TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Copies exécutoires
délivrées le :
à Me COSSON
Copies certifiées
conformes délivrées le :
à Me LEROY
■
8ème chambre
3ème section
N° RG 22/05317
N° Portalis 352J-W-B7G-CWQNZ
N° MINUTE :
Assignation du :
27 avril 2022
ORDONNANCE
DU JUGE DE LA MISE EN ÉTAT
rendue le 5 juillet 2024
DEMANDEUR
Monsieur [S] [X]
[Adresse 5]
[Localité 3]
représenté par Maître Antonin PIBAULT de la SCP PETIT - MARCOT - HOUILLON - & ASSOCIES, avocat au barreau de PONTOISE, avocat plaidant et par Maître Arnaud LEROY de la SCP PETIT - MARCOT - HOUILLON - & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #C1683
DÉFENDEUR
Syndicat des copropriétaires du [Adresse 1], représenté par son syndic le Cabinet CDSA
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par Maître Emmanuel COSSON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0004
MAGISTRAT DE LA MISE EN ÉTAT
Monsieur Cyril JEANNINGROS, juge, assisté de Madame Léa GALLIEN, greffier
DÉBATS
A l’audience du 5 juin 2024, avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue le 5 juillet 2024.
ORDONNANCE
Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
Premier ressort
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Par exploit d'huissier signifié le 27 avril 2022, M. [S] [X] a fait assigner le syndicat des copropriétaires devant le tribunal judiciaire de Paris. Aux termes du dispositif de l'acte introductif d'instance, celui-ci demande à la juridiction de :
- condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 4], représenté par son syndic en exercice, le Cabinet CDSA, à payer à Monsieur [S] [X] la somme de 15.984 euros au titre du préjudice subi ;
- condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 4], représenté par son syndic en exercice, le Cabinet CDSA, à payer à Monsieur [S] [X] la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
- juger n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de la décision à intervenir ;
- condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 4], représenté par son syndic, le Cabinet CDSA, aux entiers dépens.
***
Par conclusions notifiées le 6 février 2024, le syndicat des copropriétaires a saisi le juge de la mise en état afin que celui-ci déclare irrecevable la demande adverse portant sur le paiement de sommes dues avant le 27 avril 2017 – outre demandes au titre des dépens et frais irrépétibles.
Par conclusions notifiées le 29 mars 2024, M. [S] [X] a répliqué sur l'incident et demande au juge de la mise en état de déclarer irrecevables les conclusions adverses, et débouter le syndicat des copropriétaires de l'ensemble de ses demandes – outre demandes au titre des dépens et frais irrépétibles.
***
L’affaire a été appelée par le juge de la mise en état à l’audience de plaidoiries du 5 juin 2024, durant laquelle les débats se sont tenus. La décision a été mise en délibéré au 5 juillet 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
L'article 789 du code de procédure civile dispose que « lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour :
6° Statuer sur les fins de non-recevoir ; »
1 – Sur la recevabilité des conclusions du syndicat des copropriétaires
L'article 123 du code de procédure civile dispose que les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, à moins qu'il en soit disposé autrement et sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt.
*
En l'espèce, M. [S] [X] conteste la recevabilité des conclusions d'incident notifiées par le syndicat des copropriétaires, faisant valoir que celles-ci l'ont été postérieurement à des conclusions au fond.
Il est constant que le syndicat des copropriétaires a notifié des conclusions au fond par message électronique le 6 février 2024 à 14h48, puis des conclusions sur incident le même jour à 14h52.
Toutefois, il doit être rappelé qu'à la différence des exceptions de procédure, qui doivent être soulevées avant toute défense au fond (in limine litis), les fins de non-recevoir peuvent être soulevées en tout état de cause, c'est-à-dire même après la notification de conclusions au fond.
Il conviendra ainsi de recevoir les conclusions d'incident notifiées par le syndicat des copropriétaires.
2 – Sur la recevabilité des demandes
L’article 122 du code de procédure civile dispose que « constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ».
En application des articles 2222 et 2224 du code civil, dans leur rédaction issue de la loi no 2008-561 du 17 juin 2008, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent désormais par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. En cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.
*
En l'espèce, le syndicat des copropriétaires conteste partiellement la recevabilité de la demande adverse, faisant valoir que M. [S] [X] réclame indemnisation au titre d'un préjudice locatif à compter de l'année 2016, alors qu'il n'a agi en justice que par acte du 27 avril 2022, soit postérieurement à l'expiration d'un délai de cinq ans à compter de la manifestation du dommage.
Il est en effet constant que le délai de prescription applicable en matière de responsabilité extra-contractuelle est celui de l'article 2224 du code civil, et qu'il court à compter de la survenance des dommages pour lesquels il est demandé réparation.
A cet égard, il résulte de l'examen des pièces produites, et des propres écritures de M. [S] [X], que les dommages dont il est demandé réparation sont survenus en 2016 (page n°7 : « il ressort des nombreuses pièces versées aux débats que Monsieur [S] [X] ne peut jouir de son appartement depuis 2016, date à laquelle les opérations de réfection de la toiture ont commencé »).
S'il est constant que la prescription ne court pas contre celui qui ne peut agir, le fait que les travaux de réfection n'aient été achevés qu'en juin 2021 n'a aucune incidence sur le cours du délai de prescription, dès lors qu'ils n'affectent pas la connaissance qu'avait M. [S] [X] de l'existence et de l'étendue des dommages fondant ses demandes.
De même, sauf à faire dépendre la prescription de facteurs extérieurs aux désordres et aux préjudices qui en résultent, il ne peut être valablement soutenu que le délai aurait débuté à la date « à laquelle une fin de non-recevoir officielle de l’ensemble des copropriétaires a été opposée à sa demande d’indemnisation », c'est-à-dire le 24 mars 2021. Par ailleurs, ce refus de l'assemblée générale est également sans incidence sur la connaissance qu'avait M. [S] [X] de l'existence des dommages fondant ses demandes.
Il apparaît ainsi que M. [S] [X] disposait dès 2016 de l'ensemble des faits lui permettant d'exercer son action, si bien qu'il n'est pas recevable à agir en indemnisation au titre de préjudices subis avant le 27 avril 2017.
L'affaire sera renvoyée à la mise en état.
3 – Sur les demandes accessoires
- Sur les dépens
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
Les dépens seront réservés.
- Sur les frais exposés non compris dans les dépens
En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.
M. [S] [X] a contraint le syndicat des copropriétaires à saisir le juge de la mise en état afin de voir déclarer une demande partiellement irrecevable, et donc à exposer des frais irrépétibles. Il sera ainsi condamné au paiement d'une indemnité de 500,00 euros.
PAR CES MOTIFS,
Le juge de la mise en état, statuant par ordonnance contradictoire, publiquement et par mise à disposition au greffe,
DÉCLARE M. [S] [X] irrecevable en sa demande portant sur l'indemnisation d'un préjudice subi avant le 27 avril 2017 ;
RÉSERVE les dépens ;
CONDAMNE M. [S] [X] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 500,00 euros au titre des frais irrépétibles ;
RENVOIE l'affaire à l'audience de mise en état du 2 octobre 2024 à 10 heures, pour éventuelles conclusions en demande ;
RAPPELLE que la décision est exécutoire à titre provisoire.
Faite et rendue à Paris, le 5 juillet 2024.
Le greffier Le juge de la mise en état