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28/06/2024 | FRANCE | N°20/01035

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 1/2/2 nationalité b, 28 juin 2024, 20/01035


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS




1/2/2 nationalité B

N° RG 20/01035 -
N° Portalis 352J-W-B7E-CRR52

N° PARQUET : 19-1054

N° MINUTE :

Assignation du :
22 Novembre 2019


AFP


[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :








JUGEMENT
rendu le 28 Juin 2024

DEMANDEUR

Monsieur [N] [T]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 4] (ALGERIE)

représenté par Me Nadir HACENE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #P0298
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DEFENDERESSE

LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Parquet 01 Nationalités
[Adresse 8]
[Localité 3]

Madame Sophie BOURLA-OHNONA, Vice-Procureure





Décision du 28/06/2024
Chambre du contentieux
de la nati...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

1/2/2 nationalité B

N° RG 20/01035 -
N° Portalis 352J-W-B7E-CRR52

N° PARQUET : 19-1054

N° MINUTE :

Assignation du :
22 Novembre 2019

AFP

[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

JUGEMENT
rendu le 28 Juin 2024

DEMANDEUR

Monsieur [N] [T]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 4] (ALGERIE)

représenté par Me Nadir HACENE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #P0298

DEFENDERESSE

LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Parquet 01 Nationalités
[Adresse 8]
[Localité 3]

Madame Sophie BOURLA-OHNONA, Vice-Procureure


Décision du 28/06/2024
Chambre du contentieux
de la nationalité Section B
N°RG 20/01035

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Antoanela Florescu-Patoz, Vice-présidente
Présidente de la formation

Madame Clothilde Ballot-Desproges, Juge
Madame Victoria Bouzon, Juge
Assesseurs

Assistées de Madame Manon Allain, Greffière

DEBATS

A l’audience du 17 Mai 2024 tenue publiquement

JUGEMENT

Contradictoire,
en premier ressort,
Prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Antoanela Florescu-Patoz, Vice-présidente et par Madame Manon Allain, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu les articles 455 et 768 du code de procédure civile,

Vu l'assignation délivrée le 22 novembre 2019 au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Paris, par M. [N] [T];

Vu l’ordonnance de clôture prononcée le 17 décembre 2021 ;

Vu le jugement de révocation de l'ordonnance de clôture rendu le 9 juin 2022 ;

Vu les dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 29 novembre 2022 par le Procureur de la République ;

Vu les dernières conclusions de M. [N] [T] et le dernier bordereau de communication des pièces notifiés par la voie électronique le 15 mars 2024 ;

Vu l’ordonnance de clôture prononcée le 22 mars 2024 et la fixation de l'affaire à l'audience du 17 mai 2024 ;

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la procédure

Le tribunal rappelle qu'aux termes de l’article 1043 du code de procédure civile, dans toutes les instances où s'élève à titre principal ou incident une contestation sur la nationalité, une copie de l'assignation est déposée au ministère de la justice qui en délivre récépissé.

En l’espèce, le ministère de la justice a délivré ce récépissé le 15 février 2021. La condition de l’article 1043 du code de procédure civile est ainsi respectée. Il y a donc lieu de dire que la procédure est régulière au regard de ces dispositions.

Sur la recevabilité de l’action

L’article 26-3, alinéas 1 et 2, du code civil dispose que la décision du ministre ou du greffier en chef du tribunal d’instance qui refuse d’enregistrer les déclarations qui ne satisfont pas aux conditions légales, est motivée et notifiée au déclarant qui peut la contester devant le tribunal de grande instance durant un délai de six mois.

En l’espèce, il résulte du procès verbal de notification de la décision refusant l'enregistrement d'une déclaration de nationalité souscrite en vertu de l'article 21-2 du code civil, que le refus d’enregistrement de la déclaration de nationalité française en date du 12 juin 2019 (dossier 2019DX006764/MM), a été notifié à M. [N] [T] le 27 juin 2019 par le Consul adjoint, chef de chancellerie du Consulat général de France à [Localité 4] (pièce n°2 du ministère public ), ce qui lui laissait jusqu’au 27 décembre 2019 pour former un recours devant le tribunal judiciaire.

M. [N] [T] allègue dans ses écritures que la décision de refus d'enregistrement de la déclaration de nationalité française du 12 juin 2019 lui a été notifiée le 17 mai 2019. Or le tribunal constate que le refus a bien été notifié à M. [N] [T] le 27 juin 2019 par le Consul adjoint du Consulat général de France à [Localité 4], le procès verbal de notification ayant été signé par l'intéressé. Cet acte comporte la date de la remise de l'acte, la signature du consul et le tampon émanant du Consulat général de France à [Localité 4].

Le demandeur a assigné le procureur de la République le 22 novembre 2019. L’action est donc recevable.

Sur le fond

M. [N] [T], se disant né le 18 juillet 1966 à [Localité 5] (Algérie) a souscrit le 12 février 2019 une déclaration acquisitive de nationalité française sous le n° 2019DX006764 auprès du Consul adjoint, Chef de chancellerie du Consulat de France à [Localité 4], en application de l’article 21-2 du code civil, en raison de son mariage, célébré le 23 avril 2011 à la Mairie de [Localité 6] (Seine-Saint-Denis), avec Mme [X] [W], née le 1er octobre 1978 à [Localité 7], de nationalité française par double droit du sol, pour être née en France des deux parents nés sur le territoire des départements français d’Algérie avant le 3 juillet 1962 (pièce n°1 du ministère public).

Par décision en date du 12 juin 2019, le Ministre chargé des naturalisations a refusé l’enregistrement de la déclaration de nationalité française au motif que la communauté de vie tant affective que matérielle entre le demandeur et sa conjointe n'était pas établie à son domicile en Algérie ; qu'en effet, son épouse avait été affiliée à la caisse d'assurance familiale de 2013 à 2014 et était toujours affiliée à la sécurité sociale en France (pièce n°11 du demandeur).

M. [N] [T] a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Paris le procureur de la République, afin de voir constater que la décision de refus d'enregistrement de la déclaration de nationalité française a été opposée à tort à M. [N] [T], d'annuler cette décision et de dire qu'il est de nationalité française.

Aux termes de l’article 21-2 du code civil, dans sa rédaction ici applicable pour une déclaration souscrite le 12 février 2019, l’étranger ou apatride qui contracte mariage avec un conjoint de nationalité française peut, après un délai de quatre ans à compter du mariage, acquérir la nationalité française par déclaration à condition qu'à la date de cette déclaration la communauté de vie tant affective que matérielle n’ait pas cessé entre les époux depuis le mariage et que le conjoint français ait conservé sa nationalité. Le délai de communauté de vie est porté à cinq ans lorsque l'étranger, au moment de sa déclaration, ne justifie pas avoir résidé de manière ininterrompue pendant au moins trois ans en France à compter du mariage.

Enfin, nul ne peut revendiquer à quelque titre que ce soit, la nationalité française, s’il ne dispose d’un état civil fiable et certain.

Aux termes de l’article 47 du code civil, tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.

Le tribunal relève que M. [N] [T] verse au dossier de plaidoirie une copie originale de son acte de naissance n° 808, en langue française, délivrée le 6 janvier 2020, par l'officier d'état civil de la commune de [Adresse 2], dont il résulte qu'il est né le 18 juillet 1966 à 16 h, à [Localité 5] (Algérie), de [K], âgé de … profession ... et de [S] [T], âgée de …, profession …, domiciliés [Adresse 1], commune de …, l'acte ayant été dressé le 21 juillet 1966 à 17h25, sur la déclaration de [T] [K] (pièce n° 1 du demandeur).

Décision du 28/06/2024
Chambre du contentieux
de la nationalité Section B
N°RG 20/01035

L'analyse de cet acte permet au tribunal d'observer que l’ensemble des mentions de l’acte produit sur formulaire EC12, n’apparaissent pas puisque le jour de sa naissance, le 18 juillet 1966, était applicable l’article 57 du code civil français dans sa rédaction issue de la loi du 7 février 1924 puisque la loi algérienne n° 62-157 du 31 décembre 1962 avait reconduit, jusqu’à nouvel ordre, la législation en vigueur à cette date, à savoir le droit issu du code civil français alors en vigueur en Algérie, lequel restera applicable jusqu’au 1er juillet 1972, date de l’entrée en vigueur de l’ordonnance n°70-20 du 19 février 1970 relative à l’état civil. Aux termes de cet article 57, l’acte de naissance doit énoncer les prénoms, noms, âge, profession et domicile des père et mère et s'il y a lieu du déclarant.
En l’espèce, l’acte de naissance du demandeur ne contient pas l'âge des père et mère, de sorte que leur identification au vu du seul acte de naissance est impossible.

Pour pallier à cette difficulté, M. [N] [T] verse au dossier de plaidoiries, une copie originale de son acte de naissance n°808, rédigé en langue française et la traduction de la même copie de l'acte, délivrée le 18 octobre 2022, par l'officier d'état civil de la commune de [Adresse 2], dont il résulte qu'il est né le 18 juillet 1966 à 16 h, double zéro, à [Localité 5] (Algérie), de [K], âgé de 27 ans, profession boulanger et de [S] [T], âgée de 24 ans, sans profession, domiciliés commune de [Adresse 2], l'acte ayant été dressé le 21 juillet 1966 à 16h, double zéro, sur la déclaration de [T] [K] le père (pièces n° 57 et 58 du demandeur).

L'analyse de ces deux pièces permet au tribunal de constater, comme l'indique le ministère public à juste titre, qu'il ne s'agit pas de deux copies d'un même acte de naissance, mais bien de deux copies divergentes du même acte, qui ne portent pas les mêmes indications sur la date à laquelle l'acte de naissance a été dressé.

Le demandeur n'a pas répondu à ce moyen soulevé par le ministère public.

Or, l'acte de naissance est un acte unique, conservé dans le registre des actes de naissance, de sorte que les copies de cet acte doivent toujours avoir les mêmes références et le même contenu, force est de constater que de telle divergence, ne permet pas d'identifier avec fiabilité et certitude la personne dont la naissance est relatée et remet en cause le caractère probant des dits actes, sans qu'aucun ne puisse alors faire foi au sens de l'article 47 du code civil.

Ainsi, l’acte de naissance produit par le demandeur n’est pas conforme aux exigences des dispositions du code civil alors en vigueur en Algérie.

L’acte de naissance de M. [N] [T] ne présente aucune force probante au sens de l’article 47 du code civil.
Partant, ne rapportant la preuve d'un état civil certain, le demandeur ne peut revendiquer la nationalité française à aucun titre et il sera débouté de l'ensemble de ses demandes.

Sur la mention prévue à l'article 28 du code civil

Aux termes de l’article 28 du code civil, mention sera portée, en marge de l'acte de naissance, des actes administratifs et des déclarations ayant pour effet l'acquisition, la perte de la nationalité française ou la réintégration dans cette nationalité. Il sera fait de même mention de toute première délivrance de certificat de nationalité française et des décisions juridictionnelles ayant trait à cette nationalité. En conséquence, cette mention sera en l’espèce ordonnée.

Sur les dépens

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
M. [N] [T], qui succombe, supportera la charge des dépens.

PAR CES MOTIFS :

LE TRIBUNAL, statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et par mise à disposition au greffe :

DIT la procédure régulière au regard des dispositions de l'article 1043 du code de procédure civile,

Juge l'action de M. [N] [T] recevable ;

DEBOUTE M. [N] [T] de l'ensemble de ses demandes,

JUGE que M. [N] [T], se disant né le 18 juillet 1966 à [Localité 5] (Algérie), n'est pas de nationalité française,

ORDONNE la mention prévue par l’article 28 du code civil,

CONDAMNE M. [N] [T] aux dépens.

Fait et jugé à Paris le 28 Juin 2024

La GreffièreLa Présidente
Manon AllainAntoanela Florescu-Patoz


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 1/2/2 nationalité b
Numéro d'arrêt : 20/01035
Date de la décision : 28/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-28;20.01035 ?
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