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28/06/2024 | FRANCE | N°24/01417

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr référé, 28 juin 2024, 24/01417


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Madame [I] [U]


Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me Pierre-Bruno GENON-CATALOT

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR référé

N° RG 24/01417 - N° Portalis 352J-W-B7I-C353K

N° MINUTE :







ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 28 juin 2024


DEMANDERESSE
S.A. REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3],
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Pierre-Bruno GENON-CATALOT, a

vocat au barreau de PARIS, vestiaire : B 0096

DÉFENDERESSE
Madame [I] [U],
demeurant [Adresse 2]
comparante en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Frédéric GICQUEL, Juge, ju...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Madame [I] [U]

Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me Pierre-Bruno GENON-CATALOT

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR référé

N° RG 24/01417 - N° Portalis 352J-W-B7I-C353K

N° MINUTE :

ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 28 juin 2024

DEMANDERESSE
S.A. REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3],
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Pierre-Bruno GENON-CATALOT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B 0096

DÉFENDERESSE
Madame [I] [U],
demeurant [Adresse 2]
comparante en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Frédéric GICQUEL, Juge, juge des contentieux de la protection
assisté de Lisa BOUCHEMMA, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 19 mars 2024

ORDONNANCE
contradictoire et en premier ressort prononcée par mise à disposition le 28 juin 2024 par Frédéric GICQUEL, Juge, assisté de Lisa BOUCHEMMA, Greffier

Décision du 28 juin 2024
PCP JCP ACR référé - N° RG 24/01417 - N° Portalis 352J-W-B7I-C353K

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 2 mai 2022, la RÉGIE IMMOBILIÈRE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) a donné à bail à Madame [I] [U] un appartement à usage d'habitation situé [Adresse 2] pour un loyer mensuel de 864,95 euros et 215 euros de provision sur charges.

Par acte de commissaire de justice du 5 septembre 2023, la RÉGIE IMMOBILIÈRE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) a fait délivrer à Madame [I] [U] un commandement de payer dans un délai de six semaines la somme principale de 3 472,38 euros au titre de l'arriéré locatif en visant la clause résolutoire prévue dans le contrat.

Par acte de commissaire de justice du 5 janvier 2024, la RÉGIE IMMOBILIÈRE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) a assigné en référé Madame [I] [U] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris aux fins de :
- constater la résiliation de plein droit du bail par le jeu de la clause résolutoire,
- ordonner l'expulsion de Madame [I] [U] et de tous occupants de son chef, au besoin avec le concours de la force publique et d'un serrurier,
- ordonner le transport et la séquestration des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux aux frais, risques et périls du défendeur,
- condamner Madame [I] [U] à payer à titre provisionnel la somme de 3 896,31 euros au titre des loyers et charges avec intérêts au taux légal ainsi qu'à une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer et des charges,
- condamner Madame [I] [U] à payer la somme de 400 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens comprenant notamment le coût du commandement de payer, de l'assignation et des frais de la procédure éventuelle d'expulsion.

À l'audience du 19 mars 2024, la RÉGIE IMMOBILIÈRE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP), représentée par son conseil, a sollicité le bénéfice de son acte introductif d'instance et a actualisé sa créance à la somme de 3 833,52 euros selon décompte du 15 mars 2024, terme de février 2024 inclus. La bailleresse a par ailleurs donné son accord à l'octroi de délais de paiement suspendant les effets de la clause résolutoire selon les modalités proposées par le locataire.

Madame [I] [U], comparante en personne, a reconnu le montant de la dette locative et a demandé à pouvoir se maintenir dans les lieux en réglant 110 euros par mois en plus du loyer courant, exposant travailler en contrat à durée indéterminée pour un salaire de 3 200 euros par mois primes incluses, percevoir une allocation de soutien familial de 374 euros en l’absence de règlement de la pension alimentaire mise à la charge du père de ses deux enfants et s'être retrouvée en difficulté financière à la suite de saisies sur salaire pratiquées en vertu de dettes désormais soldées.

Un diagnostic social et financier a été reçu au greffe dont il a été donné lecture de ses conclusions à l'audience.

La décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 19 juin 2024 puis a été prorogée à ce jour.

MOTIFS

Sur la recevabilité de l'action en résiliation de bail

Une copie de l'assignation a été notifiée à la préfecture de Paris par la voie électronique le 8 janvier 2024 soit plus de six semaines avant l'audience, conformément aux dispositions de l'article 24 III de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989.

Par ailleurs, la RÉGIE IMMOBILIÈRE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) justifie avoir saisi la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (CCAPEX), également par la voie électronique le 6 septembre 2023, soit deux mois au moins avant la délivrance de l'assignation, conformément aux dispositions de l'article 24 II de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989.

L'action est donc recevable.

Sur l'acquisition de la clause résolutoire

En vertu de l'article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

En vertu de l'article 835 du même code, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

L'article 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 dispose que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ne produit effet qu'à l'expiration d'un certain délai après un commandement de payer demeuré infructueux, de deux mois avant la loi n°2023-668 du 27 juillet 2023 et désormais de six semaines, étant observé que les dispositions de la loi nouvelle ne s'appliquent pas immédiatement aux contrats en cours qui demeurent régis par les stipulations des parties, telles qu'encadrées par la loi en vigueur au jour de la conclusion du bail (Cass, 3ème civ., 13 juin 2024, n°24-70.002).

En vertu de ces textes, il est possible, dans le cadre d'une procédure en référé, de constater la résiliation de plein droit d'un contrat de location en application d'une clause résolutoire lorsque celle-ci est mise en œuvre conformément aux dispositions d'ordre public de la loi applicable en matière de baux d'habitation.

En l'espèce, le bail conclu le 2 mai 2022 contient une clause résolutoire (article VIII) et un commandement de payer visant cette clause a été signifié le 5 septembre 2023 pour la somme en principal de 3 472,38 euros. Il correspond par ailleurs bien à une dette justifiée à hauteur du montant des loyers échus et impayés (voir ci-après au titre du montant de l'arriéré locatif) et est ainsi valable.

Ce commandement est enfin demeuré infructueux pendant le délai de deux mois applicable jusqu'au terme du bail le 1er mai 2028 (seule la somme de 1 100 euros ayant été réglée dans le délai), de sorte qu'il y a lieu de constater que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire contenue dans le bail sont réunies à la date du 6 novembre 2023.

Sur le montant de l'arriéré locatif et l'indemnité d'occupation

Aux termes de l'article 835 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le juge des contentieux de la protection saisi en référé peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Madame [I] [U] est redevable des loyers impayés en application des articles 1103 du code civil et 7 de la loi du 6 juillet 1989.

Par ailleurs, son maintien dans les lieux postérieurement à la date d'expiration du bail constitue une faute civile ouvrant droit à réparation en ce qu'elle cause un préjudice certain pour le propriétaire dont l'occupation indue de son bien l'a privé de sa jouissance. Au-delà de cet aspect indemnitaire, l'indemnité d'occupation, qui est également de nature compensatoire, constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des locaux.

La RÉGIE IMMOBILIÈRE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) produit un décompte faisant apparaître que Madame [I] [U] est redevable de la somme de 3 833,52 euros à la date du 15 mars 2024, terme de février 2024 inclus et Madame [I] [U] n'apporte aucun élément de nature à contester le principe ni le montant de la dette, qu'elle reconnaît d'ailleurs à l'audience.

Elle sera donc condamnée au paiement de la somme de 3 833,52 euros à titre provisionnel avec en l'absence d'autres précisions intérêts au taux légal sur la somme de 3 896,31 euros à compter de la délivrance de l'assignation conformément aux dispositions de l'article 1231-6 du code civil.

Elle sera également condamnée au paiement à compter de l'échéance de l'échéance de mars 2024, en lieu et place des loyers et charges, d'une indemnité mensuelle d'occupation qu'il convient de fixer à titre provisionnel au montant du loyer qui aurait été dû en l'absence de résiliation et des charges mensuelles dûment justifiées.

Sur les délais de paiement et la suspension de la clause résolutoire

Les articles 24 V et VII de la loi du 6 juillet 1989 disposent que le juge peut, à la demande du locataire, du bailleur ou d'office, à la condition que le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu'il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l'article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative.

Lorsque le juge est saisi en ce sens par le bailleur ou par le locataire et à la condition que celui-ci ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, les effets de la clause de résiliation de plein droit peuvent être suspendus pendant le cours des délais accordés par le juge.

En l'espèce, Madame [I] [U] a repris le règlement du loyer courant et la bailleresse a donné son accord pour l'octroi de délais de paiement suspendant les effets de la clause résolutoire selon les modalités proposées par la locataire.

Dès lors, Madame [I] [U] sera autorisée à se libérer du montant de sa dette selon les modalités qui seront précisées au dispositif de la présente ordonnance.

Il convient néanmoins de prévoir qu'à défaut de paiement des loyers et charges courants d'une part et de respect des délais de paiement d'autre part le solde de l'arriéré de loyers et de charges deviendra immédiatement exigible et la clause résolutoire reprendra son plein effet entraînant la résiliation du bail à la date de son acquisition et permettant l'expulsion de Madame [I] [U] avec si nécessaire l'assistance de la force publique et d'un serrurier.

Sur les demandes accessoires

Madame [I] [U], partie perdante, sera condamnée aux dépens de la présente instance, comprenant notamment le coût du commandement de payer, de l'assignation et de sa notification à la préfecture conformément à l'article 696 du code de procédure civile.

En revanche, il n'appartient pas au juge de se prononcer par avance sur la charge des sommes liées à l'exécution forcée de la présente ordonnance lesquelles sont en ce qui concerne les mesures d'exécution forcée soumises au code des procédures civiles d'exécution régies par les dispositions de l'article L.111-8 dudit code.

L'équité commande par ailleurs de faire droit à hauteur de 200 euros à la demande de la RÉGIE IMMOBILIÈRE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) concernant les frais non compris dans les dépens, en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément aux articles 489 et 514 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Nous, juge des contentieux de la protection, statuant en référé, après débats en audience publique, par ordonnance mise à disposition au greffe contradictoire et en premier ressort,

Au principal, RENVOYONS les parties à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront mais, dès à présent, vu l'urgence et l'absence de contestation sérieuse,

DÉCLARONS l'action en résiliation de bail et expulsion recevable,

CONSTATONS que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire figurant au bail conclu le 2 mai 2022 entre la RÉGIE IMMOBILIÈRE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) d'une part, Madame [I] [U] d'autre part, concernant l'appartement à usage d'habitation situé [Adresse 2] sont réunies à la date du 6 novembre 2023,

CONDAMNONS Madame [I] [U] à verser à la RÉGIE IMMOBILIÈRE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) la somme de 3 833,52 euros (décompte arrêté au 15 mars 2024, incluant la mensualité de février 2024) correspondant à l'arriéré de loyers, charges et indemnités d'occupation échus à cette date avec intérêts au taux légal sur la somme de 3 896,31 euros à compter du 5 janvier 2024,

RAPPELONS que les paiements intervenus postérieurement au décompte viennent s'imputer sur les sommes dues conformément à l'article 1342-10 du code civil et viennent ainsi en déduction des condamnations ci-dessus prononcées,

AUTORISONS sauf meilleur accord des parties Madame [I] [U] à s'acquitter de cette somme, outre le loyer et les charges courants, en 34 mensualités de 110 euros chacune et une 35ème mensualité qui soldera la dette en principal et intérêts,

PRÉCISONS que chaque mensualité devra être versée au terme prévu contractuellement pour le paiement du loyer et pour la première fois le mois suivant la signification de la présente décision,

SUSPENDONS les effets de la clause résolutoire pendant l'exécution des délais accordés,

DISONS que si les délais accordés sont entièrement respectés, la clause résolutoire sera réputée n'avoir jamais été acquise,

DISONS qu'en revanche, toute mensualité, qu'elle soit due au titre du loyer et des charges courants ou de l'arriéré, restée impayée sept jours après l'envoi d'une mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception justifiera :
* que la clause résolutoire retrouve son plein effet,
* que le solde de la dette devienne immédiatement exigible,
* qu'à défaut pour Madame [I] [U] d'avoir volontairement libéré les lieux dans les deux mois de la délivrance d'un commandement de quitter les lieux, la RÉGIE IMMOBILIÈRE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) puisse faire procéder à son expulsion ainsi qu'à celle de tous les occupants de son chef, conformément à l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution, avec le concours d'un serrurier et de la force publique si besoin est, étant rappelé que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution,
* que Madame [I] [U] soit condamnée à verser à la RÉGIE IMMOBILIÈRE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) une indemnité mensuelle d'occupation provisionnelle égale au montant du loyer et des charges qui auraient été dus en l'absence de résiliation du bail, jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux caractérisée par la remise des clés au bailleur ou à son mandataire,

CONDAMNONS Madame [I] [U] à payer à la RÉGIE IMMOBILIÈRE DE LA VILLE DE [Localité 3] (RIVP) la somme de 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTONS les parties de leurs autres demandes,

CONDAMNONS Madame [I] [U] aux dépens comme visé dans la motivation,

REJETONS les demandes des parties plus amples ou contraires,

RAPPELONS que la présente ordonnance est de plein droit exécutoire à titre provisoire.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition les jour, mois et an susdits par le Juge des contentieux de la protection et la Greffière susnommés.

La Greffière,Le Juge des contentieux de la protection.


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr référé
Numéro d'arrêt : 24/01417
Date de la décision : 28/06/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "conditionnelle" ordonnée en référé avec suspension des effets de la clause résolutoire

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-28;24.01417 ?
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