TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le:
■
4ème chambre 1ère section
N° RG 22/10322
N° Portalis 352J-W-B7G-CXY3O
N° MINUTE :
Assignations des :
28 et 29 Août 2022
JUGEMENT
rendu le 02 Juillet 2024
DEMANDERESSE
S.A.S. RAVET
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Me Xavier LAGRENADE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C0517
DÉFENDERESSES
S.A.S. APAVE INFRASTRUCTURES ET CONSTRUCTION FRANCE
[Adresse 4]
[Localité 9]
représentée par Me Patrice GRENIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C1144
S.A. AXA FRANCE IARD
[Adresse 3]
[Localité 8]
représentée par Me Patrice GRENIER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C1144
PARTIE INTERVENANTE
Société d’assurance mutuelle SOCIETE MUTUELLE D’ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS
[Adresse 7]
[Localité 5]
représentée par Me Xavier LAGRENADE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C0517
Décision du 02 Juillet 2024
4ème chambre 1ère section
N° RG 22/10322 - N° Portalis 352J-W-B7G-CXY3O
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Géraldine DETIENNE, Vice-Présidente
Julie MASMONTEIL, Juge
Pierre CHAFFENET, Juge
assistés de Nadia SHAKI, Greffier,
DÉBATS
A l’audience du 07 Mai 2024 tenue en audience publique devant Monsieur CHAFFENET, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.
JUGEMENT
Prononcé par mise à disposition
Contradictoire
En premier ressort
EXPOSÉ DU LITIGE
Le 14 février 2018, M. [Y] [K], employé au sein de la société Ayra, a été victime d’un accident du travail sur un chantier situé [Adresse 1] à [Localité 10] dans les circonstances suivantes : M. [X] [O], salarié de la SAS Ravet en charge du lot ravalement, procédait à la pose de rails métalliques pour la fixation d’un isolant thermique du bâtiment depuis un échafaudage de pied et, en l’absence d’un autre échafaudage pour poursuivre son travail, a alors pris appui sur une casquette en béton, élément décoratif, qui s’est détachée et est tombée sur M. [K] qui circulait sous cette même casquette.
Dans le cadre de ce chantier, la SAS Apave infrastructures et construction France (ci-après la société Apave) s’était vue confier par le maître d’ouvrage une mission de coordination en matière de sécurité et de protection de la santé.
Suivant jugement du 9 novembre 2021, le tribunal judiciaire de Paris a retenu la responsabilité de la société Ravet et l’a condamnée in solidum avec son assureur, la société d’assurance mutuelle Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (ci-après la SMABTP), à indemniser M. [K] de son préjudice résultant de l’accident et la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de la Seine-Saint-Denis, des débours engagés dans l’intérêt de son affilié. Il a en outre ordonné une expertise médicale des blessures et lésions de M. [K].
Par actes d’huissier de justice en date du 29 août 2022, la société Ravet a fait citer devant ce tribunal la société Apave ainsi que son assureur, la SA Axa France I.A.R.D. (ci-après la société Axa), recherchant la garantie de ces derniers au titre des indemnisations devant être fixées par le tribunal.
Suivant jugement du 27 juin 2023, ce même tribunal a procédé à la fixation des préjudices de M. [K], et a en conséquence condamné in solidum la société Ravet et la SMABTP à verser différentes indemnités à ce dernier ainsi qu’à la CPAM de la Seine-Saint-Denis.
Par ordonnance en date du 12 septembre 2023, le juge de la mise en état a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par les sociétés Apave et Axa fondée sur l’autorité de chose jugée attachée au jugement du 9 novembre 2021.
Par dernières écritures régularisées par la voie électronique le 8 décembre 2023, la société Ravet et la SMABTP, intervenant volontairement à l’instance avec son assurée, demandent au tribunal de :
« Vu l’article 1240 du Code civil,
Vu les pièces,
(...)
- Condamner la Société APAVE INFRASTRUCTURES ET CONSTRUCTION FRANCE (AICF) et son assureur AXA FRANCE IARD à relever et garantir la société RAVET et son assureur, la SMABTP de toute condamnation qui pourrait être prononcée à leur encontre dans le cadre de la procédure engagée aux fins d’indemnisation par Monsieur [K] au titre de l’accident corporel du 14 février 2018, et ce quelque que ce soit, en principal, frais et intérêts et capitalisation des intérêts ;
- Condamner la Société APAVE INFRASTRUCTURES ET CONSTRUCTION FRANCE (AICF) et son assureur AXA FRANCE IARD à payer à la Société RAVET et son assureur, la SMABTP, la somme de 203 429,89 € ;
- Condamner la société APAVE INFRASTRUCTURES ET CONSTRUCTION FRANCE (AICF) et son assureur AXA FRANCE IARD au paiement de la somme de 2 000 € en application de l’art. 700 du CPC et aux entiers dépens ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Xavier LAGRENADE, AARPI d’HERBOMEZ, LAGRENADE & ASSOCIES, qui pourra les recouvrer directement conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile ».
Elles se prévalent en substance du rapport de l’inspection du travail en date du 22 juin 2018 pour conclure à l’engagement de la responsabilité délictuelle de la société Apave compte tenu des circonstances de l’accident. Elles relèvent en particulier que la défenderesse, pourtant en charge de la coordination en matière de sécurité, n’a édicté dans les documents et plans remis aucune mesure de précaution en lien avec la coactivité existant sur le chantier (intervention simultanée ou successive d’entreprises) et qu’elle n’a pas effectué les diligences nécessaires pour détecter les risques liés à cette coactivité dans le cadre des visites d’inspection, réalisées en outre tardivement par rapport au démarrage des travaux selon elles. Elles soulignent ainsi qu’il incombait à la société Apave d’anticiper et de prévenir le risque pour les travailleurs en raison de la superposition et de la simultanéité de travaux au-dessus de la casquette, circonstance ayant directement mené au sinistre.
Elles considèrent que l’engagement ainsi établi de la responsabilité de la société Apave justifie en outre la mobilisation des garanties de son assureur responsabilité civile, la société Axa.
Par dernières écritures régularisées par la voie électronique le 23 mars 2023, la société Apave et la société Axa demandent au tribunal de :
« Vu l’article 1242 du Code civil,
Vu les articles 514-1, 514-5, 519 et 700 du Code de procédure civile
Vu les articles L. 4323-58, L. 4323-59, L. 4532-1, L. 4532-2, L. 4532-6, L. 4532-8 et R. 4532-43, du Code du travail,
(...)
A titre liminaire :
- JUGER que les présentes conclusions au fond ne sont prises que pour le cas où le juge de la mise en état saisi de la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée déciderait de déclarer recevable l’action formée par les sociétés Ravet et SMABTP ;
A titre principal :
- JUGER que la société Apave Infrastructures et Construction France venant aux droits de la société Apave Nord-Ouest n’a commis aucune faute dans le cadre de sa mission de coordination SPS, de telle sorte qu’aucune responsabilité ne peut être recherchée à son encontre ;
En conséquence :
- DEBOUTER les sociétés Ravet et SMABTP de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions dirigées contre les concluantes ;
A titre subsidiaire :
- JUGER que la faute de Monsieur [O], préposé de la société Ravet, est la causalité exclusive des préjudices corporels allégués par Monsieur [K] ;
- JUGER qu’aucun lien de causalité ne peut dès lors exister entre les supposés manquements qu’aurait commis la société Apave Infrastructures et Construction France et les préjudices allégués par Monsieur [K] ;
En conséquence :
- DEBOUTER les sociétés Ravet et SMABTP de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions dirigées contre les concluantes ;
A titre infiniment subsidiaire :
- LIMITER la part éventuelle de responsabilité des sociétés Apave Infrastructures et Construction France et Axa France IARD à seulement 10% du sinistre, compte tenu de l’implication prépondérante de la société Ravet dans l’accident de Monsieur [K], dont les manquements ont contribué directement à la survenance du sinistre ;
- CONDAMNER les sociétés Ravet et SMABTP à relever et garantir les sociétés Apave Infrastructures et Construction France et Axa France IARD à hauteur d’au minimum 90% du montant total des condamnations prononcées au profit de Monsieur [K] (afin de tenir compte de la limitation de la part de responsabilité des concluantes à seulement 10% du sinistre) ;
Et en tout état de cause :
- ECARTER l’exécution provisoire de droit conformément à l’article 514-1 du Code de procédure civile ;
- Ou, à défaut d’écarter l’exécution provisoire de droit, JUGER que le montant de la condamnation qui sera prononcée soit déposé à la Caisse des dépôts et consignations, et/ou versé sur le compte CARPA du cabinet Grenier Avocats qui la conservera en tant que séquestre et ce, jusqu’à expiration des voies de recours ;
Décision du 02 Juillet 2024
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- CONDAMNER in solidum les sociétés Ravet et SMABTP à payer, aux sociétés Apave Infrastructures et Construction France et Axa France Iard, la somme de 10.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
- CONDAMNER les sociétés Ravet et SMABTP aux entiers dépens ».
Pour contester toute responsabilité dans l’accident, elles opposent tout d’abord que l'intervention du coordonnateur chargé de la sécurité ne modifie ni la nature, ni l'étendue des responsabilités incombant à chacun des participants aux opérations de bâtiment et de génie civil, et que le coordonnateur exerce ses missions sous la responsabilité du maître d'ouvrage conformément à l’article L. 4532-6 du code du travail.
Elles objectent alors que le plan général de sécurité contenait plusieurs mesures de prévention particulières liées à la coactivité et au risque de chutes, notamment de matériaux, et que la question de l’échafaudage commun de pied avait également été abordée. Elles soulignent également que les visites de sécurité ont été réalisées dans les temps prévus par le code du travail et qu’elles ont porté sur l’appréciation de ces mêmes risques, outre que le coordonnateur en charge du suivi du chantier avait adressé plusieurs observations à la société Ravet pour s’assurer de la bonne mise en place de l’échafaudage de pied. Elles considèrent dans ces circonstances que rien n’aurait en toute hypothèse justifié une évolution du plan général et des différentes recommandations émises pour prendre en compte le risque qui s’est réalisé le 14 février 2018.
Elles relèvent par ailleurs qu’avant l’accident de M. [K], il n’avait pas été prévu de travaux superposés au niveau de la casquette qui s’est effondrée ; que cette partie n’était d’ailleurs équipée d’aucun échafaudage, ce qui devait nécessairement mener les intervenants à comprendre l’interdiction de réaliser des travaux au-dessus de celle-ci ; qu’à supposer une installation d’échafaudage supplémentaire préconisée, l’inspection du travail a retenu que cet ajout n’aurait pas permis aux travailleurs de l’entreprise Ayra d’intervenir dans de bonnes conditions.
Elles considèrent au regard de ces éléments que la société Apave a effectué toutes les diligences utiles en lien avec les missions qui lui avaient été confiées. Elles invoquent au surplus l’inopposabilité du rapport de l’inspection du travail, réalisé de manière non contradictoire, et soulignent qu’au terme de ce même rapport, aucune violation de la loi n’a été reprochée à la société Apave.
Elles objectent encore qu’aucun lien de causalité n’est démontré entre les prétendus manquements de la société Apave et l’accident, uniquement imputable à une faute de l’employé de la société Ravet.
En cas de responsabilité retenue de la société Apave, elles concluent à un partage de responsabilité à hauteur de 10 % pour elles, considérant prépondérante l’implication de la société Ravet dans la survenue de l’accident.
La clôture a été ordonnée le 6 février 2024.
Pour un plus ample exposé des faits de la cause et des prétentions des parties, il est fait expressément référence aux pièces du dossier et aux dernières écritures des parties conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
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MOTIFS
A titre liminaire, il convient de rappeler que les demandes tendant à voir notamment “juger que”, ne constituent pas nécessairement des prétentions au sens des dispositions de l’article 4 du code de procédure civile en ce qu’elles ne sont pas susceptibles d’emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.
Il ne sera donc pas statué sur ces “demandes” qui ne donneront pas lieu à mention au dispositif.
Sur la responsabilité de la société Apave
Il résulte des dispositions de l’article 1240 du code civil que « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».
En vertu de ces dispositions et de l’article 1353 du même code, il incombe à celui qui entend engager la responsabilité d’autrui de rapporter la preuve d’une faute de ce dernier et d’un préjudice subi en lien causal avec cette faute.
A cet égard, il est constant que le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage.
En l’espèce, il n’est pas en débats que le maître d’ouvrage du chantier sur lequel l’accident est survenu avait confié à la société Apave une mission de coordination en matière de sécurité et de protection de la santé des travailleurs.
Au regard de la mission ainsi confiée et acceptée, il revenait donc à la société Apave de définir et mettre en oeuvre, conformément à l’article R. 4532-11 du code du travail, des principes généraux de prévention des risques pouvant découler des travaux envisagés puis réalisés.
L’article R. 4532-13 du même code ajoute qu’au cours de la réalisation de l’ouvrage, le coordonnateur « 1° Organise entre les entreprises, y compris sous-traitantes, qu'elles se trouvent ou non présentes ensemble sur le chantier, la coordination de leurs activités simultanées ou successives, les modalités de leur utilisation en commun des installations, matériels et circulations verticales et horizontales, leur information mutuelle ainsi que l'échange entre elles des consignes en matière de sécurité et de protection de la santé. A cet effet, il procède avec chaque entreprise, préalablement à l'intervention de celle-ci, à une inspection commune au cours de laquelle sont en particulier précisées, en fonction des caractéristiques des travaux que cette entreprise s'apprête à exécuter, les consignes à observer ou à transmettre et les observations particulières de sécurité et de santé prises pour l'ensemble de l'opération. Cette inspection commune est réalisée avant remise du plan particulier de sécurité et de protection de la santé lorsque l'entreprise est soumise à l'obligation de le rédiger ;
2° Veille à l'application correcte des mesures de coordination qu'il a définies ainsi que des procédures de travail qui interfèrent ».
Il importe néanmoins de rappeler qu’aux termes de l’article L. 4532-6 du code du travail : « L'intervention du coordonnateur ne modifie ni la nature ni l'étendue des responsabilités qui incombent, en application des autres dispositions du présent code, à chacun des participants aux opérations de bâtiment et de génie civil ».
Ceci précisé, la société Apave verse aux débats le plan général de coordination sécurité et protection de la santé qu’elle a établi en exécution de ses obligations. Contrairement à ce que soutient la société Ravet, il en ressort que des risques liés à la co-activité sur le chantier ont été identifiés et que des mesures ont été envisagées afin de les limiter, notamment au chapitre 3.7 de ce plan : « Mesures prises en matière d’interactions sur le site ». Ainsi est-il notamment prévu, de manière générale, une « planification des interventions d’entreprises (...) de manière à supprimer les co-activités génératrices de risques » et il était alors convenu que « toute zone de travail à risque (chute d’objets, évolution de matériel, zone de montage, d’essais, etc..;) sera signalée par tout moyen adapté par l’entreprise générant le risque ».
Figure également dans ce plan, au titre des protections collectives contre les chutes, la réalisation d’un échafaudage commun de pied à la charge du lot 2 ravalement, soit le lot confié à la société Ravet, « sur toute la périphérie des bâtiments ».
La société Ravet, ne contestant pas s’être vue remettre ce plan, a donc été pleinement informée des mesures à prendre en cas de co-activité et également des mesures lui incombant en lien avec ce risque.
Elle a également accepté de prendre à sa charge, afin de prévenir les risques de chute, l’installation d’un échafaudage devant entourer les bâtiments objets des travaux.
Certes, l’inspection du travail évoque dans le rapport dont se prévalent les demanderesses que « la responsabilité du maître d’ouvrage peut être engagée sur la base des manquements relevés dans la mise en oeuvre de la coordination en matière de sécurité et de protection de la santé », soulignant que les préconisations données dans le plan demeuraient imprécises et pour partie incomplètes, et que la visite d’inspection préalable du chantier s’étant déroulée le jour-même de démarrage du chantier, la pertinence de celle-ci pouvait être questionnée.
Pour autant, cette administration souligne de manière explicite que ce « défaut d’organisation est en lien de causalité indirecte » avec l’accident et elle rappelle à cet égard, au visa de l’article R. 4532-64 du code du travail, que les plans particuliers de sécurité et de protection de la santé, qu’il incombait à la société Ravet et à la société Ayra d’établir en parallèle du plan général de la société Apave, présentaient des lacunes comme ne traitant pas les risques liés à la co-activité. Ces documents ne sont alors pas versés aux débats par la demanderesse. Il est également souligné que si l’échafaudage installé par la société Ravet n’est pas mentionné dans une réunion de chantier du 24 janvier 2018, il est en toute hypothèse certain que la « vérification de l’échafaudage de pied n’explique pas l’accident du travail ».
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En effet, il doit être rappelé que les circonstances de l’accident sont dues à une néglignence fautive du salarié de la société Ravet qui, procédant à l’exécution de sa mission depuis un échafaudage de pied, a décidé, au mépris de toute précaution de sécurité élémentaire, de prendre appui sur une casquette en béton, simple élément décoratif et qui « au-delà de toute considération technique sur la résistance structurelle (...) ne constituait pas un poste de travail conforme » ainsi que s’attache à le souligner l’inspecteur du travail. Ce dernier rappelle alors, au regard des obligations de la société Ravet, que cette dernière « devait mettre à la disposition de Monsieur [X] [O] un équipement de travail adapté à un travail en sécurité ».
En cet état, il y a lieu de retenir que si des négligences sont caractérisées dans les diligences incombant à la société Apave, celles-ci ne sont pas en lien causal avec la survenue de l’accident du 14 février 2018, lequel a exclusivement résulté du manquement de la société Ravet aux obligations qu’elle avait acceptées dans le cadre du chantier et du comportement de son salarié.
Dans ces conditions, la société Ravet et la SMABTP échouent à établir que la responsabilité de la société Apave est engagée en raison de cet accident.
Elles seront en conséquence déboutées de leurs demandes formées à l’encontre tant de la société Apave que de son assureur, la société Axa.
Sur les autres demandes
La société Ravet et la SMABTP, succombant, seront condamnées in solidum aux dépens.
Au vu des circonstances de la cause et des situations respectives des parties, il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des sociétés Apave et Axa les frais qu'elles ont exposés au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Elles seront par conséquent déboutées de la demande qu'elles forment à ce titre.
L'exécution provisoire est, en vertu des articles 514-1 à 514-6 du code de procédure civile issus du décret 2019-1333 du 11 décembre 2019, de droit pour les instances introduites comme en l'espèce à compter du 1er janvier 2020.
Les défenderesses sollicitent que soit écartée ou aménagée l’exécution provisoire uniquement en cas de condamnation prononcée à leur encontre. Au regard du sens de la présente décision, il n’y a pas lieu de faire droit à leur demande.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire, en premier ressort et par mise à disposition au greffe,
Déboute la SAS Ravet et la société d’assurance mutuelle Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics de l’ensemble de leurs demandes à l’encontre de la SAS Apave et de la SA Axa France IARD,
Condamne in solidum la SAS Ravet et la société d’assurance mutuelle Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics aux dépens,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toute autre demande plus ample ou contraire des parties,
Dit n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de droit de la présente décision.
Fait et jugé à Paris le 02 Juillet 2024.
Le GreffierLa Présidente
Nadia SHAKIGéraldine DETIENNE