TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :
■
8ème chambre
2ème section
N° RG 22/10133
N° Portalis 352J-W-B7G-CXE5J
N° MINUTE :
Assignation du :
19 Août 2022
JUGEMENT
rendu le 18 Juillet 2024
DEMANDEUR
Le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2], représenté par son syndic en exercice le cabinet RINALDI; le Cabinet C.P. RINALDI, domicilié en son établissement secondaire sis:
[Adresse 4]
[Localité 7]
représenté par Maître Eric AUDINEAU de l’AARPI AUDINEAU GUITTON, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant, vestiaire #D0502
DÉFENDEURS
SCI [Adresse 5], prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 6]
[Localité 8]
représenté par Maître Sandrine QUETU, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #B0514
Société RS SCOOTER MOTO, SARL, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 3]
[Localité 8]
défaillante
Décision du 18 Juillet 2024
8ème chambre 2ème section
N° RG 22/10133 - N° Portalis 352J-W-B7G-CXE5J
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Frédéric LEMER GRANADOS, Vice-Président
Anita ANTON, Vice-Présidente
Lucie AUVERGNON, Vice-Présidente
assistés de Nathalie NGAMI-LIKIBI, Greffière
DEBATS
A l’audience du 25 Avril 2024 présidée par Frédéric LEMER GRANADOS tenue en audience publique avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 18 Juillet 2024.
JUGEMENT
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Réputé contradictoire
en premier ressort
EXPOSÉ DU LITIGE
L’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 8] est régi par le statut de la copropriété des immeubles bâtis.
La SCI du [Adresse 5] est propriétaire, au sein de cet immeuble, d’un local commercial situé au rez-de-chaussée.
Par acte authentique en date du 29 décembre 2020, la SCI du [Adresse 5] a consenti à la société SARL RS SCOOTER MOTO un bail commercial à effet au 1er janvier 2021, afin d’exercer une activité d’achat, de vente et d’entretien de motos et de scooters.
Par courrier en date du 14 avril 2021, le syndic a mis en demeure la SCI du [Adresse 5] de :
« - condamner la porte au fond de la boutique afin d’empêcher toutes odeurs, bruits, vibrations de se répandre dans l’immeuble,
- consolider les murs et plafonds pour les rendre résistants au feu et de les isoler phoniquement,
- assurer la sécurité du local tant pour les salariés que pour les occupants de l’immeuble face au risque incendie du fait des produits manipulés et plus généralement de l’activité qui y est exercée. »
Il lui exposait également que :
- « dans l’impossibilité de répondre favorablement à ces obligations, il vous incombe de purement et simplement faire immédiatement cesser l’activité en place »,
- « il vous incombe d’imposer à votre preneur à titre d’obligations essentielles à sa charge le respect du règlement de copropriété ainsi que l’obligation de cesser immédiatement les troubles et nuisances quotidiennes ».
Par courriers recommandés séparés en date du 06 octobre 2021, le conseil du syndicat des copropriétaires a adressé à la SCI [Adresse 5] et à la société RS MOTO SCOOTER une deuxième mise en demeure exigeant la cessation de l’ensemble des nuisances sonores et olfactives ainsi que de l’atteinte à la sécurité incendie de l’immeuble.
Par courrier du 20 mai 2022, le syndic a adressé une troisième mise en demeure à la SCI [Adresse 5] pour lui demander d’agir sans délai afin que les nuisances cessent et que les locaux soient insonorisés et isolés.
Par courrier recommandé du 7 janvier 2022, le conseil de la SCI [Adresse 5] a :
- rappelé à la société RS SCOOTER MOTO qu’aux termes de son bail, elle s’était engagée à ne pas nuire à la tranquillité de l’immeuble et à procéder si nécessaire, à ses frais, aux travaux d’aménagement et de mises aux normes utiles à l’exercice de son activité,
- mis en demeure la société RS SCOOTER MOTO de bien vouloir, dans un délai de 10 jours, justifier auprès de son bailleur des améliorations ou travaux réalisés depuis la mise en demeure adressée par le syndicat des copropriétaires le 5 octobre 2021 et, à défaut d’avoir pris la moindre mesure, d’adresser à son bailleur les devis des travaux à entreprendre.
Par actes délivrés séparément le 19 août 2022 et le 26 août 2022, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] à [Localité 8], représenté par son syndic en exercice le cabinet RINALDI CHRISTIAN, a assigné la société RS SCOOTER MOTO et la SCI [Adresse 5] aux fins de voir :
- prononcer la résiliation du bail consenti par la SCI [Adresse 5] à la société RS SCOOTER,
- condamner la société RS SCOOTER à évacuer le local commercial et, à défaut, ordonner à son expulsion,
- ordonner la séquestration des biens meubles garnissant le local dans tout garde meubles au choix du syndicat des copropriétaires et aux frais, risques et périls de la SCI [Adresse 5] en sa qualité de copropriétaires bailleur et de la société RS SCOOTER en sa qualité de locataire,
- condamner in solidum la SCI [Adresse 5] et la société RS SCOOTER à lui payer la somme de 10.000 € en réparation de son trouble de jouissance,
- condamner in solidum la SCI [Adresse 5] et la société RS SCOOTER aux dépens et au paiement de la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
- prononcer l’exécution provisoire.
Par acte d’huissier en date du 7 octobre 2022, la SCI [Adresse 5] a assigné la société RS SCOOTER MOTO devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris aux fins de voir constater l’acquisition de la clause résolutoire insérée dans le bail commercial et ordonner son expulsion.
Par ordonnance en date du 2 janvier 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris a notamment :
- constaté l'acquisition de la clause résolutoire du bail commercial à la date du 5 septembre 2022,
- ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux dans le mois de la signification de l’ordonnance, l’expulsion de la société RS SCOOTER MOTO et de tout occupant de son chef des lieux situés [Adresse 1] / [Adresse 2] à [Localité 8] avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d’un serrurier,
- dit que les meubles et objets mobiliers se trouvant sur place donneront lieu à l'application des dispositions des articles L433-1 et L433-2 du Code des procédures civiles d'exécution.
Le 2 juin 2023, la société RS SCOOTER a été expulsée.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 21 juin 2023, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] à [Localité 8] demande au tribunal de :
Vu l’article 9 de la loi du 10 juillet 1965, vu les articles 1341-1 et 1240 et suivants du code civil, vu le règlement de copropriété,
Dire le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 8] recevable et bien fondé en l’ensemble de ses demandes,
Débouter la SCI [Adresse 5] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Prononcer la résiliation du bail consenti par la SCI [Adresse 5] à la société RS SCOOTER MOTO,
Condamner la société RS SCOOTER MOTO à évacuer de corps et de biens ainsi que de tous occupants de son chef, le local commercial formant le lot n°741 dont est propriétaire la SCI [Adresse 5] au sein du syndicat des copropriétaires [Adresse 2], à compter de la signification du jugement,
A défaut pour la société RS SCOOTER MOTO d'avoir quitté les lieux, ordonner son expulsion et celle de tout occupant de son chef, après la signification d'un commandement de quitter les lieux, avec l'assistance de la force publique si besoin est et sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir,
Ordonner la séquestration des biens meubles et objets mobiliers garnissant lesdits lieux dans tout garde meuble au choix du syndicat des copropriétaires et aux frais risques périls de la SCI [Adresse 5], en sa qualité de copropriétaire bailleur, et de la société RS SCOOTER MOTO, en sa qualité de locataire,
Condamner in solidum la SCI [Adresse 5] et la société RS SCOOTER MOTO à payer la somme de 10.000 € au syndicat des copropriétaires à titre de dommages intérêts pour trouble de jouissance,
Condamner in solidum la SCI [Adresse 5] et la société RS SCOOTER MOTO à verser au syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] la somme de 10.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens,
Prononcer l’exécution provisoire de droit.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 19 septembre 2023, la SCI du [Adresse 5] demande au tribunal de :
Vu les dispositions de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, vu l’article 1103 du code civil,
Juger la SCI du [Adresse 5] recevable et bien fondée en ses demandes,
Y faisant droit,
Juger que la demande du syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] à [Localité 8] en résiliation du bail liant la SCI du [Adresse 5] et la société RS SCOOTER MOTO et en expulsion de la société RS SCOOTER MOTO ne peut prospérer dès lors que l’ordonnance de référé rendue par le tribunal judiciaire de Paris le 3 janvier 2023 a déjà jugé comme acquise le clause résolutoire prévue audit bail et prononcé l’expulsion de la société RS SCOOTER, sans délai, à défaut de départ volontaire de cette dernière dans le mois suivant la signification de ladite ordonnance,
A titre principal :
Débouter le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] 19ème de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l’encontre de la SCI du [Adresse 5],
A titre subsidiaire :
Si le Tribunal devait condamner la SCI du [Adresse 5] au paiement de frais de garde meubles ou de dommages intérêts, condamner la société RS SCOOTER MOTO à la garantir de cette condamnation,
En tout état de cause :
Condamner la société RS SCOOTER MOTO à payer à la SCI du [Adresse 5] la somme de 2.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Bien que régulièrement assignée à domicile le 19 août 2022, dans les conditions des articles 655 à 658 du Code de procédure civile, la société RS SCOOTER MOTO n’a pas constitué avocat.
Le jugement sera réputé contradictoire en application des dispositions de l'article 473 du code de procédure civile.
Pour l’exposé des moyens, il est renvoyé aux écritures précitées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 24 octobre 2023.
L’affaire, plaidée à l’audience collégiale du 25 avril 2024, a été mise en délibéré au 18 juillet 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
En application de l'article 472 du code de procédure civile si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond et le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.
A cet égard, le tribunal constate en premier lieu que le syndicat des copropriétaires ne justifie pas avoir signifié à la société RS SCOOTER MOTO, partie non constituée, ses dernières conclusions. Si les demandes formées par le syndicat des copropriétaires dans le dispositif de ses dernières conclusions sont identiques à celles formées dans le dispositif de son assignation, le syndicat des copropriétaires ne justifie pas avoir fait signifier à la société RS SCOOTER MOTO ses pièces n° 12 à 16. Ces pièces n’ont donc pas été débattues au contradictoire de la société RS SCOOTER. Elles lui sont donc inopposables, en application des articles 7 et 16 du code de procédure civile.
Le tribunal constate en second lieu que la SCI du [Adresse 5] n’a signifié aucune de ses conclusions en intervention volontaire à la société RS SCOOTER MOTO. Dès lors, la demande en garantie formée par la SCI du [Adresse 5] à l’encontre de la société RS SCOOTER MOTO ainsi que sa demande formée au titre des frais irrépétibles seront déclarées irrecevables, en application des mêmes dispositions des articles 7 et 16 du code de procédure civile.
Par ailleurs, il convient de rappeler qu’en application de l’article 768 du code de procédure civile, le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions des parties et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Dès lors, le tribunal n’est pas saisi de la demande formée par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] à [Localité 8], se trouvant dans la partie de ses conclusions relatives à la discussion des prétentions et des moyens, de condamnation in solidum de la SCI [Adresse 5] et de la société RS SCOOTER MOTO à enlever les scooters dans un délai de 15 jours à compter de la signification de la décision à intervenir puis sous astreinte de 500 € par jour de retard et par scooter et sous astreinte de 500 € par jour et par scooter stationné sur le trottoir devant l’entrée de l’immeuble, infraction constatée par voie d’huissier.
1-1 Sur les nuisances alléguées en raison de l'exploitation du local par la société RS SCOOTER MOTO, leur origine et les responsabilités
Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] 19ème soutient que la responsabilité de la SCI du [Adresse 5] doit être retenue, en application de l’article 9 de la loi du 10 juillet 1965, dès lors qu’elle répond des manquements au règlement de copropriété de son locataire (Cour d’appel de Paris. 23ème Ch. B, 31/05/2001 ; IJDI.2001, p 806).
Il expose que les nuisances contreviennent aux dispositions de l’article 12 de ce règlement, page 101, aux termes desquelles « sont formellement exclus tous établissements dangereux et insalubres, de nature à incommoder par le bruit et l’odeur les personnes habitant la maison.» et à celle de l’article 7, page 18, aux termes desquelles « chaque propriétaire de lot pourra lui conférer la destination qu’il lui plaira, à la seule condition de ne pas générer par le bruit, les trépidations et l’odeur les autres copropriétaires ».
Il expose en outre qu’il est de jurisprudence constante que le locataire doit respecter le règlement de copropriété et veiller à ne pas porter atteinte à la jouissance paisible des autres copropriétaires.
Il souligne à ce titre que l’activité de la société RS SCOOTER MOTO a généré les nuisances suivantes :
- odeurs, trépidations et bruits liés aux allumages des deux roues en cours de réparation, aux entrées et sorties permanentes des scooters, au stationnement permanent de scooters et motos sur le trottoir devant la devanture du commerce et à la clientèle,
- odeurs liées à l’utilisation de produits, essences, huiles et graisses se propageant dans les parties communes de l’immeuble par la gaine de ventilation statique,
- vibrations qui se propagent dans les appartements des étages supérieurs lors des essais de deux roues dans le fond du local,
- mise en danger des passants et notamment des habitants de la copropriété, la porte d’accès au niveau du [Adresse 3] étant immédiatement mitoyenne à celle du local incriminé,
- mise en danger de la sécurité incendie de l’immeuble, le syndicat des ne parvenant à obtenir de la part des défendeurs aucune garantie quant au respect des normes en l’absence notamment de porte coupe-feu s’agissant de la porte du fond de la boutique communiquant directement avec les parties communes de l’immeuble dont la finition complète est en lambris bois.
Il soutient que les attestations des copropriétaires qu’il produit démontrent la réalité et l’ampleur des nuisances sonores et olfactives collectivement subies sans discontinuer depuis le 1er janvier 2021.
Il fait valoir qu’il ressort de ces attestations que les troubles olfactifs et sonores sont ressentis dans la cage d’escalier jusqu’aux portes palières du 9ème étage et ne sont pas exclusivement subis par les proches voisins du local. Il relève que la jurisprudence admet l’existence d’un trouble de jouissance à caractère collectif (nota. Civ. 3ème, 26 janv. 2010, n° 08.21.438, pour des troubles causés à l’ensemble des lots par les nuisances sonores d’un atelier de mécanique exploité par un locataire).
Il soutient que la SCI du [Adresse 5] n’a pas réagi aux trois mises en demeure adressées le 14 avril 2021, le 06 octobre 2021 et le 20 mai 2022, et souligne qu’elle n’a sollicité la résiliation et l’expulsion de son locataire qu’un an et demi après la première mise en demeure, après avoir été assignée.
En défense, la SCI du [Adresse 5] soutient que le syndicat des copropriétaires fait état de nuisances dont il ne démontre pas la réalité, ni l’ampleur dès lors qu’il ne produit aucun constat d’huissier qui aurait relevé les nuisances « de manière impartiale ». Elle considère que le syndicat des copropriétaires ne démontre pas que les troubles allégués sont ressentis de la même manière par l’ensemble des copropriétaires ni qu’ils affectent les parties communes de l’immeuble ou l’intérieur de chacun des appartements de l’immeuble. Elle fait en outre valoir qu’elle ne peut être tenue pour responsable des nuisances commises par son locataire car elle démontre avoir tout mis en œuvre pour les faire cesser. Elle expose ainsi avoir mis en demeure son locataire de bien vouloir cesser les nuisances dénoncées, dès qu’elle en a eu connaissance. Elle rappelle qu’elle a agi en justice pour solliciter, en référé, la résiliation du bail et l’expulsion de son locataire.
***
L’article 544 du Code civil dispose « la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements ».
Ce droit pour un propriétaire de jouir de son bien de la manière la plus absolue est cependant limité par l’obligation de ne causer à la propriété d’autrui aucun dommage dépassant les inconvénients normaux de voisinage.
Lorsque le bien est soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis, cette obligation résulte de l’article 9 de la loi du 10 juillet 1965 qui prévoit que chaque copropriétaire use et jouit librement de ses parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires, ni à la destination de l’immeuble.
L'obligation pour le copropriétaire de réparer les troubles anormaux du voisinage découle ainsi des dispositions de l'article 9 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 (ex. : Cour d'appel de Paris, Pôle 4, Chambre 2, 7 novembre 2018, n° RG 16/01235).
Le trouble est sanctionné :
- dans tous les cas, s’il provient d’un usage du lot contraire au règlement de copropriété (Civ. 3ème , 15 janvier 2003, s’agissant d’une disposition du règlement de copropriété imposant de ne produire « aucun bruit de nature à gêner les voisins »),
- et, en l’absence de dispositions particulières du règlement, seulement s’il présente un caractère anormal.
La responsabilité résultant de troubles qui dépassent les inconvénients normaux de voisinage est établie objectivement sans que la preuve d'une faute soit exigée sur le fondement du principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage.
Le syndicat des copropriétaires peut agir à l’encontre d’un copropriétaire sur le fondement de la théorie des troubles anormaux du voisinage (Civ. 3ème, 11 mai 2017, n° 16-14.339).
Par suite, le propriétaire est responsable de plein droit des troubles anormaux de voisinage provenant de son fonds, que ceux-ci aient été causés par son fait ou par celui de personnes avec lesquelles il est lié par contrat (Civ. 3ème, 17 avril 1996, n° 94-15.876).
Par ailleurs, le tiers lésé, qu’il soit propriétaire ou qu’il soit occupant des lieux dont la jouissance paisible a été troublée, est recevable à diriger indifféremment son action aussi bien contre l’auteur effectif du trouble que contre le propriétaire des lieux où le trouble a trouvé son origine ou sa cause.
La victime d'un trouble de voisinage trouvant son origine dans l'immeuble donné en location, peut en demander réparation au propriétaire (Civ. 3ème, 7 avril 1996, n° 94-15.876).
L’action introduite suppose la réunion de deux conditions : une relation de voisinage et un trouble anormal. La mise en œuvre de la responsabilité objective pour troubles anormaux du voisinage suppose la preuve d'une nuisance excédant les inconvénients normaux de la cohabitation dans un immeuble collectif en fonction des circonstances et de la situation des lieux.
En l'espèce, le règlement de copropriété « refondu » le 20 novembre 1961 (pièce n° 2 du syndicat des copropriétaires, p. 62) prévoit que :
- « chaque propriétaire de lot pourra lui conférer la destination qu’il lui plaira à la seule condition de ne pas gêner par le bruit, les trépidations et l’odeur les autres co-propriétaires » (article 7 du chapitre III de la première partie du règlement intitulée “règlement de copropriété général”, p. 8),
- « sont formellement exclus tous établissements dangereux et insalubres, de nature à incommoder par le bruit et l’odeur les personnes habitant la maison » (article 12 du chapitre IV “Usage des parties privées” de la deuxième partie du règlement intitulée « règlement de copropriété particulier des lots n° 501 à 736 »).
Il convient à titre liminaire de relever que les parties n’indiquent pas, dans leurs conclusions, le numéro du lot dont la SCI SIMON BOLIVAR est propriétaire. Le tribunal relève toutefois que :
- il ressort du bail commercial signé le 29 décembre 2020 entre la SCI du [Adresse 5] et la société SARL RS SCOOTER MOTO que le lot litigieux est le « lot n° 741 »,
- l’acte rectificatif au modificatif du règlement de copropriété des 26 et 27 octobre 1989, en date du 8 décembre 1989 (pièce n° 2 du syndicat des copropriétaires) prévoit la suppression du lot n° 639 et son remplacement par les lots n° 740 et 741, ce dernier étant « une petite boutique (…) avec une vitrine de 3m27 et une profondeur d’environ 6m55, prolongée par un couloir accédant au hall d’entrée de l’immeuble de 6m23 de longueur » (p. 9 de l’acte modificatif du règlement de copropriété des 26 et 27 octobre 1989, pièce n° 2 du syndicat des copropriétaires).
Le local litigieux est donc soumis à l’application des dispositions susmentionnées de l’article 12 du règlement de copropriété.
Cependant, l’activité d’achat, de vente et d’entretien de motos et de scooters de la société RS SCOOTER MOTO, prévue en page 8 du bail commercial (pièce n° 1 de la SCI du [Adresse 5]) ne saurait, par elle-même, être qualifiée d’activité exercée par un « établissement dangereux et insalubre ».
Les dispositions des articles 7 et 12 du règlement de copropriété précitées sont donc des clauses interdisant les nuisances de façon claire mais générale, sans prévoir aucune interdiction particulière. Il convient donc de déterminer si les nuisances dénoncées par le syndicat des copropriétaires sont démontrées et si elles ont un caractère anormal.
A cet égard, six copropriétaires attestent des nuisances suivantes :
- nuisances sonores, résonnant dans la cage d’escalier et le hall des ascenseurs de l’immeuble, causées par le fonctionnement des moteurs au sein de l’atelier de réparation alors que la porte arrière de l’atelier est ouverte (attestations de M. [O] [C] et de Mme [A] [P], pièce n° 13 du syndicat des copropriétaire ; attestation de Mme [W] [V], pièce n° 15 du syndicat des copropriétaires ; signalement de M. [B] [J] au bureau d’action contre les nuisances professionnelles en date du 13 juin 2022, pièce n° 9 du syndicat des copropriétaires),
- nuisances sonores, ressenties jusque dans le hall de l’immeuble, causées par des livraisons, la nuit, de cartons (attestations de M. [O] [C], pièce n° 13 du syndicat des copropriétaire) ou par des bruits de choses lourdes trainées dans la boutique (courriel de M. [B] [J] au syndic en date du 26 août 2021, pièce n° 5 du syndicat des copropriétaires),
- nuisances sonores causées par le non-respect des horaires de fermeture (attestation de Mme [U] [N] [I], pièce n° 13 du syndicat des copropriétaires),
- nuisances olfactives, ressenties dans le hall de l’immeuble et la cage d’escalier commune, causées par les gaz d’échappement des scooters en fonctionnement dans l’atelier de réparation, ainsi que les odeurs d’essence et d’autres produits (attestations de M. [O] [C], de Mme [U] [N] [I], de M. [G] [H], de Mme [A] [P], pièce n° 13 du syndicat des copropriétaire), y compris le dimanche (attestation de Mme [A] [P], pièce n° 13 du syndicat des copropriétaires),
- atteinte à la propreté du sol des parties communes, devant la porte arrière de la boutique et jusque dans le hall d’entrée, de manière hebdomadaire et parfois quotidienne (salissures de graisse, cambouis et substances collantes noires (attestation de Mme [A] [P], pièce n° 13 du syndicat des copropriétaires ; signalement de M. [B] [J] au bureau d’action contre les nuisances professionnelles en date du 13 juin 2022, pièce n°9 du syndicat des copropriétaires),
- occupation du trottoir devant l’immeuble (attestations de M. [O] [C], de Mme [U] [N] [I], de Mme [A] [P], pièce n° 13 du syndicat des copropriétaires ; attestation de Mme [W] [V], pièce n° 15 du syndicat des copropriétaires ; signalement de M. [B] [J] au bureau d’action contre les nuisances professionnelles en date du 13 juin 2022, pièce n°9 du syndicat des copropriétaires),
- comportement agressif des gérants du local (attestation de Mme [W] [V], pièce n° 15 du syndicat des copropriétaires ; courriel de M. [B] [J] au syndic en date du 26 août 2021, pièce n° 5 du syndicat des copropriétaires).
La SCI SIMON BOLIVAR conteste la caractérisation de ces nuisances mais elle ne produit en défense aucune pièce de nature à remettre en cause la force probante des attestations et pièces versées par le syndicat des copropriétaires.
Décision du 18 Juillet 2024
8ème chambre 2ème section
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Dès lors, il convient de considérer que la matérialité des nuisances sonores et olfactives subies par la copropriété dans les parties communes (cage d’escalier commune et hall de l’immeuble)
est caractérisée. En outre, la nature des nuisances, le fait qu’elles aient été subies de jour comme de nuit, en semaine comme le week end, et qu’elles aient en outre parfois été accompagnées de comportements agressifs, caractérisent l’anormalité du trouble subi par le syndicat des copropriétaires.
S’agissant de la période des troubles, si Mme [A] [P] précise que ces nuisances existent depuis le commencement de l’activité de la société RS SCOOTER MOTO, les attestations des copropriétaires ne sont pas assez précises pour retenir un commencement des troubles à une date antérieure à la mise en demeure adressée le 14 avril 2021 par le syndicat des copropriétaires à la SCI SIMON BOLIVAR.
Il convient donc de retenir que les nuisances dénoncées ont débuté dès le 14 avril 2021 et se sont achevées 2 juin 2023, date des opérations d’expulsion (procès-verbal d’expulsion, pièce n° 5 de la SCI BOLIVAR).
Le fait que le personnel de la société RS SCOOTER soit revenu, le 21 juin 2023, récupérer le rideau de fer de la boutique en laissant le local ouvert en partant et le fait que la société RS SCOOTER MOTO puisse détenir encore les clés et le pass de l’immeuble (attestation de M. [B] [J], pièce n° 13 du syndicat des copropriétaires), constituent des faits distincts ne relevant pas des troubles anormaux du voisinage.
En tout état de cause, le SCI du [Adresse 5] justifie avoir remis en état le rideau métallique de la boutique (devis de l’entreprise Serrurerie Menuiserie Celeste en date du 14 septembre 2023 pour un montant de 7.126 €, pièce n° 7 de la SCI SIMON BOLIVAR).
S’agissant des responsabilités, il ressort des éléments précités que la société RS SCOOTER est à l’origine des troubles anormaux du voisinage subis par la copropriété.
Pour autant, le tribunal retient la matérialité de ces nuisances en confrontant les pièces n°5, n° 9, n° 13 et n° 15 (attestations de copropriétaires) à l’absence de toute preuve contraire produite en défense.
Or, comme exposé à titre liminaire, le syndicat des copropriétaires ne justifie pas avoir fait signifier à la société RS SCOOTER MOTO ses pièces n° 12 à 16.
Les pièces n° 13 et n° 15 sont donc inopposables à la société RS SCOOTER, en application des articles 7 et 16 du code de procédure civile.
Les seules pièces n° 5 et n° 9, qui correspondent à un courriel et à un signalement rédigés par un unique copropriétaire, M. [B] [J], ne permettent pas au tribunal d’entrer en voie de condamnation à l’encontre de la société RS SCOOTER MOTO.
S’agissant de la responsabilité de la SCI SIMON BOLIVAR, le tribunal relève que la SCI [Adresse 5] s’est contentée d’adresser une mise en demeure à son locataire le 7 janvier 2022 (pièce n° 3 de la SCI SIMON BOLIVAR), plus de huit mois après avoir reçu la première mise en demeure du syndic en date du 14 avril 2021 (pièce n° 4 du syndicat des copropriétaires) et plus de trois mois après avoir reçu une seconde mise en demeure, le 6 octobre 2021 (pièce n° 7 du syndicat des copropriétaires).
En outre, si la SCI SIMON BOLIVAR justifie avoir usé des voies de droit qui lui étaient offertes pour faire sanctionner son locataire en engageant, le 7 octobre 2022, une procédure en référé de résiliation du bail et d’expulsion auquel le juge des référés a fait droit le 2 janvier 2023 (pièce n° 4 de la SCI SIMON BOLIVAR), le tribunal relève qu’il résulte de la lecture de l’ordonnance de référé que cette action a été engagée pour défaut de paiement des loyers, et non à raison des troubles anormaux de voisinage dont se plaignait le syndicat des copropriétaires depuis 18 mois à la date de l’introduction de l’instance en référés.
La question des nuisances sonores n’a jamais été évoquée devant le juge des référés et ne motivait pas la demande d’expulsion engagée par le bailleur.
Le bailleur engage donc sa responsabilité pour les nuisances subies par le syndicat des copropriétaires à compter du 14 avril 2021, date de la mise en demeure, jusqu’au 2 juin 2023, date des opérations d’expulsion (procès-verbal d’expulsion, pièce n° 5 de la SCI BOLIVAR).
1-2 Sur la demande de dommages et intérêts formée par le syndicat des copropriétaires
Si l’existence d’un trouble anormal de voisinage justifie l’octroi de dommages et intérêts en réparation du préjudice, l’indemnité allouée doit tenir compte de l’importance du trouble, de sa durée et des circonstances de l’espèce (ex. : Cour d'appel de Montpellier, 1ère chambre C, 7 novembre 2017, n° RG 15/02858).
Au cas présent, il est établi que les nuisances précédemment relevées ont été subies du 14 avril 2021 au 2 juin 2023, soit pendant 2 ans, 1 mois et 15 jours.
Compte tenu de la persistance sur la durée des nuisances en provenance du local pris à bail, facteur de stress et de fatigue pour la collectivité des copropriétaires occupant l'immeuble, et en l'absence d'éléments plus précis produits en demande à ce titre, le préjudice collectif subi sera justement indemnisé à hauteur de la somme de 3.000 € que la SCI [Adresse 5] sera condamnée à payer au syndicat des copropriétaires.
Le syndicat des copropriétaires sera débouté du surplus, non justifié, de sa demande indemnitaire.
1-3 Sur les mesures propres à remédier aux nuisances subies : résiliation judiciaire du bail avec expulsion immédiate, prise en charge des frais de garde meubles concernant les biens garnissant le local
Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] à [Localité 8] soutient que l’ordonnance prononçant la résiliation du bail et l’expulsion de la société RS SCOOTER MOTO prononcée par le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris le 03 janvier 2023 ainsi que l’expulsion de la société par les forces de l’ordre le 2 juin 2023 n’ont pas rendu sans objet sa demande dès lors que la société RS SCCOTER MOTO demeure dans les lieux et continue de générer les nuisances dénoncées.
Il expose être maintenu dans l’ignorance des diligences entreprises par la SCI du [Adresse 5] pour faire exécuter l’ordonnance précitée et des difficultés d’exécution survenues.
Il considère que la SCI du [Adresse 5] ne justifie pas des points suivants : caractère définitif ou non de la décision du 3 janvier 2023 ; saisine ou non par la société RS SCOOTER MOTO du juge de l’exécution afin de solliciter un délai pour quitter les lieux ; autorisation donnée ou pas par la préfecture pour l’expulser.
Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] 19ème soutient que la SCI du [Adresse 5] n’a pas réagi aux trois mises en demeure adressées le 14 avril 2021, le 06 octobre 2021 et le 20 mai 2022, n’ayant sollicité la résiliation et l’expulsion de son locataire qu’un an et demi après la première mise en demeure, après avoir été assignée.
En défense, la SCI du [Adresse 5] soutient que les demandes du syndicat des copropriétaires visant à voir ordonner la résiliation de bail, l’expulsion de la société RS SCOOTER MOTO et la prise en charge des frais de garde meubles concernant les biens garnissant le local sont sans objet dès lors que :
- une ordonnance du juge des référés en date du 3 janvier 2023, aujourd’hui définitive, a statué sur ces demandes,
- l’ancien locataire n’a pas sollicité auprès du juge de l’exécution un quelconque délai pour quitter les lieux,
- l’ancien locataire a été expulsé le 3 juin 2023 ; son gérant n’est revenu le 16 juin 2023 que pour récupérer le rideau de fer qu’il avait lui-même posé.
Elle expose qu’elle a vidé le local et remplacé le rideau métallique.
***
L’article 1341-1 du Code civil prévoit que lorsque la carence du débiteur dans l’exercice de ses droits et actions à caractère patrimonial compromet les droits de son créancier, celui-ci peut les exercer pour le compte de son débiteur, à l’exception de ceux qui sont exclusivement rattachés à sa personne.
En cas de carence du bailleur, le syndicat des copropriétaires peut exercer en ses lieu et place par voie d’action oblique les actions dont il dispose à l’encontre de son locataire.
Il est constant que le syndicat des copropriétaires peut agir par voie d’action oblique, sur le fondement susmentionné, en résiliation du bail consenti par un copropriétaire, en raison des carences de ce dernier à faire respecter par son locataire les dispositions du bail et du règlement de copropriété.
Ainsi, un syndicat des copropriétaires peut exercer, en cas de carence du copropriétaire-bailleur, une action en résiliation d'un bail, par la voie de l'action oblique, dès lors que le locataire contrevient aux obligations découlant de celui-ci et que ses agissements, qui causent un préjudice aux autres copropriétaires, sont en outre contraires au règlement de copropriété (ex. : Civ. 3ème, 14 novembre 1985, n° 84-15.577), sans avoir à justifier de l'existence d'un préjudice (ex. : Civ. 3ème, 10 octobre 1981, n° 80-10.595).
La carence du débiteur de la partie exerçant l'action oblique se trouve établie lorsqu'il ne justifie d'aucune diligence. Inversement, la justification de diligences prive de fondement le recours à l’action oblique. Le constat de cette carence relève du pouvoir souverain des juges du fond, qui peuvent, dans ce cadre, estimer que des diligences insuffisantes permettent d'établir cette carence.
Si la résolution judiciaire du bail commercial peut être prononcée sur le fondement de l'action oblique prévue par l'article 1341-1 du Code civil, seuls des manquements graves et répétés du locataire commercial peuvent justifier qu'il soit porté atteinte à la pérennité de principe du bail commercial.
En l’espèce, par ordonnance en date du 2 janvier 2023 (pièce n° 4 de la SCI SIMON BOLIVAR), le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris a notamment :
- constaté l'acquisition de la clause résolutoire du bail commercial à la date du 5 septembre 2022,
- ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux dans le mois de la signification de l’ordonnance, l’expulsion de la société RS SCOOTER MOTO et de tout occupant de son chef des lieux situés [Adresse 1] / [Adresse 2] à [Localité 8] avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d’un serrurier,
- dit que les meubles et objets mobiliers se trouvant sur place donneront lieu à l'application des dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du Code des procédures civiles d'exécution.
Le tribunal rappelle qu’en application de l’article 488 du code de procédure civile, l'ordonnance de référé constatant l'acquisition de la clause résolutoire n'a pas, au principal, l'autorité de la chose jugée et ne s'impose pas au juge du fond saisi aux mêmes fins, de sorte que les demandes formées par le syndicat des copropriétaires ne sont pas « sans objet » de ce seul fait.
En revanche, le tribunal relève que l’action en référé de la SCI SIMON BOLIVAR ne permet pas de retenir la « carence du débiteur », au sens des dispositions de l’article 1341-1 du code civil, puisqu’elle a abouti à la résiliation du bail commercial et à l’expulsion de la société RS SCOOTER.
Il ressort en effet du procès-verbal d’huissier versé aux débats (pièce n° 5 de la SCI SIMON BOLIVAR) que la société RS SCOOTER a été expulsée le 2 juin 2023 (pièce n° 5 de la SCI SIMON BOLIVAR). Si le personnel de la société RS SCOOTER est revenu, le 21 juin 2023, récupérer le rideau de fer de la boutique en laissant le local ouvert en partant (attestation de M. [B] [J], pièce n° 13 du syndicat des copropriétaires), le SCI BOLIVAR justifie avoir remis en état le rideau métallique de la boutique (devis de l’entreprise Serrurerie Menuiserie Celeste en date du 14 septembre 2023 pour un montant de 7.126 €, pièce n° 7 de la SCI SIMON BOLIVAR).
Décision du 18 Juillet 2024
8ème chambre 2ème section
N° RG 22/10133 - N° Portalis 352J-W-B7G-CXE5J
Le syndicat des copropriétaires ne verse en tout état de cause aucune pièce aux débats qui puisse permettre au tribunal de retenir que la société RS SCOOTER se serait maintenue dans les lieux depuis son expulsion et que la SCI SIMON BOLIVAR n’aurait pas réagi.
Les conditions d’application de l’article 1341-1 du code civil n’étant pas réunies, il convient de débouter le syndicat des copropriétaires de ses demandes visant à voir :
- prononcer la résiliation du bail consenti par la SCI [Adresse 5] à la société RS SCOOTER MOTO,
- condamner la société RS SCOOTER MOTO à évacuer de corps et de biens ainsi que de tous occupants de son chef, le local commercial formant le lot n°741 dont est propriétaire la SCI [Adresse 5] au sein du syndicat des copropriétaires [Adresse 2], à compter de la signification du jugement,
- à défaut pour la société RS SCOOTER MOTO d'avoir quitté les lieux, ordonner son expulsion et celle de tout occupant de son chef, après la signification d'un commandement de quitter les lieux, avec l'assistance de la force publique si besoin est et sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir,
- ordonner la séquestration des biens meubles et objets mobiliers garnissant lesdits lieux dans tout garde meuble au choix du syndicat des copropriétaires et aux frais risques périls de la SCI [Adresse 5], en sa qualité de copropriétaire bailleur, et de la société RS SCOOTER MOTO, en sa qualité de locataire.
2. Sur les demandes accessoires :
La SCI [Adresse 5], qui succombe, sera condamnée aux entiers dépens.
Tenue aux dépens, la SCI [Adresse 5] sera condamnée à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 8] la somme de 3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Aux termes des articles 514 et suivants du code de procédure civile, dans leur rédaction issue du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019 et applicable aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.
Le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire.
Il statue, d'office ou à la demande d'une partie, par décision spécialement motivée.
En l'espèce, au regard de la nature des condamnations prononcées et de la particulière ancienneté du litige, il n'y a pas lieu d'écarter l'exécution provisoire de droit.
Les parties seront déboutées du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes plus amples ou contraires.
Décision du 18 Juillet 2024
8ème chambre 2ème section
N° RG 22/10133 - N° Portalis 352J-W-B7G-CXE5J
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal, statuant par jugement réputé contradictoire, mis à disposition au greffe et en premier ressort,
Déclare irrecevable le recours en garantie formé par la SCI [Adresse 5] à l’encontre de la société RS SCOOTER MOTO,
Déclare irrecevable la demande formée au titre des frais irrépétibles par la SCI [Adresse 5] à l’encontre de la société RS SCOOTER MOTO,
Condamne la SCI [Adresse 5] à verser au syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 8] la somme de 3.000,00 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi sur le fondement de la théorie des troubles anormaux du voisinage,
Déboute le syndicat des copropriétaires sis [Adresse 2] à [Localité 8] de sa demande indemnitaire formée à l’encontre de la société RS SCOOTER MOTO au titre du préjudice subi sur le fondement de la théorie des troubles anormaux du voisinage, ainsi que du surplus de sa demande indemnitaire formée à l’encontre de la SCI [Adresse 5],
Déboute le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 8] de ses demandes visant à voir :
- prononcer la résiliation du bail consenti par la SCI [Adresse 5] à la société RS SCOOTER MOTO,
- condamner la société RS SCOOTER MOTO à évacuer de corps et de biens ainsi que de tous occupants de son chef, le local commercial formant le lot n°741 dont est propriétaire la SCI [Adresse 5] au sein du syndicat des copropriétaires [Adresse 2], à compter de la signification du jugement,
- à défaut pour la société RS SCOOTER MOTO d'avoir quitté les lieux, ordonner son expulsion et celle de tout occupant de son chef, après la signification d'un commandement de quitter les lieux, avec l'assistance de la force publique si besoin est et sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir,
- ordonner la séquestration des biens meubles et objets mobiliers garnissant lesdits lieux dans tout garde meuble au choix du syndicat des copropriétaires et aux frais risques périls de la SCI [Adresse 5], en sa qualité de copropriétaire bailleur, et de la société RS SCOOTER MOTO, en sa qualité de locataire,
Condamne la SCI [Adresse 5] aux entiers dépens de l’instance,
Condamne la SCI [Adresse 5] à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] la somme de 3.000,00 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,
Dit n'y avoir lieu d'écarter l'exécution provisoire de droit.
Déboute les parties du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes.
Fait et jugé à Paris le 18 Juillet 2024
La Greffière Le Président