TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:
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6ème chambre 1ère section
N° RG 22/04298 -
N° Portalis 352J-W-B7G-CWSWO
N° MINUTE :
Assignation du :
05 avril 2022
JUGEMENT
rendu le 27 août 2024
DEMANDERESSE
SDC [Adresse 2] représenté par son syndic Madame [G] [O], domiciliée à la même adresse
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Maître Aurélie GEOFFROY, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C2171
DÉFENDERESSE
S.A. ENEDIS
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Maître François TRECOURT de la SELASU TRECOURT, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #A0510
Décision du 27 août 2024
6ème chambre 1ère section
N° RG 22/04298 -
N° Portalis 352J-W-B7G-CWSWO
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Céline MECHIN, vice-président
Marie PAPART, vice-présidente
Clément DELSOL, juge
assisté de Catherine DEHIER, greffier lors de l’audience et de Marie MICHO, greffier lors de la mise à disposition.
DÉBATS
A l’audience du 19 Juin 2024 tenue en audience publique devant Clément DELSOL, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.
JUGEMENT
Contradictoire
en premier ressort
Prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Céline MECHIN, président et par Marie MICHO greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
****************
Par jugement contradictoire du 29 mars 2019, le tribunal judiciaire de Paris a notamment condamné la société Enedis à procéder dans les six mois à compter de sa signification à des travaux de mise aux normes et de rénovation de la colonne montante d’alimentation électrique de l’immeuble situé [Adresse 2] à [Localité 5], suivant devis établi le 05 septembre 2016 et sous astreinte provisoire de 100 € par jour pendant 90 jours.
Ce jugement a été signifié le 04 avril 2019. Les parties n’ont pas interjeté appel de la décision, laquelle se trouve être irrévocable.
Par courrier du 03 mars 2021 adressé au syndic, la société Enedis s’est dite empêchée d’exécuter le jugement du fait de l’inexécution des travaux préparatoires.
Suivant acte d’huissier de justice délivré le 05 avril 2022, le syndicat des copropriétaires a fait citer la société Enedis devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins d'exécution des travaux.
Par dernières conclusions n°2 notifiées par voie électronique le 04 septembre 2023, le syndicat des copropriétaires forme les prétentions suivantes :
« Vu l’article L322-8 du code de l’énergie,
Vu le jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris du 29 mars 2019,
Vu le certificat de non-appel du 15 avril 2022,
Vu l’article 1231-1 du code civil et subsidiairement l’article 1241 du même code,
Condamner la société Enedis à exécuter l’ensemble des travaux préparatoires et postérieurs énoncés dans l’étude du cabinet BETEP du 7 février 2020 tant pour les parties communes que pour les parties privatives de l’immeuble, tels que validés par Enedis, ainsi que tous travaux supplémentaires qui pourraient s’avérer nécessaires.
Assortir cette condamnation d’une astreinte définitive de 200 € par jour de retard à compter d’un délai de 3 mois suivant la signification du jugement à intervenir.
Condamner la société Enedis à établir un descriptif de l’ensemble des travaux induits par le remplacement des colonnes montantes, après concertation avec la copropriété et les diverses entités contraintes d’intervenir, ainsi qu’un calendrier prévisionnel d’exécution.
Désigner tel huissier à l’effet de
se faire communiquer par Enedis un descriptif exhaustif de l’ensemble des travaux envisagés, établi après concertation avec la copropriété et les entités contraintes d’intervenir sur les réseaux, ainsi qu’un calendrier prévisionnel d’exécution. dresser un état des lieux contradictoire avant et après travaux, tant des parties privatives que des parties communes concernées par les travaux de rénovation des deux colonnes montantes électriques, Condamner la société Enedis à supporter l’intégralité des frais de constat d’huissier.
Condamner la société Enedis à effectuer tous les travaux de remise en état des parties communes et privatives tels que préconisés par le cabinet BETEP, ainsi que tous travaux supplémentaires qui pourraient s’avérer nécessaires.
Liquider l’astreinte ordonnée par le jugement du 29 mars 2019 à la somme de 9 300 €.
Condamner la société Enedis à payer au syndicat des copropriétaires ladite somme de 9 300 € avec intérêts au taux légal à compter du 5 avril 2022.
Ordonner la capitalisation des intérêts.
Condamner la société Enedis à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3 000 € à titre de dommages et intérêts.
Condamner la société Enedis à payer au syndicat des copropriétaires une somme de 5 000 € au titre de l’article 700 CPC.
Débouter la société Enedis de l’ensemble de ses demandes.
Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir. »
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 19 octobre 2023, la société Enedis forme les prétentions suivantes :
« Vu les pièces annexées aux présentes,
Il est demandé à la Juridiction de bien vouloir :
A titre principal, DEBOUTER le SDC de l’ensemble de ses demandes ;
Subsidiairement, OCTROYER à la société Enedis un délai qui ne saurait être inférieur à 6 mois pour exécuter, sans astreinte, la décision à intervenir ;
En tout état de cause, CONDAMNER le SDC à payer à la société Enedis la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l'instance conformément à l'article 696 du Code de procédure civile. »
Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture date du 19 octobre 2023.
MOTIFS
A titre liminaire, il convient de préciser que les demandes des parties tendant à voire « dire et juger » ou « constater » ne constituent pas nécessairement des prétentions au sens des dispositions des articles 4 et 30 du code de procédure civile dès lors qu'elles ne confèrent pas de droit spécifique à la partie qui en fait la demande. Elles ne feront alors pas l'objet d'une mention au dispositif.
I. L’incompétence du tribunal judiciaire de Paris pour liquider l’astreinte provisoire
L’article L131-1 du code des procédures civiles d’exécution dispose que l'astreinte, même définitive, est liquidée par le juge de l'exécution, sauf si le juge qui l'a ordonnée reste saisi de l'affaire ou s'en est expressément réservé le pouvoir.
En l’espèce, dans le jugement rendu le 29 mars 2019 n°RG18/02891, le tribunal de grande instance de Paris a notamment condamné la société Enedis à exécuter à ses frais les travaux prévus au devis du 05 septembre 2016 sous astreinte provisoire.
Force est de constater qu’aucune mention dans le dispositif ne spécifie la juridiction compétente pour liquider l’astreinte.
A ce titre, en l’absence de mention spécifique par laquelle la juridiction saisie au fond se réserve expressément le contentieux de la liquidation de l’astreinte qu’elle prononce, le juge de l’exécution est compétent.
En conséquence, le syndicat des copropriétaires est débouté de sa demande de liquidation de l’astreinte provisoire prononcée dans le jugement du 29 mars 2019.
II. La demande d’exécution des travaux conforme au devis du 07 février 2020
L’article L322-8 6° du code de l’énergie dispose que sans préjudice des dispositions du sixième alinéa du I de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales, un gestionnaire de réseau de distribution d'électricité est, dans sa zone de desserte exclusive, notamment chargé, dans le cadre des cahiers des charges de concession et des règlements de service des régies d'exploiter ces réseaux et d'en assurer l'entretien et la maintenance.
En l’espèce, c’est sur ce fondement que par jugement du 29 mars 2019, le tribunal judiciaire de Paris a notamment condamné la société Enedis à procéder dans les six mois à compter de sa signification à des travaux de mise aux normes et de rénovation de la colonne montante d’alimentation électrique de l’immeuble situé [Adresse 2] à [Localité 5], suivant devis établi le 05 septembre 2016.
A ce titre, aucune partie ne conteste le caractère définitif et irrévocable de ce jugement qui s’intègre pleinement dans l’ordonnancement juridique et oblige donc la société Enedis à exécuter les travaux prévus au devis du 05 septembre 2016.
Par ailleurs, en application des dispositions précitée, il est incontestable que l’obligation d’entretien et de maintenance à la charge du gestionnaire s’étend à tous les travaux qui sont nécessaires à la rénovation de la colonne montante, y compris la remise en état des existants sur lesquels les travaux nécessitent une intervention.
S’agissant des prestations énoncées dans l’étude du cabinet Betep du 07 février 2020 produite en pièce n°14, il est énuméré en page n°5 une liste de prestations avant, pendant et après travaux qui demeurent à la charge de la copropriété. Or, ces travaux sont rendus nécessaires uniquement par l’intervention légale de la société Enedis pour entretenir et rénover le réseau.
Il convient de rappeler que la nécessité technique ne peut plus être contestée dans la mesure où la société Enedis n’a pas contesté le jugement désormais définitif du 29 mars 2019 lequel est exclusivement fondé sur le motif décisif correspondant à l’obligation d’entretien et de maintenance de l’article L322-8 du code de l’énergie et que la nécessité technique des prestations avant, pendant et après travaux est établie en ce qu’elle résulte d’un document officiel dont l’en-tête supporte la mention « Enedis ».
Enfin, les décisions du Comité de Règlement des Différends de la Commission de Régulation de l’Energie ne disposent pas de l’autorité de la chose jugée, n’intègrent pas l’ordonnancement juridique et n’ont aucune force contraignante quant à l’appréciation des faits et du droit par les juridictions de l’ordre judiciaire.
Ainsi, il convient de faire droit à la demande du syndicat des copropriétaires.
En revanche, le prononcé d’une astreinte provisoire ou définitive n’est pas opportun, une astreinte provisoire ayant d’ores et déjà été prononcée en dans le jugement du 29 mars 2019, le syndicat des copropriétaires n’ayant pas, à ce jour, saisi le juge de l’exécution pour en obtenir la liquidation.
S’agissant des prétentions aux fins de production d'un calendrier et d'un descriptif de travaux à faire valider par le syndicat des copropriétaires, le demandeur ne précise pas le fondement juridique sur lequel il se fonde, ceci d’autant plus que le devis du 07 février 2020 est suffisamment précis et de toute évidence validé par le syndicat des copropriétaires. Il convient en conséquence de le débouter de ces demandes.
III. La demande de désignation d’un commissaire de justice
L’article 768 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Les moyens qui n'auraient pas été formulés dans les conclusions précédentes doivent être présentés de manière formellement distincte. Le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
En l’espèce, en page n°10 de ses écritures, le syndicat des copropriétaires n’invoque aucun fondement au soutien de sa demande de désignation d’un commissaire de justice aux frais de la société Enedis.
Ainsi, le syndicat des copropriétaires est débouté de sa demande.
IV. La demande en paiement de 3 000 €
L’article 542 du code de procédure civile dispose que l'appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d'appel.
En l’espèce, en page n°12 de ses écritures, le syndicat des copropriétaires affirme que le tribunal de grande instance de Paris « a manifestement commis une erreur » en laissant le montant des honoraires de maîtrise d’œuvre à la charge du syndicat des copropriétaires.
Le syndicat des copropriétaires n’ayant pas interjeté appel de cette décision, il n’est plus fondé à la critiquer, la seule voie de réformation existante lui étant désormais interdite.
Ainsi, il est débouté de sa demande de condamnation au paiement de 3 000 €.
V. Les décisions de fin de jugement
a. Les dépens
La société Enedis succombe et est condamnée aux dépens en application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.
b. Les frais irrépétibles
L’article 700 1° du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
La société Enedis succombe et est condamnée aux dépens. L’équité commande donc de la condamner à payer 2 500,00 € au syndicat des copropriétaires au titre des dispositions de l’article 700 susvisé.
c. L’exécution provisoire
En application des dispositions de l’article 514 du code de procédure civile. l’exécution provisoire est de droit.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal judiciaire statuant après débat en audience publique par jugement contradictoire en premier ressort et mis à disposition au greffe,
CONDAMNE la société Enedis à exécuter l’ensemble des travaux préparatoires et postérieurs énoncés dans l’étude du cabinet Betep du 7 février 2020 tant pour les parties communes que pour les parties privatives de l’immeuble, tels que validés par Enedis ;
DÉBOUTE le syndicat des copropriétaires de l’intégralité de ses autres prétentions ;
CONDAMNE la société Enedis aux dépens ;
CONDAMNE la société Enedis à payer 2 500,00 € au syndicat des copropriétaires au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit ;
Fait et jugé à Paris le 27 août 2024
Le greffier Le président