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27/06/2024 | FRANCE | N°18/14800

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 2ème chambre 2ème section, 27 juin 2024, 18/14800


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions exécutoires délivrées le:
Copies certifiées conformes délivrées le :





2ème chambre



N° RG 18/14800
N° Portalis 352J-W-B7C-COQXU

N° MINUTE :




Assignation du :
28 Novembre 2018




JUGEMENT
rendu le 27 Juin 2024
DEMANDERESSE

Madame [R] [E] épouse [O]
[Adresse 7]
[Localité 17]

Représentée par Maître Aurélie NICOLAS, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #D1309


DÉFENDEURS



Monsieur [A] [E]
[Adresse 20]
[Localité 11]

Représenté par Maître Nicolas GRAFTIEAUX, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #L0090

Madame [M] [E] épouse [G]
[Adresse ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions exécutoires délivrées le:
Copies certifiées conformes délivrées le :

2ème chambre


N° RG 18/14800
N° Portalis 352J-W-B7C-COQXU

N° MINUTE :

Assignation du :
28 Novembre 2018

JUGEMENT
rendu le 27 Juin 2024
DEMANDERESSE

Madame [R] [E] épouse [O]
[Adresse 7]
[Localité 17]

Représentée par Maître Aurélie NICOLAS, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #D1309

DÉFENDEURS

Monsieur [A] [E]
[Adresse 20]
[Localité 11]

Représenté par Maître Nicolas GRAFTIEAUX, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #L0090

Madame [M] [E] épouse [G]
[Adresse 8]
[Localité 19]

Représentée par Maître Laure TRIC, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #C2509

Madame [U] [J] veuve [E]
[Adresse 10]
[Localité 16]

Non représentée
Décision du 27 Juin 2024
2ème chambre
N° RG 18/14800 - N° Portalis 352J-W-B7C-COQXU

Monsieur [S] [W] en qualité de curateur de Madame [U] [J] veuve [E]
[Adresse 18]
[Localité 15]

Non représenté

* * *

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Par application des articles R.212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire et 812 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été attribuée au Juge unique.

Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.

Madame Caroline ROSIO, Vice-Présidente, statuant en juge unique.

assistée de Adélie LERESTIF, greffière.

DÉBATS

A l’audience du 30 Avril 2024, avis a été donné aux avocats que la décision serait rendue le 27 Juin 2024.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Réputé contradictoire et en premier ressort

* * *

FAITS ET PROCÉDURE

[L] [E], dont le dernier domicile était situé à [Localité 27], est décédé le [Date décès 6] 2005 laissant pour lui succéder :
- sa conjointe survivante, [U] [J] avec laquelle il était marié sous le régime de la communauté de biens réduite aux acquêts aux termes de leur contrat de mariage reçu le [Date mariage 9] 1955 par Maitre [Z] et qui a opté pour l’usufruit de la succession,
- ses trois enfants :
$gt; [R] [E] épouse [O]
$gt; [M] [E] épouse [G]
$gt; [A] [E].

Dépendait de la communauté des époux [E], une propriété, comprenant une maison et un jardin, située [Adresse 1] à [Localité 25] sur la commune de [Localité 28], cadastrée AI [Cadastre 12], [Cadastre 13] et [Cadastre 14]. La superficie de l'ensemble immobilier était de 1 673 m2.

Par acte authentique du 14 décembre 2007 [U] [J] a donné, en avancement de part successorale à ses trois enfants, à hauteur d'un tiers chacun, sa moitié indivise en toute propriété et sa moitié en usufruit du bien litigieux.

L'acte contenait une clause de droit de retour et une interdiction d’aliéner et d'hypothéquer.

Par acte sous seing privé du 4 février 2016, transmis le même jour à [R] et [M] [E], [U] [J] a renoncé à la clause d'inaliénabilité.

Par courriel du 15 mai 2016, [A] [E] a offert à ses sœurs de « racheter leurs parts » sur la base d'une valeur totale de 675.000 euros soit 225.000 euros par part. Il leur précisait alors :
« Si vous comparez l’offre d’il y a 5 ans, n’oubliez pas que celle-ci prévoyait deux conditions suspensives (obtention d’une déclaration préalable de division en 2 lots, et obtention de 2 certificats d’urbanisme opérationnels). Je ne vous demanderai aucune condition suspensive, je prends sur moi le risque que le terrain s’avère non séparable (ou que le petit terrain s’avère non constructible, ce qui revient au même). Compte tenu de ce risque, et de la tendance générale du marché, mon offre de prix est plus que raisonnable. »
« Le marché s’est un peu tassé depuis 2-3 ans. Très attentiste, beaucoup de biens restent longtemps en vente, les vendeurs ne se décidant pas à ajuster les prix. Tendance environ -5/-10% par rapport à il y a 5 ans. Le plan d’urbanisme a été retoqué peu avant la date prévue d’entrée en vigueur, le nouveau est prévu pour dans 3 ans environ. La constructibilité du bout de terrain qui nous sert actuellement de parking semble probable dans le court terme, mais est incertaine à horizon de 1 ou 2 ans. La tendance générale est en effet à la limitation des constructions; même avant l’entrée en vigueur du PLU, il est possible que les mairies anticipent et émettent des « sursis à statuer » sur les demandes de permis de construire qu’elles croient susceptibles de se trouver à terme en contravention avec le PLU. »

Cette offre a été acceptée les 30 et 31 juillet 2016 par retour de courriels de [R] et [M] [E].

Le 5 août 2016, [A] [E] a signé un mandat de vente auprès de l'agence [24] portant sur la parcelle qu'il n'entendait pas conserver.

Le 20 septembre 2016, la commune de [Localité 28] a délivré un « certificat d'urbanisme opération réalisable » pour la division de la parcelle AI [Cadastre 12] en deux lots de 480 et 715 m² à la suite d'une demande déposée le 5 août 2016. Il était précisé qu'une déclaration préalable et un permis de construire étaient requis et qu'un sursis à statuer pouvait être prononcé si la construction projetée était de nature à compromettre ou rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan local d'urbanisme.

Le 18 novembre 2016, [A] [E] a déposé une déclaration préalable de division de la parcelle cadastrée AI [Cadastre 12].

Les 29 novembre et 12 décembre 2016, [26] et [23] ont émis un avis favorable à la demande de division de la parcelle cadastrée AI [Cadastre 12].

Décision du 27 Juin 2024
2ème chambre
N° RG 18/14800 - N° Portalis 352J-W-B7C-COQXU

Par acte notarié du 15 décembre 2016, avec intervention d’[U] [J], [R] et [M] [E] ont cédé leurs droits dans ledit bien à [A] [E], à titre de licitation faisant cesser l'indivision, moyennant le prix de 466.666,66 euros, le bien dans sa totalité était évalué à 700.000 euros.

Les 4 et 9 janvier 2017, [A] [E] a conclu un avant-contrat avec un tiers portant sur la parcelle de 480 m².

Par arrêté du maire du 12 janvier 2017, la déclaration préalable de division de la parcelle a fait l'objet d'une non opposition.

Suivant document d'arpentage réalisé le 27 janvier 2017, il a été procédé à la division de la parcelle AI [Cadastre 12] comme suit :
-AI [Cadastre 2] d'une surface de 6 ares et 84 centiares,
-AI [Cadastre 3] d'une surface de 4 ares et 80 centiares,
-AI [Cadastre 4] d'une surface d'un centiare,
-AI [Cadastre 5] d'une surface de 14 centiares.

Le 4 août 2017, [U] [J] a notamment renoncé à son droit de retour ainsi qu’à l’interdiction d’aliéner stipulés dans l’acte de donation du 14 décembre 2007.

Le 28 avril 2017, un permis de construire a été délivré aux futurs acquéreurs de la parcelle.

Par acte notarié du 29 septembre 2017, [A] [E] a vendu, au prix de 320.000 euros, les parcelles suivantes
- cadastrée AI [Cadastre 3] correspondant à un terrain à bâtir d'une surface de 4 ares et 80 centiares
- cadastrée AI [Cadastre 5] qui était destinée à être cédée à la commune au titre de l'élargissement du [Adresse 22] à [Localité 25].

Par actes d’huissier des 28 novembre 2018 et 5 décembre 2018, [R] [E] a assigné en complément de part [A] [E], [M] [E], [U] [J] et [S] [W], en qualité de curateur d’[U] [J] devant le tribunal de judiciaire de Paris.

Par jugement du 25 novembre 2021, le tribunal a  :
Rejeté la demande tendant à écarter des débats la pièce n°34 communiquée par [R] [E] épouse [O],constaté l'absence d'aléa sur la valeur de la propriété comprenant une maison et un jardin, située [Adresse 1] à [Localité 25] sur la commune de [Localité 28], cadastrée AI [Cadastre 12], [Cadastre 13] et [Cadastre 14] ayant fait l'objet de l'acte de licitation du 15 décembre 2016, Avant dire-droit
ordonné une mesure d'expertiseCommis Mme [H] [F]ordonné un sursis à statuer sur le surplus des demandes dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise, Renvoyé l’affaire à l'audience de mise en état du 2 mars 2022 à 13h30 pour vérification du paiement de la consignation.
Décision du 27 Juin 2024
2ème chambre
N° RG 18/14800 - N° Portalis 352J-W-B7C-COQXU

Le rapport d’expertise a été déposé le 7 mars 2023 et l’expert a estimé à 745.000 euros la valeur des biens au jour de la licitation.

En l’état de ses dernières conclusions n°3 après rapport, notifiées par voie électronique le 18 janvier 2024, au visa des article 889 et suivants du code civil, [R] [E] demande au tribunal de céans de:
« Prononcer la lésion du plus du quart de l’acte de licitation faisant cesser l’indivision existant entre [R] [E], [M] [E] et [A] [E], reçu le 15 décembre 2016 par Maître [P] [C], notaire à [Localité 21] (17), par lequel [R] [E] et [M] [E] ont cédé à [A] [E] leurs droits indivis sur le bien sis à [Localité 28] [Adresse 1] à [Localité 25], moyennant un prix de 466.666,66 euros basé sur une valeur totale du bien de 700.000 euros, étant précisé que leur mère intervenait à l’acte pour renoncer à l’interdiction d’aliéner résultant de la donation précitéeOrdonner en conséquence un complément de part en numéraire au profit de [R] [E] à hauteur de 231.047 eurosCondamner en conséquence [A] [E] à payer à [R] [E] la somme de 231.047 eurosDire et juger que cette somme portera intérêts capitalisés à compter du 28 novembre 2018, date de la délivrance de l’assignation à [A] [E] titre subsidiaire
Dire et Juger que [A] [E] a commis des manoeuvres dolosivesCondamner en conséquence [A] [E] à payer à [R] [E] la somme de 231.047 eurosDire et juger que cette somme portera intérêts capitalisés à compter du 28 novembre 2018, date de la délivrance de l’assignation à [A] [E]Débouter [A] [E] de l’intégralité de ses demandesDébouter [M] [E] de sa demande de condamnation de [R] [E] au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et des dépensCondamner [A] [E] à payer à [R] [E] la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civileCondamner [A] [E] aux entiers dépens, qui comprendront notamment les frais de l’expertise judiciaire avancés par [R] [E] à hauteur de 5.598,18 euros.»
Par conclusions récapitulatives en défense après dépôt du rapport d’expertise notifiées par voie électronique le 28 août 2023, [M] [E] a requis, au visa des articles 889 et suivants et de l’article 826 du code civil, de:
« Statuer ce que de droit sur les demandes de [R] [E], Décision du 27 Juin 2024
2ème chambre
N° RG 18/14800 - N° Portalis 352J-W-B7C-COQXU

En conséquence, dans la mesure où le Tribunal déclarerait son action en complément de part bien fondée :
Ordonner un complément de part en numéraire au profit d’[M] [E] à hauteur de 231.047 euros, Condamner en conséquence [A] [E] à payer à [M] [E] la somme de 231.047 euros, Dire et juger que cette somme portera intérêts capitalisés à compter du 28 novembre 2018, En toute hypothèse,
Condamner [R] [E] à la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, Condamner la demanderesse aux entiers dépens de la présente instance.»
En l’état de ses dernières conclusions n°8 après rapport d’expertise, notifiées par voie électronique le 12 janvier 2024, au visa des article 889 et suivants, 891, 1240 du code civil et de l’article 700 du code de procédure civile, [A] [E] demande au tribunal de céans de:
« Débouter [R] [E] de ses demandes plus amples ou contraires Débouter [M] [E] de ses demandes plus amples ou contrairesDéclarer recevable et bien-fondé [A] [E] dans l’ensemble de ses demandesEn conséquence :
Condamner [R] [E] à verser à [A] [E] la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civileCondamner [R] [E] à verser à [A] [E] la somme de 5.000 euros au titre du préjudice moral subi par ce dernierCondamner [R] [E] à supporter la charge définitive des frais d’expertiseCondamner [R] [E] aux entiers dépensOrdonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.»

[U] [J] et [S] [W], en qualité de curateur d’[U] [J] n’ont pas constitué avocat. La présente décision sera réputée contradictoire.

Par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, le tribunal se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 24 janvier 2024 et l’audience de plaidoiries fixée au 30 avril suivant.

A l’issue des débats, les parties ont été informées que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 27 juin 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'action en complément de part

Selon les dispositions de l'article 889 du code civil, lorsque l'un des copartageants établit avoir subi une lésion de plus du quart, le complément de sa part lui est fourni, au choix du défendeur, soit en numéraire, soit en nature. Pour apprécier s'il y a eu lésion, on estime les objets suivant leur valeur à l'époque du partage. L'action en complément de part se prescrit par deux ans à compter du partage.

L'article 891 du code civil dispose que l'action en complément de part n'est pas admise contre une vente de droits indivis faite sans fraude à un indivisaire par ses co-indivisaires ou par l'un d'eux, lorsque la cession comporte un aléa défini dans l'acte et expressément accepté par le cessionnaire.

En l'espèce, le 15 décembre 2016, [A] [E] a acquis, à titre de licitation faisant cesser l'indivision, les droits de ses sœurs dans l'indivision existant sur la maison située sur la commune de [Localité 28].

Le tribunal de céans a jugé, le 25 novembre 2021, qu’il n’y avait pas d’aléa lors de cette cession quant au fait que le bien était divisible et constructible dans sa partie aujourd'hui cadastrée AI [Cadastre 3] et AI [Cadastre 5].

Si les parties se sont accordées sur un prix de vente en juillet 2016, force est de constater qu'un nouvel accord avec un prix distinct s'est formé au plus tard en décembre 2016. Dès lors, le caractère lésionnaire de l'acte doit être apprécié au jour de la signature soit au 15 décembre 2016.

L’expert mandaté par le tribunal le 25 novembre 2021 évalue le bien, au 15 décembre 2016, selon sa première hypothèse prévoyant le détachement d’un terrain à bâtir et le maintien en l’état du surplus, à 745.000 euros. Il a répondu aux nombreux dires des parties et justifie son évaluation en fonction des caractéristiques du bien immobilier, de sa situation et de l’étude des ventes de biens similaires observées en 2016. Ainsi la valeur du bien estimée par [R] [E] en fonction de son métrage ne sera pas retenue par le tribunal.

Par acte notarié du 15 décembre 2016, avec intervention d’[U] [J], [R] et [M] [E] ont cédé leurs droits dans ledit bien à [A] [E], à titre de licitation faisant cesser l'indivision, moyennant le prix de 466.666,66 euros, le bien dans sa totalité était évalué à 700.000 euros.

Le prix auquel le bien a été licité étant de 700.000 euros et la valeur fixée par l’expert à 745.000 euros, soit une différence de 45.000 euros, la lésion n’est pas constituée.

Ainsi l’ensemble des demandes tendant à prononcer la lésion et à ordonner un complément de part ainsi que toutes les demandes subséquentes seront rejetées.

Décision du 27 Juin 2024
2ème chambre
N° RG 18/14800 - N° Portalis 352J-W-B7C-COQXU

Sur le dol

[R] [E] soutient qu’elle n’aurait jamais vendu sa part à son frère à un si bas prix, soit 369.691 euros au lieu des 233.333 euros qu’elle a perçus, si elle avait eu connaissance des manœuvres dolosives de son frère consistant à cacher ses démarches pour obtenir la division du bien et vendre la parcelle après la vente.

[A] [E] fait valoir qu’un accord était intervenu avec ses soeurs le 31 juillet 2016 pour la vente du bien estimé au prix de 675.000 euros, qu’il n’a entrepris les démarches pour séparer et vendre la parcelle que postérieurement à cet accord. Il ajoute qu’il a finalement accepté, lors de la vente intervenue le 15 décembre 2016 d’augmenter le prix de cession, à la demande de [R] [E], à la somme de 700.000 euros. Il soutient enfin que ses sœurs étaient informées de son intention de séparer le terrain en deux lots dès septembre 2016 et qu’il n’a commis aucune manœuvre dolosive.

Sur ce:

Selon les articles 1130 et 1137 du code civil, constitue un dol le fait de volontairement dissimuler des informations à un contractant, qui, si elles avaient été connues de lui, l’auraient amené à ne pas contracter ou à contracter à des conditions différentes.

En l'espèce, le 15 décembre 2016, [A] [E] a acquis, à titre de licitation faisant cesser l'indivision, les droits de ses sœurs dans l'indivision existant sur la maison située sur la commune de [Localité 28] en faisant croire qu’il existait un aléa quant à la possibilité de diviser la parcelle en deux lots alors que
- plusieurs mois avant, il avait signé un mandat avec une agence immobilière pour la vente de la parcelle provenant de la division,
- le 18 novembre 2016, il avait déposé une demande de division de la parcelle,
- il a conclu un avant-contrat seulement quelques jours après l'acte litigieux dans lequel il s'est engagé à vendre la future parcelle au prix de 320 000 euros, prix dont il ne prétend pas qu'il correspond à la valeur d'un terrain non constructible,
- moins d'un mois avant la signature de l'acte litigieux, [26] et [23] ont émis un avis favorable à sa demande.

Ainsi, le 15 décembre 2016, le bien objet de la licitation devait être évalué comme étant divisible et constructible dans sa partie aujourd'hui cadastrée AI [Cadastre 3] et AI [Cadastre 5] et aurait dû être vendu pour une valeur globale de 750.000 euros.

Cependant dans son courriel du 18 septembre 2016 adressé à son frère, [R] [E] explique à ce dernier qu’il n’a pas à avoir de crainte quant à le non-séparation du terrain ou la non-constructivité du petit terrain après qu’elle ait eu un rendez-vous avec l’architecte du Conseil d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environnement. Elle informe également [A] [E] qu’elle a parlé avec une agence immobilière qui lui avait dit qu’un acquéreur pourrait être trouvé pour 700.000 euros mais qu’elle a tenu compte du fait que sa mère souhaitait que le bien reste dans la famille pour accepter de le vendre à son frère pour une valeur à l’époque de 675.000 euros.

Ainsi il est établi par ce courriel que [R] [E] était, au moment de la vente, informée du fait que son frère souhaitait acquérir le bien dans le but de le diviser et de le revendre et qu’il y avait une forte probabilité qu’il réussisse dans ses démarches.

Elle était également prête à le vendre en-dessous de sa valeur afin de privilégier son frère comme acquéreur afin que le bien reste dans la famille selon la volonté de leur mère.

Ainsi [R] [E] avait accepté de vendre le bien en toute connaissance de cause tant sur les intentions de son frère de diviser le bien que sur le fait qu’elle lui cédaitt le bien à un prix inférieur au marché qu’elle évaluait à l’époque à 700.000 euros.

Ainsi il n’est pas établi qu’elle aurait vendu le bien à des conditions différentes si elle avait eu connaissance, au moment de la vente que son frère s’était engagé à vendre la future parcelle divisée au prix de 320.000 euros quelques jours avant la vente, d’autant qu’elle avait obtenu que le bien soit évalué à 700.000 euros au lieu des 675.000 euros initialement prévus.

Ainsi ses demandes tendant à voir condamner [A] [E] à lui payer la somme de 231.047 euros avec intérêts pour manœuvres dolosives seront rejetées.

Sur le préjudice moral

Selon l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

[A] [E] soutient que tout au long de la procédure [R] [E] n’a eu de cesse d’user d’affirmations calomnieuses à son encontre.
Cependant, les propos stigmatisés n’excèdent pas la liberté de parole qui doit être reconnue à tout plaideur comme corollaire de son droit de soutenir des prétentions. La demande de dommages et intérêts de [A] [E] pour atteinte à sa réputation doit donc être rejetée.

Sur les autres demandes

[R] [E], qui succombe, sera condamnée aux dépens, comprenant notamment les frais d’expertise.

En raison de la nature familiale du litige, les demandes aux titre de l’article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

Décision du 27 Juin 2024
2ème chambre
N° RG 18/14800 - N° Portalis 352J-W-B7C-COQXU

Enfin, l’article 515 du code de procédure civile, dans sa version applicable à la présente instance, introduite antérieurement au 1er janvier 2020, autorise le juge à ordonner l’exécution par provision de sa décision chaque fois qu’il l’estime nécessaire et que cette mesure est compatible avec la nature de l’affaire et autorisée par la loi.

En l’espèce, l’ancienneté et la nature de l’affaire justifie d’ordonner l’exécution provisoire de la présente décision.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire par mise à disposition au greffe et en premier ressort:

REJETTE les demandes de [R] [E] tendant à:
Prononcer la lésion du plus du quart de l’acte de licitation faisant cesser l’indivision existant entre [R] [E], [M] [E] et [A] [E], reçu le 15 décembre 2016 par Maître [P] [C], notaire à [Localité 21] (17), par lequel [R] [E] et [M] [E] ont cédé à [A] [E] leurs droits indivis sur le bien sis à [Localité 28] [Adresse 1] à [Localité 25], moyennant un prix de 466.666,66 euros basé sur une valeur totale du bien de 700.000 euros, étant précisé que leur mère intervenait à l’acte pour renoncer à l’interdiction d’aliéner résultant de la donation précitéeOrdonner en conséquence un complément de part en numéraire au profit de [R] [E] à hauteur de 231.047 eurosCondamner en conséquence [A] [E] à payer à [R] [E] la somme de 231.047 eurosDire et juger que cette somme portera intérêts capitalisés à compter du 28 novembre 2018, date de la délivrance de l’assignation à [A] [E]
REJETTE les demandes subsidiaires de [R] [E] tendant à:
Dire et Juger que [A] [E] a commis des manoeuvres dolosivesCondamner en conséquence [A] [E] à payer à [R] [E] la somme de 231.047 eurosDire et juger que cette somme portera intérêts capitalisés à compter du 28 novembre 2018, date de la délivrance de l’assignation à [A] [E]
CONDAMNE [R] [E] aux dépens qui comprendront notamment les frais de l’expertise judiciaire ;

REJETTE les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

ORDONNE l’exécution provisoire de la présente décision;

Fait et jugé à Paris le 27 Juin 2024

La GreffièreLa Présidente
Adélie LERESTIF Caroline ROSIO


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 2ème chambre 2ème section
Numéro d'arrêt : 18/14800
Date de la décision : 27/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-27;18.14800 ?
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