La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/07/2024 | FRANCE | N°21/15722

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 8ème chambre 2ème section, 18 juillet 2024, 21/15722


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expédition exécutoire
délivrée le :
à Maître DAVIES
NAVARRO

Copie certifiée conforme
délivrée le :
à Maître DE ARAUJO





8ème chambre
2ème section


N° RG 21/15722
N° Portalis 352J-W-B7F-CVID3


N° MINUTE :


Assignation du :
17 Décembre 2021








JUGEMENT
rendu le 18 Juillet 2024

DEMANDEUR

Syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] représenté par son syndic, le CABINET CPL IMMOBILIER>[Adresse 3]
[Localité 5]

représenté par Maître Carole DAVIES NAVARRO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1290


DÉFENDERESSE

S.A.S. NEXITY LAMY
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 6]

représentée pa...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expédition exécutoire
délivrée le :
à Maître DAVIES
NAVARRO

Copie certifiée conforme
délivrée le :
à Maître DE ARAUJO

8ème chambre
2ème section

N° RG 21/15722
N° Portalis 352J-W-B7F-CVID3

N° MINUTE :

Assignation du :
17 Décembre 2021

JUGEMENT
rendu le 18 Juillet 2024

DEMANDEUR

Syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] représenté par son syndic, le CABINET CPL IMMOBILIER
[Adresse 3]
[Localité 5]

représenté par Maître Carole DAVIES NAVARRO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1290

DÉFENDERESSE

S.A.S. NEXITY LAMY
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 6]

représentée par Maître Marilina DE ARAUJO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E963

Décision du 18 Juillet 2024
8ème chambre
2ème section
N° RG 21/15722 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVID3

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Monsieur Frédéric LEMER GRANADOS, Vice-président
Madame Anita ANTON, Vice-présidente
Madame Lucie AUVERGNON, Vice-président

assistés de Madame Lucie RAGOT, Greffière,

DÉBATS

A l’audience du 23 Mai 2024 tenue en audience publique devant Madame Anita ANTON, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

L'immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 7] est soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis. Il a pour syndic le cabinet Cpl Immobilier.

Auparavant, la copropriété avait pour syndic le cabinet Nexity Lamy, en son établissement sis [Adresse 4].

A sa prise de fonctions, le cabinet Cpl Immobilier a été informé d'un impayé de 18.005,16 euros, au titre de différentes factures émises par la société Sec.

Le syndic est intervenu auprès de son prédécesseur, qui l'a informé avoir procédé au paiement, par virement, des factures de cette société.

Cependant, il est apparu que le compte bancaire que lequel le virement avait été effectué n'était pas celui de la société Sec, laquelle n'avait donc pas reçu le règlement des factures.

Il a été demandé au cabinet Nexity Lamy d'effectuer toutes recherches et de faire en sorte que la somme virée sur un compte erroné soit restituée au syndicat des copropriétaires, à charge pour lui de régler la société Sec.

Une mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception du 5 novembre 2018 reçue le 6 novembre 2018 a été adressée par le nouveau syndic au cabinet Nexity Lamy pour lui demander de procéder au remboursement de la somme de 18.005,16 euros.

En l'absence de réponse, le cabinet Cpl Immobilier est intervenu auprès du garant financier du cabinet Nexity Lamy, lequel lui opposait un refus d'indemnisation.

Par exploit de commissaire de justice délivré 17 décembre 2021, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 7], représenté par son syndic le cabinet Cpl Immobilier, a assigné la société Lamy Nexity SAS afin d'obtenir notamment sa condamnation à lui payer la somme de 18.005,16 euros en raison des fautes commises dans l'exécution de son mandat, consécutivement au règlement d'un fournisseur sur un compte erroné, avec intérêts au taux légal à compter du 5 novembre 2018 et capitalisation des intérêts, outre la somme de 5.000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier subi par la copropriété, la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles et les dépens.

Par conclusions en en réplique et récapitulatives n°4 notifiées par voie électronique le 13 février 2023, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 7] demande au tribunal de :

"RECEVOIR le requérant en ses demandes.

L'en DECLARER bien-fondé.

VU les dispositions des articles 1231 et suivants, et 1991 et 1992 du code civil,
VU les pièces versées aux débats,
VU la responsabilité de la société Nexity Lamy, en raison des fautes commises dans l'exécution de son mandant, consécutivement au règlement des factures d'un fournisseur sur un compte erroné.
VU les préjudices subis par le syndicat requérant,
VU le lien de causalité entre les préjudices et les fautes du mandataire,

CONDAMNER la société Nexity Lamy à verser au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis à [Adresse 1] :
- La somme de 18.005,16 euros en principal, laquelle sera augmentée des intérêts au taux légal à compter du 5 Novembre 2018, les intérêts devant être capitalisés dans les termes de l'article 1343-2 du code civil.
- La somme de 5.000 euros à titre dommages et intérêts, en raison du préjudice financier subi par la copropriété et à titre de sanction des manquements contractuels de la défenderesse.
- La somme de 5.000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

JUGER la société Nexity Lamy tant irrecevable que mal fondée en l'ensemble de ses moyens, demandes, fi ns et conclusions et l'en DEBOUTER.

FAIRE DROIT aux demandes du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis à [Adresse 1].

ASSORTIR la décision à intervenir de l'exécution provisoire de droit.

Décision du 18 Juillet 2024
8ème chambre
2ème section
N° RG 21/15722 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVID3

CONDAMNER la défenderesse en tous les dépens, dont distraction par application de l'article 699 du code de procédure civile, au profit de Me Carole Davies".

Par conclusions récapitulatives n°4 notifiées par voie électronique le 13 février 2023, la société Nexity Lamy demande au tribunal de :

"Vu les articles 1991 et 1992 du code civil,

DEBOUTER le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées contre la société Nexity Lamy

CONDAMNER le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] à payer à la société Nexity Lamy la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

CONDAMNER le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] aux entiers dépens de l'instance".

Pour l'exposé exhaustif de leurs moyens en fait et en droit, il est renvoyé aux dernières écritures des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 14 février 2023.

L'affaire a été appelée à l'audience de plaidoiries du 23 mai 2024.

À l'issue des débats, les parties ont été informées de la mise en délibéré de la décision au 5 septembre 2024. Le délibéré a finalement été avancé au 18 juillet 2024, date à laquelle elle a été prononcée par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1. Sur la faute du syndic

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 7] soutient que :

- la société Nexity Lamy a engagé sa responsabilité à l'égard de son mandant, alors qu'elle était tenue d'une obligation de résultat, s'agissant des obligations mises à sa charge, et notamment, de celle tenant au règlement des factures des fournisseurs de l'immeuble,

- la société Nexity Lamy n'a pas accompli les diligences nécessaires à la bonne exécution de son mandat, puisqu'elle a réglé un fournisseur autre que la société Sec, créancière des factures,

- la société Nexity Lamy s'est contentée d'adresser à son successeur, le cabinet Cpl Immobilier, un courriel en date du 22 Octobre 2018, avec les trois avis de virements sur lesquels figurent la mention d'un compte, avec la mention "Sec" et le numéro d'un RIB ouvert à la banque Crédit du Nord,

- les règles en matière de secret bancaire s'opposent à ce que des tiers par rapport au compte bancaire, et à l'établissement financier, puissent avoir accès à la moindre information, mais le bénéficiaire du compte est obligatoirement connu de la société Nexity Lamy, puisque figurant précisément sur la liste de ses bénéficiaires de virements,

- aucune force majeure ne saurait être invoquée pour expliquer que l'ancien syndic n'ait pas rempli sa mission,

- l'ancien syndic a viré les fonds correspondant aux trois factures sur un compte qui n'est pas celui de la société Sec, alors qu'il connaissait parfaitement les coordonnées bancaires du compte de cette dernière, qui sont les mêmes que celles apparaissant sur les factures antérieurement payées et le RIB,

- le compte bancaire Crédit du Nord ne pouvait pas faire l'objet de la moindre vérification, étant inconnu du Cabinet Cpl Immobilier et de la société Sec, et bien plus, ainsi qu'il a été indiqué ci-avant, le secret bancaire s'opposant à toute demande de vérification émanant d'un tiers,

- seule la société Nexity Lamy pouvait intervenir auprès du fournisseur qui a reçu les virements, puisqu'elle dispose de ses coordonnées via le n° d'IBAN,

- l'action en répétition de l'indu ne peut être diligentée que par l'émetteur des virements litigieux,

- il n'appartient aucunement au nouveau syndic de la copropriété d'agir à l'encontre de l'établissement bancaire du bénéficiaire des virements litigieux,

- la Banque Palatine a confirmé l'exécution de l'ordre de virement donné par la société Lamy Nexity, mais a déclaré de pas avoir "la possibilité de connaître le nom de titulaires de comptes ouverts dans les banques confrères. Nous vous laissons le soin de vous rapprocher de Nexity", ce qui confirme que seule la défenderesse a la possibilité d'agir en ce sens,

- la copropriété n'a plus de compte bancaire à la Banque Palatine, cette Banque était celle de la société Nexity Lamy,

- ce compte a été fermé, dès le changement de syndic, et un nouveau compte a été ouvert auprès de la Banque CIC,

- la Société CIEC (nouvelle dénomination de la société Sec) a confirmé l'absence de compte ouvert au Crédit du Nord.

La société Nexity Lamy fait valoir que :

- lorsque la société Nexity Lamy a été interrogée, elle a signalé à son successeur que les factures litigieuses, d'un montant total de 18.005,15 euros, avaient été réglées à la société Sec suivant trois virements bancaires effectués sur le compte bancaire de la société Sec n° 3007 6020 3323 3810 ouvert auprès du Crédit du Nord :

- 12 février 2018 de 12.118,97 euros
- 14 février 2018 : 2.896,01 euros
- 6 avril 2018 : 2.990,18 euros

- les virements ont été opérés suivant les coordonnées bancaires enregistrées pour la société Sec,

- la société Sec a alors prétendu qu'elle n'était pas titulaire du compte bancaire ouvert auprès du Crédit du Nord sur lequel les virements avaient été émis,

- la société Cpl Immobilier s'est ensuite contentée de cette simple allégation de la société Sec - alors même qu'elle disposait des pièces de la société Nexity Lamy - pour payer, selon ses affirmations, à nouveau les 18.005,16 euros et n'a procédé à aucune vérification auprès du Crédit du Nord, banque réceptrice des règlements,

- la copropriété, qui a la charge de la preuve, ne démontre pas que les allégations de la société Sec soient exactes en l'absence de toute réponse et même d'interrogation du Crédit du Nord,

- le syndic entrant ne s'est même pas rapproché du Crédit du Nord pour savoir si la société Sec était ou non titulaire du compte bancaire FR76 3007 6020 3323 3810 0020 154 sur lequel les virements ont été opérés,

- il n'est pas justifié que la société Nexity Lamy ait commis une faute en procédant aux virements des sommes précitées sur le compte bancaire [XXXXXXXXXX011] ouvert auprès du Crédit du Nord,

- le fait que précédemment les factures de Sec aient été réglées sur un compte ouvert auprès de la BNP Paribas ne change rien à la situation, la société Sec ayant communiqué de nouvelles coordonnées bancaires (compte ouvert auprès du Crédit du Nord) qui ont été enregistrées par la société Nexity Lamy, raison pour laquelle les virements litigieux ont été effectués sur ledit compte ouvert auprès du Crédit du Nord.

En droit, l'alinéa 1er de l'article 1991 du code civil dispose que : "Le mandataire est tenu d'accomplir le mandat tant qu'il en demeure chargé, et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution".

Selon l'article 1992 du même code, "le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion". Le syndic de copropriété, mandataire du syndicat des copropriétaires et à ce titre est responsable de sa gestion, engage sa responsabilité sur ce fondement à l'égard du syndicat des copropriétaires lorsqu'il commet des fautes ou des négligences dans le cadre de sa mission.

L'article 18 de la loi du 10 juillet 1965, qui définit les missions du syndic, prévoit par ailleurs que le syndic est seul responsable de sa gestion (3ème Civ., 21 octobre 2009, n° 08-19.111 ; 11 mars 2014, n° 13-10.875).

Il appartient au syndicat des copropriétaires d'établir la faute du syndic, étant précisé qu'il s'agit d'une obligation de moyen et que ce dernier doit réaliser sa mission dans le cadre des diligences normales d'un professionnel averti.

Le syndic doit faire toute diligence pour recouvrer les créances du syndicat comme pour en payer les dettes, sous peine de commettre une faute. Dans tous les cas, le syndic doit vérifier le montant des règlements demandés par les entreprises.

Le paiement erroné ou abusif de factures à des tiers pour des travaux non exécutés constitue une faute de sa part (par exemple s'il paye en intégralité des travaux qui n'ont été que partiellement exécutés : 3ème Civ., 8 avril 1998, pourvoi n° 96-15.430).

Aux termes de l'alinéa 2 de l'article 1353 du code civil, "celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation".

En l'espèce, il ressort des éléments versés aux débats que la société Sec, société d'exploitation de chauffage, a émis plusieurs factures les 4, 5 décembre 2017 et 31 janvier 2018, correspondant à des prestations de distribution de chauffage en exécution du contrat n° 59-25744 ayant pris effet le 01/07/2011 (pièces n° 16 du syndicat des copropriétaires).

Ces factures portent toutes la mention suivante concernant le règlement :

"Par virement : Dom : BNP Paribas
IBAN : [XXXXXXXXXX010]
BIC : [XXXXXXXXXX08]

La société Sec n'a pas reçu le règlement de ces factures sur le compte mentionné ouvert dans les livres de la BNP Paribas.

La société Nexity Lamy a procédé à trois virements bancaires les 09 et 12 février et 4 avril 2018 :

- 12 février 2018 de 12.118,97 euros,
- 14 février 2018 : 2.896,01 euros,
- 6 avril 2018 : 2.990,18 euros (pièce n° 3 du syndicat des copropriétaires).

Ces virements effectués depuis le compte bancaire séparé de la copropriété sur le compte bancaire n° FR76 3007 6020 3323 3810 ouvert auprès du Crédit du Nord et portent les références des 11 factures suivantes :

Date facture
Référence facture
Montant TTC
27/09/2017
201709X050489
1.028,17
30/08/2017
201708X050347
- 1.028,17
27/09/2017
201709X050490
- 1.080,70
04/12/2017
201712X050201
1.907,18
04/12/2017
201712X050202
1.886,91
05/12/2017
201712X050198
2.754,73
05/12/2017
201712X050199
2.856,76
05/12/2017
201712X050196
1.907,18
05/12/2017
201712X050197
1.886,91

12.118,97
31/12/2017
201712X050792
2.896,01
31/01/2018
201801X051519
2.990,18

(pièces n° 2, 3 et 4 de la société Nexity Lamy)

Les références de factures correspondant aux virements effectués par la société Nexity Lamy correspondent bien aux factures versées par le syndicat des copropriétaires en pièce n°16.

La société Nexity Lamy a procédé au règlement des factures mentionnées ci-dessus sur un autre compte bancaire que celui figurant sur les factures du fournisseur.

Si elle soutient que la société Sec lui aurait communiqué, après l'émission de ces factures, de nouvelles coordonnées bancaires, raison pour laquelle les virements litigieux auraient été effectués sur le compte ouvert auprès du Crédit du Nord, elle n'apporte aucun élément permettant de justifier cette allégation.

Il en résulte que la société Nexity Lamy, qui était en possession de ces factures portant le libellé "syndicat des copropriétaires/ Res. Baratier c/o Nexity [Localité 9], [Adresse 4]", aurait dû procéder, après une simple lecture des coordonnées de règlement figurant sur ces factures, à leur règlement sur le compte bancaire tel qu'identifié comme appartenant à la société Sec et ouvert dans les livres de la BNP Paribas.

En effectuant le règlement de ces factures par des virements sur un compte bancaire ouvert dans les livres du Crédit du Nord qui n'était pas celui identifié sur les factures sans justifier avoir procédé de la sorte à la demande du fournisseur qui lui aurait indiqué de nouvelles coordonnées bancaires, le syndic a effectué un paiement erroné constituant une faute de sa part.

En conséquence, la responsabilité de la société Nexity Lamy, syndic, sera retenue.

2. Sur le préjudice

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 7] soutient que :

- le syndicat des copropriétaires de l'immeuble a dû s'acquitter du règlement des factures de la société Sec, une seconde fois,

- le relevé du compte bancaire de la copropriété fait apparaitre le débit de la somme de 28.836,11 euros correspondant à la somme précitée de 18.005,16 euros, augmentée du montant de six nouvelles factures dues à la société Sec,

- la trésorerie de l'immeuble a été gravement compromise du fait de l'erreur commise par la défenderesse,

- le montant de 5.000 euros de dommages et intérêts sollicités correspond :

* à la nécessaire réparation du préjudice subi par la copropriété, qui a dû faire face à un double paiement des factures, compromettant ainsi sa situation de trésorerie,
* à la sanction des manquements contractuels de la défenderesse, qui a perçu des honoraires dont la contrepartie a été mise à néant, en raison de la faute qu'elle a commise.

La société Nexity Lamy fait valoir que :

- s'agissant des dommages et intérêts réclamés, la copropriété n'explique pas en quoi consisterait le préjudice financier allégué alors que cette demande fait double emploi avec celle formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- le demandeur sollicite la somme de 18.055,16 euros correspondant aux sommes prétendument versées par erreur à un tiers, sans démontrer que la copropriété ait eu à payer une nouvelle fois la somme de 18.005,16 euros,

- les virements ont été effectués depuis le compte bancaire séparé de la copropriété, l'émetteur du virement étant la copropriété, qui est titulaire du compte et non la société Nexity Lamy,

- la fermeture du compte ne change rien à la situation juridique et au fait que la copropriété soit émettrice du virement puisqu'il s'agit d'un compte bancaire séparé,

- il lui appartient de demander au Crédit du Nord l'identité du titulaire du compte puis d'agir à l'encontre de celui-ci en répétition de l'indu dans le délai de la prescription,

- il n'est pas démontré que la société Nexity Lamy aurait fait perdre la chance au syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] de pouvoir récupérer les 18.005,16 euros.

En droit, conformément à l'article 1231-1 du code civil, "Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation,

soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure".

La réparation d'une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée.

Il est constant que les juges ont l'obligation d'évaluer le préjudice dont ils constatent l'existence (ex. : 3ème Civ., 10 juillet 2012, n° 11-19.374).

En l'espèce, il est établi par les pièces versées aux débats, notamment par le relevé de compte de la copropriété et le relevé de factures, que le syndicat des copropriétaires a dû procéder au règlement de la somme de 18.005,16 euros à la société Sec (pièces n°7 et 11 du syndicat des copropriétaires).

Contrairement à ce que soutient la société Nexity Lamy, sa faute n'a pas causé au syndicat des copropriétaires une perte de chance, c'est-à-dire une disparition de la probabilité pour la copropriété de récupérer la somme virée par erreur, mais elle lui a directement causé la perte de cette somme correspondant au virement auquel elle a procédé par erreur auprès d'un bénéficiaire inconnu de la copropriété et qui n'était pas le fournisseur de chauffage de celle-ci.

Dans ces conditions, la perte de la somme de 18.005,16 euros pour la copropriété étant la conséquence directe du paiement effectué par erreur par le syndic de copropriété, la société Nexity Lamy doit être condamnée à payer cette somme au syndicat des copropriétaires, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement, s'agissant d'une créance indemnitaire ne produisant intérêts moratoires que du jour de sa fixation judiciaire (article 1231-7 du Code civil) et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.

S'agissant de la somme de 5.000 euros sollicitée à titre de dommages et intérêts, le syndicat des copropriétaires ne verse aucun élément permettant de justifier que la faute du syndic aurait compromis sa situation de trésorerie ni le quantum de sa demande.

Par conséquent, il convient de l'en débouter.

3. Sur les demandes accessoires

- Sur les dépens

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

Compte tenu du sens de la présente décision, la société Nexity Lamy sera condamnée au paiement des dépens, qui pourront être recouvrés par Me Carole Davies, avocat en ayant fait la demande, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

- Sur les frais non compris dans les dépens

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.

Il y a lieu de condamner au titre des frais irrépétibles la société Nexity Lamy à payer la somme de 3.000 euros au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 7].

La société Nexity Lamy sera déboutée de sa propre demande formulée à ce titre.

- Sur l'exécution provisoire

Aux termes des articles 514 et suivants du code de procédure civile, dans leur rédaction issue du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019 et applicable aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire. Il statue, d'office ou à la demande d'une partie, par décision spécialement motivée.

En l'espèce, il n'y a pas lieu d'écarter l'exécution provisoire.

Les parties seront déboutées du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes plus amples ou contraires.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par un jugement contradictoire, en premier ressort, après débats en audience publique et par mise à disposition au greffe,

CONDAMNE la société Nexity Lamy à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 7] la somme de 18.005,16 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;

DEBOUTE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 7] de l'intégralité de sa demande de condamnation au paiement de la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts ainsi que du surplus de ses demandes indemnitaires ;

CONDAMNE la société Nexity Lamy aux entiers dépens, qui pourront être recouvrés par Me Carole Davies, avocat en ayant fait la demande, conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Nexity Lamy à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 7] la somme de 3.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que l'exécution provisoire du présent jugement est de droit ;

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes.

Fait et jugé à Paris le 18 Juillet 2024.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 8ème chambre 2ème section
Numéro d'arrêt : 21/15722
Date de la décision : 18/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 24/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-18;21.15722 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award