TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS
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N° RG 24/80433 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4L7K
N° MINUTE :
Notification :
CCC parties LRAR
CE avocat demandeurs toque
CCC avocat défendeur toque
le :
SERVICE DU JUGE DE L’EXÉCUTION
JUGEMENT RENDU LE 15 JUILLET 2024
DEMANDEURS
Monsieur [M] [Z] [D]
né le [Date naissance 4] 1991 à [Localité 7]
[Adresse 1]
[Localité 5]
représenté par Me Marianne ROUSSO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #C2208
Monsieur [R] [S] [Y] [H]
né le [Date naissance 3] 1991 à [Localité 8]
[Adresse 1]
[Localité 5]
représenté par Me Marianne ROUSSO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #C2208
DÉFENDERESSE
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD MIDI-PYRENEES
RCS ALBI 444 953 830
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Me Messaline LESOBRE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #C2537 et par Me Laurent PARDAILLE, avocat au barreau d’AVEYRON
JUGE : Madame Sophie CHODRON DE COURCEL, Juge
Juge de l’Exécution par délégation du Président du Tribunal judiciaire de PARIS.
GREFFIER : Madame Vanessa PAVLOVSKI
DÉBATS : à l’audience du 20 Juin 2024 tenue publiquement,
JUGEMENT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe
contradictoire
susceptible d’appel
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EXPOSE DU LITIGE
Suivant acte authentique du 29 avril 2022, la CAISSE REGIONALE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD MIDI-PYRENEES a consenti à M. [D] et M. [H] deux prêts d’un montant total de 440.000 euros.
Par actes des 7 et 8 février 2024, la CAISSE REGIONALE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD MIDI-PYRENEES a pratiqué 8 saisies-attribution sur les comptes de M. [D] et M. [H]. Ces saisies-attribution ont été dénoncées à ces derniers le 14 février 2024.
Par acte du 13 mars 2024, M. [D] et M. [H] ont assigné la société CAISSE REGIONALE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD MIDI-PYRENEES devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire.
M. [D] et M. [H] sollicitent la mainlevée des huit saisies-attribution pratiquées le 7 et le 8 février 2024, la condamnation de la société CAISSE REGIONALE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD MIDI-PYRENEES à leur payer la somme de 2.000 euros chacun en réparation de leur préjudice moral, portant intérêt au taux légal à compter de la signification du jugement à intervenir, la somme de 3.500 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens dont distraction au profit de Maître Marianne ROUSSO.
La société CAISSE REGIONALE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD MIDI-PYRENEES sollicite le débouté des demandes adverses et la condamnation solidaire de M. [D] et M. [H] à lui payer la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est fait référence aux conclusions respectives visées et déposées à l’audience.
MOTIFS DE LA DECISION
A titre préalable, il convient de relever que M. [D] et M. [H] ne sollicitent pas l’annulation de la clause de déchéance du terme mais demande au juge de déclarer de nul effet la déchéance du terme prononcée par la défenderesse, moyen au soutien de leur prétention aux fins de mainlevée des saisies-attribution contestées.
Sur la recevabilité de la contestation
Il résulte de l’article R. 211-11 du code des procédures civiles d’exécution qu’à peine d'irrecevabilité, les contestations relatives à la saisie sont formées dans le délai d'un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur. Sous la même sanction, elles sont dénoncées le même jour, ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à l'huissier de justice qui a procédé à la saisie.
L'auteur de la contestation en informe le tiers saisi par lettre simple et en remet une copie, à peine de caducité de l'assignation, au greffe du juge de l'exécution au plus tard le jour de l'audience.
En application de l’article 125 du code de procédure civile, les causes d’irrecevabilité de la saisie-attribution doivent être relevées d’office par le juge de l’exécution, qui est tenu de vérifier la régularité de sa saisine.
En l’espèce, les saisies-attribution signifiées aux tiers saisis les 7 et 8 février 2024 ont été dénoncées aux débiteurs le 14 février 2024. La contestation élevée par assignation du 13 mars 2024 a été dénoncée à l’huissier instrumentaire le même jour.
La contestation est donc recevable.
Sur la demande de mainlevée des saisies-attribution contestées
Il résulte de l’article L.111-7 du code des procédures civiles d’exécution que le créancier a le choix des mesures propres à assurer l'exécution ou la conservation de sa créance mais que l’exécution de ces mesures ne peut excéder ce qui se révèle nécessaire pour obtenir le paiement de l'obligation.
L'article L211-1 du même code prévoit que « Tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d'un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d'argent, sous réserve des dispositions particulières à la saisie des rémunérations prévue par le code du travail. »
L’article L.121-2 du même code prévoit que le juge de l'exécution a le pouvoir d'ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages-intérêts en cas d'abus de saisie.
Il résulte de ces textes que pour trancher la demande de mainlevée de la mesure inutile ou abusive, il appartient au juge de l'exécution de se placer au jour où il statue (voir en ce sens l’arrêt Civ. 2, 20 octobre 2022, n° 20-22.801, publié au bulletin n°10 Partie I Procédures civiles d’exécution).
En l’espèce, suivant acte authentique du 29 avril 2022, la CAISSE REGIONALE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD MIDI-PYRENEES a consenti à M. [D] et M. [H] deux prêts d’un montant total de 440.000 euros. Il est prévu une clause de déchéance du terme (page 12/16) selon laquelle en cas de survenance de l’un quelconque des cas de déchéance du terme visés ci-après, notamment en cas de manœuvres frauduleuses ou dolosives, notamment en cas de fausse déclaration ou omission intentionnelle sur la situation personnelle, professionnelle, patrimoniale ayant servi de base à l’octroi du prêt, le prêteur pourra se prévaloir de l’exigibilité immédiate du prêt en capital, intérêts et accessoires, sans qu’il soit besoin d’aucune formalité judiciaire et après mise en demeure restée infructueuse pendant 15 jours.
Or, la CAISSE REGIONALE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD MIDI-PYRENEES n’a pas mis en demeure M. [D] et M. [H] préalablement. En effet, le courrier établi le 11 janvier 2024, s’il est intitulé « RECOMMANDE AVEC AR MISE EN DEMEURE », prononce en réalité la déchéance du terme et réclame le paiement de l’intégralité des sommes dues en capital, intérêts, frais et accessoires dans un délai de quinze jours. Peu importe que le cas de déchéance du terme visé ne puisse être régularisé, le contrat prévoit une mise en demeure préalable quel que soit le cas visé.
Ainsi, en application du contrat liant les parties, la déchéance du terme ne pouvait intervenir sans mise en demeure préalable et celle-ci faisant défaut, il convient de considérer qu’il n’y a pas eu déchéance du terme de sorte que le caractère exigible des sommes réclamées par le créancier dans les saisies-attribution contestées fait défaut et il convient d’en ordonner la mainlevée.
Sur la demande de dommages-intérêts
L’article L. 121-2 du code des procédures civiles d'exécution dispose que le Juge de l’exécution a le pouvoir d’ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages-intérêts en cas d’abus de saisie.
Le droit d’exercer des mesures d’exécution forcée d’une décision de justice ne dégénère en abus que s’il révèle de la part de son auteur une intention maligne, une erreur grossière ou une légèreté blâmable dans l’appréciation de ses droits.
Les saisies pratiquées ont été fructueuses à hauteur de 10.169,96 euros. Cependant, M. [D] et M. [H] ne sollicitent pas de dommages-intérêts au titre du préjudice financier découlant de l’immobilisation de trésorerie mais seulement au titre d’un préjudice moral qu’ils ne justifient pas.
En conséquence, M. [D] et M. [H] seront déboutés de leur demande de dommages-intérêts.
Sur les dispositions de fin de jugement
La CAISSE REGIONALE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD MIDI-PYRENEES sera condamnée aux dépens.
Il convient d’allouer à M. [D] et à M. [H] une indemnité de procédure d’un montant de 1.000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le juge de l’exécution,
Déclare la contestation recevable,
Ordonne la mainlevée des saisies-attribution pratiquées sur les comptes de M. [D] et de M. [H] les 7 et 8 février 2024,
Déboute M. [D] et M. [H] de leurs demandes de dommages-intérêts,
Condamne la CAISSE REGIONALE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD MIDI-PYRENEES à payer à M. [D] la somme de 1.000 euros et à M. [H] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la CAISSE REGIONALE CREDIT AGRICOLE MUTUEL NORD MIDI-PYRENEES aux dépens avec distraction au profit de Maître Marianne ROUSSO.
Fait à Paris, le 15 juillet 2024
LE GREFFIER LE JUGE DE L’EXÉCUTION