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20/06/2024 | FRANCE | N°20/06454

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 5ème chambre 2ème section, 20 juin 2024, 20/06454


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions exécutoires
Me Jean-Luc MATHON
Me Xavier LEDUCQ
+1 copie dossier

délivrées le:




5ème chambre 2ème section
N° RG 20/06454
N° Portalis 352J-W-B7E-CSMYA

N° MINUTE :




Assignation du :
07 Juillet 2020









JUGEMENT
rendu le 20 Juin 2024
DEMANDERESSE

Madame [J] [Z] [S]
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Me Jean-Luc MATHON, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #A0458




DÉFENDERESSES

La Compagnie AXA FRANCE VIE, Société anonyme dont le siège social est sis [Adresse 5]-prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cett e qualité ausiège ...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions exécutoires
Me Jean-Luc MATHON
Me Xavier LEDUCQ
+1 copie dossier

délivrées le:

5ème chambre 2ème section
N° RG 20/06454
N° Portalis 352J-W-B7E-CSMYA

N° MINUTE :

Assignation du :
07 Juillet 2020

JUGEMENT
rendu le 20 Juin 2024
DEMANDERESSE

Madame [J] [Z] [S]
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Me Jean-Luc MATHON, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #A0458

DÉFENDERESSES

La Compagnie AXA FRANCE VIE, Société anonyme dont le siège social est sis [Adresse 5]-prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cett e qualité ausiège social

La Société CBP GROUP, Société par actions simplifiée dont le siège social est sis [Adresse 2] prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cett e qualité au siège social.

représentée par Maître Xavier LEDUCQ de la SCP C R T D ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, avocats postulant, vestiaire #E2035
Décision du 20 Juin 2024
5ème chambre 2ème section
N° RG 20/06454 - N° Portalis 352J-W-B7E-CSMYA

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Antoine de MAUPEOU, Premier Vice-Président adjoint
Antoinette LE GALL, Vice-Présidente
Christine BOILLOT, Vice-Présidente

assistés de Catherine BOURGEOIS, Greffier,

DÉBATS

A l’audience du 25 Avril 2024 tenue en audience publique devant Christine BOILLOT, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile. Avis a été donné aux conseils des parties que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 20 juin 2024.

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

*****
Madame [J] [Z] [S] a attrait la société CBP GROUP et compagnie AXA FRANCE VIE devant le tribunal judiciaire de Paris, par assignation du 7 juillet 2020, aux fins de mettre en œuvre la garantie incapacité qu’elle a souscrite, par l’intermédiaire du courtier CBP GROUP, au titre du contrat d’assurance groupe n° 4971 en garantie du prêt immobilier n° 8473512, contracté auprès du CREDIT FONCIER, pour l’achat par la demanderesse et son époux, Monsieur [C] [T] [K], d’un bien immobilier à [Localité 4], alors qu’elle a été victime d’un accident du travail le 13 mars 2013, à l’origine d’un arrêt maladie, puis d’une invalidité, constatée le 22 mars 2018, et qu’elle a déclaré ce sinistre auprès du courtier CBP GROUP, étant précisé que les mensualités d’amortissement du prêt ont cessé d’être versées courant 2014, faute de provision suffisante sur son compte.
Elle fait valoir qu’ayant été placée entre la vie et la mort du fait de cet accident, elle n’a pu répondre aux demandes de renseignement adressées par l’assureur et son indemnisation est restée lettre morte, en dépit de la demande formulée par courrier du 29 juillet 2014, de sorte que l’incomplétude de sa déclaration et le retard de la finalisation de celle-ci ne sauraient lui être reprochés puisqu’elles résultent de la force majeure.
Le prêt a été résilié faute de paiement des mensualités, et le bien immobilier a été vendu par adjudication le 8 février 2017.
Le 21 février 2020, Madame [J] [Z] [S] a communiqué en vue de son indemnisation, par l’intermédiaire de son conseil, les pièces sollicitées par l’assureur, puis cette demande étant restée lettre morte, elle l’a assigné en justice aux fins d’obtenir le bénéfice de la garantie incapacité de travail.
Madame [J] [Z] [S], dans ses dernières conclusions transmises par voie dématérialisée, le 2 mars 2022, sollicite du tribunal, sous le bénéfice de l’exécution provisoire et au visa des articles 1218, 1240, 1302 et 1339 du code civil et L. 113-3 du code des assurances, à titre principal,
de mettre hors de cause la société CBP, simple intermédiaire ;de débouter AXA FRANCE VIE de toutes, ses demandes ;de la condamner à lui payer: 61.270,77€, augmentés des intérêts au taux légal, à compter du courrier recommandé du 21 février 2020, et jusqu’à parfait paiement au titre de la garantie incapacité, subsidiairement 14.400€, en répétition de l’indu ; 10.000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens d’instance. En réponse, la société CBP GROUP et la compagnie AXA FRANCE VIE dans leurs dernières écritures notifiées par voie électronique, le 15 février 2022, au visa des articles 1103, 1193 et 1240 du code civil, et du contrat d’assurance groupe n°4971, demandent
A titre liminaire, de mettre hors de cause la société CBP GROUP ;
A titre principal, de débouter la demanderesse de l’intégralité de ses prétentions, puisqu’elle ne justifie pas que les conditions de mise en œuvre de la garantie « incapacité de travail » sont réunies ;
A titre subsidiaire, la débouter, puisque la garantie « incapacité de travail » mobilisée, a cessé avant même que sa mise en œuvre puisse avoir lieu, Madame [Z] [S] ayant déclaré son sinistre au-delà du délai de neuf mois suivant la date de son arrêt de travail, et le sinistre étant réputé s’être réalisé le 14 mai 2014, de sorte que les garanties de la compagnie AXA FRANCE VIE ont cessé - pour défaut de paiement des cotisations d’assurance lors du premier impayé d’échéance de prêt, en 2010 ;
A titre très subsidiaire, si le tribunal ne s’estimait pas suffisamment éclairé, ordonner avant dire droit une expertise médicale à l’effet de :
- retracer le passé médical de Madame [Z] [S],
- déterminer l’origine et l’évolution des affections en cause et le lien pouvant exister entre elles,
- déterminer la date d’apparition des premiers symptômes, et celle de la première constatation médicale, la nature des soins,
- déterminer la date de consolidation,
- déterminer si elle s’est trouvée en incapacité de travail, au sens du contrat ;
- pour la période postérieure à la consolidation, déterminer les taux d’incapacité fonctionnelle et professionnelle, retenus conformément aux définitions contractuelles de la notice d’assurance, et déterminer si la demanderesse est en incapacité de travail au sens du contrat et par référence au taux d’incapacité du tableau contractuel ;
A titre infiniment subsidiaire, la débouter de ses demandes faute de justificatifs du chiffrage de celles-ci ; à défaut, juger que la durée de la prise en charge au titre de la garantie «incapacité de travail» ne saurait aller au-delà de la période du 14 mai 2014 au 6 décembre 2014, et limiter la prise en charge au capital et intérêts, soit à hauteur de 10.660,92€, en retenant que le calcul du montant de l’indemnisation, sollicité par la requérante est erroné, au titre de la garantie « incapacité de travail » ;
A titre très infiniment subsidiaire, la débouter de sa demande de remboursement des cotisations d’assurance sur la période allant de janvier 2015 à août 2018,
En tout état de cause,
écarter l’exécution provisoire ;la condamner à leur payer 4.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il sera renvoyé aux conclusions susvisées, en application de l'article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 9 novembre 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Dans la mesure où les parties s’accordent, au terme du dispositif de leurs dernières conclusions pour mettre hors de cause la société CBP, il y a lieu de faire droit à cette demande, les demandes étant exclusivement dirigées contre la compagnie AXA FRANCE VIE, et la société CBP étant simple intermédiaire d’assurance et non assureur, mis en cause aux fins de fixer la date de déclaration du sinistre.
Les parties s’accordent désormais également aux termes de leurs écritures pour fixer au 14 mai 2014 la date de déclaration du sinistre à l’assureur.
La demanderesse fait valoir, à l’appui de ses conclusions, que l’incapacité de travail est établie d’une part, que le contrat de prêt n’était pas résilié au jour de l’accident du travail, d’autre part, que la créance de la requérante n’est pas éteinte par la résiliation du contrat de prêt, et enfin, que les conditions de la force majeure sont réunies.
Elle précise être fonctionnaire d’une organisation internationale, non soumise au régime de l’assurance maladie et de la médecine du travail française, mais couverte par l’assureur privé HENNER, sous le contrôle du service médical de l’OCDE.
Madame [Z] invoque que l’impayé de 2010 a été régularisé, et que l’assureur a bien été informé de l’arrêt maladie, et qu’il y a dès lors un lien de causalité entre les impayés, et l’arrêt maladie dont elle a été victime, à compter de l’accident du travail du 13 mars 2013, de sorte que la garantie est due, l’assureur ne justifiant pas avoir mis en œuvre les dispositions de l’article L113-3 du code des assurances, dans les délais requis.
Elle fait valoir que la garantie étant acquise à la date de sa déclaration, soit au 14 mai 2014, l’assureur ne saurait se prévaloir de la résiliation ultérieure du prêt, résultant des impayés.
Le prêteur de deniers ayant été désintéressé, elle estime en effet être subrogée dans ses droits, et pouvoir bénéficier de la délégation de l’article 1399 du code civil.
Elle considère que l’incapacité - physique et psychique -, dont elle a été victime, ne lui a pas permis de finaliser son dossier de déclaration de sinistre, raison pour laquelle l’assureur n’a pas réglé au prêteur les sommes qui lui étaient dues, et que cela constitue un empêchement caractérisant la force majeure, contrairement à ce que soutient la compagnie AXA.
Elle fait valoir que l’expertise médicale sollicitée par l’assureur est sans objet, compte tenus des multiples certificats médicaux émaillant ce dossier, et qui attestent suffisamment de son état de santé, le tribunal étant en mesure de liquider sa créance, au regard du nombre de mensualités en cause (33), et de leur montant qui est connu (1.992,98€), sans pour autant déduire la cotisation d’assurance (1.776,28€), ce montant étant erroné alors que le montant mensuel de la cotisation est de 136,29€.
Elle invoque enfin un enrichissement sans cause, puisque le CREDIT FONCIER a collecté pour AXA des cotisations après la résiliation du contrat, celles-ci étant dépourvues de cause.

La compagnie AXA FRANCE VIE oppose, à titre principal, que son refus de garantie est fondé, puisque, contrairement à son époux, elle n’était pas assurée au titre de la garantie perte d’emploi, et qu’au terme de la garantie PTIA, son indemnisation était plafonnée, et qu’il n’est pas justifié que les conditions de cette garantie sont réunies, au regard des termes du contrat produit.
Elle invoque, à titre subsidiaire, la cessation de la garantie impayés, puisqu’elle avait déjà cessé avant sa mise en œuvre.
A titre très subsidiaire, elle sollicite l’organisation d’une expertise, et encore plus subsidiairement, de limiter le quantum de l’indemnisation, si l’expertise venait à être écartée, en se prévalant de la tardiveté de la déclaration de sinistre.
Elle réfute tout enrichissement sans cause qui lui serait imputé.
Elle souligne la réponse tardive de son assuré à sa demande, près de 6 ans après, qui l’a empêché d’instruire le dossier en temps utiles, le bien immobilier ayant été vendu entre-temps.
Elle invoque que l’assurée n’a pas respecté les conditions de mise en œuvre de la garantie, telles que définies à la notice d’information, et que la demanderesse ne rapporte pas la preuve qui lui incombe, et ne produit pas les pièces requises, au titre de sa police, en vue de l’instruction de son dossier, en rappelant que les décisions des organismes sociaux ou de la commission médicale de l’OCDE sont inopposables à l’assureur.

Sur la demande principale, au titre de la garantie d’assuranceL’article 1103 du code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
Il résulte de l’article 1218 dudit code, qu’il y a force majeure en matière contractuelle, lorsqu'un événement, échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l'exécution de son obligation par le débiteur. Si l'empêchement est temporaire, l'exécution de l'obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l'empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1.
Et l’article L113-2 du code des assurances prévoit que lorsqu'elle est prévue par une clause du contrat, la déchéance pour déclaration tardive au regard des délais prévus ne peut être opposée à l'assuré que si l'assureur établit que le retard dans la déclaration lui a causé un préjudice. Elle ne peut également être opposée dans tous les cas où le retard est dû à un cas fortuit ou de force majeure.
Selon l’article L113-3 du même code, à défaut de paiement d'une prime, ou d'une fraction de prime, dans les dix jours de son échéance, et indépendamment du droit pour l'assureur de poursuivre l'exécution du contrat en justice, la garantie ne peut être suspendue que trente jours après la mise en demeure de l'assuré.
La garantie incapacité de travail est contractuellement définie à la police d’assurance comme suit : « Est en incapacité de travail au sens du présent contrat, l’assuré contraint d’interrompre totalement son activité professionnelle sur prescription médicale par suite de maladie ou d’accident et dont l’état de santé interdit également l’exercice de toute autre activité professionnelle.
Le premier jour d’arrêt de travail doit nécessairement être postérieur à la date d’effet des garanties.
A compter de la consolidation de l’état de santé, l’assureur considère en incapacité de travail tout assuré dont le taux contractuel d’incapacité est supérieur ou égal à 66%. Ce taux contractuel d’incapacité est déterminé selon le barème ci-après à partir des taux d’incapacité fonctionnelle et d’incapacité professionnelle, fixés suite à l’examen de l’assuré par un médecin désigné par l’assureur ».
Le taux d’incapacité fonctionnelle « est apprécié en dehors de toute considération professionnelle et est basé uniquement sur la diminution de capacité physique ou mentale consécutive à l’accident ou à la maladie ».
Le taux d’incapacité professionnelle « est apprécié en fonction du degré et de la nature de l’incapacité fonctionnelle par rapport à la profession exercée, en tenant compte de la façon dont elle était exercée antérieurement à la maladie ou à l’accident, des conditions d’exercice normal et des possibilités d’exercice restantes, abstraction faite des possibilités de reclassement dans une profession différente ».
Dès lors, si après consolidation, le taux d’incapacité fixé sur la base dudit tableau est inférieur à 66%, aucune prestation n’est due par l’assureur.
Il est également précisé s’agissant des « Délais de déclaration
Sauf effet de la prescription légale rappelée ci-dessous, les sinistres déclarés aux prêteurs plus de neuf mois après leur survenance, seront considérés comme s’étant produits au jour de la déclaration. Toutefois, il ne sera pas fait application d’une période de franchise de quatre mois.»
Et pour vérifier que les conditions de mise en œuvre de la garantie « incapacité de travail » sont réunies, comme le souligne l’assureur les conditions générales applicables à ce contrat d’assurance groupe prévoient au titre des « Pièces à fournir » que l’assuré communique au préalable plusieurs pièces répertoriées dans la notice, en ces termes :
« Outre tableau d’amortissement, les justificatifs suivants doivent être transmis directement par l’assuré :
o Pour les assujettis au Régime Général de la sécurité sociale : Les décomptes de règlement dudit organisme,
o Pour les assujetti s à un Régime Spécial de la sécurité sociale :
Une attestation de leur employeur précisant la date et la durée de l’arrêt de travailLe cas échéant, les décomptes de règlement de cet organismeo Pour les assujettis au Régime des Travailleurs Non-salariés de la Sécurité sociale :
Les certificats de prolongation établis par le médecin traitant.
En outre, quel que soit le régime de l’assuré ou le type de prêt souscrit, lors de la première demande de prestations un certificat médical du médecin traitant doit être adressé au médecin conseil. L’assureur se réserve le droit de demander toute pièce complémentaire nécessaire à l’appréciation du dossier. ».
Il est également prévu au titre du contrôle « L’assureur se réserve dans tous les cas le droit de désigner un médecin pour contrôler l’état de santé de l’assuré. Les frais engendrés par cet examen seront à la charge de l’assureur. »
En l’espèce, les demandes formulées par la requérante, au visa de l’article 1240 du code civil, s’analysent en des demandes fondées sur la responsabilité contractuelle, comme l’admet la compagnie d’assurance qui lui oppose les termes du contrat, dans la mesure où la demanderesse se prévaut du contrat d’assurance qui la lie à la compagnie d’assurance défenderesse, désormais seule dans la cause.
Madame [Z] produit à l’appui de sa demande, des pièces qu’elle estime être suffisantes pour mettre en œuvre la garantie, à savoir,
- Les conclusions de la commission médicale de l’OCDE, du 13 mars 2018 (pièce 7). Aux termes de ce procès-verbal, la date de consolidation a été fixée au 13 mars 2018. Il y est précisé que Madame [Z] est atteinte d’une invalidité de 2ème catégorie, au sens de la législation de la sécurité sociale française correspondant au taux d’incapacité de 66% ; cette date de consolidation – postérieure à la date de la vente du bien et du recouvrement de sa créance par le Crédit Foncier – d’une part.
2°) Sont également produits, d’autre part, les certificats d’arrêt de travail pour la période du 13 mars 2013 au 13 mars 2018 (pièces 8-1 à 8-32).
3°) Ainsi que les rapports du contrôle médical de l’OCDE (pièces 11- 1 à 11-5) qui établissent l’incapacité pour la période de la déclaration de sinistre à la vente du bien le 8 Février 2017 ;
4°) Ensuite, sont produits les décomptes des prises en charge de l’assureur HENNER (pièces 9-1 à 9-28).
5°) Avec le tableau d’amortissement du prêt CREDIT FONCIER de 2013 à 2017 (pièce 16).
6°) Enfin, l’acte d’acquisition du bien du 25 novembre 2004 contenant le tableau d’amortissement du prêt applicable sur les trois premières années (pièce 12), le commandement valant saisie du 10 février 2015 (pièce 13), le jugement d’adjudication du 28 septembre 2016 (pièce 14) et le jugement d’adjudication sur surenchère du 08 février 2017 (pièce 15).
Il résulte des conditions d’assurance produites que contrairement à son co-emprunteur, Monsieur [C] [T] [K], Madame [J] [Z] [S] n’est pas assurée au titre de la perte d’emploi mais qu’elle est assurée pour 100 pour cent du montant du prêt, et que l’existence du contrat d’assurance est dûment établie. Ce contrat couvre donc, s’agissant de Madame [J] [Z] [S], comme l’admet d’ailleurs l’assureur lui-même, au terme de ses écritures (p. 3) tant le risque lié au décès - qui n’est pas en cause ici - que l’incapacité (PTIA). Et la requérante sollicite au titre de l’instance, comme au titre des courriers antérieurs envoyés à l’assureur, la garantie incapacité de travail.
L’assureur oppose que la preuve de l’incapacité de travail dont se prévaut la demanderesse au regard des pièces produites en 2014 et en 2020 n’est pas rapportée, et qu’elle ne l’est pas davantage, au terme des pièces produites à l’occasion de l’instance.
Toutefois, au regard des pièces produites à l’instance, plus complètes que celles produites initialement l’assurée, la demanderesse établit être en incapacité de travail, au sens du présent contrat. Elle justifie en effet, être contrainte d’interrompre totalement son activité professionnelle sur prescription médicale, compte tenu des divers certificats médicaux produits, par suite de maladie ou d’accident et dont l’état de santé interdit également l’exercice de toute autre activité professionnelle.
Et l’assureur ne justifie pas avoir fait jouer les dispositions qui le protègent au titre du « contrôle » précédemment rappelées. En effet, s’il estime que les conditions de la garantie ne sont pas réunies, il est en mesure de faire intervenir son médecin conseil pour justifier que l’incapacité fonctionnelle n’atteint pas le taux de 66 pour cent, de sorte qu’il ne saurait aujourd’hui reprocher que les pièces justifiant la mise en œuvre de la garantie soient insuffisantes. L’assureur ne justifie pas avoir fait usage de cette faculté, pour contester le taux de l’incapacité fonctionnelle allégué dans le certificat du médecin de l’OCDE précité, alors que, comme il l’énonce lui-même, il n’est pas lié par ce certificat ou par un document de la sécurité sociale au terme de ce contrat.
Il ne justifie pas non plus que l’assuré ait effectivement repris son activité professionnelle, ou une autre activité professionnelle, pour contrecarrer ces éléments médicaux.
Pour les mêmes raisons, l’assureur ne saurait davantage, ne serait-ce qu’à titre subsidiaire, solliciter une expertise judiciaire en vue de vérifier que les conditions de la garantie sont réunies, alors qu’il n’a pas fait usage de cette faculté antérieurement, et alors qu’il avait tout le loisir de le faire.
Par ailleurs, l’assureur argue de l’insuffisance des pièces et de ce que les dispositions relatives aux pièces à fournir ne sont pas respectées, alors que les dispositions précitées attestent que la variété des situations est prise en compte (régime général et régime spéciaux) et que les pièces à fournir diffèrent d’une situation à l’autre. Ainsi, le fait que Madame [Z] soit fonctionnaire d’une organisation internationale, et ne soit pas, comme telle, soumise au régime de l’assurance maladie, et de la médecine du travail française, mais couverte par l’assureur privé HENNER, sous le contrôle du service médical de l’OCDE, n’est pas de nature à la priver de sa garantie, et à l’empêcher d’établir son incapacité par des moyens équivalents à ceux énumérés au regard des situations inventoriées de façon énonciative.
Au demeurant, cette stipulation, relative aux pièces à fournir, a trait aux modalités de preuve : elle ne constitue pas une condition de la garantie instaurant des formes particulières de preuve conditionnant la garantie. Ce, d’autant que les dispositions du contrat d’assurance groupe, contrat d’adhésion au sens de l’article 1111 du code civil, s’interprètent en vertu de l’article 1190 du code civil en faveur de l’assuré et contre l’assureur qui les a rédigées, et que l’assuré ne doit pas être placée en situation d’impossibilité de prouver ses droits.
Il en résulte que la preuve de l’incapacité de travail dont se prévaut la demanderesse, au regard des pièces produites est rapportée et que la requérante peut prétendre au bénéfice de la garantie incapacité de travail dont elle se prévaut, la consolidation de l’état de la victime à la date de la déclaration n’étant pas un prérequis de la garantie au terme du contrat contrairement à ce qu’énonce l’assureur. Au contraire, la consolidation de l’état de santé de l’assuré permet à l’assureur ex post de vérifier que le taux contractuel d’incapacité est supérieur ou égal à 66%, comme le requiert la garantie. Par ailleurs, la non consolidation de l’état de la victime, antérieurement à cette date, résulte de différents certificats médicaux produits, notamment la pièce n° 11 du demandeur.
Dans le cadre de la présente instance, la compagnie d’assurance ne conteste plus avoir reçu la déclaration de sinistre au 14 mai 2014. Ainsi, à cette date, la garantie d’assurance était acquise et elle était toujours en cours, le contrat de prêt n’étant alors pas encore résilié, puisqu’il ne l’était pas le 10 septembre 2014, comme en atteste le courrier produit. La garantie d’assurance avait donc vocation à jouer.
L’assureur ne justifie pas de l’impayé de 2010 invoqué, qui aurait fait cesser la garantie à cette date, alors même que l’assurée prétend qu’il est régularisé, et qu’au 13 mars 2013, elle n’était plus redevable d’aucun arriéré. Il n’est pas contesté que la compagnie d’assurance ait entre temps perçu des cotisations d’assurance. Et l’assureur qui prétend avoir été en mesure de résilier le contrat d’assurance n’établit pas l’avoir formellement résilié un contrat, en vertu duquel il continuait de percevoir des primes, le contrat de prêt étant toujours en cours. Le crédit foncier indique en effet, dans sa lettre du 10 septembre 2014, précitée et produite qu’il a reçu de Madame [Z] la somme de 10.000€.
L’assureur ne saurait davantage s’abriter derrière l’impayé du 6 décembre 2014, pour prétendre que les garanties auraient à nouveau cessé à cette date, dans la mesure où la situation personnelle de l’intéressée, assurée débitrice, la plaçait dans l’impossibilité d'exécuter son obligation. L’accident et l’état qui s’en est suivi, du fait des complications qui s’en sont suivies, a constitué pour Madame [J] [Z] [S] une circonstance qui ne pouvait être raisonnablement prévue lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne pouvaient être évités par des mesures appropriées. En effet, à la suite de la première hospitalisation, survenue juste après l’accident en mars 2013, consistant en un arrachement du talon d’Achille avec cassure atypique de l’os autour, Madame [B] a contracté une septicémie, à l’origine d’une seconde hospitalisation, avec risque de gangrène et pronostic vital engagé, le traitement antibiotique ayant d’importants effets secondaires. Puis, elle a subi une longue période de rééducation, plusieurs opérations subséquentes et une dépression et elle n’a été en mesure de remarcher qu’au bout de deux ans. Ainsi, les conditions de la force majeure étaient bien réunies, et ont justifié que les obligations de l’assuré, quant au paiement de ses côtisations, soient suspendues jusqu’à la résiliation effective du prêt.
Par ailleurs, les dispositions contractuelles relatives aux délais de déclaration doivent être lues à la lumière de l’article L113-2 du code des assurances, dont les termes ont pu être rappelés. Elles sont envisagées au titre des conditions générales précitées, non comme une condition de mise en œuvre de la garantie, comme le prétend l’assureur au terme de ses écritures, mais comme un délai de déclaration, et la disposition précitée la distingue de la prescription. C’est d’ailleurs sous cette appellation de « délai de déclaration » qu’elles y sont envisagées. Et la sanction prévue aux conditions générales précitées, en cas de déclaration tardive, est celle du différé de la prise en en charge du sinistre qui a été appliquée en l’espèce, puisque l’incapacité n’est prise en compte qu’à compter du 14 mai 2014, alors que l’accident est antérieur, et remonte au 14 mars 2013.
En vertu de ce contrat d’assurance, les sommes issues de la garantie d’assurance sont en principe versées à l’établissement prêteur. Toutefois, la demanderesse justifie les avoir versées à l’établissement prêteur, lorsque le bien immobilier a été liquidé, de sorte que le condamnation de l’assureur prononcée le sera au bénéfice de Madame [Z] [S], comme elle le requiert, celle-ci étant subrogée dans ses droits.
Sur le quantum des demandes de la requéranteSi l’assureur contestait initialement le quantum des demandes formulées par la requérante, il constate au titre des dernières écritures qu’elles sont désormais basées sur le tableau d’amortissement de prêt, avec une date de déclaration du 14 mai 2014, ce qui rend sans objet les critiques antérieurement formulées par l’assureur à ce sujet.
Au titre de ses dernière écritures la compagnie d’assurance se borne donc à objecter que le paiement des cotisations ayant cessé en décembre 2014, la garantie d’assurance n’avait plus alors vocation à jouer à compter de cette date, et retient que la garantie a cessé le 6 décembre 2014. Cette critique, compte tenu de ce qui précède, mérite d’être écartée, l’accident constituant un évènement de force majeure qui a rendu impossible le paiement des cotisations, les obligations de l’assuré se trouvant suspendues au regard des dispositions de l’article 1218 du code civil.
Et la garantie d’assurance a donc vocation à jouer jusqu’au désintéressement du prêteur, survenu le 8 février 2017, et à compter de la date de déclaration de sinistre fixée au 14 mai 2014, compte tenu des pièces produites.
Pour la période considérée, les mensualités, qui sont au nombre de 33, se sont élevées à 1992,98€, comme l’établit le plan d’amortissement produit lequel n’est pas contesté. Soit, déduction faite des côtisations versées par son époux -1.856,69 € - la somme de 61.270,77€ que la compagnie AXA FRANCE VIE sera condamnée à régler directement à Madame [J] [Z] [S].
Cette somme sera augmentée des intérêts au taux légal à compter du courrier recommandé du 21 février 2020, en application de l’article 1231-6 du code civil.
Sur les demandes subsidiaires, au titre de l’enrichissement sans causeAu regard de l’article 1302 L’article 1231-1 du code civil, tout paiement suppose une dette ; ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution. La restitution n'est pas admise à l'égard des obligations naturelles qui ont été volontairement acquittées.
Les demandes principales de l’assuré ayant été accueillies il n’y a pas lieu de statuer sur les demandes subsidiaires fondées sur l’enrichissement sans cause.
Sur les demandes accessoiresLa compagnie AXA FRANCE VIE, partie perdante, sera condamnée aux dépens ainsi qu’à payer à l’assureur défendeur la somme de 3.000 €, en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La présente décision du bénéfice de l'exécution provisoire de plein droit en application de l’article 514 du code de procédure civile qu’il n’y a pas lieu d’écarter.
PAR CES MOTIFS 
Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire, en premier ressort et par mise à disposition au greffe,
CONDAMNE la compagnie AXA FRANCE VIE à payer à Madame [J] [Z] [S],
- 61.270,77€ au titre de la garantie d’assurance, augmentés des intérêts au taux légal à compter du courrier recommandé du 21 février 2020 ;
- 3. 000 €, en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
DEBOUTE Madame [J] [Z] [S] de ses plus amples demandes ;
DEBOUTE la compagnie AXA FRANCE VIE du surplus de ses demandes ;
CONDAMNE la compagnie AXA FRANCE VIE aux dépens;
RAPPELLE que la présente décision est assortie de plein droit de l'exécution provisoire.

Fait et jugé à Paris le 20 Juin 2024

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 5ème chambre 2ème section
Numéro d'arrêt : 20/06454
Date de la décision : 20/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-20;20.06454 ?
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