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21/06/2024 | FRANCE | N°21/07178

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 1/2/2 nationalité b, 21 juin 2024, 21/07178


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS




1/2/2 nationalité B

N° RG 21/07178 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUPWP

N° PARQUET : 21-279

N° MINUTE :


Assignation du :
19 Mars 2021


V.B.

[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :








JUGEMENT
rendu le 21 Juin 2024

DEMANDEUR

Monsieur [E] [K] [H]
[Adresse 2]
[Localité 4] (GABON)

représenté par Me Vanina ROCHICCIOLI, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #R0127, Me Paul CESSO, avo

cat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant


DEFENDERESSE

LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Parquet 01 Nationalités
Parvis du Tribunal de Paris
[Localité 1]
Virginie PRIÉ, substitute






Déci...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

1/2/2 nationalité B

N° RG 21/07178 - N° Portalis 352J-W-B7F-CUPWP

N° PARQUET : 21-279

N° MINUTE :

Assignation du :
19 Mars 2021

V.B.

[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

JUGEMENT
rendu le 21 Juin 2024

DEMANDEUR

Monsieur [E] [K] [H]
[Adresse 2]
[Localité 4] (GABON)

représenté par Me Vanina ROCHICCIOLI, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #R0127, Me Paul CESSO, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant

DEFENDERESSE

LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Parquet 01 Nationalités
Parvis du Tribunal de Paris
[Localité 1]
Virginie PRIÉ, substitute

Décision du 21/06/2024
Chambre du contentieux
de la nationalité Section B
N° RG 21/07178

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Antoanela Florescu-Patoz, Vice-présidente
Présidente de la formation

Madame Clothilde Ballot-Desproges, Juge
Madame Victoria Bouzon, Juge
Assesseurs

assistées de Madame Hanane Jaafar, Greffière.

DEBATS

A l’audience du 03 Mai 2024 tenue publiquement

JUGEMENT

Contradictoire,
En premier ressort,
Prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Antoanela Florescu-Patoz, Vice-présidente et par Jaafar Hanane, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu les articles 455 et 768 du code de procédure civile,

Vu l'assignation délivrée le 19 mars 2021 par M. [E] [K] [H] au procureur de la République,

Vu les dernières conclusions de M. [E] [K] [H] notifiées par la voie électronique le 29 novembre 2022,

Vu les dernières conclusions du ministère public notifiées par la voie électronique le 25 janvier 2024,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 8 mars 2024 ayant fixé l'affaire à l'audience de plaidoiries du 3 mai 2024,

MOTIFS

Sur la procédure

Aux termes de l’article 1043 du code de procédure civile, applicable à la date de l'assignation, dans toutes les instances où s'élève à titre principal ou incident une contestation sur la nationalité, une copie de l'assignation est déposée au ministère de la justice qui en délivre récépissé.

En l’espèce, le ministère de la justice a délivré ce récépissé le 6 octobre 2021. La condition de l’article 1043 du code de procédure civile est ainsi respectée. Il y a donc lieu de dire que la procédure est régulière au regard de ces dispositions.

Sur l'action déclaratoire de nationalité française

M. [E] [K] [H], se disant né le 28 février 1993 à Befelatanana (Madagascar), revendique la nationalité française par filiation paternelle sur le fondement de l'article 18 du code civil. Il fait valoir que son père, [V] [P] [C], né le 11 octobre 1955 à [Localité 5] (Madagascar) est français.

Son action fait suite à la décision de refus de délivrance d'un certificat de nationalité française qui lui a été opposée le 9 mai 2018 par le directeur des services de greffe judiciaires du service de la nationalité du tribunal d'instance de Toulouse au motif que l'acte de reconnaissance paternelle qu'il avait produit à l'appui de sa demande n'était pas dressé conformément à la loi malgache du 20 novembre 1963 relative à la filiation et ne pouvait se voir reconnaître de caractère probante (pièce n°3 du demandeur).

Le recours gracieux contre cette décision a été rejeté le 23 juillet 2020 pour les mêmes motifs (pièce n°1 du demandeur).

Aux termes de ses conclusions, le demandeur sollicite du tribunal de :
-déclarer irrecevable la pièce n°1 adverse vérification in situ,
-dire qu'il est français.

Le ministère public demande du tribunal de dire que M. [E] [K] [H] n'est pas français et de le débouter de l'ensemble de ses demandes

Sur la demande de M. [E] [K] [H] relative à la recevabilité de la pièce n°1

Cette demande ne constitue pas une prétention au sens de l'article 4 du code de procédure civile, mais un moyen, de sorte qu'elle ne donnera pas lieu à mention au dispositif.

Sur le fond

En application de l’article 30 alinéa 1 du code civil, la charge de la preuve en matière de nationalité incombe à celui qui revendique la qualité de Français lorsqu’il n’est pas déjà titulaire d’un certificat de nationalité délivré à son nom conformément aux dispositions des articles 31 et suivants du même code, sans possibilité, pour lui, d'invoquer les certificats délivrés à des membres de sa famille, fussent-ils ses ascendants, dans la mesure où la présomption de nationalité française qui est attachée à ces certificats ne bénéficie qu'à leurs titulaires, et ce même s'ils n'ont fait l'objet d'aucune contestation.

Conformément à l'article 17-1 du code civil, compte tenu de la date de naissance revendiquée par le demandeur, l'action relève des dispositions de l’article 18 du code civil aux termes duquel est français l’enfant dont l’un des parents au moins est français.

Il convient également de rappeler que les effets sur la nationalité de l’accession à l’indépendance de Madagascar sont régis par la loi numéro 60-752 du 28 juillet 1960 et par le chapitre VII du titre 1er bis du livre premier du code civil (soit ses articles 32 à 32-5), qui s’est substitué au titre VII du code de la nationalité française dans sa rédaction issue de la loi du 9 janvier 1973, dont il résulte que seuls ont conservé la nationalité française :
- les personnes originaires (et leurs descendants) du territoire de la République française tel que constitué le 28 juillet 1960, c'est-à-dire en ce notamment inclus [Localité 3], auxquels étaient assimilés les “métis” (et leurs descendants) nés de parents dont l’un, demeuré légalement inconnu, était présumé de souche européenne et d’origine française,
- les personnes qui ont souscrit une déclaration de reconnaissance de la nationalité française,
- les personnes qui ne se sont pas vu conférer la nationalité de l’un des nouveaux Etats anciennement sous souveraineté française,
- les personnes originaires de Madagascar, qui avaient établi leur domicile hors de l’un des Etats de la Communauté lorsqu’ils sont devenus indépendants.

Il appartient ainsi à M. [E] [K] [H], qui n'est pas titulaire d'un certificat de nationalité française, de démontrer, d'une part, la nationalité française du parent duquel il la tiendrait et, d’autre part, un lien de filiation légalement établi a l’égard de celui-ci, au moyen d’actes d’état civil probants au sens de l’article 47 du code civil, étant précisé qu’afin de satisfaire aux exigences de l’article 20-1 du code civil, cet établissement doit être intervenu pendant sa minorité pour avoir des effets sur la nationalité.

Aux termes de l’article 47 du code civil, tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Celle-ci est appréciée au regard de la loi française.

Il est précisé à ce titre que dans les rapports entre la France et Madagascar, les actes d'état civil sont dispensés de légalisation par l'article 26 de la convention d'entraide judiciaire signée le 4 juin 1973 et publiée le 30 juillet 1975 ; il suffit que ces actes soient revêtus de la signature et du sceau officiel de l'autorité ayant qualité pour les délivrer et certifiés conformes à l'original par ladite autorité.

Enfin, nul ne peut revendiquer à quelque titre que ce soit, la nationalité française, s’il ne dispose d’un état civil fiable et certain.

En l'espèce, pour justifier de la nationalité française de [V] [P] [C], le demandeur produit le certificat de nationalité française délivré à ce dernier le 27 juin 2008 par le service de la nationalité des Français nés et établis hors de France (pièce n°7 du demandeur). Il en ressort que son père revendiqué est français en application de l'article 19-1° du code de la nationalité française comme enfant légitime né d'une mère française, [J], dont la qualité de citoyen français a été reconnue par jugement du tribunal de première instance de [Localité 5] rendu le 31 mai 1951, pour être née de père légalement inconnu mais présumé d'origine française.

Or, comme rappelé à juste titre par le ministère public, M. [E] [K] [H], qui a la charge de la preuve de sa nationalité française en vertu de l'article 30 du code civil, ne peut se prévaloir de ce certificat de nationalité française. Il lui appartient de justifier d'une chaîne de filiation ininterrompue à l'égard de [J] et de démontrer que celle-ci a pu conserver la nationalité française lors de l'accession à l'indépendance de Madagascar, pour être originaire du territoire de la République française et que son fils mineur, a suivi sa condition.

En l'espèce, il n'est produit aucun acte d'état civil concernant [J].

Faute de justifier de l'état civil de sa grand-mère revendiquée, le demandeur ne peut se prévaloir ni d'une chaîne de filiation à son égard ni de sa nationalité française.
En conséquence, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens soulevés par le ministère public, M. [E] [K] [H] sera débouté de sa demande tendant à se voir reconnaître la nationalité française par filiation paternelle. En outre, dès lors qu'il ne revendique la nationalité française à aucun autre titre, il sera jugé, conformément à la demande reconventionnelle du ministère public, qu'il n'est pas de nationalité française.

Sur la mention prévue à l'article 28 du code civil

Aux termes de l’article 28 du code civil, mention sera portée, en marge de l'acte de naissance, des actes administratifs et des déclarations ayant pour effet l'acquisition, la perte de la nationalité française ou la réintégration dans cette nationalité. Il sera fait de même mention de toute première délivrance de certificat de nationalité française et des décisions juridictionnelles ayant trait à cette nationalité. En conséquence, cette mention sera en l’espèce ordonnée.

Sur les demandes accessoires

Sur les dépens

En application de l’article 696 du code de procédure civile, M. [E] [K] [H], qui succombe, sera condamné aux dépens.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

M. [E] [K] [H] condamné aux dépens, sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL, statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et par mise à disposition au greffe :

Dit la procédure régulière au regard des dispositions de l'article 1043 du code de procédure civile ;

Déboute M. [E] [K] [H] de sa demande tendant à voir dire qu'il est de nationalité française ;

Juge que M. [E] [K] [H], se disant né le 28 février 1993 à Befelatanana (Madagascar), n'est pas de nationalité française ;

Ordonne la mention prévue par l’article 28 du code civil ;

Rejette la demande de M. [E] [K] [H] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [E] [K] [H] aux dépens.

Fait et jugé à Paris le 21 Juin 2024

La GreffièreLa Présidente
H. JAAFAR A. FLORESCU-PATOZ


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 1/2/2 nationalité b
Numéro d'arrêt : 21/07178
Date de la décision : 21/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-21;21.07178 ?
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