 € pour [D] et 91 469 € pour [X].

A titre subsidiaire, pour le cas où le tribunal considérerait qu’il y a lieu à rapport, les défendeurs font valoir que les montants proposés par la demanderesse sont erronés.

$gt;$gt; Ainsi, s’agissant de la donation reçue par [W] [F] pour acheter un appartement à [Localité 27], ils indiquent que le bien a été acquis à hauteur de 820 000 francs par le recours à un crédit et 280 000 francs par des deniers personnels. [W] [F] sollicite que la donation rapportable soit strictement limitée à la somme qu’elle a reçue de ses parents. Par ailleurs, elle estime que la valeur du bien doit être calculée au regard de son état le jour de la donation. Ainsi, sans compter les travaux, le bien présenterait une valeur de 683 000 €. Elle souhaite donc que la somme à rapporter soit limitée à :
42 685, 72 € (donation) / 167 693, 91 € (valeur d’achat) x 683 000 (valeur actuelle) = 173 854, 53 €.

En ce qui concerne les dons manuels reçus par [W] [F], les défendeurs soulignent que les tableaux réalisés par la demanderesse ne sont pas fiables et qu’il est nécessaire de s’attacher à étudier toutes les pièces de nature à justifier les montants perçus. Ainsi, la somme de 100 000 francs attribuée par [X] [F] à sa soeur correspondrait en réalité à une somme de 50 000 francs, chèque établi à l’ordre de [26]. Ils ajoutent que le chèque n° 1187106 présente la mention manuscrite “[U]”, que la demanderesse produit un talon de chèque raturé sans aucune valeur probante, qui plus est établi à l’ordre de Me [S] et non à celui de [W] [F] (pièces 59 et 65), que le chèque n° 3550034 d’un montant de 2 100 € n’est pas rapportable car chacun a reçu la même somme au moment de Noël 2013. Enfin, [W] [F] affirme que les chèques de 305 et 500 € reçus en janvier 2006 constituent des remboursements de sommes qu’elle avait avancées à sa maman. Dans ces conditions, hormis la donation d’un montant de 280 000 francs, il n’est établi que l’encaissement d’un chèque de 1000 € (N° 19 64411 en avril 2014) et 100 000 francs en 1999, soit 15 384, 62 €. Dans ces conditions, la défenderesse sollicite que le montant des sommes rapportables autres que celle de 280 000 francs soit fixé à la somme de 16 384, 62 €.

$gt;$gt;Pour ce qui concerne les donations reçues par [D] [F], les défendeurs sollicitent que seules les pièces justificatifs soient étudiées, à l’exclusion du tableau établi unilatéralement par [X] [F]. Ainsi, il conviendra d’exclure le chèque n° 1530064 en date du 26 mai 2009, qui n’a pas été versé à monsieur [F] (fils), mais à “réseau pro”. Ils ajoutent que l’intention libérale ne se présume pas et que les chèques effectués en faveur de la société [26] ne sont pas constitutifs de donations à [D] [F]. Ils produisent les factures de la société [26], avec les écrits de madame [L] [F]. En réponse à la demanderesse, qui note que les factures ont été émises par [12], ils précisent que les factures étaient réglées par [26], qui était ensuite remboursée par les bénéficiaires des travaux, à savoir les époux [F]. Ils notent que le fait que monsieur [D] [F] (fils) soit le gérant de la société [26] ne permet pas de déduire que ces règlements constituaient des donations. Ils rappellent que rien n’interdisait au couple [F] de recourir aux services de [26] pour réaliser les travaux au sein de leur maison de [Localité 15]. Monsieur [F] (fils) ajoute qu’il a financé personnellement des travaux en 2017 pour permettre à sa mère de rester chez elle (installation d’une salle de douche-WC au rez-de-chaussée du domicile). De même, il indique avoir réalisé des virements bancaires pour couvrir les découverts de sa mère. Il considère alors que le rapport des donations, s’il doit avoir lieu, ne peut concerner que les sommes suivantes : 1 500 € (chèque n°2016023), 1 000 € (chèque n° 3054524), 2 000 € (chèque n° 1844071), soit un montant total de 4 500 € à rapporter à la succession. Il rappelle par ailleurs qu’il ne lui appartient pas de prouver qu’il n’a pas utilisé ces sommes pour acquérir des biens immobiliers, mais à la demanderesse de démontrer ce qu’elle prétend.

$gt;$gt;S’agissant des donations reçues par [X] [F], les défendeurs notent que la demanderesse reconnaît avoir perçu la somme de 117 680 € dont 45 734,72€ en octobre 1999. Ils affirment que cette somme a servi à acquérir une maison à [Localité 33]. Malgré les dénégations de la demanderesse, ils affirment que l’argent reçu en donation a bien servi à l’acquisition du bien, se fondant notamment sur la comptabilité de Me [T] dont il ressort que [22] a versé la somme de 238 107 francs le 10 novembre 1999 pour le compte de monsieur [R] et madame [F]. Ils en déduisent que la donation a bien servi à acquérir le bien immobilier et sollicitent que la demanderesse rapporte à la succession la donation évaluée au regard de la plusvalue réalisée. Ils ajoutent que monsieur [R], conjoint de [X] [F], a fait ouvrir un compte à ses beaux-parents à la Poste, et que de retraits ont été opérés sur ce compte à [Localité 33] alors que le couple [F] vivait toujours à [Localité 17] à l’époque. Les défendeurs sollicitent alors que soit rapportée à la succession la somme de 21 703, 49 € correspondant à ces retraits. Au total, les défendeurs sollicitent que la demanderesse rapporte à la succession les sommes de 45 734,72 €, 20 900 €, 1200 €, 1610€, 1000€, 1500€, 21 703,49 €, soit une somme de 93 648, 21 €.

Les défendeurs souhaitent par ailleurs que soient établis les comptes d’administration, pour ce qui concerne les sommes versées durant l’indivision.

Ainsi, monsieur [D] [F] sollicite le remboursement, par l’indivision, du paiement des charges de la maison de [Localité 17], qu’il a assurées seul, à hauteur de 4 857,97 €.

Les consorts [F] sollicitent également le remboursement à l’indivision, par madame [X] [F], de la somme de 4000 € correspondant aux droits de succession payés pour elle. Ils ajoutent avoir versé indûment chacun la somme de 1981 € à leur soeur et en demandent la restitution.

Ils réclament aussi la somme de 1022,74 € correspondant aux frais de saisies et de blocage du compte, outre la somme de 514 € due au titre de la taxe foncière 2019.

Ils notent que la demanderesse fait supporter par l’indivision des frais personnels mais s’oppose parallèlement au règlement par l’indivision de dépenses nécessaires (travaux de conservation du bien sis [Adresse 30]). Elle s’oppose également à la mise en location de la maison de [Localité 15], qui pourrait pourtant permettre à l’indivision de financer les travaux, et occupe le bien seule durant l’été.

Les défendeurs, en réponse à la demande madame [F] tendant à ce que monsieur [F] restitue les biens pris dans l’immeuble sis [Adresse 6], sollicitent qu’elle-même restitue les biens qu’elle a pris et notamment les extraits de compte [11] et [22] en sa possession.

S’agissant enfin des dépens et frais irrépétibles, les consorts [F] relèvent que l’absence de règlement amiable n’est imputable ni à la demanderesse ni aux défendeurs et par conséquent, sollicitent le débouté de la demande formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre que les dépens soient laissés à la charge de celui qui les aura exposés.

***

La clôture de l’instruction a été ordonnée le 12 octobre 2023 et l’affaire fixée à l’audience du 23 janvier 2024, audience annulée au regard de la situation du greffe à la deuxième chambre civile.

Les parties ont accepté le principe d’un dépôt sans audience et l’affaire a été mise en délibéré au 26 mars 2024.

Motifs

I- Sur la demande de partage judiciaire et la désignation du notaire

L’article 815 du code civil dispose que “nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu’il n’y ait été sursis par jugement ou convention”.

L’article 840 du même code prévoit quant à lui que “ Le partage est fait en justice lorsque l’un des indivisaires refuse de consentir au partage amiable ou s’il s’élève des contestations sur la manière d’y procéder ou de le terminer ou lorsque le partage amiable n’a pas été autorisé ou approuvé dans l’un des cas prévus aux articles 836 et 837 ".

En l’espèce il convient de constater, d’une part, les contestations qui sont émises de part et d’autre sur le fond, d’autre part, l’accord des parties sur l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage.

Nul n’étant contraint de demeurer dans l’indivision, il y a lieu d’ordonner l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la communauté ayant existé entre [D] [F] et [L] [O] épouse [F], ainsi que des successions de [D] [F] et [L] [O] épouse [F].

Les parties s’accordent sur le principe de la désignation d’un notaire afin de liquider la succession mais non sur le professionnel à choisir.

[X] [F] sollicite que Maître [K], qui a déjà proposé plusieurs projets de partage amiables et qui connaît l’état de la succession soit désignée pour y procéder. Son frère et sa soeur s’y opposent, estimant que la professionnelle a commis des erreurs ayant entraîné des pénalités pour l’indivision, manque d’impartialité, et ajoutant qu’au regard de sa façon de travailler, elle a suscité une forme de “défiance” chez eux qu’ils ne peuvent dépasser.

Aux termes de l’article 1364 du Code de procédure civile, pris en son alinéa 2 : “Le notaire est choisi par les copartageants et, à défaut d'accord, par le tribunal”.

En l’espèce, s’il apparaît effectivement opportun de désigner un notaire ayant une connaissance du dossier dans un souci d’efficacité des opérations de compte liquidation partage, il ne faut pas omettre que celles-ci doivent se dérouler dans un climat apaisé. La défiance manifeste des défendeurs à l’égard de Me [K] n’est pas de nature à assurer le bon déroulement des opérations. Il y a donc lieu d’exclure sa désignation et de désigner un notaire neutre habilité à conduire les opérations litigieuses.

Au regard du lieu du décès et de la localisation des biens de l’actif successoral, il y a lieu de désigner Me [Z], notaire à [Localité 24], pour procéder aux opérations de comptes, liquidation, partage dans les conditions détaillées au dispositif de la présente décision.

Le notaire commis aura pour mission, conformément aux dispositions des articles 1364 et suivants du Code de procédure civile, d'établir un projet d'acte liquidatif qu'il soumettra à la signature des parties et, le cas échéant, d'établir un procès-verbal de difficultés en cas de désaccord.

Dans ce cadre, il appartient en premier lieu au notaire désigné, professionnel de l’immobilier, de procéder à l’évaluation de l’ensemble des biens immobiliers dépendant de la succession et de procéder au rapport des libéralités qui y sont soumises. Pour ce faire, comme le permet l’article 1365 du code de procédure civile, il pourra, si la valeur ou la consistance des biens le justifie, s’adjoindre un expert, choisi d’un commun accord entre les parties ou, à défaut, désigné par le juge commis.

A ce stade de la procédure, rien ne justifie de procéder à la désignation d’un expert judiciaire, étant précisé qu’une mesure d’expertise judiciaire est par principe longue, coûteuse, et aléatoire.

II- Sur les libéralités soumises au rapport

1/ Sur le principe du rapport

L’article 825 du code civil dispose que “ La masse partageable comprend les biens existant à l’ouverture de la succession, ou ceux qui leur ont été subrogés, et dont le défunt n’a pas disposé à cause de mort, ainsi que les fruits y afférents. Elle est augmentée des valeurs soumises à rapport ou à réduction, ainsi que des dettes des co-partageants envers le défunt ou envers l’indivision”.

L’article 826 poursuit : “L’égalité dans le partage est une égalité en valeur. Chaque co-partageant reçoit des biens pour une valeur égale à celle de ses droits dans l’indivision. S’il y a lieu à tirage au sort, il est constitué autant de lots qu’il est nécessaire. Si la consistance de la masse ne permet pas de former des lots d’égale valeur, leur inégalité se compense par une soulte”.

L’article 843 prévoit que : “Tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l’actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu’il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu’il ne lui aient été faits expréssément hors part successorale” .

L’article 860 ajoute que “le rapport est dû de la valeur du bien donné à l’époque du partage, d’après son état à l’époque de la donation” et l’article 860-1 de poursuivre “le rapport d’une somme d’argent est égal à son montant. Toutefois, si elle a servi à acquérir un bien, le rapport est dû de la valeur de ce bien, dans les conditions prévues à l’article 860".

En l’espèce, il n’est pas contesté que [D] [F] fils et [W] [F] ont été bénéficiaires d’une donation en avancement d’hoiries chacun le 23 décembre 1978.

Madame [F] soutient que ces donations sont “rapportables” à la succession.

Pour commencer, il convient de relever que l’acte notarié du 23 décembre 1978 portant donation à monsieur [D] [F] fils contient la mention suivante : “La présente donation étant faite en avancement d’hoirie, sera rapportable aux successions des donateurs, conformément aux dispositions légales, auxquelles il n’est apporté aucune dérogation”. L’acte notarié pris à la même date et portant donation à [W] [F] comporte la même mention.

Ensuite, les défendeurs soutiennent que par acte de donation-partage en date du 26 décembre 2005, leurs parents ont rétabli l’égalité dans la succession, de sorte qu’ils n’auraient pas à rapporter les donations reçues en 1978. Or, il résulte de l’étude de l’acte, de la lecture de l’acte sous seing privé daté du même jour et des déclarations des parties que tel n’a pas été le cas.

En effet, l’acte de donation-partage énumère les donations antérieures dans les “déclarations des DONATEURS” au paragraphe “IMPOT SUR LA MUTATION”. La liste des donations antérieures comprend les donations litigieuses du 23 décembre 1978, outre les donations de parts sociales au bénéfice des trois héritiers. Il n’est aucunement mentionné une donation équivalente à celles du 23 décembre 1978 qui aurait été accordée à [X] [F] avant l’acte de donation-partage de 2005.

En outre, il est à noter que l’acte du 26 décembre 2005 ne mentionne à aucun moment la volonté des époux [F] de réincorporer les donations du 23 décembre 1978. Cela est d’autant plus surprenant qu’ils ont souhaité que soit mentionné le prêt accordé à leur fils pour un montant de 80 189 €, prêt qu’ils entendaient transformer en don. Au regard de cette mention, nul doute que si telle avait été leur volonté, les donateurs n’auraient pas manqué de faire acter par un professionnel leur souhait de réintégration des donations antérieures.

Par ailleurs, s’il existait une donation-antérieure au bénéfice de [X] [F], équivalente à celle de ses frère et soeurs, là encore, les donateurs n’auraient pas manqué de le mentionner dans l’acte de donation-partage du 23 décembre 2005.

A défaut d’une mention précise dans l’acte notarié, il ne peut, comme souhaiteraient le faire les défendeurs, être procédé à une interprétation de l’acte pour en déduire que les donations de 1978 y avaient été fictivement réincorporées alors que cette volonté des donateurs n’apparaît nulle part dans le-dit document.

Par ailleurs, avec la demanderesse, il est à noter qu’il existe, au sein de l’acte notarié du 26 décembre 2005, un paragraphe intitulé “PAIEMENT DES SOULTES” qui expose :

“Les soultes d’un montant de 46 142 € dues par Monsieur [F] [D] [fils] ont été payées comptant ce jour-même, directement et hors la comptabilité du notaire soussigné à madame [E] née [F] [W] et à Mademoiselle [F] [X] qui le reconnaît et lui en donne quittance”. A ce propos et toujours dans l’idée de démontrer que l’acte de donation partage de 2005 a rétabli l’égalité, les défendeurs mentionnent l’existence d’un acte sous seing privé daté du même jour qui mentionne :
“Que suivant acte reçu par Me [C], notaire à [Localité 17], en date de ce jour,ils ont reçu de leurs parents Monsieur et Madame [D] [F] demeurant à [Localité 17] des biens immobiliser sis à [Adresse 6].
Qu’aux termes dudit acte Monsieur [D] [F] devait à sa soeur madame [W] [E] la somme de 42 813 € et à sa soeur Mlle [X] [F] la somme de 3329€, que ces sommes n’ont pas été versées par la comptabilité du Notaire mais directement entre les parties dès avant ce jour,
Madame [E] et Mlle [X] [F] reconnaissent ce réglement et renoncent à inquiéter en quoi que ce soit Mr [D] [F] à ce sujet.
Mr [D] [F] et Madame [L] [F] donateurs demeurant à [Adresse 20], interviennent ici pour déclarer qu’il y a égalité entre leurs 3 enfants et ils dispensent Me [C] de faire constater par sa comptabilité le réglement des soultes”.

Au sujet de cet acte sous seing privé, il est à retenir que contrairement aux allégations des défendeurs, il ne permet pas de constater une quelconque renonciation de la part de [X] et [W] [F] aux soultes dues par leur frère. Qui plus est et ainsi que le souligne la demanderesse, un tel acte n’aurait eu aucun intérêt ni aucune utilité si renonciation il y avait eu. Enfin, à défaut de précision autre, la mention relative à “l’égalité” des héritiers doit être considérée comme portant sur la donation-partage du 26 décembre 2005 et sur le règlement des soultes par monsieur [F] (fils) qui permettait effectivement d’équilibrer ladite donation-partage, chacun recevant la somme de 43 041 € et non sur la succession entière et définitive.

Les défendeurs affirment qu’il serait inéquitable et contraire à la volonté de leurs parents de retenir que les lots reçus en 1978 par [W] et [D] [F] seraient rapportables alors que celui reçu par [X] [F] ne le serait pas. A cet égard, il est à noter que le tribunal n’est aucunement en mesure de savoir quel “lot” ils évoquent, aucune preuve n’étant rapportée de l’existence d’une donation à leur soeur équivalente à celle reçue par eux. De même, les documents fournis (notes manuscrites du notaire, mention “pour part frais donation partage par M et Mme [F] à leurs enfants”) ne suffisent pas à prouver l’existence d’une telle donation équivalente, quand bien même la volonté des donateurs de parvenir in fine à l’égalité entre leurs héritiers n’est pas remise en question. Après étude des documents produits, il est possible de conclure que les trois héritiers ont bien reçu la même somme en 2005, soit 43 041 €. Dans ces conditions, [X] [F] n’ayant pas reçu de donation équivalente à celle reçu en 1978 par son frère et sa soeur, reste déficitaire par rapport à ses co-partageants qui ont tous les deux perçus la somme de 43 041 € en plus de la donation de 1978. D’où il s’en suit que les donations de 1978 doivent être rapportées.

Dans ces conditions et au regard des éléments ci-dessus développés, il y a lieu de considérer que la donation-partage en date du 26 décembre 2005 n’a pas rétabli l’égalité entre les donataires et d’ordonner le rapport à la succession des donations antérieures.

2/ Sur l’étendue des rapports

Au regard des éléments apportés par les parties, il y a lieu de calculer ainsi les rapports dus à la succession.

- Rapports dus par madame [X] [F]

La demanderesse tient à rappeler qu’elle n’avait initialement mentionné que certaines donations manuelles parce que d’un commun accord avec ses co-héritiers, il avait été décidé que les co-partageants ne rapporteraient que ce qu’ils avaient perçu en plus par rapport aux autres. Elle est favorable à ce que chacun rapporte l’intégralité de ce qu’il a reçu.

Madame [F] estime devoir rapporter 117 680 € au titre des dons manuels perçus.

En défense, son frère et sa soeur considèrent qu’elle doit verser la somme de 45 734,72 € réévaluée à hauteur de la valeur de la partie de sa maison acquise grâce à cette somme, outre les libéralités à hauteur de71 944,72 €, outre 21 703, 49 € retirés sur le compte des époux [F] enregistré à la Poste de [Localité 33], là où travaillait le conjoint de madame [X] [F], soit au total 93 648, 21 € au titre des libéralités et 45 734, 72 € à réévaluer, soit au minimum 139 382, 93 € (dans l’attente de la réévaluation de la donation manuelle ayant servi, selon eux, à acquérir la maison de [Localité 33]).

S’agissant de la maison acquise à [Localité 33], il résulte du reçu N°34841 de Me [T], notaire à [Localité 16], que la somme de 26 500 francs ayant servi à acquérir le terrain de monsieur [R] et madame [X] [F] a été versée par monsieur [R] seul. En outre, il résulte du reçu N°34842 du même notaire, que la somme de 238 107 francs a été versée par la Poste pour le compte de monsieur [R] et madame [F], ce qui vient attester du fait que le couple a contracté un prêt auprès de la Poste pour acquérir le bien. Ils n’ont alors pas utilisé les fonds donnés par monsieur et madame [F] (parents). Dans ces conditions, la libéralité de 45 734,72 € sera rapportée sans ré-évaluation du montant au regard du prix actuel de la maison de madame [X] [F] et monsieur [R].

S’agissant des sommes retirées sur le compte de monsieur et madame [F], ouvert à [Localité 33], il y a lieu de considérer que, sans preuve de l’intention libérale, les sommes sont à rapporter. En effet, sans élément de réponse au moyen, ni justificatif de la demanderesse, il n’y a pas lieu de considérer que ces sommes ont été données manuellement hors part successorale et avec dispense expresse de rapport. Les défendeurs suggèrent qu’il existe un recel successoral mais ne sollicitent que le rapport desdites sommes à la succession. A défaut de pouvoir démontrer clairement un recel successoral, et au regard malgré tout des retraits effectués régulièrement sur le compte de monsieur et madame [F] à [Localité 33] alors même que ces derniers habitaient à [Localité 17], considérant que l’intention libérale ne peut se présumer, il y a lieu de condamner madame [X] [F] à rapporter les sommes à la succession, soit un montant de 21 703, 49 €.

Sur la base de ces éléments et des justificatifs fournis par les parties, il y a lieu d’ordonner le rapport à la succession les sommes suivantes :
- 45 734, 70 € (18/10/1999)
- 45 734, 70 € (06/09/2000)
- 1200 € (19/09/2005)
- 20 900 € (09/12/2005)
- 1 610 € (13/11/2007)
- 1000 € (21/10/2008)
- 1500 € (18/12/2013)
- 21 703, 49 € (retraits)
soit un montant total de 139 382, 89 € au titre des dons manuels perçus et des retraits opérés, étant précisé que la somme de 45 734, 70 € perçue en 1999 pour l’acquisition de sa maison n’a pas été utilisée aux fins d’acquisition de sa maison et doit donc être prise en compte au titre d’une simple libéralité.

- Rapports dus par madame [W] [F]

[W] [F] sera tenue de rapporter la donation reçue en avancement d’hoirie le 23 décembre 1978, soit 53 358 €.

S’agissant des sommes reçues à titre de dons manuels, madame [W] [F], dans ses échanges avec la demanderesse, a pu communiquer un tableau récapitulatif des sommes qu’elles a perçues et qui se composent des liquidités reçues par versement ou chèque et des sommes versées par le notaire.

Il y a lieu de se rapporter à cette base de calcul proposée par la défenderesse elle-même et de retenir les sommes de :
- 15244,90 € (chèque N° 4622181) 15/10/1999
- 2126,66 € (chèque N° 9176958) 10/10/2000
- 2286, 74 € (chèque N° 9480760) 14/09/2001
- 2287 € (chèque N° 5484319) 20/03/2002
- 305 € (chèque N° 5484312) 03/03/2002
- 1830 € (chèque N° 5484340) 15/05/2002
- 3811, 26 € (chèque N° 2941605) 21/11/2002
- 575 € (chèque N° 1069598) 22/03/2004
- 2300 € (versement) 16/06/2004
- 1000 € (chèque N° 1127730) 28/10/2004
- 3000 € (chèque N° 1187101) 20/05/2005
- 1600 € (chèque N° 1187105) 1/06/2007
- 2745 € (chèque N° 1243385) 12/01/2006
- 200 € (chèque N° 1474841) 2008
- 1229 € (chèque N° 1292068) 27/12/2006
- 2000 € (chèque N° 1844079) 30/11/2012
- 2100 € (chèque N° 133550034.F) 25/12/2013
- 1000 € ( chèque N° 1964411) 01/04/2014
- 500 € (chèque N° 1795642)
- 9146, 94 €
- 9146, 94 €
- 21 045, 43 €
- 8753, 32 €
- 3674, 02 €
- 74, 40 €
= 97 981,61 € au titre des sommes rapportables, étant précisé que certains montants contestés par la défenderesse (15 244,90 € par chèque N° 2860251 à l’ordre de [26], 1 000 € par chèque N° 1187106 à l’ordre de “[H] [E]”, - et non “[U]” - 945, 91€ par chèque N° 1091617 à l’ordre de Me [W] [S], 945, 91 € par chèque N° 1091619 à l’ordre de Me [W] [S]) ont été décomptés, et d’autres non (2100 € chèque N° 133550034.F 25/12/2013), la défenderesse n’apportant pas la preuve qu’il s’agissait d’un don pour Noël que tous les enfants auraient reçu et (chèques de 305 et 500 € dont la défenderesse ne rapporte pas la preuve qu’il s’agissait de sommes avancées pour le compte de sa maman), étant précisé en outre que la somme de 42 685, 72 € versée par virement du notaire sera prise en compte ultérieurement au titre de la valorisation du bien qu’elle a servi à acquérir.
S’agissant précisément de la somme reçue en donation pour l’achat d’un appartement à [Localité 27], il est à considérer, avec la défenderesse, que seule la somme de 42 685,72 € pourra être retenue au titre de la donation ayant servi à financer une partie du bien, puisqu’il résulte de la lecture de l’acte de vente dudit bien que seule cette somme a été apportée à titre personnel, le reste ayant été financé au moyen d’un prêt. Par ailleurs, et suivant l’article 860 du code civil, le rapport est dû de la valeur du bien donné à l’époque du partage, d’après son état à l’époque de la donation. Aussi, il y a lieu de prendre en considération la valeur du bien au jour de la donation, soit en janvier 2000 (donc avant travaux), soit 1 100 000 francs ou 167 693,92 €. Enfin, et s’agissant de la valeur actuelle du bien, il y a lieu de la fixer à 800 000 €, ainsi qu’estimé par l’expert sollicité par madame [W] [F], l’état du logement et la nécessité éventuelle de travaux (et donc de réduction du prix) n’étant pas avérée.

Il y a donc lieu de fixer ainsi qu’il suit la somme rapportable au titre de la donation de cette somme :
42 685,72 (donation) / 167 963,92 (valeur d’achat) x 800 000 (valeur actuelle) = 203 309 €. Cette somme sera rapportable à la succession.

Au regard de ces éléments, il y a lieu d’ordonner le rapport à la succession la somme totale de 354 648, 61 € détenue par madame [W] [F].

- Rapports dus par monsieur [D] [F]

Monsieur [F] sera tenu de rapporter à la succession la somme reçue en avancement d’hoirie le 23 décembre 1978, à hauteur de 53 358 €.

S’agissant des dons manuels, la demanderesse en évalue le montant à la somme de 257 647, 61 € dont elle retire le prêt de 80 189 € transformé en don par l’acte de donation-partage du 26 décembre 2005, soit un montant restant de 177 437, 61€. Madame [X] [F] sollicite à cet égard que cette somme puisse être ré-évaluée selon les justificatifs fournis par son frère, qui aurait acquis différents biens immobiliers grâce à ces dons, et dont la valeur aurait augmenté. En défense, les consorts [F] relèvent que la somme sollicitée par leur soeur n’a été calculée que sur la base de suppositions et d’allégations, qui ne sont aucunement justifiées. Ils ajoutent que les chèques établis à l’ordre de [26], dont il était le gérant, ne peuvent être assimilées à des donations. Monsieur [D] [F] (fils) limite à la somme de 4 500 € à rapporter par lui à la succession, précisant que c’est à la demanderesse de prouver ce qu’elle allègue s’agissant de ses acquisitions immobilières.
A cet égard, il y a lieu de relever, avec les défendeurs, que l’intention libérale ne se présume pas et de fait, d’exclure les chèques émis à l’ordre de [26] des sommes à rapporter. Il y a lieu de considérer, à l’instar des défendeurs, que les factures émises au nom de [26] par [12] correspondent au travaux effectués dans la maison de [Localité 15] appartenant au époux [F] et de noter que les factures émises au profit de la société [26] correspondaient au remboursement par le couple, des sommes avancées par elle auprès de [12], pour ces travaux.

De même, seront exclues du tableau de madame [X] [F], basé sur le tableau de madame [W] [F], les sommes dont il n’est pas suffisamment établi que monsieur [D] [F] en a été bénéficiaire.

De même, seront exclues les sommes qui ont déjà été incluses dans le prêt de 80 189 € repris dans la donation-partage (cf tableaux respectifs de [X] et [W] [F]).

Au regard des éléments fournis par les parties, il y a lieu de fixer le rapport dû par monsieur [D] [F] au titre des dons manuels reçus, exclusion faite de la somme de 80 189 €, aux sommes suivantes :

- 7 622 € (chèque N° 9961563, 16/04/1997)
- 12 196 € (chèque N° 2860269, 13/10/1999)
- 3 049 € (chèque N°2860270, 13/10/1999)
- 10 671 € (chèque N°6530898, 13/11/1999)
- 4 269 € (chèque N°8509574, 20/01/2000)
- 13 720 € (chèque N° 2163022, 22/05/2000)
- 7 622 € (chèque N°2163023, 22/05/2000)
- 7 622 € (chèque N°9176946, 30/08/2000)
- 15 245 € (chèque N°9176950, 22/09/2000)
- 6 098 € (chèque N°9176951, 22/09/2000)
- 10 000 € (chèque N°1292078, 28/12/2006)
- 800 € (chèque N°1691356, 12/01/2011)
- 750 € (chèque N°1844053, 01/05/2012)
- 404 € (chèque N°1795652, 21/11/2013)
- 1 000 € (chèque N°1964412)
- 400 € (chèque N°1924457)
- 2 100 € (chèque N°1947392, 25/12/2013)
- 2 000 € (chèque N°1844071, 14/11/2012)
- 1 500 € (chèque N°2018023, 14/01/2015)
- 1 000 € (chèque N°3054524, 28/04/2015)
soit un total de 108 068 €, dont il devra le rapport à la succession.

La demanderesse fait valoir que monsieur [D] [F] a acquis différents biens immobiliers à l’aide de ces sommes, dont la valeur pourrait devoir être réévaluée. Notamment, elle évoque un terrain à [Localité 29], un terrain à [Localité 32], un appartement à [Adresse 28], une villa à [Localité 27]. Toutefois, à défaut de rapporter la preuve de l’utilisation des dons manuels par le défendeur pour l’acquisition de ces biens, les sommes devront être rapportées en valeur.

III- Sur les comptes d’administration de l’indivision successorale

En ce qui concerne les droits de succession versés par l’indivision pour le compte de madame [X] [F], les parties s’accordent sur le remboursement par la demanderesse, qui devra donc rembourser 4 000 € à l’indivision.

S’agissant du paiement des pénalités de retard de la déclaration de succession, la demanderesse note que le retard dans le dépôt de la déclaration de succession par Me [K] est lié à une action dilatoire de la part de ses co-héritiers, qui ont refusé l’offre d’achat du locataire du bien sis [Adresse 30], retardant ainsi l’évaluation précise de l’actif immobilier et empêchant, de fait, le notaire de déposer la déclaration complète de succession dans les temps. Elle fait valoir que son frère et sa soeur ont ensuite annoncé à Me [K] leur refus qu’elle représente leurs intérêts dans l’établissement de la succession, conduisant le notaire à faire une déclaration de succession à son seul nom. Dans ces conditions, elle ne s’estime pas responsable des pénalités de retard appliquées par l’administration fiscale, dont elle a d’ailleurs réglé le tiers.

Les défendeurs réclament aussi la somme de 1 022, 74 € correspondant aux frais de saisie et de blocage du compte [11]. La demanderesse note que pour les raisons précédemment expliquées, elle n’est pas responsable du retard dans la déclaration et que les frais de blocage ayant été mis en oeuvre par les services fiscauxpour régler le solde des pénalités pour le retard du dépôt de la déclaration de la succession, ils doivent être assurés par l’ensemble de l’indivision.

Au regard des éléments avancés par les parties, il n’y a pas lieu de faire supporter à madame [X] [F] seule les pénalités et autres frais de blocage du compte, la déclaration de succession n’ayant manifestement pas été retardée de son seul fait. Ces frais, d’un montant de 1 022,74 € resteront à la charge de l’ensemble de l’indivision.

Monsieur [F] sollicite le remboursement par l’indivision des sommes versées par lui seul pour assurer les charges de la maison de [Localité 17], à hauteur de 4 857, 97 €, ce dont il justifie. Cette somme devra donc lui être remboursée par l’indivision.

D’autre part madame [W] [F] et monsieur [D] [F] assurent avoir chacun versé la somme de 1.981 euros au bénéfice de Madame [X] [F] qui l’aurait reçue indûment selon le nouveau calcul des droits de succession. Ils en sollicitent le remboursement. Ils notent que [X] [F] a versé 12 582 € et a demandé le prélèvement de 4 000 € sur l’actif successoral, à charge de le rembourser ultérieurement et qu’elle a donc versé 16 582 € tandis qu’ils ont versé 17 185 € chacun. A cet égard et à défaut de démontrer les sommes dues et les sommes payées, la carence probatoire des défendeurs doit conduire à les débouter de leur demande, la production de mails n’étant pas suffisante à établir clairement les droits de chacun et les éventuels dettes.

En ce qui concerne la taxe foncière de 514 € due pour le local sis [Adresse 6], alors que les défendeurs réclament que [X] [F] la prenne à son compte, affirmant qu’elle en est redevable à titre personnel, la demanderesse fait valoir que la taxe n’est pas émise à son nom et que c’est l’indivision qui l’a réglée par un chèque co-signé par tous les héritiers. A défaut pour les défendeurs de rapporter la preuve de ce que cette taxe doit être supportée à titre personnel par madame [X] [F], la somme de 514 € restera à charge de l’indivision.

La demanderesse sollicite que monsieur [F] rembourse à l’indivision les loyers perçus par lui pour la location de la maison de [Localité 15] en 2000, il y a lieu de faire droit à cette demande.

S’agissant de l’appropriation de biens meubles dont [D] et [X] [F] s’accusent mutuellement, il y aura lieu, pour le notaire, de procéder à une répartition équitable des biens suivant l’inventaire successoral établi.

En tout état de cause, il conviendra au notaire d’établir les comptes d’administration de chacun des indivisaires.

IV- Sur les demandes accessoires

Il convient de prévoir que les dépens de la présente procédure seront compris dans les frais privilégiés de partage de la succession.

Compte tenu du contexte familial du présent litige, l’équité commande de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de l’une ou l’autre des parties.

L’exécution provisoire de la présente décision est de droit et aucune circonstance du litige ne justifie d’y déroger.

PAR CES MOTIFS

ORDONNE l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la communauté ayant existé entre [D] [F] et [L] [O], ainsi que des successions de [D] [F], décédé le [Date décès 8] 2013 à [Localité 17] et de [L] [O] épouse [F], décédée le [Date décès 4] 2019 à [Localité 17] ;

COMMET pour y procéder Me [Z], notaire à [Localité 24], demeurant [Adresse 2], [Courriel 25], tel [XXXXXXXX01] ;
DIT que le notaire commis aura pour mission, conformément aux dispositions des articles 1364 et suivants du Code de procédure civile, d’établir un projet d’acte liquidatif qu’il soumettra à la signature des parties et, le cas échéant, d’établir un procès-verbal de difficultés en cas de désaccord ;

DESIGNE le juge de la mise en état de la 2ème chambre du tribunal judiciaire de Rennes pour surveiller ces opérations et faire rapport à la juridiction de jugement en cas de désaccords persistants ;

DIT qu’en cas d’empêchement, le notaire désigné pourra être remplacé par simple ordonnance rendue sur requête du juge commis ;

FIXE à la somme de 2 100 € le montant de la provision à valoir sur les émoluments du notaire commis;

DIT que cette provision sera versée directement entre les mains du notaire commis par chacune des parties, à parts égales, soit 700 € chacune ;

AUTORISE en cas de carence de l’une des parties dans le paiement de sa part de provision, une autre à approvisionner en ses lieu et place ;

DISPENSE, le cas échéant, la partie bénéficiaire de l’aide juridictionnelle de versement d’une provision;

RAPPELLE que le notaire commis pourra s’adjoindre si la valeur ou la consistance des biens le justifie, un expert choisi d’un commun accord entre les parties ou à défaut, désigné par le juge commis;

REJETTE, à ce stade de la procédure, la demande des parties aux fins de désignation d’un expert judiciaire pour évaluer les biens dépendants de la succession et/ou donnés soumis à rapport ;

ETEND la mission de Me [A] [Z], notaire, à la consultation des fichiers FICOBA et FICOVIE pour le recueil des données concernant l’identification de tout compte bancaire ou postal, ou contrat d’assurance-vie ouverts au nom de monsieur [D] [F] ou madame [L] [O] épouse [F], aux dates qu’il indiquera à l’administration fiscale chargée de la gestion de ce fichier ;

ORDONNE à cet effet et au besoin REQUIERT les responsables des fichiers FICOBA et FICOVIE, de répondre à toute demande dudit notaire (art L 143 du LFP) ;

ORDONNE le rapport à la succession des époux [F] des donations consenties à leurs héritiers ainsi qu’il suit :
- 139 382, 89 € à rapporter par [X] [F] au titre des dons manuels perçus de ses parents et des retraits effectués sur le compte de ces derniers à [Localité 33] ;
- 53 358 € à rapporter par [D] [F] au titre de la donation en avancement d’hoirie reçue le 23décembre 1978 ;
- 108 068 € à rapporter par [D] [F] au titre des dons manuels perçus de ses parents ;
- 53 358 € à rapporter par [W] [F] au titre de la donation en avancement d’hoirie reçue le 23 décembre 1978 ;
- 97 981,61 € à rapporter par [W] [F] au titre des dons manuels reçus de ses parents ;
- 203 309 € à rapporter par [W] [F] au titre de la valeur du bien acquis partiellement grâce à un don manuel de la part de ses parents, évalué au jour de la donation ;

DIT que ces rapports se feront selon les règles applicables en la matière et notamment prévues à l’article 860 du code civil ;

CONDAMNE [X] [F] à rétablir à la succession la somme de 4 000 € versée pour son compte par l’indivision au titre des droits de succession ;

CONDAMNE [D] [F] à rétablir à la succession les loyers encaissés pour la location de la maison de [Localité 15] en 2000 ;

DIT que la somme de 4 857, 97 € acquittée par monsieur [D] [F] (fils) seul devra être inscrite au passif de la succession des époux [F] et au besoin condamne la succession à verser à monsieur [D] [F] ladite somme ;

DIT que la somme de 1 022,74 € correspondant aux pénalités de retard de déclaration successorale devra être inscrite au passif de la succession des époux [F] ;

DIT que la somme de 514 € correspondant à la taxe foncière pour le logement sis [Adresse 6] devra être inscrite au passif de la succession des époux [F] ;

DEBOUTE les défendeurs de leur demande de condamnation de la demanderesse à leur verser 1981 € chacun au titre des droits successoraux ;

DIT qu’il appartiendra aux parties et/ou au notaire commis de déterminer la date de jouissance divise conformément aux dispositions de l’article 829 du code civil ;

RAPPELLE que le notaire désigné dispose d’un délai d’un an à compter de la présente décision pour dresser un état liquidatif qui établit les comptes entre copartageants, la masse partageable, les droits des parties, la composition des lots à répartir ;

RAPPELLE que ce délai sera suspendu dans les conditions de l’article 1369 du code civil ;

RAPPELLE que le notaire commis devra convoquer d’office les parties et leurs avocats et pourra solliciter de celles-ci, dans le délai qu’il leur impartit, tout document utile à l’accomplissement de sa mission ;

DIT que le notaire commis rendra compte au juge commis des difficultés rencontrées et pourra solliciter de celui-ci toute mesure nécessaire à l’accomplissement de sa mission (injonctions, astreintes, désignation d’un expert en cas de désaccords, désignation d’un représentant à la partie défaillante, vente forcée d’un bien...) ;

RAPPELLE que les parties pourront à tout moment abandonner la voie du partage judiciaire et réaliser entre elles un partage amiable, le juge commis étant alors informé sans délai par le notaire commis afin de constater la clôture de la procédure judiciaire ;

RAPPELLE qu’en cas de désaccord des co-partageants sur le projet d’état liquidatif dressé par le notaire, ce dernier transmettra sans délai au juge un procès-verbal reprenant les dires des parties, un exposé précis et exhaustif des points de d’accord et de désaccord des parties, ainsi que le projet d’état liquidatif ;

RAPPELLE au notaire commis qu’en cas d’inertie d’un indivisaire, il lui appartient de solliciter la désignation d’un représentant à celui-ci, conformément aux dispositions de l’article 841-1 du code civil;

DIT que les dépens de la présente procédure seront compris dans les frais privilégiés de partage des successions ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes concurrentes au titre des frais irrépétibles.

RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit à titre provisoire ;

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Rennes
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/00059
Date de la décision : 26/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 01/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-26;22.00059 ?
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