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19/07/2024 | FRANCE | N°24/02070

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Ps élections pro, 19 juillet 2024, 24/02070


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le : 19.07.2024
à : toutes les parties

Pôle social


Elections professionnelles

N° RG 24/02070 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4YJQ

N° MINUTE :
24/00196






JUGEMENT
rendu le 19 juillet 2024


DEMANDERESSE
S.A.S.U. PENELOPE L’AGENCE,
dont le siège social est sis [Adresse 4]
représentée par Maître Benoît DUBESSAY de la SELCA CHASSANY WATRELOT ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : #K0100

DÉFENDERESSE

S
Syndicat SECI,
dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Me Daniel RAVEZ, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #B1024

Syndicat UNSA,
dont...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le : 19.07.2024
à : toutes les parties

Pôle social

Elections professionnelles

N° RG 24/02070 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4YJQ

N° MINUTE :
24/00196

JUGEMENT
rendu le 19 juillet 2024

DEMANDERESSE
S.A.S.U. PENELOPE L’AGENCE,
dont le siège social est sis [Adresse 4]
représentée par Maître Benoît DUBESSAY de la SELCA CHASSANY WATRELOT ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : #K0100

DÉFENDERESSES
Syndicat SECI,
dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Me Daniel RAVEZ, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #B1024

Syndicat UNSA,
dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Etienne COLIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #B0372

Madame [W] [U],
demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Daniel RAVEZ, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #B1024

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Aurélie LESAGE, Vice-présidente,
assistée de Alexis QUENEHEN, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 02 juillet 2024

JUGEMENT
contradictoire et en dernier ressort prononcé par mise à disposition le 19 juillet 2024 par Aurélie LESAGE, Vice-présidente, assistée de Alexis QUENEHEN, Greffier
Décision du 19 juillet 2024
Pôle social - Elections Professionnelles - N° RG 24/02070 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4YJQ

EXPOSE DU LITIGE

Madame [W] [U] est employée par la société PENELOPE L'AGENCE.

Le SECI-UNSA, à la suite des dernières élections professionnelles où il a recueilli plus de 10% des suffrages exprimés au premier tour, a désigné Madame [W] [U] en qualité de déléguée syndicale par mandat du 16 mai 2022.

Par courriel du 15 avril 2024 confirmé par courriel du 18 avril 2024, l'UNSA a informé la société PENELOPE L'AGENCE de la désaffiliation du SECI et a révoqué l'ensemble des mandats SECI-UNSA au sein de l'entreprise.

Par courriel du 17 avril 2024 confirmé par courriel du 19 avril 2024, le SECI a contesté auprès de la société PENELOPE L'AGENCE la validité des révocations opérées par l'UNSA.

Par requête reçue au greffe de ce tribunal le 25 avril 2024, la société PENELOPE L'AGENCE a requis la convocation du SECI, de l'UNSA et de Madame [W] [U] aux fins d'obtenir du tribunal de juger que le mandat de Madame [W] [U] en qualité de déléguée syndicale est devenu caduc à la suite du courriel reçu le 15 avril 2024 par lequel l'UNSA a procédé à sa révocation.

Par avertissements donnés au moins trois jours à l'avance, la société PENELOPE L'AGENCE, le SECI, l'UNSA et Madame [W] [U] ont été convoqués pour l'audience du 28 mai 2024. L'affaire a été renvoyée à l'audience du 14 juin 2024 puis du 2 juillet 2024 afin de permettre aux parties de se mettre en état.

A cette audience, la société PENELOPE L'AGENCE, représentée par son conseil, maintient ses demandes. Elle expose que le lien d'affiliation du SECI à l'UNSA a constitué un élément essentiel du vote des électeurs et que sa désaffiliation autorise l'UNSA à révoquer l'ensemble des mandats qui avaient été donnés par le SECI.

L'UNSA, représentée par son conseil, sollicite de :
- juger caduque la désignation de Madame [W] [U] en qualité de déléguée syndicale,
- condamner le SECI à lui payer une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance.

Elle soutient qu'elle a décidé de désaffilier le SECI par décision des 7 et 8 février 2024, que l'affiliation nationale interprofessionnelle au titre de laquelle un syndicat présente des candidats au premier tour des élections professionnelles constitue un élément essentiel du vote des électeurs, qu'en cas de désaffiliation, le syndicat ne peut plus se prévaloir des suffrages ainsi obtenus pour se prétendre représentatif, que la confédération ou le syndicat national interprofessionnel peut révoquer les mandats de délégué syndical et de représentant syndical désignés avant la désaffiliation et procéder à de nouvelles désignations à condition de justifier de l'existence dans l'entreprise au jour de la désignation d'une section syndicale constituée sous son sigle.

Le SECI et Madame [W] [U], représentés par leur conseil, concluent au débouté des demanderesses de l'ensemble de leurs demandes et sollicitent la condamnation de la société PENELOPE L'AGENCE à payer au SECI une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Le SECI sollicite également reconventionnellement oralement l'annulation des désignations de Madame [S] [R] en qualité de déléguée syndicale et Madame [P] [T] en qualité de représentante syndicale au CSE opérées par l'UNSA portées à sa connaissance dans les pièces adverses.

Ils soutiennent que l'UNSA est irrecevable à défaut de preuve de la régularité de sa constitution, le récépissé de dépôt en mairie du 13 février 2024 ne mentionnant pas les noms de toutes les personnes qui le dirigent ou l'administrent et des syndicats composant l'union. Ils précisent que le SECI a quitté l'UNSA par délibération du 22 décembre 2023 et a procédé au dépôt modificatif de ses statuts en mairie le 4 janvier 2024. Sur le fond, ils font valoir que la Cour de cassation persiste, en contradiction avec les textes internationaux et l'article L.2121-1 du code du travail, à accorder la priorité aux unions et confédérations en contrariété avec les statuts proclamant l'autonomie et l'indépendance des syndicats confédérés et l'action concrète de terrain effectuée par le syndicat de base. Ils ajoutent que le SECI rapporte la preuve qu'il a acquis sa représentativité en son nom propre grâce à son action sur le terrain, étant présent dans l'entreprise depuis une quinzaine d'années en étant affilié à la CFTC, puis sans affiliation confédérale et enfin en étant affilié à l'UNSA, que l'UNSA n'a ni capacité ni légitimité pour prétendre être représentative au sein de la société, la liste aux élections professionnelles ayant été présentée par le SECI et l'UNSA ne disposant ni d'une section syndicale ni d'adhérents et ne justifiant d'aucune activité dans l'entreprise. Ils font également valoir que la révocation d'un mandat ne peut émaner que de l'organisation désignataire, que l'annulation des désignations aurait pour effet de priver les salariés de toute représentation dans l'entreprise, que l'UNSA viole ses propres statuts qui ont pour principe l'indépendance syndicale comme l'indique d'ailleurs son nom.

Il sera référé aux écritures des parties déposées à l’audience pour un plus ample exposé de leurs moyens en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

Le SECI a été autorisé à produire une note en délibéré sous huit jours pour faire valoir ses éventuelles observations sur les dernières pièces communiquées par la société PENELOPE L'AGENCE.

L'affaire a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 19 juillet 2024.

La note est parvenue dans le délai imparti.

Par courriel du 10 juillet 2024, le tribunal a informé les parties qu'il entendait relever d'office l'absence des parties intéressées à l'audience (Madame [S] [R] et Madame [P] [T], dont il est sollicité reconventionnellement l'annulation des mandats, et la Fédération FESSAD-UNSA syndicat désignataire) et les a invitées à faire part sous 48 heures de leurs éventuelles observations.

Par courriel du 12 juillet 2024, la société PENELOPE L'AGENCE a indiqué que la demande reconventionnelle du SECI était irrecevable faute d'avoir été faite dans les formes prévues par l'article 68 du code de procédure civile et sollicité subsidiairement sa disjonction.

Par courriel du 12 juillet 2024, l'UNSA a fait valoir, au visa des articles 446-2, 68 et 70 du code de procédure civile que les écritures du SECI ne contiennent pas la demande d'annulation des mandats de Madame [S] [R] et Madame [P] [T], que la demande n'a pas été faite par voie de requête, qu'elle est dénuée de tout lien avec la demande initiale et que Madame [S] [R], Madame [P] [T] et le FESSAD ne sont pas parties à l'instance, si bien que la demande est irrecevable et que le jugement annulant les mandats serait nécessairement censuré par la Cour de cassation.

EXPOSE DES MOTIFS

Sur la fin de non recevoir tirée de l'absence de preuve de la régularité de la constitution de l'UNSA

Aux termes de l'article L. 2131-3 du code du travail, les fondateurs de tout syndicat professionnel déposent les statuts et les noms de ceux qui, à un titre quelconque, sont chargés de l'administration ou de la direction et ce dépôt est renouvelé en cas de changement de la direction ou des statuts.

En l'espèce, l'UNSA produit ses statuts modifiés lors du 8eme congrès national du 8 juin 2023 et justifie du dépôt de ses statuts modifiés et de la liste de ses dirigeants (secrétaire général, trésorier général et secrétaires nationaux) à la mairie de [Localité 5] le 13 février 2024. La fin de non recevoir sera donc rejetée.

Sur les demandes de la société PENELOPE L'AGENCE et de l'UNSA

L'affiliation confédérale sous laquelle un syndicat a présenté des candidats au premier tour des élections des membres titulaires du comité d'entreprise constitue un élément essentiel du vote des électeurs si bien qu'en cas de désaffiliation après ces élections le syndicat ne peut continuer à se prévaloir des suffrages ainsi recueillis pour se prétendre représentatif (Soc 18 Mai 2011 – n°10-60.069).

En cas de désaffiliation de l'organisation syndicale ayant procédé à la désignation d'un délégué syndical, le mandat de ce délégué peut être révoqué par la confédération syndicale, la fédération ou l'union à laquelle le syndicat désignataire était affilié (Soc 16 Octobre 2013 – n°12-60.281).

En l'espèce, les procès-verbaux des élections au CSE d'avril 2022 établissent que le SECI-UNSA a recueilli plus de 10% des suffrages exprimés. Le SECI-UNSA a désigné Madame [W] [U] déléguée syndicale par courrier du 16 mai 2022.

Le SECI a voté son retrait d'adhésion à l'UNSA le 22 décembre 2023 et a déposé en mairie ses statuts modifiés le 4 janvier 2024. L'UNSA a radié le SECI par décision du bureau national des 7 et 8 février 2024 pour défaut de paiement de la cotisation 2023.

L'UNSA, par courriels des 15 et 18 avril 2024, a révoqué le mandat de déléguée syndicale de Madame [W] [U]. Il convient par conséquent de constater que le mandat de Madame [W] [U] est caduc à compter du 15 avril 2024.

Sur les demandes reconventionnelles du SECI en annulation des désignations opérées par l'UNSA

Aux termes de l'article 14 du code de procédure civile, nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée.

L'article 68 du même code précise que les demandes incidentes faites à l'encontre des tiers sont faites dans les formes prévues pour l'introduction de l'instance.

Madame [S] [R] et Madame [P] [T], dont il est sollicité l'annulation du mandat ne sont pas dans la cause ni la Fédération FESSAD-UNSA qui a procédé aux désignations litigieuses.

En tout état de cause, un syndicat, qui s'est désaffilié de la confédération sous le sigle de laquelle il avait présenté des candidats lors des dernières élections professionnelles, est irrecevable à contester la désignation de représentants syndicaux par la fédération ou par un syndicat affilié à la fédération appartenant à cette même confédération (Soc 28 Juin 2023 – n°22-16.020).

Le SECI sera par conséquent déclaré irrecevable en ses demandes reconventionnelles.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

L’article 700 du code de procédure civile aux termes duquel une partie peut demander le remboursement des frais exposés dans l’instance et non compris dans les dépens est applicable aux sommes engagées par une partie pour la défense de ses intérêts, même en une matière où il n’y a pas de condamnation aux dépens.

Il n'apparaît pas inéquitable de débouter le SECI et l'UNSA de leurs demandes au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en dernier ressort :

Rejette la fin de non recevoir soulevée par le SECI,

Constate que le mandat de déléguée syndicale de Madame [W] [U] est caduc suite à la révocation opérée par l'UNSA le 15 avril 2024,

Déclare le SECI irrecevable en ses demandes reconventionnelles,

Déboute le SECI et l'UNSA de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Ainsi statué sans frais ni dépens,

Ainsi jugé et prononcé, en audience publique aux jour, mois et an ci-dessus et signé par Nous, Aurélie LESAGE, Président et le Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Ps élections pro
Numéro d'arrêt : 24/02070
Date de la décision : 19/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-19;24.02070 ?
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