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18/07/2024 | FRANCE | N°13/16008

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 8ème chambre 2ème section, 18 juillet 2024, 13/16008


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :




8ème chambre
2ème section


N° RG 13/16008
N° Portalis 352J-W-B65-CBGQL

N° MINUTE :


Assignation du :
04 Octobre 2013








JUGEMENT
rendu le 18 Juillet 2024
DEMANDERESSE

S.C.I. KERENE, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 4]
[Localité 9]

représentée par Maître Antoine ATTIAS, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant/postulant, vestiaire #C2306<

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DÉFENDEURS

Le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5], représenté par son syndic le Cabinet GRIFFATON & MONTREUIL.
[Adresse 1]
[Localité 7]

Société Cabinet SO...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

8ème chambre
2ème section


N° RG 13/16008
N° Portalis 352J-W-B65-CBGQL

N° MINUTE :

Assignation du :
04 Octobre 2013

JUGEMENT
rendu le 18 Juillet 2024
DEMANDERESSE

S.C.I. KERENE, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 4]
[Localité 9]

représentée par Maître Antoine ATTIAS, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant/postulant, vestiaire #C2306

DÉFENDEURS

Le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5], représenté par son syndic le Cabinet GRIFFATON & MONTREUIL.
[Adresse 1]
[Localité 7]

Société Cabinet SOGIMCO COPROPRIETES, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 3]
[Localité 10]

Tous deux représentés par Maître Laurence GUEGAN-GELINET, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant/postulant, vestiaire #C0886
Décision du 18 Juillet 2024
8ème chambre -2ème section
N° RG 13/16008 -N° Portalis 352J-W-B65-CBGQL

Société de Caution Mutuelle des Professions Immobileres et Foncieres (SO.CA.F), prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 6]
[Localité 8]

représentée par Maître Thierry MONTERAN de la SCP UGGC Avocats, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant/postulant, vestiaire #P0261

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Frédéric LEMER GRANADOS, Vice-Président
Anita ANTON, Vice-Présidente
Lucie AUVERGNON, Vice-Présidente

assistés de Nathalie NGAMI-LIKIBI, Greffière

DEBATS

A l’audience du 25 Avril 2024 présidée par Frédéric LEMER GRANADOS tenue en audience publique avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 18 Juillet 2024.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

Exposé du litige :

La S.C.I. KERENE est propriétaire de deux locaux commerciaux, l’un d’optique (lots n° 3, 19, 25, 26, 29, 30, 31 et 32) et l’autre de traiteur (lots n° 1, 4, 5, 7, 20, 22, 23, 29, 54 et 56), au sein du bâtiment A de l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 2], soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis, composé de huit bâtiments (A à H), dont le syndic a été la société ESPACIMMO jusqu’au 30 juin 2009, la société SOGIMCO COPROPRIETES à compter du 28 janvier 2010 et enfin le cabinet GRIFFATON & MONTREUIL depuis le 26 mai 2015.

L’assemblée générale des copropriétaires du 20 mars 2008 a voté d’importants travaux sur l’ensemble des bâtiments pour un montant total de 540.223,76 €.

La société ESPACIMMO a été de nouveau désignée en qualité de syndic, son mandat devant prendre fin le 30 juin 2009.

L’exécution des travaux a été suspendue, notamment en l’absence de paiement par tous les copropriétaires des provisions sur travaux appelées, les appels de fonds n’ayant été honorés qu’à hauteur de la somme de 397.893,07 € et un montant de 230.056,59 € ayant été versé aux entreprises en exécution des travaux votés sur ladite somme de 397.893,07 €.

La société ESPACIMMO n’ayant pas convoqué de nouvelle assemblée générale avant l’expiration de son mandat puis ayant présenté sa démission, selon lettre recommandée avec avis de réception du 29 septembre 2019, la copropriété s’est trouvée dépourvue de syndic et un administrateur provisoire a été désigné, selon ordonnance sur requête en date du 5 novembre 2009, en la personne de Maître [Y] [L].

La société SOGIMCO COPROPRIETES a été désignée en qualité de syndic lors de l’assemblée générale du 28 janvier 2010.

La société SOGIMCO COPROPRIETES a saisi le président du tribunal de grande instance de Paris, statuant comme en matière de référé, d’une demande de condamnation de la société ESPACIMMMO à lui remettre sous astreinte l’ensemble des documents et archives du syndicat, cette remise ayant été ordonnée par décision du 3 juin 2010.

Par ordonnance du 26 octobre 2011, la société ESPACIMMO a été condamnée à payer au syndicat des copropriétaires une somme de 9.000 € au titre de la liquidation de l’astreinte, une nouvelle astreinte ayant par ailleurs été prononcée, liquidée par jugement du tribunal de commerce de Créteil du 2 mai 2012.

Lors de l’assemblée générale du 8 juin 2011, la société SOGIMCO COPROPRIETES a été autorisée, selon résolution n° 18, à agir en justice à l’encontre de la société ESPACIMMO, de la SO.CA.F en qualité de garant financier de la société ESPACIMMO et de la S.A.A., recherchée en qualité d’assureur responsabilité civile de la société ESPACIMMO.

Une plainte pénale a par ailleurs été déposée par le syndicat des copropriétaires à l’encontre de la société ESPACIMMO pour non-représentation de fonds (reliquat d’appels de fonds sur travaux d’un montant de 162.760,34 € prétendument conservé par la société ESPACIMMO, ancien syndic, et non versé aux entreprises en exécution des marchés votés).

A réception des factures émises par les entrepreneurs mandatés par la société ESPACIMMO, en exécution de la décision prise lors de l’assemblée générale du 20 mars 2008, la société SOGIMCO COPROPRIETES n’a pu en assurer le règlement, en l’absence de trésorerie suffisante.

Un appel de trésorerie exceptionnel d’un montant de 184.500 € a alors été voté lors de l’assemblée générale du 30 septembre 2010, selon une clé de répartition excluant la S.C.I. KERENE, copropriétaire défaillant, n’ayant pas réglé les appels de provisions afférents aux travaux précédemment votés à hauteur de la somme de 142.299,58 €, au 2 septembre 2010.

Les fonds ont été affectés au règlement des entreprises concernées pour un montant total de 173.468,24 € (AME, AJC [R], [C] [J], LECAUDAY & KHANLARI ARCHITECTES).

Entretemps, la S.C.I. KERENE a été condamnée, par jugement du tribunal de grande instance de Paris du 16 décembre 2009, au paiement de la somme de 147.385 €, arrêtée au 6 octobre 2009 et non au 6 octobre 2008 (selon jugement en rectification d’erreur matérielle du 3 mars 2010), avec intérêts au taux légal à compter du 31 octobre 2008 sur la somme de 96.979,63 €, jugements dont elle a interjeté appel le 4 février 2010.

Par arrêt du 12 octobre 2011, la cour d’appel de Paris a confirmé les jugements, sauf en ce qui concerne le débouté du syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts et statuant à nouveau de ce chef, a condamné la S.C.I. KERENE au paiement de la somme de 1.500 € à titre de dommages et intérêts ainsi qu’au paiement de la somme de 2.000 € au titre des frais irrépétibles.

Deux assemblées générales ordinaires de copropriétaires se sont tenues le 10 juin 2013 puis le 12 juin 2014 au cours desquelles diverses résolutions ont été adoptées portant sur :
- les comptes de l’exercice 2012 et le quitus de gestion donné au syndic pour cette période, la création d’un lot n° 59 provenant des parties communes supprimées du bâtiment H et son alinéation (assemblée générale du 10 juin 2013),
- l’approbation des comptes de l’exercice 2013 et le quitus de gestion donné au syndic pour cette période, l’approbation de travaux d’urgence d’électricité, la ratification de l’appel exceptionnel de trésorerie du 5 décembre 2013 (20.000 € pour les travaux d’électricité réalisés en urgence par la société A.M.E.) et l’autorisation donnée au syndic de procéder à un appel de trésorerie exceptionnel « pour terminer les travaux votés lors de l’assemblée générale du 20 mars 2008 pour un montant de 120.000 € TTC sur les différents bâtiments » (assemblée générale du 12 juin 2014).

Par acte d’huissier du 4 octobre 2013, la S.C.I. KERENE a fait assigner le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5], son syndic, la société SOGIMCO COPROPRIETES et la SO.CA.F., recherchée en qualité de garant financier de la société SOGOMCO COPROPRIETES, afin de solliciter :
- à titre principal la condamnation de la société SOGIMCO COPROPRIETES à lui rembourser, sous astreinte, la somme de 169.762,28 €,
- à titre subsidiaire sa condamnation sous astreinte à faire exécuter les travaux votés lors de l’assemblée générale du 20 mars 2008 en justifiant de leur avancement ainsi que de leur règlement,
- de voir ordonner sous astreinte la déduction de la somme de 7.524,26 € des appels de provisions qui lui sont adressés,
- de voir ordonner la mainlevée de l’hypothèque judiciaire provisoire prise le 10 juin 2010 sur les lots dont elle est propriétaire,
- l’annulation des résolutions n° 5, 6, 14, 15, 16, 17, 18, 19 et 20 de l’assemblée générale des copropriétaires du 10 juin 2013,
- et la révocation judiciaire du syndic, SOGIMCO COPROPRIETES du fait des « manquements graves commis dans l’exercice de ses fonctions » (affaire enregistrée sous le numéro de RG 13/16008).

Par acte d’huissier du 4 septembre 2014, elle a fait assigner les mêmes parties défenderesses devant le tribunal de grande instance de Paris afin de notamment de solliciter :
- l’annulation des résolutions n° 6, 7, 8, 9 et 25 de l’assemblée générale des copropriétaires du 12 juin 2014,
- la révocation judiciaire du syndic SOGIMCO COPROPRIETES et sa condamnation à lui payer la somme de 170.000 € au titre du préjudice financier subi (affaire enregistrée sous le numéro de RG 14/14850).

La jonction des deux affaires a été ordonnée, par mentions aux dossiers, le 19 février 2015, l’instance se poursuivant sous le seul numéro de RG 13/16008.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées par voie électronique le 6 juillet 2022, la S.C.I. KERENE demande au tribunal de :

Vu le décret du 17 mars 1967 pris en application de la loi du 10 juillet 1965,
Vu l'article 1184 du code civil,

Prononcer l'annulation des résolutions 5, 6, 14, 15 et 16, votées lors de l'assemblée générale des copropriétaires du 10 juin 2013,

Prononcer l'annulation des résolutions 6, 7, 8, 9 et 25 votées lors de l'assemblée générale des copropriétaires du 12 Juin 2014,

Condamner le syndicat des copropriétaires à faire figurer au crédit du compte de la SCI KERENE la somme de 169 762,28 €, sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,

A titre subsidiaire, condamner le syndicat des copropriétaires à faire exécuter les travaux votés lors des assemblées générales du 20 mars 2008, et à justifier de leur avancement ainsi que de leur règlement, sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,

Dire et juger que les travaux d'électricité et de ravalement votés lors de l'assemblée générale du 20 mars 2008 devront être achevés sans qu'aucune somme complémentaire ne puisse être réclamée à la SCI KERENE à ce titre,

Ordonner au syndicat des copropriétaires de déduire la somme de 7 524,26 € des appels de provisions adressés à la SCI KERENE, sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,

Ordonner au syndicat des copropriétaires de procéder à la mainlevée de l'hypothèque judiciaire provisoire prise le 18 juin 2010 sur les lots de la SCI KERENE, et d'en justifier, sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,

Dire et juger que la responsabilité civile professionnelle du Syndic SOGIMCO COPROPRIETES est engagée,

Débouter le syndicat des copropriétaires de ses demandes reconventionnelles,
Condamner le syndic SOGIMCO COPROPRIETES à verser à la SCI KERENE la somme de 170 000 € au titre du préjudice financier subi,

Dire et juger recevable la mise en cause de la garantie financière de la SOCAF,

Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir, nonobstant toutes voies de recours,

Condamner conjointement et solidairement le syndicat des copropriétaires et le syndic SOGIMCO COPROPRIETES à payer à la SCI KERENE la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Aux termes de leurs dernières écritures notifiées par voie électronique le 5 mai 2023, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] et la société SOGIMCO COPROPRIETES demandent au tribunal de :

Vu les articles 10 et 10-1 de la loi du 10 juillet 1965,
Vu l'article 35 du Décret du 17 mars 1967,
Vu l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965,
Vu les articles 1231-6 et 1343-2 du Code civil,
Vu les pièces versées aux débats,

RECEVOIR le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5]) représenté par son syndic en exercice, et la société SOGIMCO COPROPRIETES en leurs conclusions, fins et prétentions et les y déclarer bien fondés ;

En conséquence,

DEBOUTER la SCI KERENE de ses demandes d'annulation des résolutions n° 5, 6, 14, 15 et 16 de l'assemblée générale du 10 juin 2013,

CONSTATER que la SCI KERENE a renoncé à ses demandes d'annulation des résolutions n° 19 et 20 de l'assemblée générale du 10 juin 2013, faute d'intérêt à agir,

DEBOUTER la SCI KERENE de ses demandes d'annulation des résolutions n° 6, 7, 8, 9 et 25 de l'assemblée générale du 12 juin 2014,

DEBOUTER la SCI KERENE de ses demandes d'annulation des résolutions n°6 et 7 de l’assemblée générale du 13 janvier 2016,

CONSTATER que la société SOGIMCO COPROPRIETES n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité,

DEBOUTER la SCI KERENE de ses demandes de dommages et intérêts DEBOUTER la SCI KERENE de toutes ses autres demandes,

A titre reconventionnel

RECEVOIR le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5]) en toutes ses demandes reconventionnelles.

Y faisant droit :

CONDAMNER la SCI KERENE à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5]) les sommes suivantes :

1°) 25.368,04 € au titre de l’arriéré des charges de copropriété dues en principal, en ce comprises les charges provisionnelles du 2e trimestre 2023, mais exclues les charges de l’année 2016, puis de 2019 à 2023, et suivant l’arrêté de compte au 11 avril 2023, augmentée des intérêts au taux légal à compter du présent exploit ;
3°) 20.000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive au paiement, conformément à l’article 1231-6 du Code civil ;

DIRE ET JUGER que les intérêts produits par la somme due en principal seront le cas échéant capitalisés annuellement selon les modalités prévues par l’article 1343-2 du code civil.

REFUSER tout délai de paiement et subsidiairement, si par extraordinaire des délais de paiement étaient accordés à la SCI KERENE dire et juger que lesdits délais seront octroyés sous réserve du paiement des charges de copropriété courantes pour la période postérieure à celle faisant l’objet des condamnations à intervenir.

CONDAMNER la SCI KERENE à payer la somme de 15.000 € au syndicat des copropriétaires et la somme de 4.000 € à la société SOGIMCO COPROPRIETES en application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNER la SCI KERENE aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Laurence GUÉGAN, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées par voie électronique le 13 août 2015, la SO.CA.F (Société de Caution Mutuelle des Professions Immobilières et Foncières) demande au tribunal de :

Vu l’article 56 du code de procédure civile,
Vu l’article 122 du code de procédure civile,
Vu l’article 39 du décret du 20 juillet 1972,
Vu l’article 700 du code de procédure civile,

Prononcer l’annulation de l’assignation du 4 octobre 2013 délivrée à la SO.CA.F,

Prononcer l’annulation de l’assignation du 4 septembre 2014 délivrée à la SO.CA.F, Prononcer la mise hors de cause pure et simple de la SO.CA.F.,

A titre surabondant :

Dire et juger que la demande de la SCI KERENE contre la SO.CA.F. est irrecevable,

A titre encore plus surabondant :

Décision du 18 Juillet 2024
8ème chambre -2ème section
N° RG 13/16008 -N° Portalis 352J-W-B65-CBGQL

Dire et juger que la SCI KERENE ne rapporte pas la preuve d’une créance certaine, liquide et exigible, Dire et juger que SOGIMCO n’est pas défaillante,

En conséquence :

Débouter la SCI KERENE de toutes ses demandes, fins et conclusions contre la SO.CA.F,

Condamner la SCI KERENE à verser à la SO.CA.F. une somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamner la SCI KERENE aux entiers dépens dont distraction sur le fondement de l’article 699 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des moyens, il est renvoyé aux écritures précitées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 3 octobre 2023.

L’affaire, plaidée à l’audience du 25 avril 2024, a été mise en délibéré au 18 juillet 2024.

Selon avis de mise en délibéré notifié par voie électronique le 25 avril 2024, le conseil de la S.C.I. KERENE a été invité à déposer son dossier de plaidoirie au plus tard le 10 mai 2024, avec la mention selon laquelle « à défaut, le tribunal statuera sans ses pièces ».

MOTIFS DE LA DECISION :

I – Sur les demandes d’annulation des assignations délivrées les 4 octobre 2013 et 4 septembre 2014 formées par la SO.CA.F et sur la fin de non-recevoir pour défaut de qualité à agir soulevée par la SO.CA.F :

La SO.CA.F sollicite l’annulation des assignations délivrées à son encontre les 4 octobre 2013 et 4 septembre 2014, faute de fondement en droit et en fait des demandes formulées à son encontre, hormis la référence selon laquelle la SOGIMCO bénéficierait de la garantie financière de la SOCAF, ne répondant pas aux exigences de l’article 56 du code de procédure civile, et sa mise hors de cause.

Elle estime également la demande formée par la S.C.I. KERENE irrecevable, en application de l’article 122 du code de procédure civile, seuls les mandants ou ex-mandants de la personne garantie disposant d’une action à son encontre et la créance devant en outre résulter du solde d’une situation financière arrêtée à la fin de la garantie, tandis qu’aucun document de ce type n’est produit à l’appui des prétentions de la S.C.I. KERENE.

La S.C.I. KERENE répond que le syndic, SOGIMCO COPROPRIETE, bénéficiant de la garantie financière de la SO.CA.F, il y a lieu de mettre cet organisme dans la cause, celle-ci ayant vocation à intervenir, notamment, à l’occasion d’opérations de gestion immobilière.

Décision du 18 Juillet 2024
8ème chambre -2ème section
N° RG 13/16008 -N° Portalis 352J-W-B65-CBGQL

Elle ajoute que le syndic s’est vu confier par le syndicat des copropriétaires la gestion de l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 2] pour lequel les copropriétaires, dont la S.C.I. KERENE, lui ont remis des appels de fonds pour travaux. Elle estime que la SO.CA.F s’étant amplement défendue dans ses écritures en réponse, de sorte qu’elle ne saurait se fonder sur l’article 56 du code de procédure civile pour invoquer la nullité de ses assignations.

***

1-1 Sur l’exception de nullité des assignations délivrées les 4 octobre 2013 et 4 septembre 2014 :

L'article 56 2° du Code de procédure civile prévoit que l'assignation contient à peine de nullité un « exposé des moyens en fait et en droit ». S'agissant de l'absence de moyen en fait et en droit, formalité prescrite à peine de nullité de l'assignation, le régime de la nullité prévu par l’article 56 du Code de procédure civile, qui n’entre pas dans les cas limitativement prévus par l’article 117 du Code de procédure civile, est celui de la nullité pour vice de forme, défini aux articles 112 et suivants du même code.

Aux termes des articles 114 et 115 du code de procédure civile, la nullité pour vice de forme d'un acte de procédure ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité.

La nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l'acte si aucune forclusion n'est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief.

Il est également de jurisprudence constante que le fondement juridique peut se déduire de la demande et qu'il appartient au juge d’apprécier la validité de l'assignation au regard de l'objet de l'action dont il est saisi, l’objet de la demande pouvant n’être exprimé que de façon implicite (ex. Cour d'appel de Bordeaux, 17 décembre 2009, n° RG 08/06374).

En l'espèce, aux termes de son exploit introductif d’instance, la S.C.I. KERENE sollicite la mise en cause de la SO.CA.F en qualité de garant financier de la société SOGIMCO COPROPRIETE.

Par ailleurs, aux termes de ses dernières écritures (page 17), elle estime être fondée à solliciter la mise en cause de la SO.CA.F en qualité de garant financier de la société SOGIMCO COPROPRIETE, en faisant valoir que la SO.CA.F a “vocation à intervenir notamment à l’occasion d’opérations de gestion immobilière”, qu’elle se serait vue “confier par le Syndicat des copropriétaires la gestion de l’immeuble sis [Adresse 5] pour lequel les copropriétaires, dont la SCI KERENE, lui ont remis des appels des fonds de travaux” et que “les fonds remis par la SCI KERENE à hauteur de 169.762,28 €” aurait “été détournés par SOGIMCO COPROPRIETE”.

Son action est donc implicitement mais nécessairement fondée sur les dispositions de l’article 39 du décret n° 72-678 fixant les conditions d’application de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d’exercice des activités relatives à certaines opérations sur les immeubles et fonds de commerce, qui prévoient en particulier que “la garantie financière couvre toute créance ayant pour origine un versement ou une remise effectués à l’occasion d’une opération mentionnée à l’article 1er de la loi du 2 janvier 1970”.

La SO.CA.F, qui invoque d’ailleurs également ce fondement pour répondre aux moyens soulevés par la S.C.I. KERENE, a conclu à deux reprises au fond dans le cadre de la présente procédure et a pu utilement faire valoir ses moyens de défense, de sorte qu’elle ne justifie d’aucun grief que lui aurait causé l’irrégularité qu’elle invoque des assignations délivrées les 4 octobre 2013 et 4 septembre 2014.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, les exceptions de nullité des assignations délivrées les 4 octobre 2013 et 4 septembre 2014, soulevées par la SO.CA.F., devront être rejetées.

1-2 Sur la fin de non-recevoir pour défaut de qualité à agir soulevée par la SO.CA.F. :

Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile : « Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt » […].

En l’espèce, la S.C.I. KERENE, qui est un tiers par rapport au contrat de garantie financière liant le syndic à la SO.CA.F., n’a pas qualité pour agir dans l’intérêt du mandant de la SO.CA.F., le syndicat de copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 2] disposant d’une action personnelle et directe à l’encontre du garant, en application de la loi dite Hoguet du 2 janvier 1970 et du décret du 20 juillet 1972.

En effet, ce contrat ayant pour objet de garantir au mandant, le syndicat des copropriétaires, le remboursement des versements ou remises effectués entre les mains du mandataire et n’ayant pas été affectés à leur destination contractuelle ou légale, seul le représentant légal du syndicat est recevable à mobiliser la garantie de la SO.CA.F.

Dans ces conditions, la S.C.I. KERENE sera déclarée irrecevable en sa demande de mise en cause de la garantie financière de la SO.CA.F.

II – Sur les demandes d’annulation des résolutions n° 5, 6, 14 à 16 de l’assemblée générale du 10 juin 2013 et 6 à 9 et 25 de l’assemblée générale du 12 juin 2014 :

La S.C.I. KERENE fait valoir en substance les moyens suivants :

a) Sur les résolutions n° 5 et 6 de l’assemblée générale du 10/06/13 (approbation des comptes de l’exercice 2012 et quitus de gestion donné au syndic) :
$gt; allégations de comptes erronés, comme mentionnant un « solde en attente de travaux négatif de – 11.696,83 € alors qu’elle aurait payé la somme de 167.859,08 € destinée à régler des travaux, somme qui n’apparaît pas en écriture comptable ; allégations de sommes réglées non visibles comme n’apparaissant nulle part en écriture comptable, qui semblent s’être « volatilisées » ; différence de 181.922,63 € entre l’exercice 2011 et l’exercice 2012… ;

b) Sur les résolutions n° 14, 15 et 16 de l’assemblée générale du 10/06/13 (création du lot n° 59, aliénation à M. [T] et mandat donné au syndic pour effectuer les formalités subséquentes à l’aliénation) :
$gt; une absence de précisions sur le montant de l’aliénation, élément essentiel permettant aux copropriétaires de se prononcer sur celle-ci ;

c) Sur les résolutions n° 17 et 18 de l’assemblée générale du 10/06/13 :
$gt; qu’il s’agirait de simples informations n’appelant pas de vote, sans évoquer l’état des procédures engagées par le syndic en paiement de charges, en dépit de ses demandes d’inscription à l’ordre du jour ;

d) Sur les résolutions n° 8, 9 et 25 de l’assemblée générale du 12/06/14 (travaux d’électricité qualifiés d’urgents, identiques à ceux contenus dans un devis AME de 2007 approuvé par l’assemblée de 2008 pour lesquels des appels de provisions auraient déjà été réglés, et « terminaison » de travaux votés lors de l’assemblée générale du 20/03/2008 pour un montant de 120.000 € TTC sur les différents bâtiments, alors que lors de l’assemblée générale du 10/06/13, le devis de l’entreprise AJC DE [R], soumis au vote, mentionnait des travaux restants à effectuer pour le seul montant de 38.326,76 € TTC, ceux listés étant pour la plupart ceux à effectuer selon devis du 20 avril 2007 soumis à l’assemblée générale du 20/03/2008) :
$gt; que ces travaux ont déjà été votés lors de l’assemblée générale du 20/03/2008 et réglés par elle pour un montant de 176.883,34 € (pièce n° 21),
$gt; que les travaux votés en 2013 sont de nouveaux votés et les appels de fonds correspondants réclamés.

Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 2] répond notamment que :
$gt; il n’y a pas de nullité sans texte (ex. : Civ. 3ème, 23 septembre 2009, n° 08-17.720),
$gt; l’approbation des comptes emporte seulement constatation de la régularité comptable et financière des comptes du syndic (Civ. 3ème, 14 mars 2019, n° 17-26.190), de sorte que la contestation d’une dépense figurant dans les comptes n’est pas de nature à vicier la résolution les ayant approuvés,
$gt; Sur les résolutions n° 5 et 6 de l’assemblée générale du 10/06/13 : aucune démonstration n’est faite d’une inobservation de formalités prescrites par les textes, s’agissant de simples appréciations personnelles de la demanderesse, les résolutions n’étant entachées d’aucune irrégularité susceptible d’entraîner leur nullité.

Elle ajoute que :
- les travaux votés lors de l’assemblée générale du 20/03/08 n’ont pu être intégralement réglés aux entrepreneurs en raison de la non-représentation d’une somme de 162.760,34 € par l’ancien syndic, ESPACIMMO, ainsi que de l’absence de règlements des appels de fonds par la S.C.I. KERENE, qui restait devoir la somme de 142.299,58 € à la copropriété au 2 septembre 2010, ce qui a nécessité le vote d’une avance de trésorerie exceptionnelle d’un montant de 184.500 € au cours de l’assemblée générale du 30/09/10, les fonds ayant été appelés et réglés pour un montant de 173.468,24 € (hors règlement non honorés par la SCI KERENE) aux entreprises concernées, comme il en résulte des extraits de compte (pièce n° 3),
- dans l’intervalle, la S.C.I. KERENE a été condamnée par jugement du 16/12/2009 au paiement de la somme de 147.385 € avec intérêts au taux légal sur la somme de 96.979,63 €, confirmé par arrêt de la cour d’appel de Paris du 12 octobre 2011, soit au total la somme de 166.508,18 € versée par la S.C.I. KERENE, cette somme apparaissant sur son compte en plusieurs versements,
- par suite de ce règlement, il a été procédé au remboursement partiel de l’appel de trésorerie auprès des copropriétaires qui l’avaient supporté pour pallier la carence de la S.C.I. KERENE afin de procéder au paiement des travaux en ses lieux et place, ce remboursement partiel étant intervenu le 1er octobre 2012, comme il résulte du grand livre pour la période du 1er octobre 2012 au 31 décembre 2012 (pièce n° 4).

$gt; Sur les résolutions n° 14, 15 et 16 de l’assemblée générale du 10/06/13 : il fait valoir qu’il n’y a pas de démonstration de l’inobservation d’une formalité prescrite par la loi, aucun motif d’annulation n’étant soulevé, sauf à indiquer que le montant de l’aliénation ne serait pas précisé, alors qu’il s’agirait là de décisions de principe de l’assemblée générale, l’aliénation effective du lot étant soumise à la fixation d’un prix.

$gt; Sur les résolutions n° 17, 18, 19 et 20 : il soutient qu’il s’agit de simples informations n’appelant pas de vote alors qu’il ne peut y avoir de décision lorsqu’il n’y a pas eu de délibérations sanctionnées par un vote (Civ. 3ème, 4 novembre 2003 et 6 mai 2003), l’assemblée s’étant contentée d’informer les copropriétaires sur les procédures de recouvrement de charges engagées au sein de la copropriété et les travaux en cours.

Il invoque également un défaut d’intérêt à agir de la S.C.I. KERENE concernant les résolutions n° 19 et 20 et un défaut d’intérêt à agir s’agissant de décisions soumises à un nouveau vote lors d’une assemblée générale ultérieure devenue définitive, la S.C.I. KERENE n’ayant pas sollicité l’annulation des résolutions n° 21 et 22 de l’assemblée générale du 12 juin 2014.

$gt; Sur les résolutions n° 6 et 7 de l’assemblée générale du 12/06/14 (approbation des comptes de l’exercice 2013, quitus de gestion donné au syndic pour cet exercice) : il relève qu’il n’y a pas de fondement juridique à la demande et que les prétendues omissions de règlement intervenus mi 2012 sont sans objet par rapport à des comptes approuvés en 2014 et afférents à l’année 2013.

$gt; Sur les résolutions n° 8, 9 et 25 de l’assemblée générale du 12/06/14 (approbation travaux d’urgence d’électricité, ratification appel exceptionnel de trésorerie du 5/12/13, autorisation donnée au syndic de procéder à un appel de trésorerie exceptionnel de 120.000 € TTC sur les différents bâtiments) : il soulève l’absence de fondement en droit des demandes d’annulation, s’agissant de travaux et d’appels de fonds exceptionnels déjà approuvés lors de l’assemblée générale du 20/03/08 et ayant déjà fait l’objet d’appels de fonds, ce que ni le syndicat des copropriétaires ni le syndic ne nie, tout en faisant valoir que les fonds appelés suite à l’assemblée générale du 20/03/2008 pour réaliser les travaux votés ont en partie fait l’objet d’une non représentation par le syndic de l’époque, la société ESPACIMMO, de sorte que :

* seule la somme de 397.893,07 € a été adressée au syndic, par suite du non-paiement par certains copropriétaires des sommes appelées,
* sur cette somme, un montant de 230.056,59 € a été versé aux entreprises en exécution des marchés votés,
* le reliquat s’élevant à la somme de 162.760,34 € a été conservé par la société ESPACIMMO et n’a jamais été versé pour l’exécution des travaux qui ont été suspendus, un administrateur provisoire ayant été désigné parallèlement selon ordonnance sur requête du 5 novembre 2009 puis la société SOGIMCO ayant été nommée en qualité de syndic lors de l’assemblée générale du 28 janvier 2010 (pièce n° 8), une autorisation d’agir en justice à l’encontre d’ESPACIMMO et de la SOCAF ayant ensuite été donné au syndic lors de l’assemblée générale du 8 juin 2011 (pièce n° 9),
* la trésorerie de la copropriété s’est donc trouvée gravement obérée en raison du détournement de fonds dont elle a été victime et de la très grave carence de la S.C.I. KERENE, obligeant les copropriétaires à décider lors de l’assemblée générale de donner leur accord sur les devis de travaux ou travaux soumis et de voter l’appel de fonds exceptionnel, ces votes étant intervenus en toute transparence, dès lors que les copropriétaires ont été informés de l’état des procédures engagées par le syndicat des copropriétaires à l’encontre de la société ESPACIMMO, de son assureur responsabilité civile professionnelle et de la garantie financière.

***
Aux termes de ses dernières écritures (page 9), tirant les conséquences de l’annulation des résolutions n° 19 et 20 de l’assemblée générale du 10 juin 2013 lors d’une assemblée générale ultérieure du 12 juin 2014, la S.C.I. KERENE ne sollicite plus l’annulation des résolutions n° 19 et 20 de sorte qu’il n’y a pas lieu d’examiner les moyens soulevés par les parties concernant lesdites résolutions.

De même, la S.C.I. KERENE ne sollicite pas l’annulation des résolutions n° 17 et 18 de l’assemblée générale du 10 juin 2013 aux termes desquelles les copropriétaires ont simplement été informés de l’état des procédures engagées par le syndic contre les copropriétaires défaillants dans le paiement des charges de copropriété ainsi que des travaux de copropriété réalisés et payés, et des travaux restant à effectuer et à régler, bâtiment par bâtiment, sans qu'aucun vote n'ait été émis, de sorte que ces résolutions ne constituent pas des décisions (ex. : Civ. 3ème, 6 mai 2003, n° 01-17.829).

En tout état de cause, aucun élément n'indique que ces points d'information auraient comporté des informations lacunaires et/ou erronées qui auraient été d'une quelconque manière de nature à influencer sur le sens du vote des copropriétaires concernant d’autres résolutions examinées au cours de ladite assemblée.

Aux termes de l’article 12 du code de procédure civile :
« Le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables.
Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ».

En l’absence de précision quant au fondement de la demande, les juges du fond doivent examiner les faits sous tous leurs aspects juridiques conformément aux règles de droit qui leur sont applicables. Ils doivent alors expliciter le fondement juridique de la demande dont ils sont saisis (ex. : Civ. 3ème, 6 février 1991, n° 89-14.514 ; 20 avril 2023, n° 22-14.669).

En l’espèce, aux termes de ses dernières écritures (page 18), la S.C.I. KERENE vise de manière générale « le décret du 17 mars 1967 pris en application de la loi du 10 juillet 1965 ».
Décision du 18 Juillet 2024
8ème chambre -2ème section
N° RG 13/16008 -N° Portalis 352J-W-B65-CBGQL

2-1 Sur la demande d’annulation des résolutions n° 5 et 6 de l’assemblée générale des copropriétaires du 10 juin 2013 (approbation des comptes de l’exercice 2012 et quitus de gestion donné au syndic pour l’exercice 2012) :

S’agissant de la résolution n° 5, il est constant que l’approbation des comptes du syndicat par l’assemblée générale ne constitue pas une approbation par chacun des copropriétaires de son compte individuel, selon l’article 45-1, alinéa 1er du décret du 17 mars 1967.

La jurisprudence, constante sur ce point, confirme que « l'approbation des comptes emporte seulement constatation de la régularité comptable et financière des comptes du syndicat » (ex. : Civ. 3ème 14 mars 2019, n° 17-26.190) et qu’elle ne constitue pas pour autant « une approbation du compte individuel de chacun des copropriétaires » (ex. : Civ. 3ème, 1er février 2018, n° 16-26.992).

Il en résulte qu'une erreur reprochée au syndic dans le solde débiteur du décompte d'un copropriétaire, reprise sur les documents comptables soumis à l'analyse des copropriétaires en vue de l’approbation des comptes, n'est pas de nature à entraîner l'irrégularité des comptes approuvés. En ce sens, il a déjà été jugé que le moyen d’un copropriétaire relatif à la contestation de sa dette de charges est insuffisant à appuyer sa demande d'annulation de l'approbation des comptes même si sa dette de charges est reprise dans l'état financier communiqué avec la convocation à l'assemblée générale (ex. : Cour d'appel, Paris, Pôle 4, chambre 2, 12 octobre 2022 – n° 17/12180).

L'annulation de l'approbation des comptes peut être sollicitée s'il est démontré que le syndic a commis des irrégularités dans l'établissement des comptes que la copropriété n'a pas été à même d'apprécier lors du vote, ou si les documents annexés à la convocation n'étaient pas de nature à permettre aux copropriétaires de manifester un vote éclairé, en violation des dispositions de l'article 11 du décret du 17 mars 1967 (ex. : Cour d'appel de Paris, Pôle 4, Chambre 2, 25 octobre 2017, n° RG 15/20708).

Il convient donc de rechercher si la communication des documents notifiés aux copropriétaires était de nature à leur délivrer une information suffisante leur permettant de voter l’approbation des comptes en toute connaissance de cause (ex. : Civ. 3ème, 12 novembre 2020, 19-21.668, deuxième moyen, seconde branche), en les mettant en mesure d’apprécier la situation comptable et financière de la copropriété (ex. Cour d’appel de Paris, 23ème chambre, section B, 20 décembre 2007, n° RG 07/06123 ; Pôle 4, Chambre 2, 27 janvier 2021, n° RG 17/09926), en toute connaissance de cause (ex. : Civ. 3ème, 27 novembre 2013, n° 12-26.395).

En l’espèce, la S.C.I. KERENE se plaint de l’absence de prise en compte de certaines sommes qu’elle aurait réglées dans les annexes comptables sans toutefois rapporter la preuve que les informations délivrées aux copropriétaires en vue de l’approbation des comptes de l’exercice 2012 auraient été erronées ou que les copropriétaires n’auraient pas été mis en mesure d’être pleinement éclairés sur la situation comptable et financière de la copropriété, alors même qu’il ressort des éléments de la procédure et des pièces produites que :

- une information leur a été délivrée lors de cette assemblée générale sur les procédures en cours concernant les impayés de charges ainsi que les travaux de copropriété réalisés et payés et ceux restant à effectuer et à régler,

- les travaux votés lors de l’assemblée générale du 20 mars 2008 (pièce n° 7 produite par le syndicat des copropriétaires, maçonnerie, ravalement, couverture, menuiserie, etc.) n’ont pu être réglés intégralement aux entrepreneurs désignés en raison notamment de l’absence de représentation de fonds par la société ESPACIMMO (pièces n° 12 et 21 produites par le syndicat des copropriétaires, assignation délivrée à la société ESPACIMMO et à la SOCAF et courrier du 4 février 2013 du procédure de la République de Paris indiquant au syndicat des copropriétaires diligenter une enquête préliminaire) et de l’absence de règlements par plusieurs copropriétaires, dont en particulier la S.C.I. KERENE à hauteur de plus de 142.000 €, des appels de fonds émis par le syndic pour la mise en œuvre desdits travaux, qui ont été suspendus,

- pour faire face à ce déficit important de trésorerie, une avance exceptionnelle d’un montant de 184.500 € a été votée lors de l’assemblée générale du 30 septembre 2010, en excluant les lots de la S.C.I. KERENE, eu égard à l’ampleur de son impayé de charges,

- les fonds correspondant à cette avance destinée à pallier un manque de trésorerie du syndicat ont été appelés par le syndic de l’immeuble puis réglés aux entreprises concernées (AME, AJC [R], ALIN HARTTMANN, LECAUDAY & KHANLARI), ainsi qu’il en ressort d’extraits de compte afférents à l’exercice 2013 produits par le syndicat des copropriétaires en pièce n° 3,

- dans l’intervalle, la S.C.I. KERENE a été condamnée par jugement du 16 décembre 2009, confirmé par arrêt de la Cour d’appel de Paris du 12 octobre 2011, au paiement de la somme principale de 147.385 € avec intérêts au taux légal à compter du 31 octobre 2008 sur la somme de 96.979,63 €,

- par suite du règlement, en plusieurs versements, de la somme de 166.508,18 € due par la S.C.I. KERENE, il a été procédé au remboursement partiel de l’appel correspondant à l’avance de trésorerie voté lors de l’assemblée générale du 30 septembre 2010 auprès des copropriétaires qui l’avaient supporté, afin de permettre le paiement des travaux, à l’exclusion de la S.C.I. KERENE, cette restitution d’avance exceptionnelle pour la période du 01/10/2012 au 31/12/2012 étant justifiée par la production du grand livre des comptes de cette période établi par la société SOGIMCO COPROPRIETES (pièce n° 4 du syndicat des copropriétaires),

- selon résolution n° 18 de l’assemblée générale ordinaire du 8 juin 2011, le syndic en exercice de l’immeuble a été autorisé à agir en justice à l’encontre de l’ancien syndic, ESPACIMMO, le garant financier et l’assureur responsabilité civile d’ESPACIMMO « aux fins d’obtenir leur condamnation au paiement de la somme en principal de 162.760,34 € correspondant aux appels de fonds effectués auprès des copropriétaires et non restitués, outre des dommages intérêts, intérêts légaux et frais » (pièce n° 9 produite par le syndicat des copropriétaires, page 8/11).

Sur la résolution n° 6, le quitus donné par l'assemblée générale au syndic permet de ratifier des actes de gestion effectués par le syndic sans pouvoir et/ou au-delà de ses pouvoirs.
Décision du 18 Juillet 2024
8ème chambre -2ème section
N° RG 13/16008 -N° Portalis 352J-W-B65-CBGQL

Le quitus donné sans réserve au syndic entraîne ratification par l'assemblée générale de la gestion du syndic et de tous les actes faits par ce dernier et emporte reconnaissance que le syndic a régulièrement assumé la gestion d'ensemble de la copropriété, que ce soit dans le domaine financier ou dans les autres domaines où il a pu intervenir de sorte qu'il est interdit au syndicat de critiquer l'exécution du mandat confié au syndic ou de rechercher sa responsabilité.

Pour que le quitus opère décharge de responsabilité pour la période sur laquelle il a été accordé, il doit porter sur des éléments portés à la connaissance de l'assemblée générale de façon loyale, complète et sincère, et que l'assemblée a été à même d'apprécier (ex. : Civ. 3ème, 23 juin 1999, n° 97-17085 ; Civ. 3ème, 19 octobre 2011, n° 10-20.019 : assemblée générale ayant expressément donné quitus au gestionnaire ; Civ. 3ème, 5 novembre 2015, n° 14-17828 : appréciation souveraine des juges du fond quant au caractère libératoire du quitus, en l'absence de « dissimulation dolosive » du syndic).

En l'espèce, outre que l'approbation des comptes et le quitus de gestion donné au syndic sont deux questions parfaitement distinctes (ex. : Civ. 3ème, 14 janvier 2009, n° 08-10.624), la S.C.I. KERENE ne rapporte pas la preuve de la présentation erronée des comptes par le syndic dont elle se plaint.

La preuve n'est donc pas rapportée en l'espèce d'une quelconque dissimulation dolosive par le syndic d'irrégularités manifestes de gestion ou d'éléments déterminants qui n'auraient pas été communiqués aux copropriétaires, dans le cadre d'un exposé loyal, complet et sincère, concernant la gestion du syndic, de sorte que l'assemblée générale a été mise en mesure de délibérer, en toute connaissance de cause, sur le quitus à donner au syndic (ex. : Civ. 3ème, 8 janvier 1992, n° 89-16.303, premier moyen).

Au regard de l’ensemble des éléments précités, la S.C.I. KERENE devra être déboutée de sa demande d’annulation des résolutions n° 5 et 6 de l’assemblée générale ordinaire des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 2] en date du 10 juin 2013.

2-2 Sur la demande d’annulation des résolutions n° 14, 15 et 16 de l’assemblée générale des copropriétaires du 10 juin 2013 (création du lot n° 59 provenant de parties communes supprimées du bâtiment H, aliénation du lot n° 59 nouvellement créé à Monsieur [T], propriétaire des lots n° 35, 42, 45 et 46, mandat à donner au syndic pour exécuter les formalités nécessaires à l’aliénation du lot n° 59, à la réunion des lots n° 45, 46 et 59 et à la publication du modificatif de l’état descriptif de division) :

Aux termes de l’article 42 alinéa 2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, « les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants, dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions qui leur est faite à la diligence du syndic dans un délai de deux mois à compter de la tenue de l’assemblée générale ».

Dès lors, seules les véritables décisions au sens de l’article 42 alinéa 2 de la loi peuvent faire l’objet d’un recours en justice.

Décision du 18 Juillet 2024
8ème chambre -2ème section
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Ne constitue pas une réelle décision la résolution par laquelle les copropriétaires ne prennent aucun engagement de même qu'une simple consultation de copropriétaires (ex. : Civ. 3ème, 27 février 2001, n° 99-17.512) ou la résolution dont la portée est limitée à une décision de principe devant être suivie d'une seconde étape indispensable pour qu'elle devienne effective (ex. : Civ. 3ème, 10 novembre 1992, n° 90-17.278, 4 janvier 2006, n° 04-19.771, 28 janvier 2015, n° 13-28.021) et ne faisant naître aucune obligation à ce stade pour les copropriétaires (ex. : Cour d'appel de Bastia, 4 avril 2012, n° 11/00132).

En l’espèce, la S.C.I. KERENE ne soulève aucun moyen de droit précis au soutien de sa demande d’annulation, se contentant d’indiquer qu’un « élément essentiel permettant aux copropriétaires de se prononcer sur l’alinéation du lot n° 59, à savoir son montant, ne figure pas dans la résolution n° 15 » (dernières écritures, page 8), ce qui n’est pas contesté en défense ni contestable à l’examen de la résolution n° 15 querellée (pièce n° 11 produite par le syndicat des copropriétaires, procès-verbal de l’assemblée générale ordinaire du 10 juin 2013, page 7/10).

En tout état de cause, cette résolution ne fait qu’arrêter le principe de la vente mais ne réalise pas celle-ci de sorte qu’elle doit s’analyser en une décision simplement préparatoire à la vente, qui ne vaut pas vente au sens de l’article 1589 du code civil et n’opère pas transfert de propriété, mais requiert une nouvelle décision d’assemblée générale devant statuer sur la vente effective du lot n° 59 ainsi que sur les modifications du règlement de copropriété et de l’état descriptif de division en découlant (ex. : Cour d’appel de Paris, 23ème chambre, section B, 2 juillet 2009, n° RG 07/21753).

Au regard de l’ensemble des éléments précités, la S.C.I. KERENE devra être déboutée de sa demande d’annulation des résolutions n° 14, 15 et 16 de l’assemblée générale ordinaire des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 2] en date du 10 juin 2013.

2-3 Sur la demande d’annulation des résolutions n° 6 (approbation des comptes de l’exercice 2013), 7 (quitus de gestion donné au syndic pour l’exercice 2013), 8 (approbation des travaux d’urgence d’électricité, réalisés par la société A.M.E. pour un montant de 19.000 € TTC), 9 (ratification de l’appel exceptionnel du 5 décembre 2013, d’un montant de 20.000 € pour des travaux d’électricité réalisés en urgence par la société A.M.E.) et 25 (autorisation à donner au syndic pour procéder à un appel de trésorerie exceptionnel afin de terminer les travaux votés lors de l’assemblée générale du 20 mars 2008 pour un montant de 120.000 € TTC sur les différents bâtiments) de l’assemblée générale des copropriétaires du 12 juin 2014 :

S’agissant des résolutions n° 6 (approbation des comptes de l’exercice 2013) et 7 (quitus de gestion donné au syndic pour l’exercice 2013), la S.C.I. KERENE se plaint de l’absence de prise en compte de certaines sommes qu’elle aurait réglées dans les annexes comptables sans toutefois rapporter la preuve que les informations délivrées aux copropriétaires en vue de l’approbation des comptes de l’exercice 2013 auraient été erronées ou que les copropriétaires n’auraient pas été mis en mesure d’être pleinement éclairés sur la situation comptable et financière de la copropriété.

Elle ne rapporte pas davantage la preuve de la présentation erronée des comptes par le syndic dont elle se plaint, ni d’une quelconque dissimulation dolosive par le syndic d'irrégularités manifestes de gestion, ou d'éléments déterminants qui n'auraient pas été communiqués aux copropriétaires, dans le cadre d'un exposé loyal, complet et sincère, concernant la gestion du syndic, de sorte que l'assemblée générale a été mise en mesure de délibérer, en toute connaissance de cause, sur le quitus à donner au syndic.

S’agissant de la résolution n° 8 (approbation des travaux d’urgence d’électricité, réalisés par la société A.M.E. pour un montant de 19.000 € TTC, suite au courrier de la Mairie de Paris), 9 (ratification de l’appel exceptionnel du 5 décembre 2013, d’un montant de 20.000 € pour des travaux d’électricité réalisés en urgence par la société A.M.E.) et 25 (autorisation donnée au syndic pour procéder à un appel de trésorerie exceptionnel afin de terminer les travaux votés lors de l’assemblée générale du 20 mars 2008 pour un montant de 120.000 € TTC sur les différents bâtiments), outre que la S.C.I. KERENE ne soulève aucun moyen de droit précis au soutien de sa demande de nullité, il est établi au travers des pièces produites que les travaux litigieux, dont il n’est pas contesté qu’ils ont fait l’objet d’un premier vote lors de l’assemblée générale des copropriétaires du 20 mars 2008, n’ont pu être mis en œuvre en raison du non-paiement par certains copropriétaires (dont la S.C.I. KERENE) de sommes importantes appelées à ce titre ainsi que de la non-affectation à l’exécution desdits travaux d’une somme importante (162.760,34 €) par l’ancien syndic de l’immeuble, ESPACIMMO (qui n’a pas été appelée en la cause dans le cadre de la présente instance), ayant conduit à la suspension des travaux et à l’abandon du chantier.

Dès lors, les copropriétaires n’ont eu d’autres possibilités que d’approuver a posteriori des travaux nécessaires à la sauvegarde de l’immeuble dans les conditions mentionnées à la résolution n° 8 querellée, de valider un appel exceptionnel de 20.000 € du 5 décembre 2013, à la suite desdits travaux réalisés en urgence par la société A.M.E., puis d’autoriser le syndic de l’immeuble à procéder à un nouvel appel de trésorerie exceptionnel pour que les travaux votés lors de l’assemblée générale du 20 mars 2008 puissent être réalisés sur les différents bâtiments dans leur intégralité, en comblant un déficit important de trésorerie (dont l’origine a été exposé précédemment) n’ayant pas permis leur pleine mise en œuvre, par le vote d’une avance de trésorerie dans le respect des dispositions légales et réglementaires applicables au statut de la copropriété des immeubles bâtis [avant l’entrée en vigueur du décret n° 2020-834 du 2 juillet 2020 ayant modifié l’article 35 du décret du 17 mars 1967 : annexe 1, 1031, décret n° 2005-240 du 14 mars 2005 relatif aux comptes du syndicat des copropriétaires, article 7, nomenclature des comptes, de l’arrêté du 14 mars 2005, ex. : Cour d’appel de Paris, Pôle 4, Chambre 2, 9 mars 2012, Jurisdata n° 2012-021577, Cour d’appel de [Localité 11], 1ère chambre, section D, 14 juin 2016, n° 14/01927, etc.].

Au regard de l’ensemble des éléments précités, la S.C.I. KERENE ne pourra qu’être également déboutée de sa demande d’annulation des résolutions n° 6, 7, 8, 9 et 25 de l’assemblée générale ordinaire des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 2] en date du 12 juin 2014.

III – Sur les demandes de remboursement sous astreinte, de condamnation sous astreinte à faire effectuer les travaux votés lors de l’assemblée générale du 20 mars 2008, de déduction de la somme de 7.524,26 € des appels de fonds adressés et de mainlevée d’une hypothèque judiciaire provisoire formées par la S.C.I. KERENE :

La S.C.I. KERENE sollicite également le remboursement sous astreinte par le syndicat des copropriétaires de la somme de 169.762,28 € prétendument réglée pour des travaux qui n’auraient pas été réalisés, en dépit d’une demande par lettre recommandée du 18 février 2013 adressée au syndic de mise à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale d’une résolution ayant pour but d’éclairer les copropriétaires sur l’état précis d’avancement des travaux, en invoquant un procès-verbal de constat d’huissier du 30 août 2013 qui démontrerait l’état de dégradation du bâtiment A, le placement du syndicat des copropriétaires sous administration judiciaire de Me [L] ayant débuté la comptabilité à zéro, alors que les comptes de l’ancien syndic laissaient apparaître un solde débiteur de 235.277,58 €, ainsi que le vote des mêmes travaux du bâtiment A déjà votés et réglés par la S.C.I. KERENE.

A titre subsidiaire, elle sollicite la condamnation du syndicat des copropriétaires à faire effectuer les travaux votés lors de l’assemblée générale du 20 mars 2008.

En tout état de cause, elle réclame également :
- que soit ordonnée la déduction de la somme de 7.524,26 € réglée entre les mains d’un huissier de justice, suite à une opposition formée le 2 décembre 2009 par le syndicat des copropriétaires (somme mentionnée dans l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 12 octobre 2011) et qui continuerait à lui être réclamée par le syndic (elle figurerait sur les appels de provisions adressés à la SCI KERENE, notamment celui en date du 21 mars 2013 du 2ème trimestre 2013),
- la mainlevée d’une inscription d’hypothèque judiciaire provisoire sur les lots lui appartenant, alors qu’elle aurait réglée sa dette depuis le 31 mai 2012.

Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 2] répond qu’en l’état, la copropriété ne détient pas les fonds nécessaires à la réalisation des travaux en raison du détournement d’une partie des sommes devant servir à la payer par la société ESPACIMMO, tandis que le seul patrimoine du syndicat des copropriétaires est constitué par les paiements réguliers par tous les copropriétaires de leurs charges de copropriété.

Il précise que la demande tendant à voir porter au crédit du compte de la S.C.I. KERENE la somme de 169.762,28 € ne figure qu’au dispositif de ses dernières écritures et elle ajoute qu’aucun moyen de fait ou de droit ne figure dans ses conclusions pour fonder sa demande, qui doit être rejetée sans autre examen.

Il souligne que la somme de 7.023,17 € a été créditée sur le compte 204617 correspondant au lot vendu par la SCI KERENE, tel qu’il résulte de l’extrait de compte, conformément aux documents comptables transmis par l’administrateur judiciaire (pièce n° 5), de sorte que la demande de compensation est sans objet.

Sur la demande de mainlevée sous astreinte de l’hypothèque provisoire prise le 18 juin 2010, il relève que la S.C.I. KERENE est encore et toujours débitrice de charges de copropriété.

***
Le tribunal relève en premier lieu que la demande de remboursement de la somme de 169.762,28 € figure bien au dispositif des dernières écritures de la S.C.I. KERENE (page 18) et qu’en tout état de cause, en application de l'article 753 du code de procédure civile, dans sa version en vigueur du 1er mars 1999 au 11 mai 2017 applicable au présent litige, le tribunal serait saisi d’une telle demande, quand bien même celle-ci ne figurerait que dans le corps des dernières écritures de la demanderesse (ex. : Civ. 3ème, 26 novembre 2014, n° 13-22.067 et 13-22.505, publié au bulletin).

Sur le fond, les demandes tendant à faire figurer au crédit de son compte la somme de 169.762,28 € et à titre subsidiaire de condamnation du syndicat des copropriétaires à faire exécuter les travaux votés lors des assemblées générales du 20 mars 2008, à justifier de leur avancement ainsi que de leur règlement, ne sont pas justifiées en droit.

S’agissant de la demande de remboursement de la somme de 169.762,28 €, outre que la S.C.I. KERENE ne rapporte pas la preuve qui lui incombe que ladite somme n’aurait pas été affectée, pour partie, au paiement des travaux votés lors de l’assemblée générale des copropriétaires du 20 mars 2008, cette demande apparaît également mal dirigée alors que l’ancien syndic de l’immeuble n’a pas été appelée en la cause.

Au surplus, comme le fait remarquer en défense le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 2], la S.C.I. KERENE a été condamnée par jugement en date du 16 décembre 2009 confirmé par arrêt du 12 octobre 2011 au paiement de la somme globale de 166.508,18 € portant à titre principal sur des provisions pour travaux non compris dans le budget prévisionnel régulièrement appelées en exécution de décisions définitives d’assemblée générale, ces condamnations étant revêtues de l’autorité de la chose jugée de sorte qu’elles ne peuvent être remises en cause au travers d’une demande de remboursement, nonobstant l’exécution ou non des travaux afférents aux sommes faisant l’objet de cette demande.

A cet égard, il est constant qu’à partir du moment où les comptes du syndicat ont été approuvés, dès lors que la décision de l’assemblée générale ayant approuvé les comptes et la répartition des charges de copropriété n’a pas été contestée dans le délai de forclusion de deux mois de l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965, chaque copropriétaire devient débiteur de sa quote-part de charges correspondante, qu’il ne peut refuser d’acquitter en faisant valoir l’inexécution de travaux décidés par une assemblée générale devenue définitive (ex. : Civ. 3ème, 5 novembre 2015, n° 14-23.496).

La demande subsidiaire de condamnation du syndicat des copropriétaires à faire exécuter les travaux votés lors de l’assemblée générale du 20 mars 2008, à justifier de leur avancement ainsi que de leur règlement, n’est justifiée par aucun élément de preuve, alors même qu’il ressort des éléments de la procédure et des pièces produites que :
- ces travaux n’ont pu être mis en œuvre dans leur intégralité en raison d’un déficit important de trésorerie du syndicat, lié notamment à d’importants impayés de charges,
- après qu’ait été décidée par l’assemblée générale des copropriétaires une avance exceptionnelle destinées à pallier ce manque de trésorerie du syndicat, lesdits travaux ont repris, les appels de fonds ayant été affectés, entre 2010 et 2012, au règlement des entreprises concernées (pièces n° 1 à 4 produites par le syndicat des copropriétaires : ventilation du devis marché par bâtiment et avancement sur situation au 18 janvier 2010, tableau récapitulatif des marchés et paiements, extraits de comptes AJC DE [R], AME, [J], LECAUDAY & KHANLARI ARCHITECTES, grand livre des comptes pour la période du 1er octobre 2012 au 31 décembre 2012).

Au regard de ces éléments, la S.C.I. KERENE devra être déboutée :
- de sa demande de condamnation sous astreinte du syndicat des copropriétaires à faire figurer au crédit de son compte la somme de 169.762,28 €,
- et de sa demande subsidiaire de condamnation sous astreinte du syndicat des copropriétaires à faire exécuter les travaux votés lors de l’assemblée générale du 20 mars 2008 et à justifier de leur avancement ainsi que de leur règlement.

S’agissant de la demande de déduction de la somme de 7.524,26 € des appels de provisions adressés à la S.C.I. KERENE, il est justifié en défense que la somme litigieuse a bien été portée, le 25 février 2010, au crédit du compte individuel n° 204617 de la S.C.I. KERENE (pièce n° 5 produite par le syndicat des copropriétaires), de sorte que la demanderesse devra également en être déboutée.

S’agissant, enfin, de la demande de mainlevée de l’hypothèque judiciaire provisoire prise le 18 juin 2010 sur les lots de la S.C.I. KERENE, outre que cette demande n’est pas justifiée en droit, il ressort des pièces produites que la S.C.I. KERENE est toujours débitrice de charges de copropriété au titre des lots dont elle est propriétaire au sein de l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 2].

Dans ces conditions, la S.C.I. KERENE sera déboutée de ses demandes tendant à voir ordonner sous astreinte au syndicat des copropriétaires de déduire la somme de 7.524,26 € des appels de provisions adressés à la S.C.I. KERENE, de procéder à la mainlevée de l’hypothèque judiciaire provisoire prise le 18 juin 2010 sur les lots de la S.C.I. KERENE et d’en justifier.

IV – Sur la demande de dommages et intérêts formée par la S.C.I. KERENE à l’encontre de la société SOGIMCO COPROPRIETES :

La S.C.I. KERENE sollicite l’engagement de la responsabilité civile professionnelle du syndic, SOGIMCO, pour avoir mis à l’ordre du jour de l’assemblée générale du 10 juin 2013 diverses résolutions destinées à éclairer les copropriétaires sur plusieurs questions opaques (contentieux des charges concernant la SCI KERENE, procédures en cours, moyens mis en œuvre par le syndic pour recouvrer les charges impayées, situations des travaux réalisés et votés lors de l’assemblée générale du 20 mars 2008), sans communiquer les informations attendues, et pour avoir redistribué 150.000 € entre les autres copropriétaires de l’immeuble, incluant des appels de fonds réglés par elle, devant être utilisés pour payer les travaux du bâtiment A, qui n’auraient in fine pas été réalisés, justifiant le vote d’un appel de trésorerie exceptionnel d’un montant de 120.000 €, selon résolution n° 25.

Sur la responsabilité du syndic, elle fait valoir que :
- la somme de 169.762,28 € qu’elle a réglée correspond à des appels de provisions pour travaux votés lors de l’assemblée générale du 20 mars 2008 et non pas à un « arriéré de charges »,
- cette somme a disparu de la comptabilité du syndic et a vraisemblablement été détournée,
- des entrepreneurs n’auraient pas été réglés de travaux réalisés,
- le syndic aurait commis des manquements graves dans l’exercice de ses fonctions, lui ayant causé un préjudice financier (opacité des comptes, anomalies de comptabilité, absence de réponse à ses demandes légitimes, disparition de sommes).

La société SOGIMCO COPROPRIETES répond que :
- pour engager sa responsabilité délictuelle, il convient de démontrer l’existence d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre les deux,
- elle a été désignée en qualité de syndic de l’immeuble lors de l’assemblée générale du 28 janvier 2010 et ne saurait supporter les fautes commises par son prédécesseur, la S.C.I. KERENE confondant manifestement le syndic et le syndicat des copropriétaires dans ses demandes alors qu’il ne peut lui être demandé de rembourser sur ses derniers personnels des sommes qu’elle n’a pas perçues, la S.C.I. demanderesse ne précisant pas en quoi elle aurait commis une faute, se contentant d’invoquer des détournements de fonds de sa part, sans jamais en rapporter la preuve alors que c’est la société ESPACIMMO qui aurait commis des détournements de fonds, la demanderesse étant d’une grande mauvaise foi,
- la demanderesse ne qualifie pas l’existence d’un préjudice, l’exécution d’une décision de justice ayant autorité de la chose jugée ne pouvant être considérée comme tel.

***
Le syndic, investi du pouvoir d'administrer et de conserver l'immeuble en copropriété, ainsi que de sauvegarder les droits afférents à l'immeuble, est responsable à l'égard de chaque copropriétaire, sur le fondement quasi-délictuel des fautes commises dans l'accomplissement de sa mission.

Ainsi, les copropriétaires qui subissent un préjudice personnel et direct sont fondés à mettre en cause la responsabilité délictuelle du syndic sur le fondement de l'article 1240 du Code civil (Civ. 3ème, 9 juillet 1985, n° 83-12.960, 7 février 2012, n° 11-11.051).

Compte tenu de l'ampleur des tâches qui lui incombent et des difficultés pratiques auxquelles il est fréquemment confronté, le syndic est tenu d'une obligation de diligence et de vigilance, donc de moyen et non pas de résultats (ex. : Cour d'appel de Paris, 19 novembre 2014, n° RG 12/00684). Son appréciation s’opère in abstracto par rapport au standard du bon père de famille et des diligences normales du professionnel averti (ex. : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 10 septembre 2020, n° RG 18/11191).

Décision du 18 Juillet 2024
8ème chambre -2ème section
N° RG 13/16008 -N° Portalis 352J-W-B65-CBGQL

En l'espèce, la S.C.I. KERENE ne justifie pas des manquements qu’elle impute à la société SOGIMCO COPROPRIETES (opacité des comptes, anomalies de comptabilité, absence d’informations communiquées aux copropriétaires, détournement de sommes, absence de règlements d’entrepreneurs, etc.), alors que la société SOGIMCO COPROPRIETES n’a été désignée en qualité de syndic de l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 2] qu’à compter du 28 janvier 2010 (pièce n° 8 produite par le syndicat des copropriétaires , résolution n° 2, page 4).

Si les appels de provisions pour travaux émis par le syndic de l’immeuble correspondent pour partie à des travaux précédemment votés, il n’est pas davantage contestable qu’ils correspondent également à des avances de trésorerie régulièrement votées en assemblées générales, de sorte qu’aucune faute de la société SOGIMCO COPROPRIETES n’apparaît davantage caractérisée à ce titre.

Enfin, la somme de 170.000 € réclamée forfaitairement par la S.C.I. KERENE « au titre du préjudice financier subi » (dernières écritures, page 17) n’est justifiée ni dans son principe, ni dans son quantum.

La preuve n’étant pas rapportée de l’existence d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre les deux, la S.C.I. KERENE devra être intégralement déboutée de sa demande de condamnation de la société SOGIMCO COPROPRIETES à lui verser la somme de 170.000 € au titre du préjudice financier subi.

V - Sur les demandes reconventionnelles du syndicat des copropriétaires au titre d’un arriéré de charges et de dommages et intérêts pour résistance abusive :

Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] [Localité 2] fait valoir que :
- le compte de la SCI KERENE présente au 11 avril 2023 un solde débiteur total de 25.368,04 €, 2ème trimestre 2023 inclus (pièce n° 30, page 10, et pièce n 31, page 19), mais en excluant les charges de l’année 2016, puis de 2019 à 2023, selon arrêté de compte au 11 avril 2023,
- l’ensemble des appels de fonds depuis l’origine de la dette est fourni, à l’exclusion du solde de charges 2014 (KERENE OPTIQUE) d’un montant de 2.363,38 € et du solde de charges 2014 (KERENE TRAITEUR) d’un montant de 4.773,76 €,
- néanmoins, il produit un grand livre 2015 dans lequel la régularisation de charges de l’année 2014 apparaît,
- l’intégralité des sommes réclamées est donc justifiée, les appels de fonds ne servant pas à établir l’exigibilité de la dette de charges.

Il réclame également reconventionnellement la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, en raison du défaut de paiement de la S.C.I. KERENE mettant en péril la trésorerie de la copropriété, à l’origine d’un préjudice distinct du retard de paiement indemnisé par les intérêts moratoires, conformément à l’article 1231-6 du code civil.

La S.C.I. KERENE fait valoir en défense qu’il n’est fait aucune distinction entre charges courantes et appels de fonds pour travaux et elle estime ne pas avoir à payer deux fois des travaux déjà votés et payés mais non encore exécutés, alors que la somme de 169.762,28 € ne figure pas au crédit de son compte.

***
5-1 Sur la demande en paiement de charges de copropriété :

Selon l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965, les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d’équipement commun en fonction de l’utilité objective que ces services et éléments représentent à l’égard de chaque lot et aux charges relatives à la conservation, à l’entretien et à l’administration des parties communes, proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots.

En vertu de l’article 35 du décret du 17 mars 1967, les appels provisionnels auxquels procède le syndic, dans les limites et sous les conditions prévues par ce texte, constituent une créance certaine, liquide et exigible.

Pour justifier sa demande principale à hauteur de la somme globale de 25.368,04 € au titre des charges de copropriété (charges courantes et charges pour travaux non compris dans le budget prévisionnel), incluant les appels de charges et de travaux du 2ème trimestre 2023, selon décomptes arrêtés au 11 avril 2023, le syndicat des copropriétaires produit notamment :

* deux relevés de comptes individuels concernant les lots n° 3, 19, 25 et 26 (locaux commerciaux d’optique) d’une part, et concernant les lots n° 1, 4, 5 et 7 (locaux commerciaux de traiteur), d’autre part, distinguant clairement les charges courantes et les charges pour travaux (pièces n° 30 et 31 produites par le syndicat des copropriétaires) et faisant apparaître, hors frais de recouvrement, un solde débiteur :
- d’un montant 10.841,07 € (pour les locaux « optique),
- et d’un montant de 14.526,97 € (pour les locaux « traiteur »),
Soit au total la somme réclamée de 25.368,04 €,
* les appels de provisions relevant du budget prévisionnel et de travaux adressés à la S.C.I. KERENE par le syndic de l'immeuble entre 2010 et 2018 (pièces n° 32, 343 et 36), ainsi que le grand livre des comptes de l’exercice 2015 (pièces n° 32, 34 et 36),
* les procès-verbaux des assemblées générales des copropriétaires des 28 janvier 2010, 8 juin 2011, 11 juin 2012, 10 juin 2013, 26 mai 2015, 1er juin 2017, 29 mai 2018 et 22 mai 2019, portant notamment approbation des comptes des exercices 2010 à 2018 et votant les budgets prévisionnels des exercices 2011 à 2020, outre le vote de divers travaux non compris dans le budget prévisionnel.

L'approbation des comptes par une décision d'assemblée générale non contestée dans les délais légaux s'oppose à ce qu'un copropriétaire refuse de payer sa quote-part de charges correspondante (ex. : Civ. 3ème, 1er décembre 2010, n° 09-72402), sauf contestation de la régularité de son compte individuel, conformément au deuxième alinéa de l'article 45-1 du décret du 17 mars 1967.

Dès lors qu'un syndicat des copropriétaires produit, comme en l'espèce, des appels de fonds, un décompte individuel de charges ainsi que les procès-verbaux des assemblées générales de copropriétaires ayant approuvé les comptes et voté les budgets prévisionnels, et que les appels de fonds adressés au copropriétaire portent sur un nombre de tantièmes correspondant aux tantièmes de charges communes générales affectées au lot de ce copropriétaire, la créance du syndicat des copropriétaires est justifiée (ex. : Civ. 3ème, 7 juillet 2016, n° 14-28395).

Par ailleurs, le tribunal relève que, si les procès-verbaux des assemblées générales ayant approuvé les comptes et/ou ayant voté les budgets prévisionnels des exercices 2021 à 2023 ne sont pas produits par le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] à Paris 12ème dans le cadre de la présente instance, la S.C.I. KERENE n’en conteste pas l’existence ni l’exigibilité des sommes réclamées, se contentant de faire valoir qu’aucune distinction entre les charges courantes et les appels de fonds pour travaux ne serait effectuée, alors que cette distinction apparaît clairement dans les décomptes individuels de charges produits, et de contester devoir régler une « seconde fois des travaux déjà votés et payés » mais prétendument « non exécutés », alors qu’il a été vu précédemment que ces travaux ont fait l’objet de nouveaux votes après l’assemblée générale du 20 mars 2008, rendant exigibles les sommes dues à ce titre.

La somme de 169.762,28 €, non représentée par l’ancien syndic et pour le paiement de laquelle le nouveau syndic a été autorisé par l’assemblée générale du 8 juin 2011 à ester en justice à l’encontre de la société ESPACIMMO, de la SOCAF, en qualité de garant financier, et de la S.A.A., en qualité d’assureur de responsabilité civile de la société ESPACIMMO, ne saurait être portée au crédit du compte individuel de la S.C.I. KERENE

Les contestations émises par la S.C.I. KERENE ne sont donc pas de nature à remettre en cause le caractère certain, liquide et exigible des sommes réclamées par le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] [Localité 2] au titre des charges de copropriété échues et impayées afférentes aux lots dont la S.C.I. KERENE est propriétaire.

En application des textes visés ci-dessus et au vu des pièces produites par le syndicat, la créance du syndicat des copropriétaires apparaît établie à hauteur de la somme réclamée de 25.368,04 € au titre des charges de copropriété (charges courantes relevant du budget prévisionnel et charges pour travaux hors budget prévisionnel) échues et impayées au 11 avril 2023, appels de fonds et de travaux du 2ème trimestre 2023 inclus.

La S.C.I. KERENE sera donc condamnée au paiement de cette somme au syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] [Localité 2] avec intérêts au taux légal à compter du 5 mai 2023, date de notification des dernières écritures du syndicat des copropriétaires valant interpellation suffisante au sens de l'article 1344 du code civil.

5-2 Sur la demande de dommages et intérêts :

Les manquements systématiques et répétés d'un copropriétaire à son obligation essentielle à l'égard du syndicat des copropriétaires de régler les charges de copropriété est constitutif d'une faute susceptible de causer un préjudice financier direct et certain, distinct de celui compensé par les intérêts moratoires, à la collectivité des copropriétaires.

En l'espèce, il ressort des éléments de la procédure et des pièces produites que bien qu'ayant déjà été condamnée au paiement de charges de copropriété, pour un montant de 147.385 € à titre principal, somme arrêtée au 6 octobre 2009, la S.C.I. KERENE a recommencé à ne pas régler ses charges de copropriété à leur date d'exigibilité, perturbant ainsi gravement la trésorerie du syndicat des copropriétaires et le bon fonctionnement de la copropriété.

En restant débitrice de charges à hauteur de 25.368,04 €, la S.C.I. KERENE a fortement contribué à fragiliser l'équilibre financier du syndicat.

La mauvaise foi de la S.C.I. KERENE, au sens du dernier alinéa de l'article 1231-6 du code civil, ressort de ce qu’elle s'est dispensée pendant plusieurs années du paiement régulier des charges de copropriété lui incombant.

Il est donc établi en l'espèce que les manquements réitérés et sans motifs légitimes de la S.C.I. KERENE à son obligation essentielle de régler ses charges de copropriété à leur date d'exigibilité a perturbé fortement la trésorerie ainsi que le bon fonctionnement de la copropriété et ont ainsi causé au syndicat un préjudice financier direct et certain, distinct de celui résultant du simple retard, ce qui justifie la condamnation de ce copropriétaire à verser au syndicat des copropriétaires une indemnité de 2.000,00 € (deux mille euros), à titre de dommages et intérêts en réparation de ce préjudice.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] sera débouté du surplus, non justifié, de sa demande de dommages et intérêts.

VI – Sur les autres demandes :

La capitalisation des intérêts sur les sommes précitées sera ordonnée dans les conditions de l'article de l'article 1343-2 du code civil.

Eu égard à l’ancienneté de l’instance, il convient d'ordonner l'exécution provisoire du présent jugement, qui apparaît nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire.

La S.C.I. KERENE, qui succombe à l’instance, sera condamnée aux entiers dépens ainsi qu’au paiement au titre des frais irrépétibles :
- de la somme de 5.000,00 € au syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] [Localité 2],
- de la somme de 2.500,00 € à la société SOGIMCO COPROPRIETES,
- et de la somme de 1.500,00 € à la SO.CA.F.

La S.C.I. KERENE sera par ailleurs intégralement déboutée de sa demande formée au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile sera accordé aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre.

Les parties seront déboutées du surplus de leurs demandes formées au titre des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes plus amples ou contraires.
Décision du 18 Juillet 2024
8ème chambre -2ème section
N° RG 13/16008 -N° Portalis 352J-W-B65-CBGQL

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et en premier ressort,

Rejette les exceptions de nullité des assignations délivrées les 4 octobre 2013 et 4 septembre 2014, soulevées par la SO.CA.F.,

Déclare la S.C.I. KERENE irrecevable en sa demande de mise en cause de la garantie financière de la SO.CA.F.,

Déboute la S.C.I. KERENE de sa demande d’annulation des résolutions n° 5, 6, 14, 15 et 16 de l’assemblée générale ordinaire des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 2] en date du 10 juin 2013,

Déboute la S.C.I. KERENE de sa demande d’annulation des résolutions n° 6, 7, 8, 9 et 25 de l’assemblée générale ordinaire des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] en date du 12 juin 2014,

Déboute la S.C.I. KERENE de sa demande de condamnation sous astreinte du syndicat des copropriétaires à faire figurer au crédit de son compte la somme de 169.762,28 €,

Déboute la S.C.I. KERENE de sa demande subsidiaire de condamnation sous astreinte du syndicat des copropriétaires à faire exécuter les travaux votés lors de l’assemblée générale du 20 mars 2008 et à justifier de leur avancement ainsi que de leur règlement,

Déboute la S.C.I. KERENE de ses demandes tendant à voir ordonner sous astreinte au syndicat des copropriétaires de déduire la somme de 7.524,26 € des appels de provisions adressés à la S.C.I. KERENE, de procéder à la mainlevée de l’hypothèque judiciaire provisoire prise le 18 juin 2010 sur les lots de la S.C.I. KERENE et d’en justifier,

Déboute la S.C.I. KERENE de l’intégralité de sa demande de condamnation de la société SOGIMCO COPROPRIETES à lui verser la somme de 170.000 € au titre du préjudice financier subi,

Condamne la S.C.I. KERENE à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] la somme de 25.368,04 € au titre des charges de copropriété échues et impayées au 11 avril 2023, appels de fonds et de travaux du 2ème trimestre 2023 inclus, avec intérêts au taux légal à compter du 5 mai 2023,

Condamne la S.C.I. KERENE à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] la somme de 2.000,00 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier subi,

Ordonne la capitalisation des intérêts sur les sommes précitées dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,

Déboute le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 12] [Localité 2] du surplus de sa demande de dommages et intérêts,

Condamne la S.C.I. KERENE aux entiers dépens,

Accorde le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre,

Condamne la S.C.I. KERENE à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 5] la somme de 5.000,00 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la S.C.I. KERENE à payer à la société SOGIMCO COPROPRIETES la somme de 2.500,00 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la S.C.I. KERENE à payer à la SO.CA.F. la somme de 1.500,00 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute la S.C.I. KERENE de l’intégralité de sa demande formée au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes formées au titre des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes.

Fait et jugé à Paris le 18 Juillet

La Greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 8ème chambre 2ème section
Numéro d'arrêt : 13/16008
Date de la décision : 18/07/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-18;13.16008 ?
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