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09/07/2024 | FRANCE | N°21/13720

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 7ème chambre 1ère section, 09 juillet 2024, 21/13720


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :




7ème chambre 1ère section


N° RG 21/13720
N° Portalis 352J-W-B7F-CVPW6

N° MINUTE :


Assignation du :
06 Mai 2014















JUGEMENT
rendu le 09 Juillet 2024
DEMANDEURS

Monsieur [P] [Y]
13 rue des Violettes
67530 BOERSCH

Monsieur [T] [I]
Le Bourg
14310 EPINAY SUR ODON

Monsieur [Z] [F]
67 rue de la Canteraine
59320 HAUBOURDIN

Mada

me [V] [O] épouse [F]
67 rue de la Canteraine
59320 HAUBOURDIN

Monsieur [X] [J]
50 Chemin des Croisettes
62750 LOOS EN GOHELLE

représentés par Maître Marie-hélène LEONE CROZAT de la SELEURL CABINET LEONE CROZAT, avo...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

7ème chambre 1ère section


N° RG 21/13720
N° Portalis 352J-W-B7F-CVPW6

N° MINUTE :

Assignation du :
06 Mai 2014

JUGEMENT
rendu le 09 Juillet 2024
DEMANDEURS

Monsieur [P] [Y]
13 rue des Violettes
67530 BOERSCH

Monsieur [T] [I]
Le Bourg
14310 EPINAY SUR ODON

Monsieur [Z] [F]
67 rue de la Canteraine
59320 HAUBOURDIN

Madame [V] [O] épouse [F]
67 rue de la Canteraine
59320 HAUBOURDIN

Monsieur [X] [J]
50 Chemin des Croisettes
62750 LOOS EN GOHELLE

représentés par Maître Marie-hélène LEONE CROZAT de la SELEURL CABINET LEONE CROZAT, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #E0468

Madame [C] [GT] épouse [J]
50 Chemin des Croisettes
62750 LOOS EN GOHELLE

Monsieur [B] [D]
48 rue Henri Dunant
59176 MASNY

Madame [M] [R] épouse [D]
48 rue Henri Dunant
59176 MASNY

représentés par Maître Marie-hélène LEONE CROZAT de la SELEURL CABINET LEONE CROZAT, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #E0468

DÉFENDEURS

Société GAN ASSURANCES
8-10 rue d’Astorg
75008 PARIS

représentée par Maître Patrice PIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #B0039

MAF en sa qualité d’assureur de Monsieur [AK]
9 rue de l’Amiral Hamelin
75116 PARIS

représentée par Maître Marc FLINIAUX, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D0146

S.A. MAAF
Chaban de Chauray
79036 NIORT CEDEX 09

représentée par Maître Alain BARBIER de la SELARL BARBIER ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #J0042

Maître [A] [N] mandataire judiciaire de Monsieur [AK]
29 boulevard Berthelot Beaulieu
63400 CHAMALIERES

S.A.S ALTEAL anciennement dénommée CAPMARINE prise en la personne de son liquidateur la SELARL [S] [G]
13 rue Camille Godart
33000 BORDEAUX

Monsieur [E] [AK]
26 rue de la Paix
63140 CHATELGUYON

défaillants non constitués

Décision du 18 Juin 2024
7ème chambre 1ère section
N° RG 21/13720 - N° Portalis 352J-W-B7F-CVPW6

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Perrine ROBERT, Vice-Président
Madame Malika KOURAR, Juge
Monsieur Mathieu DELSOL, Juge

assistée de Marie MICHO, Greffier,

DÉBATS

A l’audience du 25 Mars 2024 tenue en audience publique devant Madame ROBERT, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Prononcé en audience publique
Réputé contradictoire
en premier ressort
Prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues aux deuxième alinéa de l’article de l’article 450 du Code de procédure civile
Signé par Madame Perrine ROBERT, Présidente, et par Madame Marie MICHO, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS et PROCEDURE

La société CAPMARINE a fait réaliser en qualité de maître d’ouvrage une résidence pour personnes âgées comprenant cinq appartements, dénommée “Villa Family” située sur la commune de SEXCLES (19430).

La déclaration d’ouverture du chantier est datée du 8 octobre 2007.

Sont notamment intervenus à l’opération de construction :
- Monsieur [E] [AK], maître d’oeuvre, assuré auprès de la société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS (ci-après MAF);
- la société CREUSE COUVERTURE assurée auprès de la société MAAF,

Pour les besoins de cette opération, une assurance dommages-ouvrage et constructeur non réalisateur a été souscrite auprès de la société GAN ASSURANCES.

Les lots ont été vendus en état futur d'achèvement et un syndicat des copropriétaires a été constitué.

Ainsi, Monsieur [X] [J] et Madame [C] [GT] épouse [J] ont acquis selon acte authentique du 1er avril 2008 le lot n°5, un appartement en duplex pour un prix de 94 178 euros.

Monsieur [P] [Y] a acquis selon acte authentique du 9 avril 2008 le lot n°1, un appartement situé au rez-de-chaussée pour un prix de 135 812 euros.

Monsieur [Z] [F] et Madame [V] [O] épouse [F] ont acquis selon acte authentique du 10 avril 2008 le lot n°2, un appartement situé au rez-de-chaussée pour un prix de 78 405 euros.

Monsieur [B] [D] et Madame [H] [R] épouse [D] ont acquis selon acte authentique du 26 juin 2008 le lot n°3, un appartement situé au rez-de-chaussée pour un prix de 135 812 euros.

Monsieur [T] [I] a acquis selon acte authentique du 24 novembre 2008 le lot n°4, un appartement en duplex pour un prix de 94 178 euros.

Les actes authentiques de vente prévoyaient que les appartements devaient être livrés dans un délai de 12 mois à compter de leur signature soit une livraison échelonnée entre le 1er avril 2009 et le 24 novembre 2009.

Le chantier s’est arrêté en 2010.

Par jugement du 19 juillet 2010, la société ALTEAL, anciennement dénommée CAPMARINE a été placée en liquidation judiciaire et la société [S] [G] a été désignée en qualité de mandataire judiciaire.
C’est dans ces circonstances que Monsieur [Y], Monsieur [I], Monsieur et Madame [F], Monsieur et Madame [J] et Monsieur et Madame [D] ont saisi le juge des référés du Tribunal de grande instance de PARIS d'une demande d'expertise. Monsieur [U] a été désigné en qualité d'expert par ordonnance du 12 juillet 2011.

L’expert a déposé son rapport le 9 novembre 2013.

Par actes d’huissier du 9 mai 2014 les acquéreurs ont fait assigner devant le tribunal judiciaire de Paris la société GAN ASSURANCE, en qualité d’assureur dommages-ouvrage et CNR, la société ALTEAL, Monsieur [S] [G] en qualité de mandataire judiciaire de cette dernière, Monsieur [E] [AK], son assureur la société MAF et la société MAAF en qualité d’assureur de la société CREUSE COUVERTURE et de Monsieur [W].

Par jugement du 19 février 2016, le tribunal de grande instance de CLERMONT FERRAND a prononcé la liquidation judiciaire de Monsieur [E] [AK] et désigné Monsieur [A] [N] en qualité de liquidateur judiciaire.

Par jugement réputé contradictoire du 28 février 2017, le tribunal de grande instance de Paris a :
- déclaré irrecevables les demandes de fixation de créances au passif de la procédure collective de la société ALTEAL,
- débouté les consorts [Y], [I], [F], [J] et [D] de leur demande tendant au prononcé de la réception judiciaire,
- dit que les dommages ne revêtent pas un caractère décennal,
- dit que les garanties de la société GAN ASSURANCES, de la MAAF et de la MAF ne sont pas mobilisables,
- condamné Monsieur [E] [AK] à payer :

* au titre des travaux de reprise des malfaçons les sommes de :
. 16 445, 47 euros pour Monsieur [Y],
. 18 524, 86 euros pour les époux [F],
. 11 144, 54 euros pour les époux [D],
. 16 780, 35 euros pour Monsieur [I],
. 18 643, 27 euros pour les époux [J],

* au titre des moins-values, les sommes de :
. 3 500 euros pour Monsieur [Y],
. 6 500 euros pour les époux [F],
. 2 300 euros pour les époux [D]
. 3 500 euros pour Monsieur [I],
. 6 500 euros pour les époux [J],

* au titre des préjudices financiers consécutifs aux surcoûts devant être assumés par les différents propriétaires pour terminer le chantier :
. 10 292, 87 euros pour Monsieur [Y],
. 9 055, 03 euros pour les époux [F],
. 3 921, 21 euros pour les époux [D],
. 11 049, 66 euros pour Monsieur [I],
. 11 952, 86 euros pour les époux [J],
- condamné Monsieur [E] [AK] aux dépens, comprenant les frais d’expertise,
- condamné Monsieur [E] [AK] à payer aux consorts [Y], [I], [F], [J] et [D] la somme totale de 12 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
- admis les avocats qui en ont fait la demande et qui peuvent y prétendre au bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, notamment Maître Léone CROZAT,
- ordonné l’exécution provisoire du jugement,
- débouté les parties de toutes les autres demandes comprenant les demandes plus amples ou contraires.

Les consorts [Y], [I], [F], [J] et [D] ont interjeté appel de ce jugement en mars 2017.

Par arrêt du 1er septembre 2021, la Cour d’Appel de PARIS a :

- déclaré le jugement rendu par le tribunal de grande instance de PARIS le 28 février 2017 non avenu à l’égard de Monsieur [E] [AK] en application des dispositions de l’article 372 du code de procédure civile,
- rappelé qu’en conséquence, le tribunal judiciaire reste saisi des demandes dirigées contre Monsieur [E] [AK],
- sursis à statuer dans l’attente du jugement à intervenir sur les demandes en tant que dirigées contre Monsieur [E] [AK],
- renvoyé l’affaire à la mise en état du 3 mai 2022 pour justification de la saisine du tribunal judiciaire de PARIS, à peine de radiation de la procédure d’appel,
-réservé les dépens.

C’est ainsi que Monsieur [Y], Monsieur et Madame [F], Monsieur et Madame [J], Monsieur et Madame [D] et Monsieur [I] ont signifié par voie électronique le 17 décembre 2021 des conclusions de reprise d’instance devant le tribunal de céans.

Par acte d’huissier du 16 mai 2022, ils ont assigné en intervention forcée Monsieur [A] [N] mandataire judiciaire, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de Monsieur [AK].

***
Aux termes de leurs dernières conclusions signifiées par voie électronique le 17 décembre 2021 par Monsieur [P] [Y], Monsieur [T] [I], Monsieur [Z] [F], et Madame [V] [O] épouse [F], Monsieur [X] [J] et Madame [C] [K] [GT] épouse [J], Monsieur [D] [B] et Madame [M] [R] épouse [D] demandent au tribunal de :
« CONSTATER la reprise de l'instance,
VOIR INTERVENIR Maître [A] [N] es qualité de mandataire liquidateur, de Mr [AK]
CONSTATER que la responsabilité de Mr [AK] a été retenue pour l'ensemble des désordres et leur conséquence tant pour les préjudices matériels que financiers.
DIRE et JUGER bien fondés Monsieur [Y], les époux [F], les époux [D], Monsieur [I] et les époux [J] à voir fixer leur créance à titre chirographaire au passif de Monsieur [AK] aux sommes suivantes :
Au titre des malfaçons les sommes de :
16.445,47 € pour Monsieur [Y]
18.524,86 € pour les époux [F]
11.144,54 € pour les époux [D]
16.780,35 € pour Monsieur [I]
18.643,27 € pour les époux [J]
Au titre des préjudices financiers les sommes de :
10.292,87 € pour Monsieur [Y]
9.055,03 € pour les époux [F]
3.921,21 € pour les époux [D]
11.049,66 € pour Monsieur [I]
11.952,86 € pour les époux [J]
Au titre des moins-values :
3 500 € pour Monsieur [Y]
6 500 € pour les époux [F]
2 300 € pour les époux [L]
3 500 € pour Monsieur [I]
6 500 € pour les époux [J]
Au titre de l’article 700 du CPC la somme de 12 000 € outre les dépens.
CONDAMNER les parties succombantes aux dépens d'instance »
Ils font valoir qu’il appartenait à Monsieur [AK] de surveiller et suivre le chantier afin que l’exécution des travaux se fasse en conformité avec les règles de l’art, qu’il a manqué à ses obligations lesquelles ont concouru à la réalisation des dommages, que ces manquements ont déjà conduit le tribunal à retenir sa responsabilité de sorte qu’ils sont fondés à solliciter du tribunal que leur créance soit fixée à titre chirographaire au passif de la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l’encontre Monsieur [AK].

Aux termes de ses denières conclusions signifiées par voie électronique le 20 mars 2023, la MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS, assureur de Monsieur [E] [AK] demande au tribunal de :
« DEBOUTER Monsieur [Y], Monsieur [I], Monsieur et Madame [F], Monsieur et Madame [J] et Monsieur et Madame [D] de leurs demandes dirigées à l'encontre de Monsieur [E] [AK] représenté par son liquidateur judiciaire Monsieur [A] [N] en l’absence de faute démontrée à son encontre ayant un lien de causalité avec les dommages invoqués au regard de la mission limitée qui lui a été confiée;
Subsidiairement,
FIXER la responsabilité de Monsieur [E] [AK] représenté par son liquidateur judiciaire Monsieur [A] [N] conformément au jugement du Tribunal de Grande Instance de PARIS du 28 février 2017 ;
CONDAMNER solidairement Monsieur [Y], Monsieur [I], Monsieur et Madame [F], Monsieur et Madame [J] et Monsieur et Madame [D] à 3 000 € au titre de l’article 700 du CPC ;
LES CONDAMNER aux entiers dépens que Me Marc FLINIAUX pourra recouvrer directement conformément à l'article 699 du CPC. »

Elle explique que le jugement du 28 février 2017 n’a été déclaré nul et non-avenu qu’à l’égard de Monsieur [AK] et non pas à son encontre et rappelle que cette décision n’a prononcé aucune condamnation à son égard. Elle fait également valoir qu’aucun contrat de maîtrise d’oeuvre n’a été signé entre le maître de l’ouvrage et Monsieur [AK], que sa mission se limitait à une mission de conception de l’ouvrage et qu’aucune faute ne peut dès lors lui être reprochée au titre du suivi et de la direction des travaux.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 20 mars 2023, la société GAN ASSURANCES, assureur dommages-ouvrage demande au tribunal de :
« DIRE que M. [AK] a engagé sa responsabilité contractuelle à l’égard des acquéreurs en raison de ses fautes commises.
STATUER comme il plaira au Tribunal sur les demandes des copropriétaires.
CONDAMNER in solidum les copropriétaires à payer à GAN ASSURANCES la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 CPC.
Les condamner aux dépens. »

Au soutien de ses prétentions, elle indique que le maître d’oeuvre a signé les avancements de travaux et engagé ainsi sa responsabilité contractuelle dans le cadre de sa mission de suivi du chantier au regard des désordres constatés par l’expert.
*

La clôture de la mise en état du dossier a été ordonnée le 12 juin 2023.

MOTIFS

A titre liminaire, il est rappelé que la cour d’appel de Paris dans son arrêt du 1er septembre 2021 a relevé qu’au terme du jugement du 28 février 2017 dont appel, le tribunal faute d’être informé de l’ouverture, pendant l’instance, d’une procédure collectiveà l’encontre de Monsieur [AK], n’avait pas constaté l’interruption de cette instance et avait condamné celui-ci au paiement de sommes d’argent.

Elle a, en conséquence, déclaré ce jugement non avenu à l’égard de Monsieur [AK] en application de l’article 372 du code de procédure civile et sursis à statuer dans l’attente du jugement du tribunal judiciaire sur les demandes formées à son égard.

C’est dans ce contexte que les demandeurs ont signifié par voie électronique le 17 décembre 2021 devant le présent tribunal des conclusions de reprise d’instance.

Ils ont assigné en intervention forcée Monsieur [N], liquidateur judiciaire de Monsieur [AK] par acte d’huissier du 16 mai 2022 et justifient avoir déclaré leurs créances au passif de la procédure collective de celui-ci par courrier du 14 avril 2016.

Leurs demandes en fixation de leurs créances au passif de cette procédure collective sont dès lors recevables.

Sur la demande d'indemnisation

1. Sur la responsabilité de Monsieur [AK]

Le tribunal n’est saisi en l’espèce que des demandes formées à l’encontre de Monsieur [AK].
Dans son jugement du 28 février 2017, ce tribunal a considéré qu’était établie la matérialité des inexécutions et malfaçons relevées par l’expert judiciaire en pages 13 à 90 de son rapport et notamment les désordres suivants :
- les appareils sanitaires des logements n’ont pas été installés
- les peintures intérieures ne sont pas terminées,
- les faïences murales n’ont pas été installées dans les salles de bain et les cuisines,
- le revêtement de sol en PVC se décolle par endroits et présente des défauts de pose et des traces noires,
- certaines menuiseries extérieures en aluminium et portes de placard n’ont pas été réglées,
- certaines menuiseries sont dépourvues de ventilation et de volet d’occultation,
- au niveau des évacuations, les plots béton nécessaires au relevé d’étanchéité n’ont pas été réalisés,
- il manque des interrupteurs de volets roulants,
- les logements sont dépourvus de main courante,
- l’installation électrique est affectée de plusieurs non-conformités, les panneaux de distribution, les disjoncteurs et le raccordement vers le réseau EDF restent à réaliser ; les logements ne sont pas sous tension,
- les logements 2 et 5 sont alimentés en électricité respectivement par les logements 1 et 4 et n’ont de ce fait ni panneau et disjoncteur de branchement, ni câble de télé-report,
- la distribution en eau des logements n’est pas complète et il n’existe pas de collecteur de distribution dans l’ensemble des appartements,
- les logements 2 et 5 ne bénéficient pas d’alimentation en eau potable indépendante,
- les logements 2 et 5 sont dépourvus de plinthes et aucun garde-corps n’a été installé au niveau des fenêtres des séjours dont l’allège est inférieure à 1 mètre de hauteur,
- les escaliers installés dans les logements n°2 et 5 sont bruts et présentent une pente trop raide pour un logement en location,
- le groupe VMC n’est pas raccordé,
- les toitures sont dépourvues de solin,
- côté logement n°1 les habillages des chevrons de rives en ardoise se déclouent et certaines ardoises tombent,
- en plusieurs endroits, le revêtement de façade cloque et se décolle en suivant les formats des plaques d’isolation,
- les descentes d’eaux pluviales n’ont pas été installées,
- certaines parties des façades n’ont pas été revêtues d’enduit isolant,
- les seuils des portes du logement 1 ne sont pas traités et l’étanchéité du seuil de la porte d’entrée doit être revue ; leur hauteur n’est pas conforme aux normes d’accessibilité aux personnes handicapées
- le réseau dans lequel se rejettent les égouts a été déclaré non conforme et l’aide allouée aux habitations pour mettre en conformité l’assainissement individuel a été supprimée.

Le tribunal a en outre rejeté la demande des demandeurs tendant au prononcé d’une réception judiciaire et,en l’absence de toute réception, a dit que les dommages ne revêtaient pas de caractère décennal.

Seule la responsabilité contractuelle de Monsieur [AK] peut dès lors être recherchée.

En application de l’article 1147 ancien du code civil, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommage et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.

Il appartient ainsi aux demandeurs de justifier d’un manquement contractuel de Monsieur [AK], maître d’oeuvre tenu en cette qualité d’une obligation de moyen.

Il apparaît qu’aucun contrat n’a été formalisé par la société CAP MARINE, maître d’ouvrage et Monsieur [AK] sur la mission confiée par celle-là à celui-ci dans le cadre du chantier litigieux et, devant l’expert, Monsieur [AK] a indiqué qu’il ne s’était occupé que du permis de construire, qu’il n’avait pas la direction des travaux et qu’il n’était jamais venu sur site.

Cependant, il ressort tant des opérations d’expertise que des pièces produites que Monsieur [AK] a signé des attestations d’avancement de travaux, établissant ainsi qu’il avait bien une mission de direction et de suivi du chantier. S’il a précisé à l’expert avoir donné son tampon et sa signature au maître de l’ouvrage sans s’être lui-même rendu sur le chantier, cette circonstance n’est pas de nature à l’exonérer de sa responsabilité dès lors que, ce faisant, il a pris le risque et accepté de laisser ce-dernier avaliser des travaux inachevés en son nom et sous sa signature.

Or, il n’est justifié d’aucune diligence de sa part pour remédier, durant les travaux, aux nombreux désordres constatés par l’expert alors qu’il aurait été en mesure, compte tenu de leur importance, de les percevoir même au cours de visites ponctuelles du chantier. Il apparaît en outre qu’il a laissé les demandeurs effectuer des paiements d’un montant supérieur au montant des travaux réellement effectués et demeurés inachevés.

Sa responsabilité est ainsi engagée.

2. Sur l’indemnisation des préjudices
Les demandeurs sollicitent l’indemnisation de leurs préjudices tels qu’évalués par l’expert comme suit :
Au titre des travaux de reprise des malfaçons :
- 16 445, 47 euros pour Monsieur [Y],
- 18 524, 86 euros pour les époux [F],
- 11 144, 54 euros pour les époux [D],
- 16 780, 35 euros pour Monsieur [I],
- 18 643, 27 euros pour les époux [J]

- au titre des moins-values (travaux défectueux affectant les seuils des portes-fenêtres, les escaliers et les réseaux ne pouvant être repris) :
- lot 1: 3 500 euros (2 000 + 1 500) pour [Y],
- lot 2 : 6 500 euros (5 000 +1 500) pour les époux [F]
- lot 3 : 2 300 euros (800+ 1 500) pour les époux [D],
- lot 4 : 3 500 euros ( 2 000 + 1 500) pour Monsieur [I],
- lot 5 : 6 500 euros (5 000 + 1 500) pour les époux [J]

- au titre des préjudices financiers consécutifs aux surcoûts devant être assumés par les différents propriétaires pour terminer le chantier en raison des attestations mensongères d’avancement des travaux :
- 10 292, 87 euros pour Monsieur [Y] ( 23 096, 67 euros au titre des travaux d’achèvement - 12 803, 80 euros au titre du solde restant dû sur le prix de vente)
- 11 952, 86 euros pour les époux [J] ( 21 370, 66 euros au titre des travaux d’achèvement - 9 417, 80 au titre du solde restant dû sur le prix de vente)
- 9 055, 03 euros pour les époux [F] (16 441, 03 euros au titre des travaux d’achèvement- 7 386 euros au titre du solde restant dû sur le prix de vente)
- 3 921, 21 euros pour les époux [D] ( 23 126, 91 euros au titre des travaux d’achèvement -19 205, 70 euros au titre du solde restant dû sur le prix de vente)
- 11 049, 66 euros pour Monsieur [I] (20 467, 46 euros au titre des travaux d’achèvement - 9 417, 80 au titre du solde restant dû sur le prix de vente).

Ces préjudices ne sont discutés ni en leur principe ni en leur quantum. Etayés par les constats de l’expert, ils seront retenus et fixés au passif de la procédure collective de monsieur [AK].

Sur les dépens et les frais irrépétibles
Il apparaît équitable de laisser à chaque parties les frais irrépétibles qu’elle a engagés dans la présente instance. Les parties seront déboutées de leurs demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Les dépens de la présente instance seront fixés au passif de la procédure de liquidation judiciaire de Monsieur [AK] qui succombe conformément à l’article 696 du code de procédure civile.

En l’absence de condamnation aux dépens, il n’y a pas lieu d’ordonner le recouvrement direct de ceux-ci par les avocats de la cause qui en font la demande sur le fondement de l’article 699 du code de procédure civile.

Sur l’exécution provisoire
Au regard de l'ancienneté des désordres et du litige, l’exécution provisoire du présent jugement apparaît nécessaire. Elle est compatible avec la nature de l’affaire et n’est pas interdite par la loi. Aussi sera-t-elle ordonnée, autorisée par les dispositions de l'article 515 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Le TRIBUNAL,
Statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort, par mise à disposition au greffe,

FIXE au passif de la procédure de liquidation judiciaire de Monsieur [E] [AK] les créances suivantes :
Au titre des travaux de la reprise des malfaçons :
- 16 445, 47 euros pour Monsieur [Y],
- 18 524, 86 euros pour les époux [F],
- 11 144, 54 euros pour les époux [D],
- 16 780, 35 euros pour Monsieur [I],
- 18 643, 27 euros pour les époux [J]

Au titre des moins-values :
- 3 500 euros pour [Y],
- 6 500 euros pour les époux [F]
- 2 300 euros pour les époux [D],
- 3 500 euros pour Monsieur [I],
- 6 500 euros pour les époux [J]

Au titre des préjudices financiers :
- 10 292, 87 euros pour Monsieur [Y]
- 11 952, 86 euros pour les époux [J]
- 9 055, 03 euros pour les époux [F]
- 3 921, 21 euros pour les époux [D]
- 11 049, 66 euros pour Monsieur [I]

DEBOUTE les parties de leurs demandes en indemnisation de leurs frais irrépétibles,

FIXE les dépens de l’instance au passif de la procédure de liquidation judiciaire de Monsieur [E] [AK],

ORDONNE l’exécution provisoire,

Fait et jugé à Paris le 09 Juillet 2024

Le Greffier Le Président
Marie MICHO Perrine ROBERT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 7ème chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 21/13720
Date de la décision : 09/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 22/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-09;21.13720 ?
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